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12/07/2024 | FRANCE | N°24/00292

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 12 juillet 2024, 24/00292


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/131

N° RG 24/00292 - N° Portalis DBVL-V-B7I-U6RY



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E





article L 3211-12-4 du code de la santé publique



Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Julie FERTIL, greffière,



Statuant sur l'appel formé le 04 Juillet 2024 à 11h24 par Me FROMON

T pour :



M. [V] [F]

né le 23 Juillet 1992 à [Localité 2] (SYRIE)

demeurant [Adresse 1]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier de [3]

...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/131

N° RG 24/00292 - N° Portalis DBVL-V-B7I-U6RY

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Julie FERTIL, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 04 Juillet 2024 à 11h24 par Me FROMONT pour :

M. [V] [F]

né le 23 Juillet 1992 à [Localité 2] (SYRIE)

demeurant [Adresse 1]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier de [3]

ayant pour avocat Me Isabelle FROMONT, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 25 Juin 2024 par le Juge des libertés et de la détention de RENNES qui a ordonné le maintien de son hospitalisation complète ;

En présence de [V] [F], régulièrement avisé de la date de l'audience, assisté de Me Isabelle FROMONT, avocat

En présence du tiers demandeur, M. [I] [F],

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 04 juillet 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé, ayant adressé un certificat de situation le 09 juillet 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

Après avoir entendu en audience publique le 11 Juillet 2024 à 11 H 00 l'appelant assisté de son avocat et le tiers demandeur en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :

Le 18 décembre 2023, suite à une levée des soins sur ordonnance du juge du 15 décembre 2023, M. [V] [F] a été à nouveau admis en soins psychiatriques en urgence à la demande d'un tiers, en l'espèce son père M. [I] [F].

Le certificat médical du 18 décembre 2023 du Dr [N] [R] a expliqué que M. [W] était hospitalisé à la suite de troubles du comportement avec agitation et agressivité, sur une pathologie psychiatrique ancienne avec désorganisation idéique, délire de persécution avec expression hallucinatoire ; ceci survenant sur des antécédents d'encéphalite et de traumatismes de guerre. Le médecin a établi l'instabilité du patient au plan comportemental et la désorganisation sur le plan des pensées. Le patient ne percevait que de façon confuse et déformée au travers de son vécu persécutif la réalité des faits et de son état mental. Cette obtusion de la conscience, associée au délire de persécution ne lui permettait pas de consentir de façon éclairée et valable aux soins indispensables. Le médecin a estimé que l'hospitalisation de M. [F] devait être assortie d'une mesure de contrainte et a estimé que cette situation relevait de l'urgence.

Par une décision du 18 décembre 2023 du directeur du Centre Hospitalier [3], M. [F] a été admis en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète en urgence.

Le certificat médical des ' 24 heures établi le 19 décembre 2023 à 9h15 par le Dr [D] [C] et le certificat médical des ' 72 heures établi le 21 décembre 2023 à 10h49 par le Dr [A] [T] ont préconisé la poursuite de l'hospitalisation complète.

Par décision du 21 décembre 2023, le directeur du centre hospitalier [3] a maintenu les soins psychiatriques de M. [F] sous la forme d'une hospitalisation complète pour une durée d'un mois.

Par ordonnance en date du 29 décembre 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète.

Depuis le mois de janvier 2024 et jusqu'à la décision du 07 juin 2024, l'hospitalisation complète de M. [F] a été renouvelée mensuellement.

Le certificat médical de saisine du juge des libertés et de la détention établi le 13 juin 2024 par le Dr [S] [E] a indiqué que le patient restait instable sur le plan comportemental et désorganisé sur le plan des pensées, le jugement était profondément altéré et le patient ne percevait que de façon floue et déformée la réalité des faits et de son état mental. Cette obtusion de la conscience associée au délire de persécution ne permettait pas à M. [F] de consentir de façon éclairée aux soins indispensables. Le médecin estimé que l'état de santé de M. [F] justifiait le maintien de l'hospitalisation complète.

Par requête du 13 juin 2024 reçue au greffe le 17 juin 2024, le directeur du Centre Hospitalier [3] a saisi le tribunal judiciaire de Rennes afin qu'il soit statué sur la mesure d'hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 25 juin 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète.

L'ordonnance a été notifiée le 26 juin 2024 au patient.

M. [F] a interjeté appel de l'ordonnance du 25 juin 2024 par email de son avocate adressé au greffe de la cour d'appel de Rennes le 04 juillet 2024 à 11h24. L'apppelant a demandé la mainlevée de la mesure en raison de :

- La tardivité de la saisine du juge au regard de l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique, la saisine étant intervenue le 17 juin 2024, soit trois jours après la date limite du 14 juin 2024.

- L'amélioration de son état de santé.

Le ministère public a sollicité la confirmation de la décision attaquée.

Le certificat de situation du Dr [E] du 09 juillet 2024 précise que ce patient a été hospitalisé à la suite de troubles du comportement avec agitation et agressivité, sur une pathologie psychiatrique ancienne avec désorganisation idéique et délire de persécution avec expression hallucinatoire, que ceci survient sur des antécédents d'encéphalite toxique et de traumatismes de guerre et qu'il avait déja été hospitalisé à plusieurs reprises auparavant. Il est noté que depuis lors le patient reste instable sur le plan comportemental et désorganisé sur le plan des pensées, que le jugement est profondément altéré ; que le patient ne perçoit que de façon floue et déformée la réalité des faits et de son état mental et que cette obtusion de la conscience associée au délire de persécution ne lui permet pas de consentir de façon éclairée aux soins indispensables alors que des soins constants et une surveillance restent nécessaires. Il est ajouté que le patient bénéficie chaque fin de semaine d'une permission de 48 heures chez ses parents et conclu qu'en conséquence, les soins en SDT en hospitalisation complète restent justifiés et à maintenir.

A l'audience du 11 juillet 2024, M.[F] avait du mal à s'exprimer et était difficilement compréhensible. Son conseil a indiqué qu'il souhaitait rentrer chez lui, qu'il avait pu le lui dire assez clairement en entretien individuel. Son père, tiers à la procédure et s'exprimant en arabe, a expliqué par le truchement d'un ami qui a traduit ses propos en français qu'il souhaitait qu'il reste hospitalisé, qu'il venait en permission mais dormait beaucoup, ne s'alimentait pas et ne prenait pas son traitement.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, M. [F] a formé le 04 juillet 2024 un appel de la décision du juge du tribunal judiciaire de Rennes du 25 juin 2024 et notifiée le 26 juin 2024.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité de la procédure :

Aux termes de l'article L. 3216-1 du Code de la Santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge, et en cas d'irrégularité, celle-ci n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

La saisine du juge prévue par l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.

En l'espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.

- Sur la tardivité de la saisine du juge :

L'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique dispose que, ' I - l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention [...] ait statué sur cette mesure [...]

3° avant l'expiration d'un délai de six mois à compter [...] de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Toute décision du juge des libertés et de la détention prise avant l'expiration de ce délai en application du 2° du présent I ou de l'un des mêmes articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1, ou toute nouvelle décision judiciaire prononçant l'hospitalisation en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale fait courir à nouveau ce délai. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi quinze jours au moins avant l'expiration du délai de six mois prévu au présent 3° .

Le conseil de M.[F] fait valoir que la dernière décision du JLD étant le 29 décembre 2023, la saisine en vue d'une autorisation de maintien devait se faire avant le 14 juin 2024, ce qui n'a pas été le cas puisqu'elle a été faite le 17 juin 2024.

En effet si la lettre de saisine a été datée manuellement du 13 juin 2024, l'enregistrement au greffe du JLD a eu lieu le 17 juin 2024. Le système d'envoi par Plex ne permettant pas de conserver les documents au delà de 15 jours, aucun élément du dossier ne permet de savoir à quelle date l'envoi de la requête a été effectué.

Dès lors seule la date de réception est certaine et compte tenu du mode d'envoi, soit par voie dématérialisée, elle tend à démontrer que la saisine a eu lieu postérieurement au 14 juin 2024, correspondant à l'expiration du délai de saisine ayant suivi l'ordonnance du 29 décembre 2023.

La sanction du non-respect des délais étant la levée de la mesure, l'ordonnance entreprise ne peut qu'être infirmée et la mainlevée de l'hospitalisation complète de M. [F], ordonnée sans que les autres moyens ne soient examinés.

Les éléments médicaux au dossier notamment figurant dans le certificat de situation du Dr [E] du 09 juillet 2024 précisent que ce patient a été hospitalisé à la suite de troubles du comportement avec agitation et agressivité, sur une pathologie psychiatrique ancienne avec désorganisation idéique et délire de persécution avec expression hallucinatoire, que ceci survient sur des antécédents d'encéphalite toxique et de traumatismes de guerre et qu'il avait déja été hospitalisé à plusieurs reprises auparavant. Il est noté que depuis lors le patient reste instable sur le plan comportemental et désorganisé sur le plan des pensées, que le jugement est profondément altéré ; que le patient ne perçoit que de façon floue et déformée la réalité des faits et de son état mental et que cette obtusion de la conscience associée au délire de persécution ne lui permet pas de consentir de façon éclairée aux soins indispensables alors que des soins constants et une surveillance restent nécessaires. Il est ajouté que le patient bénéficie chaque fin de semaine d'une permission de 48 heures chez ses parents.

En conséquence au regard du besoin évident de soins cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi ou qu'une nouvelle hospitalisation complète soit décidée. La mesure d'hospitalisation complète prendra fin dès l'établissement de ce programme de soins ou au plus tard à l'issue du délai précité.

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Catherine LEON, présidente de chambre, statuant publiquement, et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit M. [F] en son appel,

Constate que le juge des libertés et de la détention n'a pas été saisi dans les délais prévus par l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique ;

En conséquence:

Infirme l'ordonnance entreprise,

Statuant à nouveau,

Ordonne la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l'hospitalisation complète de M [F];

Dit toutefois que cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi ou une nouvelle hospitalisation complète décidée et que la mesure d'hospitalisation complète prendra fin dès l'établissement de ce programme de soins ou au plus tard à l'issue du délai précité,

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 12 Juillet 2024 à 14h

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Catherine LEON, Présidente

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [V] [F] , à son avocat, au CH et tiers demandeur

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00292
Date de la décision : 12/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-12;24.00292 ?
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