7ème Ch Prud'homale
ARRÊT N°320/2024
N° RG 21/05986 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SBTC
Société VERT L'OUEST
C/
M. [L] [W] [M]
Copie exécutoire délivrée
le :11/07/2024
à : Me GRENARD
Me CHATELLIER
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 11 JUILLET 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,
Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 Mai 2024 devant Monsieur Bruno GUINET, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
En présence de Madame [P] [B], médiateur judiciaire,
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 11 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
Société VERT L'OUEST
[Adresse 4]
[Localité 2]
Comparante en la personne de son gérant Monsieur [Y] [O], assistée de Me Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES, substituée par Me Justine COSNARD, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉ :
Monsieur [L] [W] [M]
né le 15 Mars 1991 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Comparant en personne, assisté de Me Carine CHATELLIER de la SCP VIA AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
EXPOSÉ DU LITIGE
La SARL Vert l'ouest accompagne les particuliers et professionnels dans l'aménagement de leurs espaces extérieurs, de la phase de la conception à la réalisation. Elle applique la convention collective des entreprises du paysage et emploie moins de 10 salariés.
Du 20 mai 2019 au 2 août 2019, M. [L] [C] a travaillé dans le cadre d'un contrat d'intérim pour le compte de la société Vert l'Ouest, société utilisatrice. À compter du 26 août 2019, la relation de travail s'est poursuivie en contrat à durée indéterminée. Il occupait le poste d'ouvrier paysagiste position O.5.
Le 9 décembre 2019, il a heurté l'un de ses collègues avec son véhicule de travail. Celui-ci a fait l'objet d'une incapacité totale de travail de quatre jours.
Par courrier remis en mains propres en date du 10 décembre 2019, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement fixé le 17 décembre suivant. Puis, par courrier daté du 20 décembre 2019, il s'est vu notifier son licenciement pour faute grave pour avoir manqué à son obligation de sécurité lors de la conduite du véhicule.
***
Contestant la rupture de son contrat de travail, M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Malo par requête en date du 09 juin 2020 afin de voir:
- Dire et juger que le licenciement pour faute grave prononcé à l'encontre de M. [C] le 20 décembre 2019 est sans cause réelle et sérieuse,
En conséquence
- Condamner la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] les sommes suivantes :
- Indemnité compensatrice de préavis : 1932,66 euros
- Congés payés sur préavis : 193,26 euros
- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 1932,66 euros
- Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 786,57 euros
- Congés payés sur rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 78,65 euros
- Condamner la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] la somme de 328,92 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 32,89 euros de congés payés y afférent
- Condamner la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] la somme de 606,35 euros à titre de rappel d'indemnité de panier
- Condamner la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] la somme de 11 595,96 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 8223-1 du code du travail
- Condamner la la SARL Vert l'ouest au paiement de la somme de 1932,66 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées légales de travail
- Condamner la la SARL Vert l'ouest au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- Condamner la même aux entiers dépens d'instance
- Ordonner l'exécution provisoire à intervenir
La SARL Vert l'ouest a demandé au conseil de prud'hommes de :
- Débouter M. [W] [M] de toutes ses demandes, fins et conclusions
- Le condamner à payer à la SARL Vert l'ouest la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
- Dépens.
Par jugement en date du 1er septembre 2021, le conseil de prud'hommes de Saint-Malo a :
- Dit et jugé que le licenciement pour faute grave de M. [C] était sans cause réelle et sérieuse par la SARL Vert l'ouest,
-Condamné la SARL Vert l'ouest à verser à M. [C] les sommes suivantes :
-indemnités compensatrices de préavis : 1 932,66 euros,
-congés payés sur préavis : 193,26 euros,
-rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 786,57 euros,
-congés payés sur rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 78,65 euros.
- Dit et jugé que le temps de trajet était du temps de travail :
- Condamné la SARL Vert l'ouest à verser à M. [C] les sommes suivantes :
- rappel des heures supplémentaires : 328,92 euros,
-congés payés sur les heures supplémentaires : 32,89 euros,
- indemnités de panier MG déjà versée déduite : 327,65 euros.
- Condamné la la SARL Vert l'ouest à verser à M. [C] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Ordonné l'exécution provisoire
- Débouté les parties de leurs autres demandes
- Condamné la SARL Vert de l'ouest aux entiers dépens de l'instance.
Pour statuer ainsi, le conseil de prud'hommes a retenu que :
* Il n'a pas été apporté la preuve de la vitesse excessive qui aurait été à l'origine de l'accident, et qu'aucune formation sécurité au moment des faits n'avait été mise en place, ce qui aurait été utile à M. [C] qui conduisait et à M. [D] qui marchait sur la chaussée ;
* L'employeur n'apporte pas la preuve de la gravité de la faute imputable au salarié ;
* L'article 1 de l'avenant n°24 en date du 26 avril 2019 de la convention collective nationale des entreprises de paysage régit le temps de trajet selon les conditions d'organisation du travail au sein de l'entreprise, en l'absence d'accord d'entreprise, le temps de trajet dépôt / chantier est considéré comme du temps de travail ;
* Il n'y a pas de preuve d'une durée de travail supérieur à 48h/semaine dans les relevés d'heures ;
* Les éléments examinés n'établissent pas la volonté de dissimuler le travail de la part de l'employeur.
***
La SARL Vert l'ouest a interjeté appel de la décision précitée par déclaration au greffe en date du 23 septembre 2021.
En l'état de ses dernières conclusions transmises par son conseil sur le RPVA le 24 mai 2022, la SARL Vert l'ouest demande à la cour d'appel de :
- Dire et juger recevable et bien fondé l'appel interjeté par la la SARL Vert l'ouest contre le jugement rendu le 1er septembre 2021 par le conseil de prud'hommes de Saint-Malo (RG 20/00039),
En conséquence,
- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que le temps de trajet était du temps de travail,
- L'infirmer en ce qu'il a condamné la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] les sommes suivantes :
- 328,92 euros au titre du rappel d'heures supplémentaires,
- 32,89 euros au titre des congés payés afférents au rappel d'heures supplémentaires,
- 327,65 euros de rappel d'indemnité de panier,
- Statuant de nouveau, en débouter M. [C],
- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé le licenciement pour faute grave de M. [C] dénué de cause réelle et sérieuse,
- Statuant de nouveau, dire et juger que le licenciement de M. [C] repose sur une faute grave,
- L'infirmer en ce qu'il a condamné la la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] les sommes suivantes :
- 1 932,66 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 193,26 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,
- 786,57 euros de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire,
- 78,65 euros au titre des congés payés afférents à la mise à pied conservatoire,
- Statuant de nouveau, en débouter M. [C],
- Infirmer le jugement dont appel ce qu'il a condamné la SARL Vert l'ouest à payer à Monsieur [C] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Statuant de nouveau, en débouter M. [C],
- Confirmer le jugement dont appel en toutes ses autres dispositions,
Y additant,
- Condamner M. [C] à payer à la la SARL Vert l'ouest la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Le condamner aux entiers dépens.
En l'état de ses dernières conclusions transmises par son conseil sur le RPVA le 8 mars 2022, M. [W] [M] demande à la cour d'appel de :
- Réformer la décision déférée en ce qu'elle a :
- dit et jugé que le licenciement pour faute grave de M. [C] est sans cause réelle et sérieuse par la la SARL Vert l'ouest,
- débouté les parties de leurs autres demandes.
Statuant à nouveau :
- Dire et juger que le licenciement pour faute grave prononcé à l'encontre de M. [C] le 20 décembre 2019 est sans cause réelle et sérieuse, et à ce titre est abusif et injustifié,
En conséquence,
- Condamner la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] les sommes suivantes :
- Indemnité compensatrice de préavis : 1932,66 euros
- Congés payés sur préavis : 193,26 euros
- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 1932,66 euros
- Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 786,57 euros
- Congés payés sur rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 78,65 euros
- Condamner la la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] la somme de 328,92 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 32,89 euros de congés payés y afférent,
- Condamner la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] la somme de 606,35 euros à titre de rappel d'indemnité de panier,
- Condamner la SARL Vert l'ouest à payer à M. [C] la somme de 11 595,96 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L 8223-1 du code du travail,
- Condamner la SARL Vert l'ouest au paiement de la somme de 1932,66 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées légales de travail,
- Condamner la SARL Vert l'ouest au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de l'indemnité allouée en première instance,
- Condamner la même aux entiers dépens d'instance,
***
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état le 16 avril 2024 avec fixation de la présente affaire à l'audience du 14 mai 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions régulièrement signifiées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1- Sur l'exécution du contrat de travail
1-1 Sur les temps de trajet entre le domicile du salarié et les chantiers
Pour infirmation du jugement à ce titre, la SARL Vert l'Ouest soutient que la version de l'article 6 sur l'indemnisation des petits déplacements prévue par la convention collective nationale applicable et dont le salarié sollicite l'application n'est entrée en vigueur que le 1er janvier 2020, soit après la rupture du contrat de travail de M. [C], de sorte qu'il convient d'appliquer les dispositions antérieures qui ne prévoient aucune dérogation au principe selon lequel le temps de trajet normal ne constitue pas du temps de travail effectif.
L'employeur soutient qu'au sein de l'entreprise, les salariés ne sont pas obligés de passer par le dépôt avant et après le chantier, les salariés ayant le choix d'aller directement sur le chantier avec leur propre véhicule ou de passer par le dépôt pour prendre un véhicule de la société pour se rendre sur le chantier.
Pour infirmation sur le quantum, M. [C] affirme que les temps de trajet aller-retour dépôt / chantier devait être considéré comme du temps de travail effectif à partir du moment où le salarié se rend au siège de l'entreprise pour l'embauche et la débauche. Il indique que par souci de sécurité et sans possibilité de garer des camions à leur domicile, les salariés de la société Vert l'Ouest qui ont besoin de matériel lourd et encombrant pour travailler sur les chantiers doivent nécessairement passer par le dépôt.
Enfin, le salarié intimé soutient que si les temps de trajet domicile - lieu de travail peuvent ne pas être considérés comme du temps de travail effectif, c'est à la condition que cela soit un temps de trajet 'normal', or demander à ses salariés de faire des déplacements sur des chantiers situés à près d'01h30 de route ne peut être considéré comme du temps de trajet normal.
Aux termes de l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles.
Selon l'article L. 3121-4 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif.
Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, le temps de déplacement professionnel fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'il en existe. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail n'entraîne aucune perte de salaire.
Cependant, si le temps de trajet professionnel ne constitue pas en principe du temps de travail effectif, il en est différemment lorsque le salarié est obligé de passer par le siège de l'entreprise avant de se rendre sur le chantier ou au retour de chantier, pour transporter du matériel et/ou du personnel et que son temps de trajet siège-chantier est considéré comme du temps de travail effectif.
En l'espèce, il convient d'abord de préciser que M. [C] ayant quitté les effectifs de la société le 20 décembre 2019, il ne saurait se prévaloir de l'application des dispositions nouvelles de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008, modifiée par avenant n°27 du 29 novembre 2019 et étendue par arrêté du 08 juillet 2020 (pièces n°17, 18 et 19 société).
L'article 6 de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008, applicable aux faits de l'espèce, prévoit que :
« a) Est réputé constituer un temps normal de trajet celui qui éloigne les salariés de moins de 50 km du siège, de l'agence ou du dépôt.
b) Le salarié qui se rend par ses propres moyens sur le chantier assigné par son employeur perçoit pour ses frais de repas, s'il ne déjeune ni à l'entreprise ni à son domicile, une indemnité de panier, d'un montant égal à la valeur de 2,5 MG en vigueur au 1er janvier de l'année en cours.
c) Le salarié qui se rend sur les chantiers par les moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise au siège ou dans l'un de ses dépôts est indemnisé dans les conditions suivantes :
*Dans la limite du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est globalement indemnisé de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement fixée comme suit :
- dans un rayon de 0 à 5 km du siège ou du dépôt jusqu'au chantier 3 MG
- dans un rayon de plus de 5 km jusqu'à 20 km 4 MG
- dans un rayon de plus de 20 km jusqu'à 30 km 5 MG
- dans un rayon de 30 km jusqu'à 50 km 6 MG
Le MG applicable est celui en vigueur au 1er janvier de l'année en cours.
*Au-delà du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est, en outre, rémunéré pour le trajet restant comme s'il s'agissait d'un temps de travail.
L'appréciation, en durée, du temps normal de trajet de petit déplacement est déterminée par accord collectif d'entreprise ou à défaut par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel s'ils existent.
d) Dans les zones à faible densité de population, le temps normal de trajet peut excéder 50 km sans dépasser 70 km.
Ce temps normal de trajet est déterminé par accord collectif d'entreprise ou à défaut par l'employeur, après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel s'ils existent et ratification à la majorité du personnel.
Cet accord devra préciser les données économiques justifiant ce dépassement et fixer les conditions d'indemnisation du temps normal de trajet tel que retenu par l'accord. » (pièce n°16 de l'employeur).
Le contrat de travail régularisé le 02 août 2019 ne comporte aucune mention s'agissant des temps de trajet et des frais afférents (pièce n°3 de l'employeur).
M. [C], qui allègue que les temps de trajet constituent des temps de travail effectif, verse aux débats ses relevés d'heures hebdomadaires sur la période du 30 août au 13 décembre 2019, établis sous forme de tableaux indiquant les jours, l'heure de départ du dépôt, l'heure d'arrivée sur le chantier, le nom et le lieu du chantier, les tâches réalisées, l'heure de pause et de reprise, l'heure de départ du chantier, l'heure d'arrivée au dépôt, les MG (minimum garanti) ainsi que le total d'heures journalières (pièce n°2).
En réplique, la société Vert l'Ouest produit :
$gt;une note de service datée du 06 octobre 2014 ayant pour objet : 'Horaires hiver - Rappel fonctionnement horaires de travail' et rédigée comme suit : '[...] Il vous est rappelé qu'il n'est pas obligatoire de vous rendre au dépôt chaque matin : vous avez la possibilité de vous rendre par vos propres moyens directement sur chantier. Dans ce cas, vous serez indemnisé sur la base de 2,5 MG selon la convention collective.
La période hivernale implique que désormais il faudra obligatoirement effectuer vos 39 heures sur 5 jours (inclus les temps de chargement et de déchargement hors chantier), en respectant les horaires de travail légaux c'est à dire 10 heures par jour maximum et pause de 20 minutes minimum toutes les six heures obligatoire.' (pièce n°20) ;
$gt;l'attestation de M. [H] [K], salarié paysagiste de l'entreprise, indiquant: 'Nous avons le choix soit de rentrer avec le véhicule du travail chez nous, de venir au dépôt, le matin le chercher et avons aussi la possibilité d'aller avec notre véhicule personnel sur les chantiers.' (pièce n°22 de l'employeur) ;
$gt;l'attestation de M. [A] [N], ouvrier paysagiste, indiquant : 'Le fonctionnement de l'entreprise est d'avoir la possibilité de se rendre sur le chantier directement ou de se présenter au dépôt de l'entreprise situé à [Localité 5] ou lieu dit champs gelé' (pièce n°23);
$gt;les attestations de quatre autres salariés paysagistes confirmant la possibilité d'utiliser son véhicule personnel afin de se rendre sur les chantiers (pièce n°24, 25, 26 et 27).
Au résultat de ces éléments d'appréciation (la note de service et les nombreuses attestations concordantes produites par l'employeur et non-contestées par M. [C], qui font état d'une possibilité pour les salariés de se rendre directement sur les chantiers avec leur véhicule personnel, moyennant une indemnisation selon les dispositions de la convention collective), la cour constate que le salarié intimé, qui ne fournit strictement aucune pièce pour contredire utilement celles de son employeur, n'établit pas qu'il était obligé de passer par le siège de l'entreprise avant de se rendre sur le chantier ou au retour de chantier.
De même, le seul fait que les temps de trajet dépassent la durée normale de trajet, entre le domicile et le lieu habituel d'exécution du contrat de travail ne permet aucunement de qualifier ces heures de trajet d'heures de travail effectif de sorte que seule une contrepartie sous forme de repos ou sous forme financière pourrait être allouée à M. [C].
Or, le salarié intimé ne sollicite aucune contrepartie financière à ce titre et les bulletins de salaire produits révèlent le versement d'indemnités de petits déplacements, tel que prévu par la convention collective applicable (pièce n°6 salarié).
Dans ces conditions, M. [C] est débouté de ses demandes, par voie d'infirmation du jugement entrepris.
1-2 Sur le rappel de salaire au titre des indemnités de panier
Pour infirmation du jugement, la SARL Vert l'Ouest soutient que les bulletins de salaire démontrent que le salarié a perçu ses indemnités de panier sous la mention 'indemnités de déplacements', que ce sont les salariés qui remplissent les feuilles d'heures, l'employeur se contentant de vérifier la véracité de leur contenu et enfin que les indemnités de panier ont été versées conformément aux relevés d'heures remplies par le salarié intimé.
La société ajoute que la demande de M. [C] est sans objet dès lors que l'indemnité de panier et l'indemnité de petit déplacement ne se cumulent pas.
Pour infirmation du jugement sur le quantum, M. [C] affirme qu'il aurait dû percevoir une indemnité de repas chaque jour travaillé et que c'est à tort que le conseil de prud'hommes a déduit de la créance le montant perçu à hauteur de 278,70 euros versé par l'employeur au titre des dispositions de l'article 6.2 de la convention collective applicable.
Il résulte des dispositions de l'article L. 1222-1 du code du travail que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. À ce titre, l'employeur a un devoir de loyauté dans l'exécution du contrat de travail aussi bien en ce qui concerne la mise en 'uvre du contrat que l'application de la législation du travail.
En l'espèce, il résulte de l'article 6 de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008, applicable aux faits de l'espèce et sus-évoquée, que le salarié en déplacement est globalement indemnisé de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement fixée.
L'indemnité de repas ayant pour objet d'indemniser le supplément de frais occasionné par la prise de déjeuner en dehors de la résidence principale du salarié, la preuve de ce supplément de frais incombe au salarié (en ce sens, Soc 20 janvier 2016 14-15 687).
La SARL Vert l'Ouest verse aux débats les bulletins de salaire de M. [C] sur la période de septembre à novembre 2019 indiquant le paiement d'indemnité de petits déplacements de 0 à 2,5 km et de 5 à 10 km (pièce n°4), ainsi que les relevés d'heures hebdomadaires établis sous forme de tableaux indiquant les jours, l'heure de départ du dépôt, l'heure d'arrivée sur le chantier, le nom et le lieu du chantier, les tâches réalisées, l'heure de pause et de reprise, l'heure de départ du chantier, l'heure d'arrivée au dépôt, les MG (minimum garanti) ainsi que le total d'heures journalières (pièces n°28 et 29).
Il ressort de la comparaison des bulletins de salaire et relevés d'heures établis par M. [C] que ce dernier a perçu les indemnités de petits déplacements incluant celles de panier.
Si le salarié sollicite un rappel de salaire au titre des indemnités de panier qu'il aurait dû percevoir pour chaque jour travaillé, il n'établit pas avoir conservé à sa charge un supplément de frais alors que la preuve lui incombe de le démontrer pour la période en cause.
Il y a lieu de le débouter de ses demandes, par voie d'infirmation du jugement entrepris.
1-3 Sur les dommages et intérêts au titre du non-respect de la durée légale de travail
Pour infirmation du jugement, M. [C] affirme qu'à la lecture de ses relevés d'heures, il apparaît qu'il effectuait plus de 10 heures de travail effectif par jour et ce, en violation des dispositions d'ordre public de l'article L. 3121-18 du code du travail. Il sollicite à ce titre une indemnisation à hauteur d'un mois de salaire.
La SARL Vert l'Ouest ne formule aucune observation sur ce point.
Il résulte de l'article L. 3121-18 du code du travail, la durée quotidienne de travail effectif par salarié ne peut excéder dix heures, sauf en cas de dérogation accordé par l'inspecteur du travail, en cas d'urgence ou dans les cas prévus à l'article L. 3121-19 du même code.
Le droit à la santé et au repos étant au nombre des exigences constitutionnelles, le respect des dispositions relatives à la durée du temps de travail s'inscrit dans un objectif général de protection de la sécurité et de la santé du salarié par la prise d'un repos suffisant et le respect effectif des limitations de durées maximales de travail concrétisé par la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 04 novembre 2003, relative à l'aménagement du temps de travail.
Il en résulte que le dépassement de la durée maximale quotidienne de travail ouvre, à lui seul, droit à réparation.
En l'espèce, les décomptes d'heures de travail établis par le salarié et versés aux débats ne révèlent aucun dépassement de la durée maximale quotidienne de travail, l'amplitude journalière la plus élevée étant de 10 heures la journée du 09 décembre 2019.
Dès lors, il y a lieu de débouter M. [C] de ses demandes à ce titre, par voie de confirmation du jugement entrepris.
1-4 Sur l'indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé
Pour infirmation du jugement, M. [C] allègue que les décomptes d'heures font clairement ressortir des temps de trajet parfois très importants. Il en déduit que la société a volontairement choisi de ne pas rémunérer ces temps de trajet comme du temps de travail effectif caractérisant la mauvaise foi au sens de l'article L. 8223-1 du code du travail.
Pour confirmation à ce titre, la société Vert l'Ouest affirme qu'en l'absence de temps de trajet rémunérable, l'élément matériel caractérisant le travail dissimulé fait défaut. L'employeur soutient que si par impossible la cour devait confirmer le rappel de salaire, elle soutient que l'élément intentionnel fait défaut et que les dispositions conventionnelles expliquent pourquoi elle n'a pas réglé le temps de trajet.
L'article L. 8221-1 du code du travail prohibe le travail partiellement ou totalement dissimulé défini par l'article L. 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L. 8221-5.
L'article L. 8221-5 du code du travail dispose notamment qu'' Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'
Aux termes de l'article L. 8223-1 du même code, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 du même code, a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Il est constant que cette indemnité forfaitaire n'est due qu'en cas de rupture du contrat de travail.
En l'espèce, tel qu'il résulte des précédents développements, M. [C] ayant été rempli de ses droits s'agissant du paiement de ses heures de travail, il ne saurait prétendre que l'employeur aurait omis de mentionner l'intégralité de ses heures de travail sur ses bulletins de salaire.
En l'absence d'élément matériel caractérisant le travail dissimulé, il n'y a pas lieu d'examiner l'élément intentionnel requis.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
2- Sur le licenciement pour faute grave
La lettre de licenciement datée du 20 décembre 2019, qui circonscrit l'objet du litige est rédigée en ces termes :
« [...] J'ai décidé la rupture de votre contrat pour faute grave, pour la raison indiquée lors de notre entretien à savoir : Manquement à l'obligation de sécurité en état de conduite article L 4122-1 du Code du travail.
Ce fait s'est produit le 09 décembre 2019 à 18h10 sur la commune de [Localité 8]. Je vous rappelle les circonstances de l'accident. Au moment de quitter le chantier, [G] [D], [U] [S] et vous-même avez attelé la remorque derrière le véhicule de l'entreprise que vous vous apprêtiez à conduire. Puis, vos collègues se sont éloignés pour rejoindre un autre véhicule de l'entreprise. Alors qu'ils marchaient à une dizaine de mètres de votre position, vous avez mis brusquement en mouvement votre attelage. Vous avez alors frôlé M. [G] [D] avec le camion puis, avec la remorque qui est un peu plus large que le véhicule, vous l'avez heurté. Dans la violence du choc, celui-ci est tombé sur la tête et a perdu connaissance. Les pompiers ont été prévenus par téléphone, M. [D] est revenu à lui et a été pris en charge par l'hôpital de [Localité 7]. Juste après le choc, M. [D] a ressenti de vives douleurs au dos, a été touché à la jambe gauche et a subi une commotion à la tête. Un arrêt de travail lui a été prescrit.
Une conduite inadaptée et dangereuse liée à une vitesse excessive et une absence de prise en compte de l'environnement a provoqué cet accident : il faisait nuit, la visibilité n'était pas bonne, vos deux collègues marchaient en bord de route. Alors que vous étiez au volant du véhicule, vous n'avez pas veillé à la sécurité de vos deux collègues.
Au cours de l'entretien préalable, vous avez souhaité vous faire assister par M. [F] [Z].
Les explications que vous m'avez fournies furent les suivantes : « L'endroit n'était pas éclairé. J'étais sur ma voie de circulation en seconde, à allure normale. Je ne les ai pas vus, mais mes collègues savaient que j'allais partir et ils auraient aussi dû faire attention. Il s'agit d'un accident et tous ne peuvent être évités. »
Vos explications démontrent que vous ne remettez aucunement en question votre conduite le jour de l'accident. Ces éléments me laissent penser que dans une situation identique vos actions seraient les mêmes et les conséquences qui en découlent également.
Ce fait constitue une faute grave rendant impossible votre maintien dans l'entreprise. (...) »
Pour infirmation du jugement à ce titre, la SARL Vert l'Ouest soutient que M. [C] a manqué à son obligation de sécurité prévue à l'article L. 4122-1 du code du travail, en conduisant un véhicule de l'entreprise de manière inadaptée et dangereuse, ce qui a provoqué un accident ayant blessé M. [D]. La société affirme que le licenciement de M. [C] est parfaitement justifié, que M. [D] a été fauché et projeté à plusieurs mètres du lieu de l'impact et a été arrêté 4 jours mais n'a pas eu de séquelles.
L'employeur soutient qu'en raison des circonstances, le salarié aurait dû se montrer particulièrement vigilant dès lors qu'il savait que le 19T était garé au niveau des poubelles et que ses collègues marchaient en direction de leurs véhicules lorsqu'il a démarré son camion. Enfin, la société fait valoir qu'il n'est pas reproché au salarié un excès de vitesse mais d'avoir roulé trop vite eu égard aux circonstances et observer que cet accident aurait pu être évité si M. [C] avait fait preuve d'attention.
En réplique, M. [C] conteste avoir roulé à une vitesse excessive et n'avoir pas pris en compte son environnement. Il affirme que M. [D] se trouvait au milieu de la chaussée et non sur le trottoir au moment de l'accident, qu'il n'a aucunement perdu connaissance et que les pompiers ne sont pas déplacés de sorte que le salarié n'a pas été transporté à l'hôpital le jour de l'accident. L'intimé fait valoir que la mesure de licenciement pour faute grave apparaît contestable, il soutient que rien ne démontre qu'il a adopté une conduite excessive et soutient que la lettre de licenciement ne reflète aucunement la réalité des faits tels qu'ils se sont déroulés.
L'article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.
La cause doit ainsi être objective, exacte et les griefs reprochés doivent être suffisamment pertinents pour justifier la rupture du contrat de travail.
La faute grave privative du préavis prévu à l'article L. 1234-1 du même code est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
Elle suppose une réaction rapide de l'employeur, qui doit engager la procédure de licenciement dans un délai restreint, dès lors qu'il a connaissance des fautes et qu'aucune vérification n'est nécessaire.
La charge de la preuve de la faute grave repose exclusivement sur l'employeur.
En l'espèce, pour établir la réalité du grief tiré du manquement à l'obligation de sécurité en état de conduite, la société verse aux débats les éléments suivants :
$gt;l'attestation de M. [U] [S], paysagiste présent lors de l'accident, indiquant que : '[...] [L] a réalisé sa manoeuvre afin d'atteler le porte char dans le camping, à 10 - 15 mètres du portail. Quant à l'IVECO 19T, il était stationné à cheval sur le trottoir et la route à côté du local poubelle. [...] Nous avons passé le portail du camping avant le camion. Je me suis mis sur le trottoir et [G] était à 40 / 50 cm du trottoir quand j'ai entendu [L] démarrer le véhicule. Il m'a paru avoir démarré rapidement puisque j'ai entendu le ronflement de la première vitesse. Le camion est passé proche de [G] à moins d'1 mètre, c'est alors que [L] a fait un écart afin d'éviter le 19T. Ensuite le garde boue du porte char a fauché la jambe gauche de [G], qui est tombé violemment sur l'arrière de la tête. [L] s'est immédiatement arrêté à hauteur du 19T qui était à 20 - 25 mètres du portail. Quant à [G] il était allongé sur le sol à 4-5 mètres du portail.
Nous avons eu pour réflexe de couvrir [G] de vêtements et de voir s'il avait perdu connaissance. [L] a appelé les pompiers afin de leur décrire l'accident. Ensuite [G] s'est entretenu avec eux. Les pompiers ne sont pas intervenus, [G] se sentant apte à reprendre la route, nous sommes donc repartis en direction du dépôt, 35 - 40 minutes après l'accident. [G] et moi-même étions dans l'IVECO-19T et [L] dans L'IVECO-3,5T.' (pièce n°5) ;
$gt;des photographies ainsi qu'un plan légendé du lieu de l'accident montrant l'impasse avec un panneau de limitation de vitesse à 30 km ainsi que la zone de stationnement du camion Iveco 19 T (pièce n°6) ;
$gt;une déclaration d'accident du travail rédigée par M. [G] [D], salarié accidenté, indiquant : '[...] En fin de journée (aux alentours de 18 heures) Monsieur [L] [W] venant me récupérer une remorque sur mon chantier (au camping de [Localité 8]) m'a violemment percuté avec celle-ci m'occasionnant un traumatisme crânien avec perte de connaissance momentanée et forte douleur dorsale.
Cet accident est survenu alors que je marchais en bordure de trottoir avec un collègue de travail Monsieur [U] [S] pour récupérer notre véhicule stationné un peu plus loin. Nous avons entendu son véhicule démarrer assez rapidement (ronflement moteur important), soudainement j'ai vu le rétroviseur du camion me frôler suivi de l'angle avant la remorque et ensuite j'ai été percuté par le garde boue de la remorque qui m'a heurté violemment me projetant plusieurs mètres derrière.(...)' (pièce n°8) ;
$gt;un certificat d'accident du travail délivré à M. [D] sur la période du 09 au 13 décembre 2019 ainsi qu'une déclaration d'accident du travail effectuée auprès de la MSA le 10 décembre 2019 (pièce n°9) ;
$gt;une photocopie du permis de conduire de M. [C] indiquant qu'il est titulaire du permis BE depuis le 31 janvier 2014, du permis C depuis le 16 février 2018 et du permis CE depuis le 16 avril 2018 (pièce n°30) ;
$gt;des fiches théoriques portant sur la conduite dans des conditions atmosphériques difficiles, notamment pour la conduite de nuit, sur les distances de sécurité, sur la conduite rationnelle et préventive etc. dans le cadre des épreuves pratiques et théoriques pour l'obtention des permis professionnels (pièce n°31 à 36).
Il doit être observé que les parties s'accordent sur la réalité de l'accident survenu le 09 décembre 2019, si bien que seules les circonstances de cet accident font l'objet d'un débat.
Si MM. [S] et [D] indiquent de manière concordante que M. [C] a démarré assez rapidement, et affirment avoir entendu un bruit de 'ronflement du moteur' ou de 'ronflement de la première vitesse', cet unique élément décrit uniquement le démarrage du véhicule par le salarié et ne saurait établir la réalité d'une vitesse excessive et inadaptée adoptée par l'intéressé - étant observé qu'au-delà d'impressions à caractère subjectif sur le bruit perçu lors du démarrage du véhicule, aucun des salariés présents ne décrit une conduite dangereuse ou brutale, ni un quelconque manquement aux règles de sécurité (pas de défaut d'allumage des phares par exemple).
Nonobstant la réalité d'un choc subi par M. [D] déclarant avoir été 'violemment percuté' et qui a bénéficié de 4 jours d'arrêt de travail, le peu d'éléments produits par l'employeur ne caractérise ni un comportement dangereux, ni une négligence fautive de l'intimé qui, après avoir perçu le choc s'est immédiatement arrêté, a contacté les secours et a pris soin de son collègue accidenté, dont au surplus la perte de connaissance n'est pas établie, en tout cas non confirmée par M. [S].
Eu égard aux circonstances de cet accident, survenu de nuit (aux environs de 18 heures au mois de décembre), dans une impasse exigüe, avec un véhicule auquel était était attelé un porte-char d'une largeur supérieure à celle du camion, tandis que la victime, M. [D], se trouvait sur la chaussée et non sur le trottoir, et en l'absence d'élément objectif et pertinent permettant d'établir une quelconque faute de M. [C] lors de la conduite du véhicule (étant rappelé que le choc ne peut être déduit d'une conduite imprudente), et compte-tenu de l'absence de toute sanction disciplinaire antérieure, c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a dit et jugé que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera confirmé sur ce point ainsi que les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse, hormis en ce qui concerne la demande indemnitaire.
En effet, le conseil de prud'hommes a considéré à tort que s'agissant d'un salarié de moins d'un an d'ancienneté employé par une entreprise de moins de onze salariés, l'article L1235-3 du code du travail lui interdisait d'allouer une indemnité. Or, dans ce cas de figure, si aucune indemnité minimale n'est prévue, l'indemnité maximale est fixée à un mois de salaire (en ce sens, Soc. 12 juin 2024, F-B, n° 23-11.825). En l'occurrence, M. [C] qui a subi un préjudice certain du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement, est bien fondé à être indemnisé à hauteur de 1.900 euros, par voie d'infirmation du jugement.
3- Sur les dépens et frais irrépétibles
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la SARL Vert l'Ouest, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Condamnée aux dépens, elle sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande en revanche de condamner la société, sur ce même fondement juridique, à payer à M. [C] une indemnité d'un montant de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le temps de trajet constitue du temps de travail effectif, condamné la société Vert l'Ouest au paiement des sommes suivantes :
- rappel des heures supplémentaires : 328,92 euros,
- congés payés sur les heures supplémentaires : 32,89 euros,
- indemnités de panier MG déjà versée déduite : 327,65 euros
Et rejeté la demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Le confirme pour le surplus.
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute M. [L] [C] de ses demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des indemnités de repas ;
Condamne la SARL Vert l'ouest à payer à M. [L] [C] la somme de 1.900,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la SARL Vert l'Ouest à verser à M. [L] [C] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL Vert l'Ouest aux dépens d'appel.
La greffière Le président