7ème Ch Prud'homale
ARRÊT N°323/2024
N° RG 21/03411 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RWKB
M. [H] [D]
C/
Association ASSOCIATION LE DOMAINE
Copie exécutoire délivrée
le :11/07/2024
à : Me BAKHOS
Me CHAUDET
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 11 JUILLET 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,
Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,
Assesseur : Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 18 Mars 2024
En présence de Monsieur [M], médiateur judiciaire
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 11 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, date à laquelle a été prorogé le délibéré initialement fixé au 06 Juin 2024, au 20 Juin 2024 puis au 04 Juillet 2024
****
APPELANT :
Monsieur [H] [D]
né le 04 Janvier 1968 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Comparant en personne assisté de Me Lara BAKHOS de la SELEURL PAGES - BAKHOS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
ASSOCIATION LE DOMAINE agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Monsieur [T] [O]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Comparante en la personne de son Directeur Monsieur [T] [O], assisté de Me Youna KERMORGANT-ALMANGE de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de RENNES
Assisté de Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES
EXPOSÉ DU LITIGE
L'association Le Domaine a pour objet la création et la gestion de plusieurs établissements sociaux et médico-sociaux afin d'aider les personnes en situation de handicap psychique à se réinsérer dans la vie sociale, dont un ESAT de 101 usagers, un foyer d'hébergement de 55 places, un foyer de vie, un service d'accompagnement à la vie sociale.
Elle applique la convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.
Le 13 juin 2012, M. [H] [D] a été embauché en qualité de chef d'équipe par l'association Le Domaine dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de remplacement pendant un mois.
Le 1er novembre 2012 il a été recruté en qualité de Moniteur d'Atelier Polyvalent de 2ème classe selon un contrat à durée indéterminée.
Dans le cadre d'une réorganisation des ateliers à partir du 1er mai 2014, le salarié a occupé un poste au sein de l'ESAT de Moniteur d'Atelier 2ème classe en Jardins Espaces verts.
Le 24 avril 2019, M. [D] a été placé en arrêt maladie jusqu'au 18 août 2019.
A compter du 2 septembre 2019, il a été placé à nouveau en arrêt de travail.
Le 2 septembre 2019, M. [D] a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement fixé le 12 septembre suivant et mis à pied à titre conservatoire à compter du 9 septembre.
Le 17 septembre 2019, il s'est vu notifier son licenciement pour faute grave en raison d'un 'vol qualifié sur le temps de travail en présence de personnes vulnérables ayant un handicap'.
M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Malo par requête du 14 mai 2020 afin de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'association Le Domaine au paiement de diverses sommes et indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité en réparation de l'heure passée en entretien préalable.
L'association Le domaine s'est opposée aux demandes estimant que le licenciement pour faute grave était justifié, subsidiairement que cette faute justifiait la rupture du contrat en raison de son caractère réel et sérieux, à titre très subsidiaire, a conclu à la réduction du montant des demandes et à titre infiniment subsidiaire, a proposé une garantie financière garantissant le remboursement éventuel des sommes pouvant être mises à sa charge.
Par jugement en date du 20 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Saint-Malo a :
- Pris acte de la remise des documents sollicités par M. [D] lors de l'audience de conciliation;
- Déclaré recevables les demandes additionnelles
- Dit que le licenciement de M. [D] repose sur une faute grave :
- Débouté M. [D] de l'ensemble de ses demandes;
- Condamné M. [D] à verser à l'association Le domaine la somme de 50,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné M. [D] aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux règles relatives à l'aide juridictionnelle.
M. [D] a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe en date du 3 juin 2021.
En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 6 juillet 2021, M. [D] demande à la cour de :
- Dire et juger son appel recevable et bien fondé ;
- Infirmer, en toutes ses dispositions, le jugement,
Statuant à nouveau :
- Condamner l'association Le domaine à lui régler les sommes suivantes :
- 300 euros au titre de son préjudice moral en raison de la convocation à l'entretien préalable en dehors de ses heures de sorties ;
- 13,47 euros au titre du paiement de l'heure passée en entretien préalable, outre 1,34 euros pour les congés payés afférents ;
- Dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- Condamner l'association Le domaine à lui payer les sommes de :
- 4 100,32 euros au titre du préavis outre 410 euros au titre des congés payés afférents,
- 7 427,40 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 653,88 euros au titre de la mise à pied à titre conservatoire outre 65,38 euros pour les congés payés afférents
- 16 401,28 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- Condamner l'association Le domaine, au paiement des intérêts de droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter du prononcé de la décision pour les sommes à caractère indemnitaire ;
- Ordonner la capitalisation des intérêts par application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil sur l'ensemble des sommes auxquelles pourrait être condamnée la société et ce à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
- Condamner l'association Le domaine à communiquer les bulletins de salaires, le certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi rectifiés 15 jours après la notification de l'ordonnance, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
- Condamner l'association Le domaine au paiement de 3 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, y compris ceux éventuels d'exécution.
En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 6 octobre 2021, l'association Le Domaine demande à la cour de :
À titre principal:
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'il n'y avait pas lieu d'indemniser le temps passé en entretien préalable;
- Infirmer le jugement en ce qu'il a estimé recevable la demande nouvelle formulée par M. [D] dans le cadre de ses conclusions en réponse de première instance;
- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement pour faute grave de M. [D] est justifié ;
- Débouter M. [D] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions;
- Recevoir l'association Le domaine en sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner M. [D] à payer une somme de 500 euros à l'association Le domaine au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- Condamner M. [D] aux éventuels dépens;
A titre subsidiaire :
- Si par extraordinaire la Cour estimait que la faute commise et reconnue par M. [D] ne présente pas le caractère d'une faute grave
- Juger que cette faute justifie la rupture du contrat en raison de son caractère réel et sérieux;
- Fixer l'indemnité conventionnelle de licenciement à 7 168 euros ;
- Fixer l'indemnité compensatrice de préavis à 4 097,88 euros bruts et les congés payés afférents à 409,79 euros bruts;
- Débouter M. [D] de sa demande d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse;
- Dire n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts;
- Débouter M. [D] de sa demande au titre de son préjudice moral en raison de la convocation à l'entretien préalable en dehors de ses heures de sortie;
A titre très subsidiaire :
Dans l'hypothèse improbable où la Cour estimait que la rupture du contrat de travail de M. [D] est dénuée de cause réelle et sérieuse,
- Réduire à de plus justes proportions le montant des dommages-intérêts alloués en application de l'article L.1235-3 du code du travail, c'est-à-dire limiter le montant au minima prévu par cet article;
- Réduire à de plus justes proportions le montant de la demande au titre du préjudice moral en raison de la convocation à l'entretien préalable en dehors des heures de sortie;
***
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 5 mars 2024 avec fixation de l'affaire à l'audience du 18 mars 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions régulièrement signifiées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le licenciement pour faute grave
sur l'absence de pouvoir du signataire de la lettre de licenciement
M.[D] soutient que l'employeur n'a pas respecté les règles prescrites par le règlement intérieur en matière de licenciement, constitutives de garanties de fond, puisque la lettre de licenciement signée uniquement par le Directeur ne l'a pas été par le Président, alors que ce dernier intervenu au stade du recrutement du salarié aurait dû signer le courrier de licenciement. Il en conclut que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
L'association Le domaine considère à l'inverse que les règles de son règlement intérieur prévoyant une gestion par le Directeur des licenciements des salariés non cadres ont été respectées, que la validation du licenciement par le Président de l'association est mentionnée dans le courrier de licenciement. Elle soutient que le salarié fait une interprétation déformée des textes en exigeant la double signature du Directeur et du Président.
L'article L 1232-6 du code du travail dispose que lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.
Le Président d'une association, représentant légal auprès des tiers pour tous les actes de la vie sociale, dispose du pouvoir de licencier un salarié à défaut d'une disposition spécifique des statuts attribuant cette compétence à un autre organe de l'association et peut également déléguer ses pouvoirs en matière de licenciement.
Il résulte des pièces produites que :
- le règlement intérieur de l'association du 24 mars 1987 prévoit que 'la décision de licenciement disciplinaire est prise conjointement entre le président et le directeur d'établissement ', 'toute sanction est motivée et notifiée par écrit au salarié.'' au cours de l'entretien, l'employeur indiquera le motif de la sanction envisagée et recevra les explications du salarié. La sanction ne pourra intervenir moins d'un jour Franc ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien;'( pièce 1)
- les statuts en date du 24 octobre 2016 ' le Président de l'association peut déléguer tout ou partie de ses fonctions au Directeur de l'association dans les conditions prévues dans le règlement intérieur.' ( pièce 2)
- le ' Document Unique de Délégations' en vigueur au 11 juin 2019 avec présentation détaillée des pouvoirs délégués au Directeur de l'association en matière de ' Gestion des licenciements des cadres et non cadres' ( motif réel et sérieux, faute grave, faute lourde, faute économique). Il est ainsi prévu que le Directeur est chargé de la mise en oeuvre du licenciement d'un salarié non-cadre, avec la validation conjointe du Président.
La lettre de licenciement signée par le Directeur, M.[O], fait référence à la décision qu'il a prise en concertation avec M.[Z] Président de l'association. Il s'ensuit que le signataire de la lettre du 17 septembre 2019 était habilité suivant les statuts de l'association à exercer le pouvoir de licencier M.[D], après recueil de l'accord conjoint du Président sans que la signature de ce dernier ne soit exigée par les statuts comme devant figurer sur la lettre de licenciement.
Le moyen soulevé par l'appelant sera donc rejeté.
Sur le fond
L'article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à l'existence d'une cause réelle et sérieuse.
La cause doit ainsi être objective, exacte et les griefs reprochés doivent être suffisamment pertinents pour justifier la rupture du contrat de travail.
La faute grave privative du préavis prévu à l'article L. 1234-1 du même code est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
Elle suppose une réaction rapide de l'employeur, qui doit engager la procédure de licenciement dans un délai restreint, dès lors qu'il a connaissance des fautes et qu'aucune vérification n'est nécessaire.
La charge de la preuve de la faute grave repose exclusivement sur l'employeur.
La lettre de licenciement du 17 septembre 2019 qui fixe les limites du litige est ainsi libellée:
' Lors de l'entretien ( du 12 septembre 2019), je vous ai fait part des faits qui m'ont été rapportés le vendredi 30 août et confirmés par l'ensemble de votre équipe lors d'une rencontre qui s'est déroulée le lundi 2 septembre 2019 à 13h30 en présence du chef de service et du moniteur principal.
De manière unanime, les travailleurs de votre équipe m'ont confirmé qu'au mois de mars, à l'occasion d'un chantier qui s'effectuait à [Localité 6], vous leur avez demandé de récupérer deux casiers se trouvant sur le terrain jouxtant celui où vous interveniez. Vous leur avez indiqué qu'ils pourraient être vendus et rapporter de l'argent dont ils pourraient avoir leur part.
Le mercredi 4 septembre, j'ai contacté le propriétaire. Celui-ci m'a bien confirmé que deux casiers lui ont été volés. Le grillage qui sépare son terrain de celui de la voisine a par ailleurs été abimé à cet endroit. Il n'écarte pas la possibilité de déposer plainte aujourd'hui.
A la lecture de ces faits, vous exprimez dans un premier temps votre stupeur.
Après vous avoir précisé que le propriétaire avait constaté le vol de ses casiers, vous avez indiqué qu'en réalité, il n'y en avait qu'un seul. Que par ailleurs selon vous, il était à l'abandon sur le terrain. Vous ajoutez par ailleurs n'avoir rien demandé à votre équipe et être allé vous-même prendre ce casier sur ce terrain privé.
Si votre déclaration diffère des propos de votre équipe, elle confirme néanmoins que vous avez pénétré sur un terrain prévu sans autorisation pour prendre un casier qui s'y trouvait. Ce vol confirmé par le propriétaire a été commis sur le temps de travail en présence de personnes vulnérables se trouvant par conséquent impliquées.
Cet acte s'est produit le 12 mars 2019, quelques semaines après que vous ayez fait l'objet d'un avertissement ( le 22 janvier 2019) pour avoir pris des palettes de l'atelier sous traitance pour les apporter aux manifestants se trouvant sur les ronds-points de [Localité 7], accompagné de votre équipe et sur le temps de travail.
En concertation avec M.[U], administrateur et M.[Z], Président de l'association, nous avons pris le temps d'étudier votre situation. Nous avons estimé que vos explications n'atténuaient en rien notre regard sur la gravité des faits reprochés retenus comme tels : ' vol qualifié sur un temps de travail en présence de personnes vulnérables ayant un handicap'.
Cet acte constitue un manquement inacceptable à vos fonctions et obligations dans l'association. Nous ne pouvons plus vous maintenir en activité.
Par conséquent, nous avons le regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave.(..)'
Il est rappelé que M.[D] occupait des fonctions d'encadrement d'un groupe d'adultes handicapés travaillant dans le domaine des Jardins Espace verts et percevait au dernier état de la relation contractuelle de travail un salaire de base de 2 048,94 euros brut par mois.
A l'appui des griefs, l'association Le Domaine verse aux débats :
- l'attestation sur l'honneur de M.[L], Moniteur principal à l'ESAT, qui lors de la réunion du 2 septembre 2019 à l'ESAT, a entendu les membres de l'équipe encadrée par M.[D], dire 'qu'ils avaient eu une demande directive de M.[D] d'aller chercher les casiers de pêche chez le voisin de leur chantier Mme [S] situé à [Localité 6].'
- une attestation de M.[P] , domicilié à [Localité 6], en date du 15 octobre 2019 selon lequel ' des casiers m'ont été volés par des personnes venues dans mon jardin n'ayant rien à y faire, en abîmant la clôture de la voisine. Etant moi-même handicapé et ayant des difficultés à entretenir mon jardin, j'éprouve de la colère mais n'envisage pas de déposer plainte.'
- l'avertissement adressé le 22 janvier 2019 à M.[D] pour 'avoir le 5 décembre 2018, sur son temps de travail et avec l'ensemble des travailleurs qu'il encadrait, apporté des palettes de bois aux manifestants qui se trouvaient sur le rond-point de l'aquarium situé à [Localité 7].'
La réalité des faits n'est pas contestée par M.[D] qui a seulement minimisé ses agissements devant les premiers juges ( notes d'audience du 18 mars 2021/ conclusions 16 décembre 2020) en soutenant que :
- 'depuis 6 ans, il entretenait un terrain' avec son équipe de jeunes adultes en situation de handicap et qu'il a pris 'un casier à poissons semblant abandonné le long du grillage sur un terrain voisin en friche '
- il a reconnu avoir pris un seul piège à poissons et n'a jamais sollicité les majeurs handicapés travaillant avec lui, le piège lui semblait à l'abandon dans un état lui laissant peu de doute quant à la faiblesse de sa valeur. Il n'a jamais pénétré sur le terrain afin de récupérer le casier, à portée de main le long du grillage, lequel était auparavant défoncé notamment en raison des nombreuses ronces prises dedans..
Le fait que M.[D] se soit emparé d'un ou de deux casiers au préjudice d'un tiers, ne s'analyse pas comme un fait étranger à la relation de travail dès lors que le salarié a commis les agissements reprochés durant son temps de travail avec l'équipe et les moyens mis à sa disposition. Ce comportement qui constitue un manquement à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail, doit s'apprécier dans son contexte singulier à savoir la soustraction d'un casier de pêche appartenant à un tiers, dont il ne précise pas ce qu'il est advenu, alors qu'il était en mission pour le compte d'une cliente de l'association. Ces faits sont préjudiciables à l'image de l'association laquelle justifie avoir réagi dès le 2 septembre 2019 après avoir eu connaissance des faits évoqués lors d'une réunion de service le jour même et être intervenue auprès du propriétaire M.[P] qui a confirmé la disparition des casiers.
M.[D] ne peut pas sérieusement reprocher à son employeur de ne pas avoir produit des témoignages des membres de son groupe dont la vulnérabilité est connue et soutenir que ces derniers n'ont pas été marqués par cet événement. Le fait que le ou les casiers dérobés ait une faible valeur marchande est indifférent puisque le salarié a profité de son temps de travail pour contrevenir à ses missions à portée éducative.
Ce nouvel acte doit s'apprécier aussi au regard des antécédents disciplinaires de M.[D]. En effet, la poursuite par un salarié d'un fait fautif autorise l'employeur à se prévaloir de faits similaires y compris ceux ayant déjà été sanctionnés, pour caractériser une faute grave.
En l'espèce, M.[D] s'est vu notifier quelques mois plus tôt le 22 janvier 2019 un avertissement pour avoir pris sur son temps de travail une initiative étrangère à sa mission en impliquant son équipe de travailleurs.
Dans ces conditions, les faits du 30 août 2019 imputables à M.[D] constitue une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise.
Le salarié sera en conséquence débouté de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de rappel de salaire durant la mise à pied, le jugement étant confirmé de ces chefs.
Sur la procédure de licenciement
Sur la demande de rappel de salaire du temps passé à l'entretien préalable
M.[D] sollicite le paiement d'un rappel de salaire de 13,47 euros outre les congés payés correspondant à l'heure passée en entretien préalable le 12 septembre 2019 alors qu'il se trouvait en arrêt maladie depuis le 2 septembre 2019 et jusqu'au 31 octobre 2019.
L'employeur conclut à la confirmation du jugement qui a rejeté cette demande dès lors que le salarié était placé à cette date en mise à pied à titre conservatoire et qu'il se trouvait par ailleurs en arrêt de travail pour maladie de sorte que son contrat de travail était suspendu.
M.[D] a été convoqué à un entretien préalable le 12 septembre 2019 à 14 heures alors qu'il se trouvait mis à pied à titre conservatoire dans le cadre de la procédure de licenciement.
Le salarié dont la mise à pied à titre conservatoire était justifiée pour les motifs exposés précédemment, n'est pas fondé à réclamer le paiement d'un rappel de salaire durant l'heure passée en entretien préalable. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts en raison de sa convocation à l'entretien préalable
M.[D] a présenté en cause d'appel une demande nouvelle de 300 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral en raison de sa convocation à l'entretien préalable en dehors des heures de sortie autorisées par la CPAM.
L'association Le Domaine a soulevé l'irrecevabilité de cette demande en appel dans la mesure où le salarié n'a formulé dans la saisine initiale aucune demande au titre d'un préjudice causé par la convocation à l'entretien préalable.
L'article 567 du même code dispose que les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.
En application de l'article 70 du même code, les demandes reconventionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.
En l'espèce, la prétention nouvelle de M.[D] se rattache par un lien suffisant à la demande initiale se rapportant à la procédure de licenciement dont il a fait l'objet. Cette demande indemnitaire nouvelle en cause d'appel est donc recevable.
Toutefois, M.[D] se garde de communiquer des éléments notamment d'ordre médical permettant de justifier l'existence du préjudice allégué du fait qu'il n'était pas autorisé par son médecin à sortir à partir de 14 heures pour se rendre à l'entretien préalable de sorte que sa demande de dommages et intérêts doit être rejetée.
Sur les autres demandes et les dépens
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais non compris dans les dépens. Elles seront déboutées de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives de l'article 700 du code de procédure civile.
M.[D] sera condamné aux entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
- Déclare recevable mais mal fondée la demande nouvelle en appel de M.[D] de dommages et intérêts en raison de sa convocation à l'entretien préalable.
- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
et y ajoutant :
- Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamne M.[D] aux dépens de l'appel.
Le Greffier Le Président