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11/07/2024 | FRANCE | N°21/01335

France | France, Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 11 juillet 2024, 21/01335


7ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°322/2024



N° RG 21/01335 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RMUQ













S.A.R.L. DAGHSEN



C/



M. [B] [P]





















Copie exécutoire délivrée

le :11/07/2024



à :Me CHAUDET

Me PENEAU MELLET

CGEA IDF EST (ccc)





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11

JUILLET 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Françoise DELAUNAY, lors des d...

7ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°322/2024

N° RG 21/01335 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RMUQ

S.A.R.L. DAGHSEN

C/

M. [B] [P]

Copie exécutoire délivrée

le :11/07/2024

à :Me CHAUDET

Me PENEAU MELLET

CGEA IDF EST (ccc)

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 JUILLET 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 Mars 2024

En présence de Madame [H], médiateur judiciaire,

ARRÊT :

Réputé Contradictoire, prononcé publiquement le 11 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe, date à laquelle a été prorogé le délibéré initialement fixé le 20 Juin 2024 puis le 04 Juillet 2024

****

APPELANTE :

S.A.R.L. DAGHSEN

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Marie-Béatrice GAUCHER de la SELARL MARIE-BÉATRICE GAUCHER, Plaidant, avocat au barreau de TOURS

INTIMÉ :

Monsieur [B] [P]

né le 24 Septembre 1980 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Gaëlle PENEAU-MELLET de la SELARL PENEAU & DOUARD AVOCATS ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTERVENANTS :

Organisme CGEA - IDF EST

[Adresse 3]

[Localité 6]

Assigné en intervention forcée le 22 mai 2023 à personne habilitée

Non comparant, non représenté

Maître [E] [D], es qualité de iquidateur judiciaire désigné de la SARL TRANSPORT DAGHSEN parjugement duTribunal de Commerce de Bobigny en date du 04 avril 2023 dont le siège social est sis [Adresse 4]

Assignée en intervention forcée le 13 juin 2023 à tierce personne

Non comparante, non représentée

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 3 juillet 2017, M. [B] [P] a été recruté en qualité de chauffeur poids lourd par la Sarl TPS Riad, dirigée par M.[O], dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée sur la base d'un temps complet.

La société TPS Riad a été placée en liquidation judiciaire le 15 mars 2018.

A partir du 18 juin 2018, M.[P] a travaillé comme chauffeur poids lourd pour le compte du même dirigeant, à la tête d'une nouvelle structure' TPS Riad du groupe Stamex' devenue le 1er janvier 2019 la Sarl Daghsen.

A la suite d'un vol de palettes imputé à M. [P] et à trois autres salariés de l'entreprise, l'employeur a convoqué le 9 octobre 2019 M.[P] à un entretien préalable fixé au 21 octobre.

Le salarié s'est vu notifier le même jour une mise à pied à titre conservatoire.

La plainte pour vol déposée le 25 octobre 2019 par la Sarl Transport Daghsen, anciennement Sarl Daghsen, a fait l'objet d'un classement sans suite le 14 janvier 2020.

Le 16 novembre 2019, M. [P] a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur d'une part pour absence de rémunération des heures réelles de travail et d'autre part pour ' avoir travaillé dans le cadre de prêt de main d'oeuvre illicite pour des structures différentes par l'entremise d'une structure n'ayant jamais eu d'existence juridique '. Il ajoute qu'après avoir dénoncé cette situation, il a été mis à pied à titre conservatoire avec deux autres collègues le 9 octobre 2019 jusqu'à ce jour.

M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Rennes le 26 février 2020 afin de voir :

- Dire que la prise d'acte de rupture du 16/11/2019 s'analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- condamner son employeur au paiement des indemnités de rupture et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner son employeur au paiement d'un rappel de salaire, d'un rappel de majorations d'heures de nuit en 2018 et 2019, d'un rappel de majorations d'heures supplémentaires, une indemnité de congés payés non pris, un rappel de repos compensateur de travail de nuit,

- condamner l'employeur à une indemnité pour travail dissimulé et des dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale de travail,

- condamner l'employeur à lui délivrer les documents de fin de contrat bulletin de paie attaché au mois d'octobre 2019 et de novembre 2019.

La Sarl Daghsen intervenue à la procédure a conclu au rejet des demandes de M.[P].

Par jugement en date du 27 janvier 2021, le conseil de prud'hommes de Dinan a :

- Dit et jugé que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- Condamné la SARL Daghsen à payer à M. [P] les sommes suivantes:

- 8 929,50 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- 5 953,00 euros au titre de l'indemnité de préavis, outre 595,00 € de congés payés afférents ;

- 1 674,28 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement;

- 4 464,75 euros au titre de salaire revalorisé des mois d'octobre et novembre 2019, outre 446,00 euros de congés payés y afférents;

- 1 902,85 euros au titre des congés payés non soldés ;

-179,83 euros à titre de rappel de salaire au titre de majoration d'heures de nuit pour l'année 2018, outre 17,98 euros de congés payés y afférents ;

- 608,02 euros à titre de rappel de salaire au titre de majoration d'heures de nuit pour l'année 2019, outre 60,80 euros de congés payés y afférents ;

- 3 920 euros à titre de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires pour l'année 2018, outre 392,00 euros de congés payés y afférents ;

- 1 366,86 euros à titre de rappel salaire au titre des heures supplémentaires pour l'année 2019, outre

136 euros de congés payés y afférents ;

- 3 876,50 euros à titre de rappel de salaire de base 2019, outre 387,00 euros de congés payés y afférents;

- 1 016,09 euros au titre de rappel de repos compensateur de nuit;

- 2 000 euros au titre des dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale du travail ;

- Dit que les intérêts au taux légal débuteront à compter du 05 juin 2020, date de la citation, pour les sommes à caractère salarial et à compter du présent jugement pour les dommages et intérêts;

- Dit que l'exécution provisoire est de droit pour les sommes à caractère salarial, en application de l'article R 1454-28 du code du travail et fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2 488,89 euros;

- Ordonné à la SARL Daghsen la remise de bulletins de salaire rendant compte du paiement des sommes ci-dessus à caractère salarial et des documents sociaux de fin de contrat rectifiés prenant en compte la présente décision;

- Condamné la SARL Daghsen à payer à M. [P] la somme de 1 500,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

- Débouté les parties du surplus de leurs demandes;

- Condamné la SARL Daghsen aux entiers dépens y compris les frais éventuels d'exécution.

***

La Sarl Daghsen a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe en date du 26 février 2021.

Elle a conclu sur le fond le 18 mai 2021 et le 11 août 2021 avant l'ouverture d'une procédure collective.

Par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 4 avril 2023, la Sarl Transport Daghsen a été placée en liquidation judiciaire avec désignation de Me [D] es qualité de liquidateur judiciaire.

Me [D], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Transport Daghsen a été régulièrement appelé à la procédure le 13 juin 2023 par le salarié. Il n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu.

L'AGS représenté par le CGEA d'Ile de France Est , appelé à la procédure le 22 mai 2023 par le salarié, n'a pas constitué avocat.

Dans un courrier du 24 mai 2023, l'AGS a précisé qu'elle n'entendait pas être présente ni représentée dans la mesure où elle ne disposait d'aucun élément permettant d'éclairer utilement la juridiction.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 16 mai 2023, M. [P] demande à la cour de :

- Confirmer partiellement le jugement,

Statuant à nouveau :

- Confirmer la décision entreprise et ainsi :

- Dire que la prise d'acte de rupture en date du 16 novembre 2019 s'analyse comme étant un licenciement sans cause réelle et sérieuse

- Fixer au passif de la SARL Transport Daghsen les sommes suivantes :

- A titre principal la somme de 8929,5 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ,sur une base de salaire revalorisé, et subsidiairement

, de 7 466,67 euros sur une base de salaire non revalorisé,

- A titre de rappel d'indemnité de préavis la somme de 5953 euros outre 595 euros de congés payés y afférents, et subsidiairement de 4977,78 euros outre 497 euros de congés payés y afférents

- A titre de rappel d'indemnité de licenciement à titre principal la somme de 1674,28 euros et subsidiairement, de 1 474,63 euros

- Fixer au passif de la SARL Transport Daghsen les sommes suivantes :

- Au titre du salaire courant du 1 er octobre 2019 au 16 novembre 2019 (date de la rupture) à la somme de 4464,75 euros (à titre principal en fonction du salaire revalorisé) outre 446 euros de congés payés y afférents ; à titre subsidiaire à la somme de 3732 euros outre 373 euros de congés payés y afférents ; l'employeur sera enjoint de verser le bulletin de paie attaché au mois d'octobre 2019 et de novembre 2019 rectifié,

- Au titre des majorations heures de nuit pour l'année 2018 à la somme de 179,83 euros outre 17, 98 euros de congés payés y afférents;

- A titre de rappel de salaires au titre des majorations heures de nuit pour l'année 2019 à la somme de 608,02 euros outre 60, 80 euros de congés payés y afférents

- Au titre des majorations heures supplémentaires de

l'année 2018 de 3920 euros outre 392 euros de congés payés y afférents

- A titre de rappel de salaires au titre des majorations heures supplémentaires 2019 1366,86 euros outre 136 euros de congés payés y afférents pour l'année 2019

- A titre de rappel de salaires de base 2019 à la somme de 3876,5 euros outre 387 euros au titre des congés payés y afférents.

- A titre de rappel de repos compensateur de travail de nuit à la somme de 1016,09 euros

- Constater le non-respect de la durée maximale du travail par la SARL Daghsen

En conséquence,

- Fixer au passif de la SARL Transport Daghsen la somme de 2000 euros à titre de dommages et intérêts.

- Confirmer la décision entreprise et l'infirmer sur le quantum concernant le rappel de congés payés:

Dès lors,

- Fixer au passif de la SARL Transport Daghsen à titre de rappel d'indemnité de congés payés (39,5 jours) la somme de 3919,05 euros (en fonction de la moyenne de salaire revalorisée), à titre subsidiaire la somme de 3277 euros ( en fonction de la moyenne de salaire non revalorisée sans les heures supplémentaires).

- Infirmer la décision entreprise pour le surplus :

- Par conséquent, constater l'existence de travail dissimulé

Dès lors,

- Fixer au passif de la SARL Transport Daghsen à titre principal la somme de 17859 euros de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé ( en fonction du salaire revalorisé par les heures supplémentaires), à titre subsidiaire la somme de 14933 euros de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé ;

- Constater l'absence de remise des documents de fin de contrat au salarié ;

Dès lors,

- Ordonner la remise de l'ensemble des documents de fin de contrat (attestation Assedic ' certificat de travail modifié) ;

- Fixer au passif de la SARL Transport Daghsen à verser la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour l'absence de remise des documents de fin de contrat ;

En tout état de cause,

- Fixer au passif de la SARL Daghsen la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner la SARL Daghsen aux entiers dépens

- Dire que la décision à intervenir sera opposable au CGEA,

- Dire que le CGEA se devra de garantir l'ensemble des sommes qui seront fixées au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Transport Daghsen par la présente cour.

***

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 12 mars 2024 avec fixation de l'affaire à l'audience du 25 mars 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions régulièrement signifiées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, il est rappelé que :

- la Sarl Transport Daghsen dont le numéro de Siret ( 519910632) est identique à celui de la Sarl Daghsen, a fait l'objet d'une liquidation judiciaire suivant jugement du 4 avril 2023 du tribunal de commerce de Bobigny. (93)

- Me Chaudet, conseil de la SARL Daghsen a informé la cour par message du 5 septembre 2023, qu'il n'avait pas reçu mandat de régulariser la procédure au nom du liquidateur judiciaire de la société Transport Daghsen.

Conformément aux dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce, le jugement qui prononce la liquidation judiciaire tend nécessairement à la fin de l'activité du débiteur et emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de sorte que le liquidateur judiciaire agit dans l'intérêt collectif des créanciers et exerce toutes les actions à cette fin.

En outre, l'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile dispose que : 'La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.'

En l'espèce, si la Sarl Daghsen aux droits desquels se trouve la Sarl Transports Daghsen a interjeté appel le 26 février 2021, elle a fait entre-temps l'objet d'une liquidation judiciaire suivant jugement du 4 avril 2023 du tribunal de commerce de Bobigny de sorte que son dirigeant est dépourvu du droit d'agir.

Le liquidateur judiciaire ès-qualité de la Sarl Transport Daghsen pouvant seul exercer une action concernant le patrimoine de la société et n'ayant pas constitué avocat ni conclu, est réputé s'approprier les motifs du jugement entrepris en application de l'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile.

Les dispositions du jugement entrepris seront par voie de conséquence confirmées sauf en ce qui concerne les dispositions faisant l'objet d'un appel incident de M.[P] sur lesquelles la cour doit se prononcer à savoir :

- le quantum du rappel de congés payés,

- l'indemnité pour travail dissimulé,

- les dommages et intérêts pour absence de remise des documents de fin de contrat.

Sur la demande au titre du rappel de congés payés non soldés

M.[P] sollicite l'infirmation partielle du jugement qui a limité, selon lui à tort, l'indemnité due au titre des congés payés non soldés à la somme de 1 902,85 euros, sur la base de 26 jours de congés non pris, alors qu'il disposait au moment de la rupture en octobre 2019 d'un solde de 39,5 jours de congés payés non pris.

Le salarié pour établir l'existence d'une erreur lors du report de ses congés payés verse aux débats :

- le bulletin de salaire de mars 2019 faisant apparaître dans le compteur des congés payés : 25 jours restants et 11 jours acquis,

- celui d'avril 2019 mentionnant 11 jours de congés restants et 2,5 jours acquis.

- le bulletin de salaire de septembre 2017 mentionnant un solde de 26 jours,

- les bulletins de salaire ( juillet 2017- février 2018) établis pour un temps complet par la société TPS RIAD -Groupe Stamex

- les bulletins de salaire établis à compter du 18 juin 2018 établis pour un temps complet par la société TPS RIAD -Groupe Stamex jusqu'au 31 décembre 2018 .

- ceux établis entre le 1er janvier 2019 et le 30 septembre 2019 par la Sarl Daghsen pour un temps complet.

Les revendications du salarié sont fondées sur un décompte qu'il a reconstitué ( 39,5 jours de repos non pris) à partir de la comparaison des bulletins de mars 2019 et d'avril 2019, en contradiction avec celui de septembre 2019 ( 26 jours de congés non pris ) avant qu'il ne soit mis à pied à titre conservatoire -le 9 octobre - et ne prenne acte de la rupture le 16 novembre 2019.

Toutefois, le mode de calcul proposé par M.[P] est faussé en ce qu'il reporte un solde de 20 jours de congés depuis le mois de juin 2018, que le salarié recruté depuis le 18 juin 2018 n'avait pas pu acquérir régulièrement depuis son embauche. Ce solde est donc erroné.

Il s'ensuit que M.[P], dont le contrat de travail a été suspendu à compter de sa mise à pied disciplinaire effective le 11 octobre 2019, suivie de la prise d'acte du 16 novembre 2019, ne justifiait que d'un solde de 26,83 jours de congés payés non pris au moment de la rupture de son contrat.

Il est fondé à obtenir sur la base du salaire horaire de 10,47 euros une indemnité de congés payés de 1 966,37 euros, qui sera fixée au passif de la liquidation de la société Transports Daghsen venant aux droits de la Sarl Daghsen, par voie d'infirmation du jugement uniquement sur le quantum.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé

M.[P] sollicite au titre de l'indemnité pour travail dissimulé la fixation au passif de la société Transport Daghsen d'une créance de 17 859 euros et subsidiairement de 14 933 euros en fonction du montant de son salaire, au motif que le travail dissimulé est parfaitement caractérisé à l'égard de son employeur, qui a prélevé sur les bulletins de salaire les cotisations de retraite sans l'avoir affilié auprès des caisses de retraite et sans appliquer le bon taux des heures supplémentaires. Le salarié se réfère aussi aux propos de son dirigeant tenus à un de ses collègues ' tu dis à tes gars que c'est du black'.

Il produit:

Un relevé de sa situation individuelle de retraite obligatoire édité au 22 octobre 2019 dont il ressort que la période de juin 2018 à novembre 2019 n'est pas cotisée.

Un second relevé complémentaire agirc arrco au 28 mai 2021 ne mentionnant de même aucune cotisation pour la période de 2018 à novembre 2019 n'est pas cotisée.

L'article L 8221-5 du code du travail dispose : est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

- 1°- soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L 1221-10 relatif à la déclaration préalable à l'embauche;

- 2°- de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre I de la troisième partie.

-3° soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'

Selon l'article L 8223-1 du même code, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 du même code a droit à une indemnité égale à 6 mois de salaire. Ce montant est calculé en tenant compte des heures supplémentaires accomplies par le salarié au cours des 6 mois précédant la rupture du contrat de travail.

M.[P] démontre que malgré les prélèvements effectués sur ses bulletins de salaire au titre des cotisations retraite, l'employeur n'a manifestement pas procédé aux déclarations et au paiement nécessaires du temps de travail de M.[P], situation établie par l'absence de cotisations tel que cela résulte des relevés produits par l'intéressé, ce qui caractérise l'occultation volontaire de l'emploi du salarié par la société Daghsen aux droits desquels se trouve la société Transport Daghsen. L'intention de la société de dissimuler une partie du temps de travail de M.[P] est établie au regard du volume important des heures supplémentaires réalisées durant la période et de leur traduction en salaire ( 3 920 euros brut en 2018/ 1366,86 euros en 2019) dont le salarié a obtenu la fixation au passif de son employeur.

Il convient de prendre en compte dans le calcul du salaire de référence de l'indemnité pour travail dissimulé le montant des heures supplémentaires impayées, ce qui représente la somme de 2 976,50 euros.

Il convient dès lors de fixer au passif de la société liquidée l'indemnité pour travail dissimulé représentant la somme forfaitaire de 17 859 euros, sur la base du salaire des six derniers mois, par voie d'infirmation du jugement.

Sur les dommages et intérêts pour absence de remise des documents de fin de contrat.

M.[P] demande une somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts au motif que son ancien employeur ne lui a jamais délivré de document de fin de contrat et notamment son attestation Assedic de ce qui l'a empêché de bénéficier de l'assurance chômage. Il demande l'infirmation du jugement qui a rejeté sa demande en l'absence de preuve de son préjudice.

Si l'employeur ne justifie pas de la transmission des documents de fin de contrat au salarié ayant pris acte le 16 novembre 2019 de la rupture de son contrat, ce dernier ne démontre pas l'existence et l'ampleur du préjudice subi étant observé que le salarié a retrouvé dès le 23 novembre suivant un nouvel emploi ( pièce 25 relevé Agirc Arcco). Sa demande sera donc rejetée par voie de confirmation du jugement.

Sur les intérêts

En application des articles L. 622-28 et L 641-3 du code de commerce selon lesquelles le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, il est rappelé que les créances à caractère salarial produisent intérêt au taux légal à compter du 5 juin 2020, date de la citation de l'employeur, mais que le cours des intérêts est arrêté depuis le 4 avril 2023, date du jugement de liquidation judiciaire de la société Transport Daghsen venant aux droits de la société Daghsen

Sur les dépens et frais irrépétibles

Le présent arrêt doit être déclaré opposable à l'AGS représentée par le CGEA d'Ile de France Est dont la garantie n'est acquise au salarié que dans les limites et plafonds légaux et réglementaires.

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Me [D], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Transport Daghsen, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.

Il n'est pas contraire à l'équité, eu égard aux circonstances de l'espèce, de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et il convient donc de débouter M. [P] de la demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris à l'exception des dispositions relatives à l'indemnité de congés payés et à l'indemnité pour travail dissimulé.

Statuant sur les chefs infirmés et y additant,

- Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl Transport Daghsen venant aux droits de la Sarl Daghsen les créances de M.[P] aux sommes suivantes :

- 1 966,37 euros au titre de l'indemnité du solde de congés payés non pris,

- 17 859 euros net au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

- Déboute M. [P] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

- Rappelle que les créances salariales portent intérêt au taux légal à compter du 5 juin 2020 mais que le cours des intérêts légaux est arrêté à compter du 4 avril 2023, date du jugement de liquidation judiciaire de la société Transport Daghsen venant aux droits de la société Daghsen.

- Déclare la présente décision opposable à l'AGS-CGEA d'Ile de France Est et rappelle que les créances ne seront garanties par l'AGS que dans les limites prévues par l'article L 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L 3253-17 et D 3253-5 du même code,

- Condamne Me [D], ès qualités de liquidateur de la SARL Transports Daghsen aux dépens d'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 7ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/01335
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;21.01335 ?
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