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08/07/2024 | FRANCE | N°24/00296

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 08 juillet 2024, 24/00296


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/29

N° RG 24/00296 - N° Portalis DBVL-V-B7I-U6Y4



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E



article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique



Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement



Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué(é) par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L 3222-5-1 d

u code de la santé publique, assisté de, Julie FERTIL, greffière,



Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de RENNES rend...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/29

N° RG 24/00296 - N° Portalis DBVL-V-B7I-U6Y4

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique

Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement

Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué(é) par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L 3222-5-1 du code de la santé publique, assisté de, Julie FERTIL, greffière,

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de RENNES rendue le 07 Juillet 2024 à 16h20 autorisant le maintien de la mesure d'isolement de :

Monsieur [M] [N]

né le 13 Décembre 1990 à [Localité 3]

de nationalité Française

sous curatelle renforcée, prise en la personne de Mme. [K] [F] (mandataire judiciaire)

demeurant [Adresse 1]

Actuellement hospitalisé au Centre hospitalier [2]

Ayant pour conseil Maître Valérie CASTEL-PAGÈS, avocat au barreau de RENNES

Vu la déclaration d'appel formée par Me Valérie CASTEL-PAGES pour M. [M] [N] contre cette ordonnance et transmise au greffe de la cour d'appel 07 Juillet 2024 à 18h40 ;

Vu les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique,

Vu les observations sollicitées auprès du M. [N], Me CASTEL-PAGES, le centre hospitalier [2], Mme. [F] et le Ministère Public ;

Vu l'avis du Ministère Public, pris en la personne de M. DELPERIE, avocat général rendu le 08 juillet 2024 à 09h52 et transmis aux parties ;

Vu le dossier de la procédure ;

Sur la base du certificat médical du Dr [X] [V] , M.[N] a été admis le 29 juin 2024 en hospitalisation sous contrainte au centre hospitalier [2] de [Localité 3] dans le cadre de la procédure sur demande d'un tiers, en l'occurence sa mère.

L'hospitalisation sans consentement a été maintenue par décision du directeur du centre hospitalier [2] le 01 juillet 2024.

M.[N] a fait l'objet d'une mesure d'isolement le 30 juin 2024 à 14 h 56 ce qui a conduit le directeur du centre hospitalier [2] de [Localité 3] à saisir le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes, par requête du 03 juillet 2024 d'une autorisation de maintien de M.[N] à l'isolement.

Par ordonnance du 4 juillet 2024 à 14 h 16 , le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé le maintien de la mesure d'isolement de M.[N] .

Celui-ci ayant été maintenu en isolement le directeur du centre hospitalier [2] de [Localité 3] a saisi à nouveau le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes, par requête du 07 juillet 2024 réceptionnée à 10 h 56.

Par ordonnance du 7 juillet 2024 à 16 h 20 le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé le maintien de la mesure d'isolement de M.[N].

Par ailleurs par ordonnance du 07 juillet 2024 à 11h25, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes avait ordonné la mainlevée de la mesure de contention de M. [N].

Par déclaration du 7 juillet 2024 à 18 h 40 M.[N] par le biais de son conseil a fait appel de cette ordonnance.

Il sollicite la mainlevée de son isolement et fait état des irrégularités suivantes :

- L'absence de contradictoire pour le contrôle de la mesure de contention à laquelle il était soumis ;

-la violation de l'obligation pour le psychiatre de prendre une décision motivée toutes les 12 heures pour le renouvellement de la mesure d'isolement.

Le ministère public a indiqué s'en rapporter.

DISCUSSION

Sur la recevabilité de l'appel :

L'article R. 3211-42 du code de la santé publique dispose en son 1er alinéa que ' l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa notification .

En l'espèce, M.[N] par le biais de son conseil a formé le 7 juillet 2024 à 18H40 appel d'une ordonnance rendue le 7 juillet 2024 à 16 h 20 .

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité

- Sur l'absence de saisine du juge pour le contrôle de la mesure de contention :

Le conseil de M.[N] soulève qu'il résulte de la lecture des observations inscrites dans le logiciel de suivi de la mesure qu'il est soumis à une mesure de contention depuis le 5 juillet 2024 à 19h03 au moins puisqu'il est prescrit 'poursuite de la contention'et qu'il a découvert dans l'ordonnance frappée d'appel que le JLD avait statué le même jour sur une requête aux fins de prolongation de la mesure de contention à laquelle M. [N] était effectivement soumis. Il relève que cette ordonnance a donc été rendue en violation du principe du contradictoire puisque l'état de M.[N] était incompatible avec son audition par le JLD, qu'il aurait donc été bien-fondé à en solliciter l'annulation devant la Cour.

Il y a lieu de constater que ces éléments ne constituent pas une prétention.

En tout état de cause, les mesures de contention et d'isolement sont distinctes l'une de l'autre et font l'objet le cas échéant d'un contrôle séparé, ce qui a d'ailleurs été le cas en l'espèce et les moyens pouvant être soulevés à l'occasion d'une procédure suite à une mesure de contention ne peuvent l'être dans la procédure qui concerne le contrôle de la mesure d'isolement.

- Sur l'absence d'évaluations faites par un psychiatre :

Le conseil de M.[N] soutient qu'aucun psychiatre n'était intervenu pour prendre une décision motivée pour le maintien de la mesure avant la décision du JLD purgeant ces précédentes irrégularités ; que seules trois décisions de renouvellement de la mesure avaient été prises par un psychiatre après que le maintien de la mesure ait été autorisé par le JLD sur les six requises ; que près de 45 heures (44h57) s'étaient écoulées entre la décision rendue par le JLD, le 4 juillet 2024 à 14h16 et la première décision de renouvellement de la mesure par un psychiatre. Il fait valoir que les recommandations de la Haute Autorité de Santé préconisent que la mesure prise par un interne ou un médecin non psychiatre soit confirmée par le psychiatre dans l'heure qui suit et tracé au dossier, qu'elles n'ont pas force de loi et que le JLD en l'espèce a confondu les évaluations médicales et les renouvellements de la mesure.

L'article L.3222-5-1 du code de la santé publique dispose notamment :

'La mesure d'isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut étre renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d'une durée totale de quarante-huit heures, et fait l'objet de deux évaluations par vingt-quatre heures" .

En l'espèce le patient a fait l'objet d'une mesure d'isolement le 30 juin 2024 à 14 h 56 ce placement perdurant au delà de 12h il devait faire l'objet de deux évaluations par tranche de 24 h. La décision du JLD du 4 juillet 2024 ayant ordonné le maintien de la mesure d'isolement a purgé les irrégularités antérieures.

A l'examen du registre il s'avère que M.[N] a fait depuis cette décision l'objet d'un examen renouvelant la mesure :

Entre le 04/07/2024 à 14 h 56 et le 05/07/2024 à 14h 56

- le 04/07/2024 à 18 h 32

- le 05/07/2024 à 9 h 34

Entre le 05/07/2024 à 14h 56 et le 06/07/2024 à 14h 56

- le 05/07/2024 à 19 h 04

- le 05/07/2024 à 23h44

- le 06/07/2024 à 11h13

- le 06/07/2024 à 14 h 21

Entre le 06/07/2024 à 14h 56 et le 07/07/2024 à 14h 56

- le 07/07/2024 à 1 h 09

- le 07/07/2024 à 10 h 30

Ces renouvellements s'appuient sur des observations médicales et satisfont donc à l'évaluation exigée.

La saisine du juge des libertés et de la détention est intervenue le 07 juillet à 10 h 56.

M.[N] a donc fait l'objet d'évaluations régulières et d'alternatives tentées (intervention verbale, désescalade, temps calme, entretien avec un soignant, médicament) qui n'ont pas permis la levée de la mesure.

Les renouvellements décidés soit par des psychiatres, soit par des personnes (médecins ou internes en psychiatrie) dont le nom et prénom permettant leur identification est précisé, sous la supervision systématique d'un médecin psychiatre décisionnaire en l'espèce le Dr [W] [O] [C] doivent être validées comme étant conformes aux recommandations de la Haute Autorité de Santé du 22 février 2017 et répondant à des évaluations et décisions prises par des professionnels compétents travaillant sous le contrôle d'un autre encore plus expérimenté s'agissant des internes ce qui garantit au surplus un double regard sur la situation du patient.

Le moyen soulevé ne sera pas retenu.

Sur le fond :

D'une façon générale, l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique dispose en son 1er alinéa que 'l'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en 'uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.'

S'agissant des raisons médicales du placement à l'isolement de M.[N] , il est mentionné dans les dernières observations médicales psychiatriques du 7 juilet 2024 à 10H30 que ce dernier présente un état psychiatrique restant trés préoccupant, la labilité émotionnelle est majeure, de même l'hostilité et la tension psychique, il persiste à l'évidence un vécu délirant, avec des convictions persécutives, le patient estimant que les soignants parlent entre eux avec une attitude malveillante à son écart, ce qui traduit l'existence d'un risque de mise en danger de lui-même et d'autrui justifiant pour l'instant le recours à la mesure très exceptionnelle que doit constituer l'isolement.

Le juge n'a pas à se substituer à l'autorité médicale et il résulte de ce qui précède que cette mesure exceptionnelle doit être maintenue au regard des symptômes encore présents.

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Catherine Léon présidente de chambre, statuant en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit M.[N] en son appel,

Confirme l'ordonnance entreprise

Laisse les dépens à la charge du trésor public

Fait à Rennes, le 08 Juillet 2024 à

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Catherine LEON, Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00296
Date de la décision : 08/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-08;24.00296 ?
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