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04/07/2024 | FRANCE | N°23/01443

France | France, Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 04 juillet 2024, 23/01443


7ème Ch Prud'homale





ORDONNANCE N°240/2024



N° RG 23/01443 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TSML













M. [B] [I]





C/



S.A.S. ARCHE MC2















Ordonnance d'incident















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNA

NCE MISE EN ETAT

DU 04 JUILLET 2024





Le quatre juillet deux mille vingt quatre, date à laquelle a été prorogé le prononcé initialement fixé au vingt sept juin deux mille vingt quatre, date indiquée à l'issue des débats du deux avril deux mille vingt quatre, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, Magistrat de la mis...

7ème Ch Prud'homale

ORDONNANCE N°240/2024

N° RG 23/01443 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TSML

M. [B] [I]

C/

S.A.S. ARCHE MC2

Ordonnance d'incident

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE MISE EN ETAT

DU 04 JUILLET 2024

Le quatre juillet deux mille vingt quatre, date à laquelle a été prorogé le prononcé initialement fixé au vingt sept juin deux mille vingt quatre, date indiquée à l'issue des débats du deux avril deux mille vingt quatre, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, Magistrat de la mise en état de la 7ème Ch Prud'homale, assisté de Madame Françoise DELAUNAY, Greffier, lors des débats et du prononcé.

Statuant dans la procédure opposant :

DEMANDEUR A L'INCIDENT :

Monsieur [B] [I]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Corentin PALICOT de la SELARL CABINET PALICOT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES substitué par Me LIBOT, avocat au barreau de RENNES

INTIME

DÉFENDEUR A L'INCIDENT :

S.A.S. ARCHE MC2 venant aux droits de la S.A.S. CITYZEN, Société par actions simplifiée, immatriculée au R.C.S. de CHALONS-EN-CHAMPAGNE sous le n° 420 871 717, radiée le 13 avril 2022

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Luc PASQUET de la SELARL CONSILIUM ATLANTIQUE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de LORIENT, substitué par Me CESBRON, avocat au barreau d'ANGERS substituant Me ROUXEL, Plaidant avocat au barreau d'ANGERS

APPELANTE

A rendu l'ordonnance suivante :

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 1er septembre 2014, M. [I] a été embauché en qualité de Chef de projet, statut cadre, en contrat à durée indéterminée par la société Info DB, filiale du groupe, société coopérative et participative qui conçoit et commercialise des services qui facilitent l'accès à l'alimentation, la culture, les loisirs.

Le 1er septembre 2014, M. [B] [I] a été embauché en qualité de chef de projet en contrat à durée indéterminée par la société Info DB, filiale du groupe UP. La convention collective applicable est celle des bureaux d'études techniques.

Le 1er juillet 2016, son contrat de travail a été transféré à la société Apologic, filiale du groupe UP. Il est alors passé Responsable du développement.

Le 1er janvier 2018, les filiales du groupe Up ont fusionné pour donner naissance à la SAS Cityzen, filiale spécialisée dans le développement et l'édition de logiciels métiers. Le contrat de travail de M. [I] a été transféré de plein droit. Par la suite, la SAS Arche MC2 est venue aux droits de la SAS Cityzen.

Le 8 septembre 2020, il a été déclaré inapte à son emploi avec impossibilité de reclassement.

M. [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Dinan d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail pour des faits de harcèlement moral par requête en date du 11 septembre 2020.

Le 7 octobre 2020, il était licencié pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.

Par jugement en date du 7 décembre 2022, le conseil de prud'hommes de Dinan a :

- Prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [I] à la date du licenciement pour inaptitude;

- Dit et jugé que la résiliation judiciaire doit produire les effets d'un licenciement nul;

- Fixé le salaire de référence de M. [I] à 5 753 euros bruts;

- Condamné la société Cityzen à payer à M. [I] :

- 57 530 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,

- 17 259 euros au titre de la réparation du préjudice issu du harcèlement moral,

- 17 259 euros au titre de la réparation du préjudice subi du fait du manquement de l'employeur à son obligation de prévention du harcèlement moral,

- 17 259 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 725,90 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payes afférente,

- 1 186 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 4 263 euros au titre du rappel de salaire sur la période non rémunérée entre la déclaration d'inaptitude et son licenciement, outre 426 euros bruts au titre des congés payés,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné à la société Cityzen de délivrer à M. [I] des bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés suite à l'instance et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter du 15ème jour suivant la notification de la décision à intervenir pendant deux mois;

- Dit que le conseil de prud'hommes de Dinan se réserve expressément le pouvoir de liquider cette astreinte, charge à la partie intéressée d'en formuler la demande au greffe ;

- Constaté l'exécution provisoire de droit du présent jugement;

- Condamné la société Cityzen à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement, dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage.

- Débouté M. [I] du surplus de ses demandes;

- Débouté la société Cityzen de toutes ses demandes, fins et prétentions;

- Condamné la société Cityzen aux entiers dépens, y compris les frais d'exécution.

La SAS Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen a interjeté appel du jugement par déclaration au greffe en date du 8 mars 2023.

M.[I] a constitué avocat le 13 mars 2023.

La SAS Arche MC2 a conclu sur le fond le 17 juin 2023.

M.[I] a pris des conclusions sur le fond le 6 septembre 2023.

En l'état de ses conclusions d'incident transmises par RPVA 23 février 2024, M. [I] a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à voir de :

- Constater que la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen a exécuté sans réserve l'intégralité du jugement du 7 décembre 2022 et a acquiescé au jugement du 7 décembre 2022 ;

- Dire et juger irrecevable l'appel enregistré sous le numéro RG 23/01443 par la société Arche MC2

- Prononcer l'irrecevabilité de l'appel de la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen,

- Dire et juger l'instance éteinte

- Condamner la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen aux entiers dépens ;

En l'état de ses dernières conclusions d'incident transmises par RPVA le 2 avril 2024, la SAS Arche MC2 venant aux droits de la Société Cityzen demande au conseiller de la mise en état de :

- Constater que la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen n'a pas acquiescé au jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Dinan le 7 décembre 2022 ;

- Débouter M. [I] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Déclarer recevable l'appel de la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen ;

- Condamner M. [I] à payer à la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner M. [I] aux entiers dépens.

L'incident a été fixé à l'audience du 9 janvier 2024 et renvoyée à l'audience du 2 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de M.[I] tendant à voir constater l'acquiescement au jugement

M.[I] fait valoir que la société appelante a exécuté sans réserve l'ensemble des condamnations prononcées en première instance alors que le conseil des prud'hommes n'avait pas ordonné l'exécution provisoire sur le tout, de sorte que le conseiller de la mise en état est compétent pour constater qu'il s'agit d'un acquiescement au jugement du 7 décembre 2022 en application de l'article 410 du code de procédure civile, que l'appel est irrecevable et l'instance éteinte. Les moyens de défense de la société sont inopérants, et ses références jurisprudentielles erronées, dès lors que :

- la société Arche MC2 depuis la fusion absorption de la société Cityzen en avril 2022, a acquis par l'effet de la fusion la qualité de partie à l'instance introduite devant le conseil de prud'hommes de Dinan dans le litige l'opposant à M.[I] : il y a donc bien identité des parties.

- l'article 410 du code de procédure civile posant une présomption d'acquiescement en cas d'exécution sans réserve d'un jugement non exécutoire, le juge n'a pas besoin de rechercher l'intention d'acquiescer de la partie qui a exécuté la décision : les jurisprudences citées par la société ne sont pas pertinentes et ne correspondent pas à la situation des parties.

- la condamnation prononcée par le jugement de Dinan est dénuée de toute ambiguïté de sorte que l'exécution provisoire de droit en matière prud'homale était cantonnée aux seules sommes visées par l'article R 1454-28 du code du travail : la société Arche MC2 en décidant de payer l'ensemble des condamnations sans réserve sans se limiter à celles soumises à l'exécution provisoire de droit a incontestablement acquiescé au jugement.

La société Arche se défend d'avoir acquiescé au jugement dont elle a fait appel et fait valoir que :

- elle ne peut pas avoir acquiescé à une instance à laquelle elle n'était pas partie, l'instance d'origine opposant M.[I] à la société Cityzen.

- la rédaction du jugement entrepris est équivoque concernant les condamnations revêtues de l'exécution provisoire, faute de précision dans le dispositif.

- l'acquiescement doit être exprès ou implicite, ne peut pas être présumé et doit résulter d'actes ou de faits démontrant sans équivoque la volonté de la partie à laquelle on l'oppose, ce qui n'est pas le cas de l'espèce puisque la société appelante a régularisé un appel le 8 mars 2023, conclu au fond le 7 juin 2023.

Le règlement effectué le 4 septembre 2023 ne permet pas d'en déduire la volonté certaine de ne pas poursuivre la procédure d'appel. Elle précise qu'elle a exécuté les termes du jugement pour éviter que le conseiller de la mise en état ne soit saisi d'un incident suite à la mise en demeure adressée le 15 juin 2023 par le conseil de M.[I].

L'article 410 du code de procédure civile dispose que :

- L'acquiescement peut être exprès ou implicite.

- L'exécution sans réserve d'un jugement non exécutoire vaut acquiescement, hors les cas où celui-ci n'est pas permis.

La société Arche MC2 est mal fondée à soutenir qu'elle n'est pas concernée par l'instance originaire alors qu'elle vient aux droits par l'effet de la fusion absorption de la société Cityzen dont elle s'est déclarée ayant droit dans l'acte d'appel du 8 mars 2023. Le premier moyen sera écarté.

L'article 410 alinéa 2 du code de procédure civile prévoyant une présomption d'acquiescement en cas d'exécution sans réserve des condamnations non exécutoires prononcées par un jugement, il est de jurisprudence constante que le juge n'a pas à rechercher dans cette hypothèse si la partie ayant exécuté le jugement avait ou non l'intention d'y acquiescer.

Le second moyen invoqué par la société appelante n'est pas pertinent.

Il résulte des débats que :

- le jugement entrepris du 7 décembre 2022 n'était pas assorti de l'exécution provisoire pour l'ensemble des condamnations,

- il se borne à constater dans son dispositif 'l'exécution provisoire de droit du jugement', et dans sa motivation que le jugement était de droit exécutoire pour les créances mentionnées au 2° de l'article R1454-14, dans la limite fixée par l'article R 1454-28 du code du travail.

- la société Arche MC2 a interjeté appel le 8 mars 2023, portant sur l'ensemble des condamnations allouées au profit du salarié,

- le conseil de M.[I] dans sa mise en demeure du 15 juin 2023 a réclamé à l'employeur le versement d'une somme de 23 673,90 euros recouvrant le rappel de salaire et l'indemnité de préavis dans le cadre de l'exécution provisoire fixée par l'article R 1454-28 du code du travail ( pièce 3)

- le 20 juin 2023, le conseil de la société a répondu par mail intitulé ' courrier officiel' qu'il lui adressait la copie du bulletin de salaire de M.[I] révisé au regard des condamnations prononcées et qu'il lui ferait parvenir les fonds correspondant au règlement des condamnations.

- le versement a été effectué le 6 septembre 2023 par la société Arche MC2 sur le compte Carpa du conseil de M.[I] à concurrence de la somme nette de 108 808,96 euros.

Contrairement aux allégations de la société, le dispositif du jugement de Dinan est dépourvu d'ambiguïté et n'a fait que rappeler que les condamnations mentionnées au 2° de l'article R 1454-14 du code du travail dans la limite maximum de 9 mois de salaire, étaient revêtues de l'exécution provisoire.

Le fait pour l'employeur de procéder dès le 6 septembre 2023 au versement d'une somme nette de 108 808,96 euros couvrant l'ensemble des condamnations allouées à M.[I] sur le compte Carpa du conseil adverse, correspond à une exécution sans réserve par la société appelante des dispositions non exécutoires du jugement. Les courriels du conseil de l'employeur et l'établissement du bulletin de salaire rectifié (pièce 7) sont dépourvus d'ambiguïté et ne font que conforter la présomption édictée par l'article 410 alinéa 2 du code de procédure civile. Le comportement de la société Arche MC2 doit s'analyser comme un acquiescement de l'employeur qui emporte reconnaissance du bien-fondé des prétentions de M.[I] et la renonciation à son appel.

Il s'ensuit que l'appel de la société Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen doit être déclaré irrecevable.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société Arche MC2 dont l'appel est irrecevable sera condamnée aux dépens de l'appel et au versement au profit de M.[I] de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société appelante sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

Par ordonnance susceptible de déféré

Constatons l'acquiescement de la SAS Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen au jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Dinan le 7 décembre 2022.

Déclarons en conséquence irrecevable l'appel de la SAS Arche MC2 venant aux droits de la société Cityzen à l'encontre du jugement du 7 décembre 2022.

Condamnons la SAS Arche MC 2 à payer à M.[I] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejetons la demande de la société Arche MC 2 fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la SAS Arche MC2 aux dépens d'appel.

Le Greffier Le Conseiller de la mise en état


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 7ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 23/01443
Date de la décision : 04/07/2024
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.01443 ?
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