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03/07/2024 | FRANCE | N°20/05764

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 03 juillet 2024, 20/05764


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 20/05764 - N° Portalis DBVL-V-B7E-RDJ2













[12]



C/



CARRIERES DE [Localité 7]

[14]





















Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



CO

UR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 JUILLET 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère



GREFFIER :



Madame Adeline TIREL lors des déba...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 20/05764 - N° Portalis DBVL-V-B7E-RDJ2

[12]

C/

CARRIERES DE [Localité 7]

[14]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 JUILLET 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Madame Adeline TIREL lors des débats et Monsieur Philippe LE BOUDEC lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Mai 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 03 Juillet 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 15 Octobre 2020

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal Judiciaire de SAINT-BRIEUC - Pôle Social

Références : 18/01006

****

APPELANTE :

LA [8]

[Adresse 4]

[Localité 5]

non représentée, dispensée de comparution

INTIMÉES :

L'Entreprise [10]

[Adresse 17]

[Localité 3]

représentée par Me Marine ADAM de la SELARL CHEVALLIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de BREST substituée par Me Yasmine BERKANE, avocat au barreau de RENNES

LA [9]

[Adresse 1]

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Madame [C] [K] en vertu d'un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [S] [P] [O] a travaillé pour le compte de la société [16][Localité 15] en tant que tailleur de pierre du 6 septembre 2005 au 1er août 2014, puis a été embauché à compter du 1er décembre 2015 en tant qu'opérateur de production au sein de la société [10] (la société).

À compter du 14 septembre 2016, M. [S] [P] [O] a transmis à son employeur des arrêts de travail pour maladie simple.

Le 27 juillet 2017, M. [S] [P] [O] a complété une déclaration de maladie professionnelle en raison d'une 'silicose'.

Le certificat médical initial, établi le 9 juin 2017 par le docteur [V], fait état d'une 'silicose chronique pouvant justifier d'une reconnaissance en maladie professionnelle au titre du tableau n°25 du régime général'.

Par courrier du 11 juin 2018 réceptionné le 14 juin 2018, la caisse a notifié à la société la prise en charge de la maladie 'silicose' au titre du tableau n°25 des maladies professionnelles.

Le 27 juillet 2018, faisant valoir que le salarié n'avait travaillé de manière effective que neuf mois en son sein, la société a contesté cette décision devant la commission de recours amiable, laquelle a rejeté son recours lors de sa séance du 17 août 2018.

La société a alors porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Côtes d'Armor le 5 octobre 2018.

La [8] (la [11]) est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement du 15 octobre 2020, ce tribunal, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc, a :

- déclaré opposable à la société la maladie déclarée par M. [S] [P] [O] le 9 juin 2017 ;

- dit que les incidences financières de cette maladie professionnelle seront inscrites au compte spécial ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la [11] aux dépens.

Par déclaration adressée le 19 novembre 2020 par courrier recommandé avec avis de réception, la [11] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 28 octobre 2020, limité en ce qu'il a dit que les incidences financières de cette maladie professionnelle seront inscrites au compte spécial et l'a condamnée aux dépens.

Par ses écritures n°2 parvenues au greffe le 6 mai 2024, la [11], dispensée de comparution à l'audience, demande à la cour :

- d'infirmer le chef de jugement par lequel le tribunal judiciaire de Saint-Brieuc s'était reconnu compétent pour connaître de la demande d'inscription sur le compte spécial de la société et tous ceux qui en dépendent ;

- d'inviter la société à se pourvoir devant la cour d'appel d'Amiens désignée aux articles L. 311-16 et D. 311-12 du code de l'organisation judiciaire contre une décision de la [11] concernant la tarification de son établissement.

Par ses écritures parvenues au greffe par le RPVA le 31 janvier 2023, auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour :

A titre principal,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré opposable à son égard la maladie déclarée par M. [S] [P] [O] le 9 juin 2017;

Statuant de nouveau,

- de déclarer inopposable à son égard la maladie déclarée par M. [S] [P] [O] le 1er décembre 2017 ;

- d'annuler la décision de la commission de recours amiable notifiée le 29 août 2018 ;

A titre subsidiaire,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que les incidences financières de la maladie professionnelle déclarée par M. [S] [P] [O] seront inscrites au compte spécial ;

En toutes hypothèses,

- condamner la [13] et la [11] au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la [13] et la [11] aux entiers dépens.

Par ses écritures parvenues au greffe le 22 avril 2024, auxquelles s'est référée et qu'a développées sa représentante à l'audience, la [13] demande à la cour de :

- débouter la société de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré opposable à la société la maladie professionnelle déclarée par M. [S] [P] [O] le 9 juin 2017 ;

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que les incidences financières de cette maladie seront inscrites sur le compte spécial ;

Statuant à nouveau,

- juger que le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc, comme la cour, sont incompétents pour statuer sur les incidences financières de la maladie professionnelle déclarée par M. [S] [P] [O] ;

En tout état de cause,

- condamner la société aux dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur l'opposabilité à la société de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée par M. [S] [P] [O] :

La société fait valoir que le délai complémentaire d'instruction s'est achevé le 27 mai 2018 ; que ce n'est que le 22 mai 2018 que la [13] l'a informée que l'enquête était terminée et qu'elle pouvait consulter les pièces du dossier ; que ce délai était insuffisant pour qu'elle ait pu faire valoir ses observations ; que la [13] ne peut se retrancher derrière le fait qu'elle a rendu explicitement une décision le 11 juin 2018 puisqu'une décision implicite de prise en charge était déjà intervenue.

La [13] réplique que quand bien même elle n'aurait pas respecté le délai supplémentaire d'instruction de trois mois prescrit par l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, ce non-respect n'a pas pour effet de rendre la décision de prise en charge inopposable à l'employeur ; que les délais impartis à la caisse pour statuer à peine de reconnaissance implicite ne s'appliquent que dans les rapports caisse/assuré ; que la société a disposé d'un délai suffisant pour consulter les pièces du dossier avant la décision de prise en charge du 11 juin 2018.

Sur ce :

Selon l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, la caisse dispose d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie.

Sous réserve des dispositions de l'article R. 441-14, en l'absence de décision de la caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

L'article R. 441-14 du même code précise par ailleurs :

'Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

[...]

Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13. [...]'

Il est constant que l'employeur ne peut se prévaloir de l'inobservation du délai dans la limite duquel doit statuer la caisse, laquelle n'est sanctionnée que par la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident à l'égard de la victime. (2e Civ., 9 juillet 2020, pourvoi n° 19-11.400).

En l'espèce, par courrier du 27 février 2018 réceptionné le 2 mars 2018, la [13] a informé la société qu'un délai complémentaire d'instruction de trois mois était nécessaire, ce délai s'achevant le 27 mai 2018.

Puis par courrier du 22 mai 2018 réceptionné le 28 mai suivant, la société a été informée que l'instruction était terminée, que préalablement à la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie 'silicose' inscrite dans le tableau n°25 des maladies professionnelles devant intervenir le 11 juin 2018, elle avait la possibilité de venir consulter les pièces du dossier.

Par courrier du 11 juin 2018 réceptionné le 14 juin 2018, la [13] a notifié à la société la décision de prise en charge de la maladie en cause.

D'une part, la société ne peut se prévaloir de l'inobservation par la [13] du délai complémentaire d'instruction de trois mois qui ne concerne que les relations caisse/assuré.

D'autre part, il apparaît qu'entre le 29 mai et le 10 juin 2018, elle a effectivement bénéficié d'un délai de plus de 10 jours francs pour consulter le dossier avant que la décision de prise en charge intervienne.

Il en résulte que la procédure a été régulièrement menée par la [13], le jugement étant confirmé en ce qu'il a déclaré opposable à la société la décision de prise en charge.

2 - Sur la demande d'inscription de la maladie au compte spécial :

La [11] soutient que la cour d'appel d'Amiens est seule compétente pour statuer sur la demande d'inscription au compte spécial en application des articles L. 311-16 et D. 311-12 du code de l'organisation judiciaire ce que la Cour de cassation a reconnu dans deux arrêts du 28 septembre 2023 ; qu'il y a lieu de déclarer la demande de la société irrecevable dès lors qu'elle excédait les pouvoirs juridictionnels du juge du pôle social.

La [13] soutient également l'incompétence du pôle social pour statuer sur cette question.

La société réplique que les incidences financières de la maladie ne peuvent lui être imputées ; qu'elle a saisi la commission de recours amiable et le pôle social d'une demande d'inscription au compte spécial avant la première imputation sur son taux de cotisations ; qu'il y a lieu de confirmer la compétence du pôle social pour statuer sur ce point ; que l'assuré a été exposé au risque au moins 4 ans et 3 mois chez d'autres employeurs.

Sur ce :

La Cour de cassation a récemment jugé que les demandes de l'employeur aux fins de retrait de son compte des dépenses afférentes à une maladie professionnelle ou d'inscription de ces dépenses au compte spécial, même formées avant notification de son taux de cotisation, relèvent de la seule compétence de la juridiction du contentieux de la tarification de l'assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles (2e Civ., 28 septembre 2023, pourvoi n° 21-25.719).

Il en découle que les juridictions de sécurité sociales sont incompétentes pour connaître de la demande de la société.

Si, dans le corps de ses conclusions, la [11] sollicite que la demande de la société soit déclarée irrecevable, elle ne conclut dans son dispositif qu'à l'incompétence des juridictions de sécurité sociale. Or la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif en application de l'article 954 du code de procédure civile.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a admis l'inscription de la maladie au compte spécial et, au regard des dispositions des articles 81 alinéa 2 et 82 du code de procédure civile, de déclarer le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc incompétent au profit de la cour d'appel d'Amiens, spécialement désignée par l'article D. 311-12 du code de l'organisation judiciaire pour connaître des litiges relatifs au 7° de l'article L. 142-1 du code de la sécurité sociale.

3 - Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Les dépens de la présente procédure seront laissés à la charge de la société qui succombe à l'instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l'application des dispositions l'article 700 du code de procédure civile, le jugement étant infirmé en ce qu'il a condamné la [11] aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a dit que les incidences financières de la maladie professionnelle déclarée par M. [S] [P] [O] seront inscrites au compte spécial et en ce qu'il a condamné la [8] aux dépens ;

Statuant à nouveau de ce chef :

DIT que le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc n'était pas compétent pour connaître de la demande d'inscription au compte spécial ;

RENVOIE le dossier à la cour d'appel d'Amiens spécialement désignée par l'article D. 311-12 du code de l'organisation judiciaire pour connaître des litiges relatifs au 7° de l'article L. 142-1 du code de la sécurité sociale ;

CONDAMNE la société [10] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 20/05764
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;20.05764 ?
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