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26/06/2024 | FRANCE | N°24/00276

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 26 juin 2024, 24/00276


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/28

N° RG 24/00276 - N° Portalis DBVL-V-B7I-U5IL



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E



article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique



Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement



Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les article

s L 3222-5-1 du code de la santé publique, assistée de Julie FERTIL, greffière,



Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/28

N° RG 24/00276 - N° Portalis DBVL-V-B7I-U5IL

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique

Ordonnance statuant sur les recours en matière d'isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement

Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L 3222-5-1 du code de la santé publique, assistée de Julie FERTIL, greffière,

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de RENNES rendue le 24 Juin 2024 à 17 heures 29, autorisant le maintien de la mesure d'isolement de :

Monsieur [S] [O]

né le 21 Mai 2022 à [Localité 3] ([Localité 3])

[Adresse 1]

[Localité 4]

Actuellement hospitalisé au Centre hospitalier de [2]

Ayant pour conseil Maître Marion JAFFRENNOU, avocat au barreau de RENNES

Vu la déclaration d'appel formée par Maître Marion JAFFRENNOU pour M. [S] [O] contre cette ordonnance et transmise au greffe de la cour d'appel 25 Juin 2024 à 17 heures 56

Vu les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique,

Vu les observations sollicitées et recueillies sur le recours formé ;

Vu l'avis du Ministère public, Monsieur FICHOT, avocat général, l'ayant transmis par écrit déposé le 25 juin 2024, lequel a été mis à disposition des parties ;

Vu le dossier de la procédure ;

Sur la base du certificat médical du Dr [R] [A], M.[O] a été admis le 17 juin 2024 en hospitalisation sous contrainte au Centre Hospitalier [2] de [Localité 4] dans le cadre de la procédure d'hospitalisation à la demande d'un tiers.

M.[O] a fait l'objet d'une mesure d'isolement le 21 juin 2024 à 10h23 ce qui a conduit le directeur du Centre Hospitalier [2] à saisir le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes par requête du 24 juin 2024 à 9 h 14, d'une autorisation de maintien de M.[O] à l'isolement.

Par ordonnance du 24 juin 2024 rendue à 17 h 29 le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé le maintien de la mesure d'isolement de M.[O].

Par déclaration du 25 juin 2024 à 17 h 56 , M.[O] par l'intermédiaire de son conseil a fait appel de cette ordonnance.

Il sollicite la réformation de l'ordonnance et la mainlevée de son isolement faisant état des irrégularités suivantes :

-il n'y a pas eu les deux évaluations par 24 h requises par l'article L3222-5-1 du code de la santé publique ;

-le dossier fait état de renouvellements mais non d'évaluations motivées justifiant le renouvellement ;

-les décisions de renouvellement doivent être prises par un psychiatrique, or quatre de ces décisions ont été prises par des personnes qui ne sont pas médecins (M. [J] [H], Mme [T] [W] , Mme [Y] [N] , Mme [E] [P]).

Le ministère public a indiqué s'en rapporter.

DISCUSSION

Sur la recevabilité de l'appel :

L'article R. 3211-42 du code de la santé publique dispose en son 1er alinéa que ' l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa notification .

En l'espèce, M. [O] a formé le 25 juin 2024 à 17 h53 appel d'une ordonnance rendue le 24 juin 2024 à 17h 29 notifié à 18h13.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité

I.-L'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en 'uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.

La mesure d'isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d'une durée totale de quarante-huit heures, et fait l'objet de deux évaluations par vingt-quatre heures.

La mesure de contention est prise dans le cadre d'une mesure d'isolement pour une durée maximale de six heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au même premier alinéa, dans la limite d'une durée totale de vingt-quatre heures, et fait l'objet de deux évaluations par douze heures.

II. - A titre exceptionnel, le médecin peut renouveler, au-delà des durées totales prévues au I, les mesures d'isolement et de contention, dans le respect des conditions prévues au même I. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention du renouvellement de ces mesures. Le juge des libertés et de la détention peut se saisir d'office pour y mettre fin. Le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical.

Le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention avant l'expiration de la soixante-douzième heure d'isolement ou de la quarante-huitième heure de contention, si l'état de santé du patient rend nécessaire le renouvellement de la mesure au-delà de ces durées.

Le juge des libertés et de la détention statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter du terme des durées prévues au deuxième alinéa du présent II.

Si les conditions prévues au I ne sont plus réunies, il ordonne la mainlevée de la mesure. Dans ce cas, aucune nouvelle mesure ne peut être prise avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures à compter de la mainlevée de la mesure, sauf survenance d'éléments nouveaux dans la situation du patient qui rendent impossibles d'autres modalités de prise en charge permettant d'assurer sa sécurité ou celle d'autrui. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention, qui peut se saisir d'office pour mettre fin à la nouvelle mesure.

Si les conditions prévues au même I sont toujours réunies, le juge des libertés et de la détention autorise le maintien de la mesure d'isolement ou de contention. Dans ce cas, le médecin peut la renouveler dans les conditions prévues audit I et aux deux premiers alinéas du présent II. Toutefois, si le renouvellement d'une mesure d'isolement est encore nécessaire après deux décisions de maintien prises par le juge des libertés et de la détention, celui-ci est saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de sa précédente décision et le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical. Le juge des libertés et de la détention statue avant l'expiration de ce délai de sept jours. Le cas échéant, il est à nouveau saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration de chaque nouveau délai de sept jours et statue dans les mêmes conditions. Le médecin réitère l'information susmentionnée lors de chaque saisine du juge des libertés et de la détention.

Pour l'application des deux premiers alinéas du présent II, lorsqu'une mesure d'isolement ou de contention est prise moins de quarante-huit heures après qu'une précédente mesure d'isolement ou de contention a pris fin, sa durée s'ajoute à celle des mesures d'isolement ou de contention qui la précèdent.

Les mêmes deux premiers alinéas s'appliquent lorsque le médecin prend plusieurs mesures dont la durée cumulée sur une période de quinze jours atteint les durées prévues auxdits deux premiers alinéas.

- Sur l'absence d'évaluations faites par un psychiatre :

Le conseil de M.[O] soutient que les évaluations postérieures à celle de la période des 12 premières heures n'ont pas été réalisées par un psychiatre, la distinction entre les internes en médecine et les psychiatres n'étant pas mentionnée.

À l'examen du registre communiqué par l'hôpital, il s'avère que M. [O] a fait l'objet d'examens renouvelant la mesure:

- le 21/06/2024 16h43 renouvellement de la décision pour 12 h M.[H] [J] médecin décisionnaire : Dr [R] [A] psychiatre,

- le 22/06/2024 11h38 renouvellement de la décision Mme [T] [W] , pour 12 h, médecin décisionnaire : Dr [R] [A], psychiatre,

- le 22/06/2024 14h56 renouvellement de la décision Dr Pénélope Decle , pour 12 h, médecin décisionnaire : Dr [U] [D], psychiatre,

- le 23/06/2024 11h40 renouvellement de la décision Mme [Y] [N] , pour 12h, médecin décisionnaire : Dr [R] [A], psychiatre,

- le 23/06/2024 17h37 renouvellement de la décision Dr [C] [K], pour 12 h, médecin décisionnaire : Dr [R] [A], psychiatre,

- le 23/06/2024 22h21 renouvellement de la décision Mme [P] [E], pour 12 h, médecin décisionnaire : Dr [R] [A], psychiatre,

Ces évaluations, réalisées soit par des psychiatres, soit par des personnes (internes en psychiatrie,...) dont le nom et prénom permettant leur identification est précisé, sous la supervision d'un médecin psychiatre décisionnaire doivent être validées comme étant conformes aux recommandations de la Haute Autorité de santé du 22 février 2017 et répondant à des évaluations et décisions prises par des professionnels compétents travaillant sous le contrôle d'un autre encore plus expérimenté s'agissant des internes ce qui garantit au surplus un double regard sur la situation du patient.

- Sur le moven relatif au séquençage et au contenu des évaluations médicales :

L'article L.3222-5-1 du code de la santé publique dispose notamment :

'La mesure d'isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut étre renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d'une durée totale de quarante-huit heures, et fait l'objet de deux évaluations par vingt-quatre heures" .

Le conseil de M.[O] soutient qu'il a été vu une seule fois entre le 21 juin 2024 et le 22 juin 2024.

En l'espèce le patient a fait l'objet d'une mesure d'isolement à compter du 21 juin 2024 à 10h 23, ce placement perdurant au delà de 12h il devait faire l'objet d'un contrôle deux fois par 24 h.

A l'examen du registre il s'avère que M. [O] a fait l'objet d'un examen renouvelant la mesure :

-le 21 juin 2024 à 16h43

puis:

entre le 21 juin 22h 32 et le 22 juin 22h32

- le 22 juin à 11 h 38

- le 22 juin à 14 h 56

et:

entre le 22 juin 22h32 et le 23 juin 22 h 32

- le 23 juin à 11h40

- le 23 juin à 17h 37

- le 23 juin à 22h21

La saisine du juge des libertés et de la détention est intervenue ce 24 juin à 9 h 14 de sorte que les évaluations sur la période de 24 h suivante ont pu avoir lieu ulltérieurement.

Ainsi que l'a constaté le premier juge M.[O] a fait l'objet d'évaluations régulières et d'alternatives tentées (intervention verbale, entretien avec un soignant ) qui n'ont pas permis la levée de la mesure.

Il est fait état à chaque renouvellement du motif : risque suicidaire (passage à l'acte suicidaire depuis son admission) et chaque renouvellement donne lieu à des observations consignées en fin de registre , notamment le Dr [C] précise le 23 juin 2024 à 17h37 que le patient est calme, peu sédaté malgré le traitement, qu'il explique avoir des idées suicidaires fluctuantes pensant que le suicide est un choix, pas de critique ou de regret du passage à l'acte. Le médecin indique que le risque suicidaire est toujours élevé.

Il est donc établi que les renouvellements ont été décidés après évaluation.

Les moyens soulevés ne seront pas retenus.

- Sur le fond :

D'une façon générale, l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique dispose en son 1er alinéa que 'l'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en 'uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.'

S'agissant des raisons médicales du placement à l'isolement de M.[O], il est mentionné dans les dernières observations médicales psychiatriques du Dr [C] en date du 23 juin 2024 que ce patient traverse un épisode dépressif, qu'il est fait état d'un risque de suicide avec passage à l'acte suicidaire depuis son admission et ce alors que des alternatives à la mesure d'isolement ont été tentées, notamment un entretien avec soignant et une intervention verbale ce qui traduit l'existence d'un risque de mise en danger de lui-même justifiant pour l'instant le recours à la mesure très exceptionnelle que doit constituer l'isolement.

Le juge n'a pas à se substituer à l'autorité médicale et il résulte de ce qui précède que cette mesure exceptionnelle doit être maintenue au regard des symptômes encore présents.

- Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Catherine Léon présidente de chambre,, statuant en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit M.[S] [O] en son appel,

Confirme l'ordonnance entreprise

Laisse les dépens à la charge du trésor public

Fait à Rennes, le 26 Juin 2024 à

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Catherine LEON, Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00276
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;24.00276 ?
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