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26/06/2024 | FRANCE | N°21/06846

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 26 juin 2024, 21/06846


5ème Chambre





ARRÊT N°-261



N° RG 21/06846 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SFJE



(Réf 1ère instance : 20/01426)









S.A.S. LE FOURNIL PHILIPPE DE [Adresse 6]



C/



S.C.I. [Adresse 7]

S.A.S. KERVILLY



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée >


le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT...

5ème Chambre

ARRÊT N°-261

N° RG 21/06846 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SFJE

(Réf 1ère instance : 20/01426)

S.A.S. LE FOURNIL PHILIPPE DE [Adresse 6]

C/

S.C.I. [Adresse 7]

S.A.S. KERVILLY

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Mai 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Juin 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

S.A.S. LE FOURNIL PHILIPPE DE [Adresse 6] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Nathalie GREFF, Plaidant, avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉES :

S.C.I. [Adresse 7]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuel CUIEC de la SCP CUIEC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

S.A.S. KERVILLY prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuel CUIEC de la SCP CUIEC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

Par acte authentique du 29 novembre 2018, la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] a fait l'acquisition d'un fonds de commerce boulangerie, pâtisserie, sandwicherie, situé [Adresse 1] à [Localité 5].

Elle bénéficie d'un bail commercial, consenti par la société [Adresse 7], portant sur des locaux, désignés comme suit :

'Dans un ensemble immobilier a usage de centre commercial avec galerie marchande :

Dans la galerie marchande, au rez-de-chaussée,

Avec accès par le hall de la galerie,

Un local à usage commercial, d'une superficie d'environ 115 m2

Avec droit aux accès et aux parkings.'

La société Kervilly, également locataire de la société [Adresse 7], exploite dans la même galerie un magasin sous l'enseigne E. Leclerc Frais comprenant une surface de vente et une activité drive.

Estimant avoir subi une perte d'activité du fait de la fermeture du magasin E. Leclerc Frais à compter du 16 mars 2020, début de la période de confinement ordonnée dans le cadre de la pandémie liée au Covid 19, la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] a fait assigner la société [Adresse 7] et la société Kervilly devant le tribunal judiciaire de Quimper aux fins d'indemnisation de son préjudice financier.

Par jugement en date du 21 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Quimper a :

- déclaré l'action recevable,

- débouté la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] de toutes ses demandes,

- débouté la société [Adresse 7] et la société Kervilly de leurs demandes de dommages et intérêts,

- condamné la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] aux dépens et à payer à la société [Adresse 7] et à la société Kervilly une indemnité de

1 800 euros chacune au titre des frais non compris dans les dépens,

- rappelé que l'exception provisoire de la présenté décision est de droit.

Le 29 octobre 2021, la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 13 juin 2022, elle demande à la cour de :

- réformer le jugement du tribunal judiciaire de Quimper rendu le 21 septembre 2021 en ce qu'il a :

* l'a condamnée aux dépens et à payer à la société [Adresse 7] et à la société Kervilly une indemnité de 1 800 euros chacune au titre des frais non répétibles,

* l'a déboutée de ses demandes tendant à voir :

- À titre principal, condamner in solidum la société [Adresse 7] et la société Kervilly à lui payer la somme de 26 445 euros HT au titre de la perte de marge brute,

- À titre subsidiaire, condamner la société Kervilly à lui payer la somme de 26 445 euros HT au titre de la perte de marge brute,

- À titre infiniment subsidiaire, condamner la société [Adresse 7] à lui payer la somme de 26 445 euros HT au titre de la perte de marge brute,

En tout état de cause,

- condamner solidairement la société [Adresse 7] et la société Kervilly à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- débouter la société [Adresse 7] et la société Kervilly de toutes leurs demandes fins et conclusions,

Et statuant à nouveau de ces chefs :

À titre principal :

- déclarer recevable et bien fondée son action,

- débouter la société [Adresse 7] et la société Kervilly de l'ensemble de leurs demandes, fins, conclusions plus amples ou contraires,

- condamner in solidum la société [Adresse 7] et la société Kervilly à lui payer la somme de 26 445 euros HT au titre de la perte de marge brute

À titre subsidiaire :

- déclarer recevable et bien fondée son action à l'encontre de la société Kervilly,

- condamner la société Kervilly à lui payer la somme de 26 445 euros HT au titre de la perte de marge brute,

À titre infiniment subsidiaire :

- déclarer recevable et bien fondé son action à l'encontre de la société [Adresse 7],

- condamner la société [Adresse 7] à lui payer la somme de 26 445 euros HT au titre de la perte de marge brute,

En tout état de cause,

- rejeter l'appel incident de la société [Adresse 7] et de la société Kervilly, le dire mal fondé,

- débouter la société [Adresse 7] et la société Kervilly de leurs demandes de dommages intérêts et de frais irrépétibles ainsi que de toutes autres demandes,

- condamner solidairement la société [Adresse 7] et la société Kervilly à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement la société [Adresse 7] et la société Kervilly aux entiers dépens d'instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 14 mars 2022, les sociétés Kervilly et [Adresse 7] demandent à la cour de :

- débouter la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Quimper du 21 septembre 2021 en ce qu'il a :

* débouté la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] de toutes ses demandes,

* condamné la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] aux dépens, et à payer à la société [Adresse 7] et a la société Kervilly une indemnité de

1 800 euros, chacune, au titre des frais non compris dans les dépens,

* rappelé que l'exception provisoire de la présente décision est de droit,

- le réformer en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes de dommages et intérêts,

- condamner la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] à leur verser la somme de 3 000 euros, chacune, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et tous chefs de préjudices confondus,

Y additant,

- condamner la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] à leur verser la somme de 3 000 euros, chacune, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrepétibles engages en cause d'appel,

- condamner la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] aux entiers dépens d'appel, qui seront recouvrés par la société Emmanuel Cuiec, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Liminairement, il est relevé par la cour que si les intimées dans les motifs de leurs conclusions reprennent leur argumentation quant à l' irrecevabilité des demandes au motif d'une clause du bail intitulée 'exclusion de responsabilité du bailleur', elles n'ont pas, aux termes du dispositif de leurs écritures, qui seul saisit la cour, sollicité l'infirmation du jugement qui déclare l'action recevable, le tribunal ayant écarté ce moyen. Elles concluent en revanche à la confirmation du débouté des demandes, ce qui implique qu'elles admettent qu'il ait été statué au fond en première instance.

La cour n'est donc pas saisie de la question de la recevabilité de l'action.

- sur la responsabilité des sociétés [Adresse 7] et Kervilly

La société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] soutient que sa bailleresse a commis une faute en manquant à ses obligations fixées par l'article 1719 du code civil, en ne faisant pas jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.

Elle expose que le lundi 16 mars 2020 elle a découvert sur les parties communes une rangée de caddies devant l'entrée de sa boulangerie, des palettes de 2 mètres de hauteur bloquant le passage vers les parties communes et les toilettes et un défilé incessant de salariés du magasin Leclerc préparant des produits destinés à la vente au drive, au mépris de toutes les règles de protection de leurs préposés et clients.

Elle rappelle qu'il incombe au bailleur d'effectuer toute diligence pour faire cesser des troubles commis par ses preneurs, que la société [Adresse 6], également bailleresse de la société Kervilly, n'a procédé à aucune démarche en ce sens alors que cette dernière s'est rendue fautive par son comportement, ce qui lui a causé un préjudice.

Elle reproche ainsi à la société Kervilly qui exploite le magasin Leclerc d'avoir :

- empêché l'accès à son magasin par ses clients,

- empêché l'accès aux parties communes,

- méprisé les règles de protection de la santé de ses clients,

- fait fi du règlement intérieur de la galerie commerciale s'agissant de l'usage des parties communes, de l'interdiction de disposer des parties communes comme un entrepôt, de l'interdiction de fermer son magasin,

- fait croire à sa clientèle que la galerie était fermée ce qui a créé une confusion dans son esprit.

Elle demande à la cour de reconnaître que les agissements de la société Kervilly sont constitutifs d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil.

Les sociétés [Adresse 7] et Kervilly s'opposent aux prétentions de la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6], considérant celles-ci dénuées de fondement.

Elles font valoir que les affirmations de la preneuse quant à la présence sur les parties communes de rangées de caddies, de palettes bloquant le passage vers les parties communes et un défilé de salariés de la société Kervilly, ne sont nullement documentées.

Elles affirment que la société Kervilly n'a utilisé aucune partie commune pouvant nuire ou gêner l'exploitation de la boulangerie et contestent l'intégralité des griefs formulés.

Elles font valoir que la responsabilité du bailleur en application des dispositions des articles 1719 et 1725 du code civil exclut les dommages qui seraient causés sur la chose louée sans droit par des tiers.

Elles soulignent que les reproches fait au bailleur de ne pas avoir enlevé des objets qui auraient été entreposés par la société Kervilly dans les parties communes et ne pas avoir contraint la société Kervilly à ouvrir son magasin sont inconsistants.

Elles indiquent que la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] a toujours eu accès à ses locaux au même titre que sa clientèle, dans la galerie sur 50m2 devant son magasin ainsi que dans le hall devant l'entrée de 25m2 et en extérieur sur une très grande surface sécurisée de toute circulation, et qu'elle est toujours restée ouverte pendant la crise sanitaire.

Elles soutiennent que la bailleresse n'a jamais manqué à son obligation de délivrance et de jouissance paisible du locataire et que s'il devait être considéré que le preneur a subi de façon très limitée un trouble de jouissance dans son activité, ce qu'au demeurant elles contestent, le bailleur est dispensé de conférer la jouissance paisible lorsqu'il est empêché par un cas de force majeure, ce qui est le cas en l'espèce, en raison d'une décision des pouvoirs publics, fait du prince.

En ce qui concerne la responsabilité de la société Kervilly, elles indiquent que son magasin a fermé pendant quelques semaines durant la pandémie du printemps 2020 jusqu'au 4 mai 2020, dans le souci du respect des règles sanitaires. Elles estiment que les accusations de l'appelante à son égard sont fallacieuses et non établies et au demeurant totalement inexactes.

L'article 1719 du code civil dispose :

Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière:

1° De délivrer au preneur la chose louée ( ...)

2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée;

3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail;

(..)

L'article 1240 du code civil énonce :

Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

La société [Adresse 7] est la bailleresse de la société appelante et est donc tenue à une obligation de délivrance et de garantie de jouissance paisible envers elle. L'obligation du bailleur d'assurer au preneur une jouissance paisible de la chose louée pendant la durée du bail ne cesse qu'en cas de force majeure.

Il n'est pas discuté en l'espèce que durant la première partie au printemps 2020 du confinement ordonné en raison de la crise sanitaire, la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] a poursuivi son activité.

- sur l'empêchement d'accès aux parties communes

La société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] verse aux débats une photographie (pièce 17) montrant de nombreux packs de diverses boissons posées de chaque côté d'une galerie marchande, que l'on imagine être la galerie litigieuse, puisqu'on peut y lire une enseigne 'Cave [Adresse 7]', et ce sur une grande hauteur. Ces rangées de packs sont séparées par une allée centrale permettant de circuler.

La cour constate que cette photographie n'est pas datée et que, si elle a été prise durant le printemps 2020, cette unique image ne peut permettre d'affirmer que la société Kervilly a empêché l'accès aux parties communes, ce que ce cliché ne démontre pas, et encore moins pendant tout le premier confinement, ainsi que le déclarent d'ailleurs plusieurs témoins.

La société appelante ne caractérise pas l'existence d'un comportement fautif de la société Kervilly qui aurait encombré les parties communes de telle sorte que leur accès aurait été impossible ou difficile.

Ce grief n'est pas retenu.

- sur l'empêchement d'accès à son magasin et le mépris des règles de protection de la santé des clients

Des témoins évoquent 'la présence de palettes ou de rangées de caddies à proximité de la boulangerie durant la période du 16 mars 2020 au 3 mai 2020".

Aucun des témoins ne se plaint du fait que ces circonstances l'ont empêché de se rendre dans le magasin de la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] .

Pas davantage, ces témoins ne font part d'une quelconque entrave à leur sécurité en raison de la présence de ces matériels.

Ces griefs ne sont pas retenus.

- sur le non respect du règlement intérieur de la galerie commerciale

Le règlement intérieur prévoit que :

'- les commerçants ou ayants droit ne devront en aucun cas, faire obstacle au passage de piétons sur les emprises de circulation, ils devront se conformer aux règlements qui pourraient être imposés par les autorités administratives.

- les commerçants ou ayants droit ne pourront en aucun cas entreposer sur les parties communes, ni laisser leur personnel ou celui des entreprises travaillant pour leur compte y déposer, déballer ou emballer des marchandises, matériels destinés ou non à la vente, déchets ou gravats, sans y avoir été autorisés par le bailleur ou ses ayants-droit. Ledit bailleur pourra faire enlever aux frais, risques et périls du preneur tout dépôt effectué en contravention aux présentes dispositions,

- chaque commerçant ou ayant droit doit tenir son magasin constamment approvisionné et exploité.'

Compte tenu de ce qui précède, la circulation à l'intérieur de la galerie commerciale n'apparaît pas avoir été entravée.

La société Kervilly a pu, s'il l'on en croit l'unique photographie versée aux débats, procéder à des dépôts de bouteilles dans la galerie commerciale. Il est rappelé que la fréquence de tels faits ne ressort d'aucune pièce.

Les dispositions réglementaires prises en application de la loi 2020-290 du 23 mars 2020 du 23 mars 2020 pour faire face à l'épidémie de Covid 19, ont prescrit aux établissements de supermarchés et hypermarchés de 'mettre en place des mesures de nature à limiter le risques de propagation du virus entre clients, notamment par une gestion des files d'attente permettant une distanciation sociale, ont autorisé ces établissements à accueillir au maximum 100 personnes et leur ont prescrit de renforcer temporairement leur capacité de vente de type 'drive'.

La partie appelante, expose sans que cela ne soit contesté, que la société Kervilly exploite à [Localité 5] un hypermarché, un supermarché et trois points de retraits type drive :

- un hypermarché (Leclerc) sis [Adresse 2] qui est resté ouvert pendant le confinement,

- un supermarché (Leclerc Frais) sis [Adresse 1] (où la société appelante exerce son activité) qui a été fermé au public durant le 1er confinement pour la préparation des commandes des 3 points de drive,

- trois points de drive restés ouverts durant tout le confinement, situés en dehors des deux établissements précédents.

À raison, les intimées soulignent que les mesures décidées par l'Etat pour assurer l'approvisionnement de la population, dans ce contexte de crise sanitaire, primaient sur le règlement intérieur.

Il ne peut donc être fait grief à la société Kervilly d'avoir fermé au public son magasin de la galerie commerciale [Adresse 1], alors que cette décision s'est inscrite dans le souci de respecter les mesures gouvernementales et le souci d'assurer la sécurité des personnes et des salariés.

Dans un tel contexte, le reproche fait à celle-ci de ne pas respecter le règlement intérieur de la galerie commerciale, en empêchant l'accès du public à son magasin situé [Adresse 1] à [Localité 5], n'est pas fondé.

S'agissant du grief portant sur le dépôt de matériels et de marchandises dans la galerie, il ne pourrait, tout au plus, être relevé qu'une seule fois, en l'état d'une unique photographie versée aux débats. Il a été retenu précédemment qu'en tout état de cause, la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] ne justifie par aucune pièce probante que ce dépôt l'a empêchée d'exploiter. L'absence de démarches faites à ce titre par le bailleur à l'égard de la société Kervilly n'a pu avoir de lien avec un quelconque préjudice de jouissance de la partie appelante, alors que cette dernière a toujours exploité. La défaillance de certains clients de la boulangerie rapportée par des témoins n'est pas en lien avec ce manquement invoqué portant sur un dépôt de marchandises dans la galerie.

Si ces témoins la justifient par le fait de la fermeture du supermarché Leclerc, il a été retenu que sa décision de fermer au public son magasin situé sur ce site n'était pas fautive. Selon les écritures mêmes de l'appelante, la société Kervilly malgré cette fermeture au public a continué à exploiter ce site pour la préparation des commandes à retirer dans les points de drive. Il s'ensuit qu'aucune infraction au règlement intérieur n'est démontrée.

La société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] n'établit aucunement une faute tant de la société Kervilly que de la bailleresse la société [Adresse 7] en raison du non respect du règlement intérieur.

Ce grief n'est pas retenu.

- sur fait de faire croire à sa clientèle que la galerie était fermée, ce qui a crée une confusion dans son esprit

Ce grief suppose démontré que la société Kervilly a volontairement induit en erreur la clientèle de la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6].

La société appelante ne conteste pas avoir continué à exercer durant le printemps 2020. D'ailleurs, elle ne soutient nullement avoir subi une perte totale d'exploitation. Ce seul élément suffit à considérer qu'elle a été fréquentée par une clientèle qui était donc bien présente.

En tout état de cause, aucune pièce et notamment pas un article de presse annonçant la fermeture du magasin Leclerc [Adresse 6] ne permet de démontrer que la société Kervilly aurait communiqué pour faire croire aux clients de la boulangerie que ce commerce était fermé, alors que, comme le relève pertinemment le tribunal, cet article de presse ne vise que le magasin Leclerc et non la galerie et les autres activités qui s'y trouvent.

Ce grief n'est pas retenu.

En conséquence, la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] échoue à démontrer l'existence d'un comportement fautif de la société Kervilly.

Pas davantage, elle ne démontre que la société [Adresse 7] a manqué à son obligation de délivrance et de garantie de jouissance paisible.

En conséquence et sans qu'il soit nécessaire d'examiner le préjudice qu'elle invoque, ses demandes ont été à bon droit rejetées par le tribunal qui confirme le jugement de ce chef.

- sur la demande de dommages et intérêts

Les sociétés Stang Vigan et Kervilly sollicitent l'octroi d'une somme de

3 000 euros chacune à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Elles font valoir qu'elles ont donné à la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] toutes explications sur ces réclamations dans la phase précontentieuse et estiment donc l'action abusive.

L'exercice d'une action en justice est un droit qui ne dégénère en abus ouvrant droit à dommages et intérêts qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol. Il n'est pas démontré par les intimés que tel est le cas en l'espèce.

La cour confirme le jugement qui rejette ces prétentions.

- sur les frais irrépétibles

Il est inéquitable de laisser à la charge des intimées la totalité des frais irrépétibles qu'elles ont exposés à l'occasion de cette instance. La cour condamne la partie appelante à leur payer, à chacune, une somme de 1 200 euros. Elle supportera également les dépens d'appel, distraits au profit de la SCP Emmanuel Cuiec, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne à la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] à payer à la société [Adresse 7] et à la société Kervilly, chacune, une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Le Fournil Philippe de [Adresse 6] aux dépens d'appel, distraits au profit de la SCP Emmanuel Cuiec, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/06846
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;21.06846 ?
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