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26/06/2024 | FRANCE | N°21/04011

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 26 juin 2024, 21/04011


5ème Chambre





ARRÊT N° 255



N° RG 21/04011 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RZKF



(Réf 1ère instance : 20/00177)









M. [D] [L]



C/



M. [M] [P]

CPAM



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée













Copie exécutoire délivrée



le :



à : Me Fornier

Me Le Couls Bouv

et







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Virginie H...

5ème Chambre

ARRÊT N° 255

N° RG 21/04011 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RZKF

(Réf 1ère instance : 20/00177)

M. [D] [L]

C/

M. [M] [P]

CPAM

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Fornier

Me Le Couls Bouvet

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Jean-Pierre CHAZAL, lors des débats, et Madame OMNES, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Mai 2024, devant Madame Virginie HAUET, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

réputé contradictoire, prononcé publiquement le 26 Juin 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [D] [L]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 7], de nationalité française

[Localité 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Sybille MERLE DES ISLES substituant Me Cécile FORNIER de la SELARL ACTAVOCA, plaidant/postulant, avocats au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Monsieur [M] [P]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 4], de nationalité française

Lieudit [Localité 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, plaidant/postulant, avocat au barreau de RENNES

CPAM, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège,

[Adresse 1]

[Localité 4]

non représentée (déclaration d'appel et conclusions régulièrement signifiées le 04 10 2021 par remise à personne habilitée)

Par acte d'huissier du 2 décembre 2020, M. [M] [P] a assigné M. [D] [L] devant le tribunal judiciaire de Quimper exposant avoir été victime de violences volontaires commises par ce dernier le 2 mars 2016.

Par jugement en date du 25 mai 2021, le tribunal judiciaire de Quimper a :

- déclaré M. [D] [L] civilement responsable des dommages subis par M. [M] [P] suite à l'agression dont il a été victime le 12 mars 2016 à [Localité 5],

- condamné M. [D] [L] à payer à M. [M] [P] les sommes suivantes :

* 3 750 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire,

* 2 000 euros au titre des souffrances endurées,

* 3 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

- déclaré en tant que de besoin le présent jugement opposable à la CPAM du Finistère,

- condamné M. [D] [L] aux entiers dépens de l'instance, y compris les frais d'expertise médicale, ainsi qu'à payer à M. [M] [P] une indemnité de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- constaté l'exécution de plein droit de la présenté décision.

Le 30 juin 2021, M. [D] [L] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 14 mars 2024, il demande à la cour de :

- infirmer la décision entreprise,

A titre principal,

- dire et juger qu'il n'est pas rapporté la preuve du lien de causalité entre les préjudices invoqués et la faute reprochée à son encontre,

- débouter M. [M] [P] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- réduire à de plus justes proportions les sommes allouées en réparation des préjudices subis,

En tout état de cause,

- débouter M. [M] [P] de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- condamner M. [M] [P] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- débouter M. [M] [P] de toutes demandes plus amples ou contraires.

Par dernières conclusions notifiées le 8 décembre 2021, M. [M] [P] demande à la cour de :

- rejeter l'appel et le dire mal fondé,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- débouter M. [D] [L] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Y additant,

- condamner M. [D] [L] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [D] [L] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la responsabilité

M. [L] ne conteste pas le fait d'avoir bousculé M. [P] mais soutient que ce dernier ne rapporte pas la preuve du lien de causalité entre cette faute et les préjudices invoqués.

Il fait valoir que M. [P] était en état d'ébriété le jour de l'altercation et que les pièces médicales produites établissent qu'il souffre de nombreuses pathologies notamment aux épaules qui ne sont pas en lien avec les faits et qu'il bénéfice du statut de travailleur handicapé. Il considère que les arrêts de travail du 14 mars 2014 au 16 juin 2016 puis du 21 octobre 2016 au 4 novembre 2016 ne sont pas en lien avec les faits.

Il sollicite la réformation du jugement et demande de voir débouter M. [P] de toutes ses demandes.

M. [P] sollicite la confirmation du jugement entrepris. Il rappelle que les faits se sont produits dans le cadre d'un conflit de voisinage en lien avec une servitude de passage de leurs propriétés. Il conteste le fait d'avoir été alcoolisé le jour des faits et soutient que l'appelant ne le démontre pas. Il explique que si le témoin l'a vu tituber, c'est parce qu'il a été victime d'un accident en septembre 2010 à la suite duquel il porte des semelles orthopédiques et est très peu flexible au niveau des chevilles.

S'agissant du lien de causalité, il fait valoir qu'il est parfaitement établi par l'expertise judiciaire, laquelle a écarté ses antécédents médicaux et notamment l'arthrose à l'épaule, dont il souffre, comme n'étant pas en lien avec les conséquences des faits de violence.

Aux termes des dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce, il est constant que M. [L] reconnaît avoir bousculé M. [P].

Si M. [L] affirme que M. [P] est tombé parce qu'il était alcoolisé, il ne le démontre nullement. En effet, l'attestation de M. [N], seule pièce produite par l'appelant, qui indique 'j'ai remarqué que M. [P] titubait et que pour moi, il était alcoolisé. Le ton est monté et M. [L] a légèrement poussé M. [P] sur la poitrine. M. [P] étant bu et tenant pas sur ses jambes est tombé sur les fesses, et relever par sa concubine' ne permet pas d'établir l'état d'ébriété de M. [P] s'agissant d'une appréciation du témoin qui n'est corroborée par aucun autre élément. De plus, M. [P] justifie bénéficier du statut de travailleur handicapé suite à un accident à l'origine d'une fracture ouverte de la malléole gauche avec deux années d'arrêts de travail, ce qui explique qu'il ait pu tituber.

S'agissant du lien de causalité entre la faute et les préjudices invoqués, il résulte de l'expertise judiciaire que le docteur [J] a retenu, au vu de l'examen médical et des pièces médicales fournies, que M. [P] présente 'en relation directe et certaine avec l'agression du 12 mars 2016 :

- une éraflure cutanée du coude gauche,

- un hématome sous cutané de la hanche gauche en regard du grand trochanter,

- des douleurs vertébrales gauches dont le continuum clinique et l'absence de lésion visible sur les clichés réalisés la veille du 11 mars 2016, puis mise en évidence secondairement sur les clichés radiographiques ultérieurs, permet de retenir comme imputable, en relation directe et certain, un minime enfoncement du plateau supérieur de la 8ème vertèbre thoracique'.

L'expert a pris soin d'examiner les antécédents médicaux de M. [P], contrairement à ce que soutient l'appelant, puisqu'il a considéré que l'omathrose bilatérale était sans lien avec les conséquences de l'agression.

M. [L] ne produit aucune pièce de nature à remettre en cause les conclusions de l'expertise judiciaire qui établit l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la faute reconnue par l'appelant et les préjudices subis par M. [P].

Le jugement, qui a déclaré M. [L] responsable des préjudices subis par M. [P], sera confirmé.

- Sur l'indemnisation des préjudices subis par M. [P]

L'expertise judiciaire a fixé la date de consolidation au 18 novembre 2016, cette date n'est pas contestée et sera retenu.

Les préjudices extra patrimoniaux

A ' Les préjudices extra patrimoniaux temporaires

1 ' Le déficit fonctionnel temporaire .

Ce poste de préjudice vise à indemniser la gêne dans les actes de la vie courante et la perte de la qualité de la vie jusqu'à la consolidation.

M. [L] fait valoir que le jugement a indemnisé M. [P] qui présente une gêne partielle de classe I comme une gêne totale à raison de 15,30 euros par jour.

M. [P] sollicite la confirmation.

L'expert a retenu une gêne temporaire partielle de classe I du 12 mars 2016 au 17 novembre 2016 inclus.

Le jugement entrepris a alloué une somme de 15,30 euros conformément à la demande de M. [P]. Toutefois, il est constant que l'indemnisation de ce poste de préjudice est proportionnellement diminuée lorsque l'incapacité est partielle comme en l'espèce au niveau 1 qui correspond à 10 %. L'expertise judiciaire et M. [P] ne justifient pas d'un préjudice majoré.

Le jugement sera réformé et il sera alloué à M. [P] la somme de 612,50 euros (245 jours x 2,50 euros).

2 ' Les souffrances endurées

Il s'agit d'indemniser ici toutes les souffrances tant physiques que morales subies par la victime pendant la maladie traumatique et jusqu'à la consolidation.

M. [L] demande de voir réduire ce poste de préjudice à 1 000 euros.

M. [P] sollicite la confirmation du jugement.

L'expertise a retenu ce poste à hauteur de 2 sur 7 en raison des douleurs et des désagréments suite à l'agression s'agissant des lésions initiales avec notamment minime tassement vertébral du plateau supérieur de la 8ème vertèbre thoracique et le vécu douloureux, moral et psychologique.

Le jugement a justement alloué une somme de 2 000 euros qui indemnise parfaitement ce poste de préjudice. Le jugement sera confirmé.

B ' Les préjudices extra patrimoniaux permanents

1 ' Le déficit fonctionnel permanent

Il s'agit du préjudice non économique lié à la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel. Il s'agit d'un déficit définitif, après consolidation, c'est à dire que l'état de la victime n'est plus susceptible d'amélioration par un traitement médical adapté.

M. [L] demande de réduire ce poste de préjudice à la somme de 900 euros.

M. [P] sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué la somme de 3 000 euros.

L'expertise a retenu un taux de 2 % en raison de l'existence de séquelles fonctionnelles, un léger syndrome rachidien douloureux fracturaire, sans limitation fonctionnelle, résultant d'une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique persistante au moment de la consolidation.

M. [P] était âgé de 53 ans. Il convient de lui allouer la somme de 2 800 euros au titre de ce préjudice. Le jugement sera ainsi réformé.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens

Succombant en sa demande principale, M. [L] sera condamné à verser la somme de 2 500 euros à M. [P] au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives au déficit fonctionnel temporaire et au déficit fonctionnel permanent ;

Statuant à nouveau,

Condamne M. [D] [L] à payer à M. [M] [P] la somme de 612,50 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire et la somme de 2 800 euros au titre de son déficit fonctionnel permanent ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Y additant,

Déboute M. [D] [L] du surplus de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamne M. [D] [L] à payer la somme de 2 500 euros à M. [M] [P] au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ;

Condamne M. [D] [L] aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/04011
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;21.04011 ?
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