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25/06/2024 | FRANCE | N°24/02540

France | France, Cour d'appel de Rennes, Référés civils, 25 juin 2024, 24/02540


Référés Civils





ORDONNANCE N°62



N° RG 24/02540 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UXJV













Mme [Z] [D] [P] [X] veuve [N]



C/



S.E.L.A.R.L. [B] [Y]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES



ORDONNANCE DE RÉFÉRÃ



DU 25 JUIN 2024





Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,





GREFFIER :



Madame Julie ROUET, lors des débats et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé





DÉBATS :



A l'audience publique du 11 juin 2024





ORDONNANCE :



Co...

Référés Civils

ORDONNANCE N°62

N° RG 24/02540 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UXJV

Mme [Z] [D] [P] [X] veuve [N]

C/

S.E.L.A.R.L. [B] [Y]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 25 JUIN 2024

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Julie ROUET, lors des débats et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 juin 2024

ORDONNANCE :

Contradictoire, prononcée publiquement le 25 juin 2024, par mise à disposition date indiquée à l'issue des débats

****

Vu l'assignation en référé délivrée le 23 avril 2024

ENTRE :

Madame [Z] [D] [P] [X] veuve [N]

née le 14 Novembre 1932 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Jeffrey SCHINAZI, avocat au barreau de PARIS

ET :

La SCP PHILIPPE DELAERE, mandataire judiciaire immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes sous le n°378.969.810 dont le siège social est [Adresse 1], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SARL EXPLOITATIONS DES ETS CAROL'S BOUGIES, SARL immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Tarbes sous le n°478.877.764 dont le siège est [Adresse 3], désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de Saint-Nazaire du 6 mai 2015

Représentée par Me Gwladys TUBAUD de la SELARL RACINE, avocat au barreau de NANTES

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Mme [N] a consenti à la société d'exploitation des Établissements Carol's Bougies (ci-après Carol's Bougies) sept baux saisonniers successifs entre les années 2000 et 2006 portant sur des locaux situés à [Localité 5], chacun pour une durée de neuf mois courant du 1er avril au 31 décembre pour l'exploitation d'un commerce de fabrication et vente de bougies artisanales, broderie, cadeaux.

Le dernier bail signé entre les parties le 15 avril 2006 précisait que si l'une des parties n'entendait pas reconduire la location pour l'année suivante, elle devrait prévenir l'autre, par lettre recommandée avec avis de réception ou par acte d'huissier au plus tard le 30 septembre.

Le 2 avril 2008, la bailleresse a délivré congé à la société preneuse avec préavis de 30 jours.

La société preneuse a alors assigné Mme [N] devant le tribunal de grande instance de Saint Nazaire pour faire constater qu'elle était titulaire d'un bail commercial de droit commun depuis le 1er janvier 2001 ou le 1er janvier 2007.

Par jugement du 9 décembre 2010, le tribunal a :

- déclaré que l'action en revendication du statut des baux commerciaux était recevable dès lors que l'inscription de la société preneuse était effective au jour du jugement,

- reconnu à la société preneuse un bail commercial de neuf ans ayant couru à compter du 1er janvier 2007.

Ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rennes du 27 juin 2012 mais cette décision a été cassée par un arrêt de la Cour de cassation du 22 janvier 2014.

Sur renvoi, la cour d'appel de Rennes, désignée comme cour de renvoi, a, par arrêt du 18'mars 2015, a infirmé le jugement de première instance en ce qu'il a':

- dit que la société Carol's Bougies et Mme [N] n'était pas liées par un bail commercial,

- dit qu'en conséquence, la société Carol's Bougies était occupante sans droit ni titre depuis le 1er avril 2009,

- ordonné l'expulsion de la socité Carol's Bougies,

- condamné la société Carol's Bougies au payement d'une indemnité d'occupation correspondant au montant du loyer mensuel convenu, à compter du 1er avril 2009 et ce, jusqu'à libération complète des lieux.

Cet arrêt a été signifié le 2 avril 2015 par Mme [N] qui, le 31 mars, a dressé une facture de complément d'indemnité d'occupation à compter du 1er avril 2009 d'un montant de 40'700,32'euros.

Le 6 mai 2015, le tribunal de commerce a prononcé, sur déclaration de cessation des payements, la liquidation judiciaire de la société Carol's Bougies.

Le 7 mai 2015, Mme [N] a fait délivrer un commandement de quitter les lieux au plus tard le 9 mai 2015 et la société [Y], ès qualités de liquidateur de la société Carol's Bougies, a vidé les lieux et restitué les clefs à la bailleresse.

Cependant et sur pourvoi de la société Carol's Bougie, la Cour de cassation a, par arrêt du 8'septembre 2016, cassé la décision du 18 mars 2015 en toutes ses dispositions et renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.

Cet arrêt a été signifié par la société [Y] à Mme [N] le 27 septembre 2016.

Celle-ci n'ayant pas saisi la cour de renvoi, le jugement du tribunal de grande instance de Saint Nazaire du 9 décembre 2010 est devenu définitif et passé en force de chose jugée.

Par exploit du 13 mai 2019, la société [Y] ès qualités a fait assigner Mme [N] devant le tribunal judiciaire de Saint Nazaire en liquidation de son préjudice.

Par jugement du 14 décembre 2023 assorti de l'exécution provisoire, ce tribunal a':

- condamné Mme [N] à payer la somme de 160'000 euros à la société [Y] en qualité de mandataire liquidateur,

- condamné Mme [N] à payer au mandataire liquidateur la somme de 3'500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que Mme [N] supportera les dépens de l'instance, comprenant le coût de l'expertise judiciaire.

Mme [N] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 1er mars 2024.

Par exploit du 23 avril 2024, elle a fait assigner, au visa de l'article 524 ancien du code de procédure civile, la société [Y] ès qualités aux fins d'arrêter l'exécution provisoire du jugement critiqué et en payement de la somme de 3'000'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que l'exécution du jugement emporte des conséquences manifestement excessives dans la mesure où ses moyens financiers sont entièrement mobilisés pour financer sa prise en charge en EPHAD, étant âgée de 92 ans. Elle ajoute qu'en cas de réformation de la décision, le mandataire liquidateur ne sera pas en mesure de restituer la somme à l'instar de ce qui est déjà survenu par le passé, ayant versé à Me [Y] des sommes qu'elle n'a pu récupérer (10'000'euros).

La Selarl [B] [Y] ès qualités s'oppose à la demande et, subsidiairement, sollicite que la somme de 160'000'euros soit consignée sur le compte Carpa de son conseil, la Selarl Racine, et, à défaut, à la Caisse des Dépôts et Consignations. Elle réclame, en outre, une somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle que l'action a été introduite devant le premier juge antérieurement au 1er janvier 2020 de sorte que le texte applicable est l'article 524 ancien du code de procédure civile et qu'il importe peu qu'il existe ou non des moyens sérieux de réformation du jugement.

Elle conteste la situation alléguée de la débitrice qui bénéficie de revenus fonciers et dispose après règlement des sommes dues à l'Ephad où elle est hébergée d'une capacité d'épargne de 26752,35 euros ce qui atteste de facultés de payement. Elle ajoute qu'elle dispose de plusieurs comptes bancaires (6 dans différentes banques) et a tout aussi certainement vendu son ancienne résidence principale dont elle était propriétaire.

Elle ne s'oppose pas à la consignation du montant des condamnations.

SUR CE :

Le premier président tient de l'article 524 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au présent litige (c'est à dire antérieure au décret du 11 décembre 2019 ainsi qu'il résulte de l'article 55 de ce texte, l'acte introductif d'instance devant le premier juge ayant été délivré avant le 1er janvier 2020) le pouvoir d'arrêter, en cas d'appel, l'exécution provisoire ordonnée par le premier juge lorsqu'elle risque d'entraîner, pour le débiteur, des conséquences manifestement excessives que ce soit au regard de ses facultés de payement ou en considération des facultés de remboursement du créancier en cas d'infirmation du jugement.

Ce texte ajoute que le premier président peut également prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.

Il appartient à celui qui entend se prévaloir de cette disposition, de rapporter la preuve de telles conséquences, toutes autres circonstances tirées notamment du fond du droit étant indifférentes.

Pour justifier de sa situation, Mme [N] justifie être hébergée en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes depuis le 25 mai 2022, hébergement dont le coût s'est élevé pour l'année 2023 à la somme de 27'459,65 euros.

Elle produit sa déclaration de revenus établie en 2023 (sur les revenus 2022) dont il ressort qu'elle a perçu une retraite dont le montant annuel s'est élevé à la somme de 9'224'euros ainsi que des revenus fonciers nets d'un montant de 44'988'euros, soit 54'212'euros de revenus par an, somme qui excède assez largement le coût de son hébergement.

Mme [N] ne produit, en revanche, strictement aucun élément quant à son patrimoine immobilier (alors qu'elle perçoit des revenus fonciers) ni quant aux actifs mobiliers qu'elle détient alors que la Selarl [Y] rapporte la preuve par une attestation Ficoba qu'elle dispose de six comptes bancaires sont ouverts à son nom dans trois établissements différents (Crédit Agicole, Caisse d'Epargne et Banque Populaire du Grand Ouest).

Une exécution partielle (cantonnement) apparaît donc parfaitement possible.

Mme [N] justifie, en revanche, que la Selarl [Y] ès qualités a perçu en 2018 une somme de 9'000'euros qui ne lui a jamais été restituée (courrier du 6 juin 2019). Il apparaît très probable que si elle devait s'exécuter ' de nouveau ' entre les mains de la SCP [Y], elle ne puisse recouvrer les fonds en cas d'infirmation de la décision.

En l'état de ces éléments, il convient de rejeter la demande d'arrêt de l'exécution provisoire tout en la cantonnant à la somme de 50'000'euros dont la consignation sera ordonnée dans les termes précisés au dispositif de la présente décision.

Chaque partie conservera à sa charge les frais compris ou non dans les dépens par elle exposés.

Les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile seront, en conséquence, rejetées.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par ordonnance rendue contradictoirement :

Vu l'article 524 ancien du code de procédure civile':

Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire dont est assortie la décision rendue le 14 décembre 2023 par le tribunal judiciaire de Saint Nazaire.

Cantonnons l'exécution provisoire de ce jugement (toutes causes confondues) à la somme de 50'000'euros.

Autorisons Mme [N] à consigner entre les mains de la Caisse des Dépôts et Consignations la somme de 50'000'euros dans un délai d'un mois à compter du prononcé de la présente décision.

Disons que le conseil de Mme [N] devra justifier dans le dit délai au conseil de la SCP [B] [Y] ès qualités de la consignation ainsi effectuée, faute de quoi cette dernière pourra procéder au recouvrement de la somme ainsi fixée.

Disons que chaque partie conservera à sa charge les frais compris ou non dans les dépens par elle exposés.

Rejetons en conséquence les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Référés civils
Numéro d'arrêt : 24/02540
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;24.02540 ?
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