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19/06/2024 | FRANCE | N°22/04163

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 19 juin 2024, 22/04163


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 22/04163 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S46W













Mme [R] [V]



C/



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'ILLE ET VILAINE























Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUP

LE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 19 JUIN 2024



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère



GREFFIER :



Mme Adeline TIREL lors...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 22/04163 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S46W

Mme [R] [V]

C/

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'ILLE ET VILAINE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 19 JUIN 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Mme Adeline TIREL lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 Avril 2024

devant Madame Cécile MORILLON-DEMAY, magistrat chargé d'instruire l'affaire, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 19 Juin 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 25 Mai 2022

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Pole social du TJ de Rennes

Références : 21/00400

****

APPELANTE :

Madame [R] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparante en personne

ayant pour conseil Me Anastasia REGENT-PAGES, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D'ILLE ET VILAINE

Service contentieux Général

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par M. [Y] [E], en vertu d'un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [R] [V] exerce la profession libérale d'avocat depuis le 2 janvier 2019. Au titre de sa première année d'exercice, elle a réalisé un chiffre d'affaires de 37 820 euros et un bénéfice imposable de 24 961 euros ; au titre de sa deuxième année un chiffre d'affaires de 35 209 euros et un bénéfice imposable de 23 238 euros.

Mme [V] ayant donné naissance à son premier enfant le 4 septembre 2020, son congé maternité a pris effet le 30 juillet 2020 et a pris fin le 18 novembre 2020.

Le 27 juillet 2020, Mme [V] a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine (la caisse) le formulaire de demande de congé maternité. À compter du 30 juillet 2020, la caisse a versé une indemnité journalière et une allocation forfaitaire de repos maternel à Mme [V].

Par courrier du 2 octobre 2020, Mme [V] a contesté le montant des indemnités journalières et de l'allocation forfaitaire de repos maternel perçues, sollicitant un nouveau calcul de ses droits en tenant compte de ses revenus de 2019.

En réponse, la caisse a rejeté son recours en précisant que les montants transmis par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) pour le calcul de l'indemnité journalière ne correspondaient pas aux montants communiqués dans le dossier.

Le 17 novembre 2020, Mme [V] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable, laquelle a rejeté son recours lors de sa séance du 7 janvier 2021.

Mme [V] a alors porté le litige devant le pôle social du tribunal judiciaire de Rennes le 19 mars 2021.

Par jugement du 25 mai 2022, ce tribunal a :

- rejeté le recours de Mme [V] ;

- confirmé la décision de la commission de recours amiable du 7 janvier 2021 ;

- débouté Mme [V] de toutes ses demandes ;

- condamné Mme [V] aux dépens.

Par déclaration adressée le 30 juin 2022 par communication électronique, Mme [V] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 4 juin 2022.

Par les écritures de son conseil parvenues au greffe le 28 février 2023, auxquelles s'est référé et qu'a développées à l'audience, Mme [V] demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Rennes le 25 mai 2022 en toutes ses dispositions ;

- annuler la décision de rejet prononcée par la commission de recours amiable de la caisse ;

- condamner la caisse à lui verser la somme de 3 428 euros au titre de l'allocation forfaitaire de repos maternel ;

- condamner la caisse à recalculer le montant de ses indemnités journalières de congé maternité dues pour la période du 30 juillet 2020 au 19 novembre 2020 compte tenu de ses revenus déclarés, et à lui verser la différence entre les montants initialement versés et les montants recalculés ;

- à titre subsidiaire, condamner la caisse à lui verser la somme de 7 000 euros au titre des indemnités journalières de congé maternité pour la période du 30 juillet au 18 novembre 2020 ;

- condamner la caisse à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles engagés en vue de l'instance ;

- condamner la caisse aux entiers dépens.

Par ses écritures parvenues au greffe le 19 mars 2024 auxquelles s'est référée et qu'a développées son représentant à l'audience, la caisse demande à la cour de :

Sur la forme,

- la recevoir en ses écritures, fins et conclusions ;

Au fond,

- à titre principal, confirmer le jugement entrepris ;

- à titre subsidiaire, dire qu'elle est redevable de la somme de 5 712 euros au titre du reliquat des indemnités journalières ainsi que de la somme de 3 085,20 euros au titre du reliquat de l'allocation forfaitaire de repos maternel envers Mme [V] ;

En tout état de cause,

- rejeter la demande de condamnation au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [V] aux dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Mme [V] conteste le montant de l'indemnité journalière d'interruption d'activité pour son congé maternité et de l'allocation forfaitaire de repos maternel attribuées par la caisse.

Cette dernière ne conteste pas le droit de Mme [V] à percevoir l'allocation forfaitaire de repos maternel et les indemnités journalières forfaitaires en raison de son congé maternité.

Le litige porte sur les modalités de calcul de ces prestations au regard de la situation particulière de Mme [V].

D'une part, toutes les catégories de travailleurs indépendants ont droit durant le congé maternité à une allocation forfaitaire de repos maternel et à des indemnités journalières forfaitaires dont le montant varie en fonction de la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale en vigueur à la date du premier versement, ainsi que cela résulte des dispositions des articles D.623-1 et D.623-2 du code de la sécurité sociale, et en fonction du revenu d'activité annuel moyen.

D'autre part, l'article L.131-6-4 du code de la sécurité sociale prévoit un dispositif d'exonération des cotisations sociales pour les jeunes créateurs d'entreprise, selon le dispositif dit 'ACRE' (Aide à la création et à la reprise d'entreprise) :

'I.-Bénéficient de l'exonération des cotisations dues aux régimes d'assurance maladie, maternité, veuvage, vieillesse, invalidité et décès et d'allocations familiales dont elles sont redevables au titre de l'exercice de leur activité les personnes qui créent ou reprennent une activité professionnelle ou entreprennent l'exercice d'une autre profession non salariée soit à titre indépendant, soit sous la forme d'une société, à condition d'en exercer effectivement le contrôle.

(...)

II.-L'exonération mentionnée au I est accordée pour une période de douze mois.

Lorsque le revenu ou la rémunération est inférieur ou égal aux trois quarts du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du présent code, l'exonération est totale. Au-delà de ce seuil de revenu ou de rémunération, le montant de l'exonération décroît linéairement et devient nul lorsque le revenu ou la rémunération est égal au plafond annuel de la sécurité sociale.'

L'article D.622-7 du même code dispose que :

'I.-Le montant de l'indemnité journalière est égal à 1/ 730e de la moyenne des revenus pris en compte pour le calcul des cotisations d'assurance maladie de l'assuré des trois années civiles précédant la date de la constatation médicale de l'incapacité de travail, dans la limite du plafond annuel mentionné à l'article L. 241-3 en vigueur à la date du constat médical.

Lorsque l'assuré n'a pas intégralement acquitté, au titre d'une ou plusieurs années, les cotisations mentionnées au premier alinéa, le revenu pris en compte au titre desdites années pour le calcul de l'indemnité mentionnée au même alinéa est affecté d'un coefficient égal au rapport entre le montant des cotisations acquittées et le montant des cotisations dues.

Par dérogation, en cas d'octroi de délais de paiement par la caisse, le revenu est pris en compte dans son intégralité en cas de respect, à la date de la constatation médicale, des échéances fixées.-(...)

II.-Lorsque la constatation de l'incapacité de travail intervient au cours des trois premières années civiles d'affiliation en qualité de travailleur indépendant, le montant de l'indemnité journalière est calculé sur la base du rapport entre, d'une part, le revenu pris en compte jusqu'à la date de cette constatation pour le calcul des cotisations d'assurance maladie et, d'autre part, le nombre de mois d'activité rapporté à douze.'

Se fondant sur ce dernier texte, la caisse en déduit que Mme [V] qui bénéficiait depuis le 2 janvier 2019, date de début de son activité indépendante, d'une exonération de ses cotisations d'assurance maladie et maternité, ne s'était pas acquittée de ses cotisations au sens de cet article si bien qu'il convenait de considérer que son revenu d'activité annuel moyen pour l'année 2019 était nul.

En l'espèce, Mme [V] a débuté son activité libérale le 2 janvier 2019 et a bénéficié de l'exonération de la totalité de ses cotisations dans le cadre du dispositif d'aide à la création et à la reprise d'entreprise pendant une durée de 12 mois. Elle a ensuite bénéficié d'un congé maternité du 30 juillet au 19 novembre 2020, si bien que les revenus à prendre en compte étaient ceux de l'année 2019.

Au titre de sa première année d'exercice (2019), elle a déclaré un chiffre d'affaires de 37 820 euros et un bénéfice imposable de 24 961 euros et au titre de sa deuxième année d'exercice (2020), un chiffre d'affaires de 35 209 euros et un bénéfice imposable de 23 238 euros.

Considérant que le revenu non soumis à cotisations ne devait pas servir de base de calcul aux indemnités journalières de maternité et à l'allocation forfaitaire de repos maternel, la caisse a estimé que le RAAM de Mme [V] était inférieur à 10 % du PASS et que les indemnités journalières devaient être octroyées à taux réduit (5,63 euros par jour au lieu de 56,35 euros) et l'allocation forfaitaire réduite à 342,80 euros versés en deux fractions, au lieu de 3428 euros.

Ce faisant, la caisse a procédé à une application erronée de l'article D.622-7 du code de la sécurité sociale. En effet, il est démontré par les pièces versées aux débats par Mme [V], et notamment sa pièce 13 émanant de l'URSSAF en date du 4 septembre 2020, que pour l'année 2019, il a été retenu comme base de calcul un revenu de 24 960 euros engendrant des cotisations maladie d'un montant de 1 076 euros et que, après exonération ACRE, le montant des cotisations dues était ramené à 0 euros. Il convient dès lors de considérer que l'assurée s'est bien acquittée de l'ensemble des cotisations mises à sa charge en 2019, ramenées à un montant nul par le jeu de l'exonération totale ACRE.

Par conséquent, il y avait lieu de prendre en considération le revenu déclaré pour 2019 par Mme [V] à hauteur de 24 960 euros pour apprécier le revenu d'activité annuel moyen (RAAM) sur les trois années précédant son congé maternité, soit 24 960 euros / 3 = 8 320 euros.

Ainsi que le rappelle justement la caisse, pour l'année 2020, le PASS des trois années précédant le début du congé maternité de Mme [V] est de 39 828 euros, ce qui donne un seuil de 10 % soit 3 982,80 euros.

Mme [V] dépassant ce seuil, elle a droit à l'intégralité de l'allocation forfaitaire de repos maternel d'un montant de 3 428 euros et des indemnités journalières à taux plein, soit 112 x 56,35 euros =6 311,20 euros.

La caisse reste donc débitrice d'une somme de 3 085,20 euros au titre de l'allocation forfaitaire et de 5 680,08 euros au titre des indemnités journalières, après déduction de ce qu'elle a déjà versé.

Il n'y a pas lieu d'annuler la décision de la commission de recours amiable, les juridictions judiciaires n'étant pas juridiction de recours de cette commission.

En revanche, le jugement sera infirmé et la caisse condamnée à payer à Mme [V] une somme de 3 085,20 euros au titre de l'allocation forfaitaire et de 5 680,08 euros au titre des indemnités journalières.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de Mme [V] ses frais irrépétibles.

La caisse sera en conséquence condamnée à lui verser à ce titre la somme de 1 000 euros.

Les dépens de la présente procédure d'appel seront laissés à la charge de la caisse qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine à payer à Mme [V] une somme de 3 085,20 euros au titre du reliquat de l'allocation forfaitaire et de 5 680,08 euros au titre du reliquat des indemnités journalières pour son congé maternité du 30 juillet 2020 au 18 novembre 2020 ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine à verser à Mme [V] une indemnité de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 22/04163
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;22.04163 ?
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