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12/06/2024 | FRANCE | N°22/03556

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 12 juin 2024, 22/03556


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 22/03556 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S2KD













S.A. [10]



C/



Organisme [6]





















Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES



ARRÊT DU 12 JUIN 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère



GREFFIER :



Mme [V] [W] lors des débats et lors du prononcé


...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 22/03556 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S2KD

S.A. [10]

C/

Organisme [6]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 12 JUIN 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Mme [V] [W] lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 Avril 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 12 Juin 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 06 Septembre 2018

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTES

Références : 21401628

****

APPELANTE :

S.A. [10]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Bruno SERIZAY, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Léa DUPIR, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

[7]

[Adresse 2]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Sébastien HAREL, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE

A l'issue d'un contrôle de l'application de la législation relative à la contribution tarifaire ([9]) instituée par l'article 18 de la loi n°2004-803 du 9 août 2004, réalisé par la [7] (la caisse) sur la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, la société [10], anciennement [11] (la société) s'est vu notifier une lettre d'observations du 3 juin 2013 contenant 19 observations, entraînant un rappel de contribution tarifaire d'un montant de 5 951 353 euros, ainsi que des recommandations pour l'avenir.

Par courrier du 5 juillet 2013, la société a formulé des observations.

En réponse, par courrier du 8 octobre 2013, la caisse a maintenu les observations telles que notifiées dans la lettre d'observations.

La caisse a notifié une mise en demeure le 20 décembre 2013 tendant au paiement des cotisations notifiées dans la lettre d'observations et des majorations de retard y afférentes, pour un montant de 7 768 633 euros.

La société s'est acquittée du principal le 23 janvier 2014 d'un montant de 5 951 353 euros et de 908 640 euros le 1er octobre 2014 au titre de la pénalité et des intérêts de retard.

Le 24 janvier 2014, la société a contesté les observations aux points 4, 5, 6 et 12 de la lettre d'observations ainsi que le bien-fondé de la taxation forfaitaire afférente et a sollicité une remise des pénalités et intérêts de retard, devant la commission de recours amiable.

Par deux décisions du 2 juillet 2014 notifiées le 15 septembre 2014, la commission a :

- maintenu le redressement initial notifié ;

- maintenu les recommandations pour l'avenir notifiées ;

- accordé une remise gracieuse partielle d'un montant de 908 640 euros sur un montant total de 1 817 280 euros (soit 50 % du montant des intérêts de retard et pénalités dues).

La société a alors porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes le 14 novembre 2014.

Par jugement du 6 septembre 2018, ce tribunal a :

- déclaré recevable le recours introduit par courrier expédié le 14 novembre 2014, par la société ;

- déclaré irrecevables les demandes formulées par la société se rapportant aux observations 8, 13, 14, 17 et 19 ;

- confirmé le bien-fondé des observations pour l'avenir formulées par la caisse dans le cadre des observations n°4, 5, 6 et 12 figurant dans la lettre en date du 3 juin 2013, ainsi que des recommandations n°2 et 5 figurant dans l'annexe 2 de la lettre de mise en demeure en date du 20 décembre 2013 en ce qu'elles se fondent, respectivement, sur les observations n°4, 5, 6 et 12 ;

- confirmé le bien-fondé des observations n°4, 5, 6 et 12 figurant dans la lettre en date du 3 juin 2013 et les rappels CTA y afférents ;

- confirmé le bien-fondé du recours à la taxation forfaitaire de l'article 9 du décret n°2005-278 du 24 mars 2005 dans le cadre de la synthèse des valorisations des observations n°4, 5 et 6 et le redressement y afférent ;

- débouté par conséquent la société de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration adressée le 4 octobre 2018 par courrier recommandé avec avis de réception, la société a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance du 9 décembre 2019, le magistrat chargé de l'instruction de l'affaire a fait injonction à la société de conclure au fond avant le 29 mai 2020 et à la caisse de conclure au fond avant le 30 mai 2020.

Par ordonnance rectificative du 19 décembre 2019, le magistrat chargé de l'instruction de l'affaire a maintenu l'injonction de conclure à l'égard de la société pour le 29 mai 2020 et a fixé le délai pour conclure de la caisse au 30 septembre 2020.

Par ordonnance du 11 juin 2020, la cour a prononcé la radiation de l'affaire et dit que le dossier sera inscrit à nouveau au rôle avec dépôt des conclusions, bordereaux de communication de pièces avec justification de leur communication à la partie adverse.

Le 1er juin 2022, la société a demandé le ré-enrôlement de l'affaire et fait parvenir au greffe des écritures.

Par ordonnance du 27 juin 2022 puis du 9 février 2023, la cour a enjoint aux parties de conclure sur la péremption d'instance.

La société a conclu au fond le 21 décembre 2022. La caisse a conclu au fond le 3 novembre 2022.

Par ses écritures parvenues au greffe le 27 février 2023, auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour, s'agissant de la péremption d'instance, de :

- juger que la procédure étant orale, et en l'absence de fixation d'audience, le magistrat chargé de l'instruction de l'affaire n'avait aucune autorité pour imposer aux parties de conclure dans un délai imparti ;

- juger qu'aucune péremption ne lui est opposable ;

En tout état de cause,

- juger que la diligence qu'elle a accomplie le 28 mai 2020, dans le respect du délai initial de l'article 386 du code de procédure civile, a fait courir un nouveau délai de deux ans ;

- juger que l'ordonnance de radiation du 11 juin 2020 a également fait courir un nouveau délai de deux ans ;

- juger qu'elle a communiqué ses conclusions le 27 mai 2022, soit avant la fin des deux nouveaux délais de péremption ;

- en conséquence, juger que l'instance n'est pas périmée.

Par ses écritures sur le fond parvenues au greffe le 27 février 2023, auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société demande à la cour de :

- la recevoir en son appel ;

- réformer intégralement le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes du 6 septembre 2018 et rejugeant ses demandes ;

A titre principal,

- juger recevable la demande d'annulation des observations concernant les observations n°8, 13, 14, 17, 19 ;

- juger que les observations n°4, 5, 6, 8, 12, 13, 14, 17 et 19 et les recommandations auxquelles elles ont donné lieu ne valant que pour l'avenir ne peuvent fonder un rappel de [9] pour la période contrôlée (2010 et 2011) et les annuler ;

- en conséquence, ordonner à la caisse de lui rembourser la somme principale de 6 983 432 euros à laquelle s'ajouteront les intérêts légaux ;

A titre subsidiaire,

- annuler les observations n°4, 5 et 6 ainsi que la recommandation n°2 exposée à l'annexe 2 de la mise en demeure ;

- annuler la taxation forfaitaire sur les chefs de redressement n°4, 5 et 6 ;

- ordonner que la caisse lui rembourse la somme principale de 190 021 euros, augmentée des intérêts et à titre encore plus subsidiaire, qu'elle condamne la caisse à lui reverser un excédent de contribution pour un montant de 52 161 euros ;

- annuler l'observation n°12 et la recommandation n°5 exposée à l'annexe 2 de la mise en demeure ;

- ordonner que la caisse lui rembourse la somme en principal de 945 893 euros, augmentée des intérêts ;

En toute hypothèse,

- ordonner le remboursement des intérêts de retard à hauteur de 908 640 euros dans l'hypothèse de l'annulation de tout ou partie du redressement ;

- condamner la caisse à lui verser une somme de 50 000 euros HT sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses écritures parvenues au greffe le 3 novembre 2022, auxquelles s'est référée et qu'a développées sa représentante à l'audience, la caisse demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Loire-Atlantique en date du 6 septembre 2018 en toutes ses dispositions ;

- débouter la société de toutes ses demandes et prétentions ;

- condamner la société à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la péremption d'instance

La société estime que le magistrat chargé de l'instruction de l'affaire ne disposait pas du pouvoir d'imposer aux parties un délai pour conclure, aucune date d'audience n'étant fixée et les parties n'ayant pas exprimé le choix de conclure par écrit.

Il convient de rappeler que la cour ou le magistrat chargé d'instruire l'affaire est parfaitement en droit de relever d'office le moyen tiré de la péremption d'instance.

Par ailleurs, par application des dispositions de l'article 2 du code de procédure civile, les parties conduisent l'instance sous les charges qui leur incombent.

Il leur appartient d'accomplir les actes de la procédure dans les formes et délais requis, à peine de péremption d'instance dans les termes de l'article 386 du même code qui énonce que l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.

Il est exact que par application des dispositions de l'article R.142-22 du code de la sécurité sociale qui dérogeait à l'article 386 précité, l'instance n'était périmée que lorsque les parties s'abstenaient d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences expressément mises à leur charge par la juridiction (2e Civ., 22 octobre 2020, n° 19-17.835).

Toutefois, l'article R. 142-22 du code de la sécurité sociale, applicable aux instances devant la cour par renvoi de l'article R. 142-30 du même code, a été abrogé par le décret n°2018-928 du 29 octobre 2018, relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l'aide sociale, entré en vigueur le 1er janvier 2019.

Selon l'article 17 III du dit décret, les dispositions relatives à la procédure devant les juridictions sont applicables aux instances en cours.

Depuis le 1er janvier 2019 sont applicables les dispositions non modifiées de l'article R. 142-11 du même code qui énonce que devant la cour d'appel la procédure est sans représentation obligatoire. Il s'en déduit que la procédure est orale et est soumise aux dispositions des articles 931 et suivants du code de procédure civile.

Les dispositions de l'article R.142-10-10, en vigueur depuis le 1er janvier 2020 ne sont applicables qu'en première instance.

Si en matière de procédure orale, les conclusions écrites d'une partie ne saisissent valablement le juge que si elles sont réitérées verbalement à l'audience, leur dépôt constitue une diligence dès lors qu'il a été ordonné par la juridiction pour mettre l'affaire en état d'être jugée (Soc., 11 juin 2002, pourvoi n° 00-42.654).

Il en résulte que si le magistrat chargé d'instruire l'affaire ne peut fixer les délais et conditions de la communication entre parties de leurs prétentions, moyens et pièces, qu'après avoir recueilli l'accord des parties, il peut toujours pour mettre l'affaire en état d'être jugée, fixer à la charge des parties certaines diligences tel que le dépôt de conclusions écrites et pièces au greffe. (Soc 13 janvier 2021, n° 19-21.422).

Seules les diligences émanant des parties ont un effet interruptif de péremption (2e Civ., 6 octobre 2005, pourvoi n° 03-17.680 et 03-18.239). Ainsi, la radiation du rôle pour défaut de diligence des parties n'interrompt pas le délai de péremption (Civ. 2e, 23 février 2017, n° 16-13.643).

La diligence interruptive doit être de nature à accélérer le cours de l'instance ou du moins à faire progresser l'instance (Civ. 2e, 30 janv. 2020, n° 18-25.012). Par conséquent, la demande de délai supplémentaire pour conclure adressée par la société le 28 mai 2020, ne peut être considérée comme une diligence interruptive.

En l'espèce, la déclaration d'appel du 4 octobre 2018, n'a été suivie d'aucune diligence des parties, et ce, alors même que le conseil de la société a été rendu destinataire par le RPVA d'une ordonnance du 9 décembre 2019 rectifiée le 19 décembre 2019 lui faisant injonction de déposer ses conclusions et pièces pour le 29 mai 2020. La [8] n'a pas non plus adressé de conclusions au greffe en dépit de l'injonction de conclure qui lui avait également été faite. L'ordonnance de radiation du 11 juin 2020 n'a pas pu avoir pour effet d'interrompre la péremption et ce n'est que le 1er juin 2022 que la société a déposé au greffe de la cour des conclusions de remise au rôle et portant sur le fond.

L'appelante qui a été mise en mesure d'interrompre la péremption nonobstant le délai de comparution devant la juridiction ne justifie pas avoir déféré aux injonctions de déposer ses conclusions et de communiquer ses pièces, injonctions auxquelles elle ne s'est pas davantage opposée dans le délai de 10 jours qui lui était imparti.

Dès lors, aucun acte interruptif d'instance n'ayant été accompli depuis le 4 octobre 2018 et avant le 1er janvier 2021, il y a lieu de constater la péremption d'instance.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la caisse ses frais irrépétibles, si bien qu'elle sera déboutée de cette demande.

S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la société qui succombe à l'instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l'application des dispositions l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Constate la péremption de l'instance ;

En conséquence, constate l'extinction de l'instance ;

Déboute chacune des parties de sa demande d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA [10] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 22/03556
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;22.03556 ?
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