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12/06/2024 | FRANCE | N°20/02664

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 12 juin 2024, 20/02664


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 20/02664 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QVXJ













URSSAF BRETAGNE



C/



CENTRE MUNICIPAL DE VOILE DE LA VILLE DE [Localité 4]





















Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE

FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 12 JUIN 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère



GREFFIER :



Monsieur ...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 20/02664 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QVXJ

URSSAF BRETAGNE

C/

CENTRE MUNICIPAL DE VOILE DE LA VILLE DE [Localité 4]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 12 JUIN 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC lors des débats et Mme Adeline TIREL lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 27 Mars 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 12 Juin 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 13 Février 2020

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Pole social du TJ de SAINT-BRIEUC

Références : 18/00978

****

APPELANTE :

URSSAF BRETAGNE

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par M. [C] [U], en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMÉE :

CENTRE MUNICIPAL DE VOILE DE LA VILLE DE [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Florence LE GAGNE de la SELARL KOVALEX, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC substituée par Me Julien CHAINAY, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE :

A la suite d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires 'AGS' réalisé par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bretagne (l'URSSAF) sur la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, le Centre municipal de voile de la ville de [Localité 4] (le centre), fonctionnant sous statut associatif, s'est vu notifier une lettre d'observations du 18 mai 2015 portant sur deux chefs de redressement.

Par courrier du 8 juin 2015, le centre a formulé des observations sur les chefs de redressement : 'assiette forfaitaire : associations sportives, principe du forfait' et 'réduction Fillon : règles de cumul'.

En réponse, par courrier du 6 juillet 2015, l'inspecteur a maintenu les redressements tels que notifiés dans la lettre d'observations.

L'URSSAF a adressé une mise en demeure du 29 octobre 2015 tendant au paiement des cotisations notifiées dans la lettre d'observations et des majorations de retard y afférentes, pour un montant de 14 673 euros.

Contestant le redressement, le centre a saisi la commission de recours amiable le 6 novembre 2015 puis, en l'absence de décision dans les délais impartis, elle a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Brieuc le 26 avril 2016.

Lors de sa séance du 22 septembre 2016, la commission a maintenu le redressement.

Par jugement du 13 février 2020, ce tribunal, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc, a :

- annulé le redressement notifié au centre par mise en demeure du 29 octobre 2015 et la décision de la commission de recours amiable du 22 septembre 2016 ;

- débouté l'URSSAF de l'intégralité de ses demandes à l'encontre du centre ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné l'URSSAF aux dépens.

Par déclaration adressée le 12 juin 2020 par courrier recommandé avec avis de réception, l'URSSAF a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été adressé par le greffe le 15 mai 2020.

Par ses écritures n°3 parvenues au greffe le 2 février 2023, auxquelles s'est référée et qu'a développées sa représentante à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :

- infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc du 13 février 2020 ;

- confirmer le redressement afférent à la réduction Fillon pour un montant de 12 905 euros ;

- confirmer la mise en demeure du 29 octobre 2015 pour un montant de 12 963 euros en cotisations et 1 710 euros de majorations de retard soit 14 673 euros sous réserve du calcul des majorations de retard complémentaires ;

- condamner le centre à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- délivrer un arrêt revêtu de la formule exécutoire ;

- débouter le centre de l'ensemble de ses demandes.

Par ses écritures n°3 parvenues au greffe par le RPVA le 17 avril 2023, auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, le centre demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé le redressement qui lui a été notifié par mise en demeure du 29 octobre 2015, confirmé par décision de la commission de recours amiable du 22 septembre 2016 ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande de condamnation de l'URSSAF au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;

Y additant,

- condamner l'URSSAF au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

- condamner l'URSSAF aux dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur la régularité de la procédure de contrôle :

Il est constant qu'un avis de contrôle a été adressé par l'URSSAF à l'association le 19 janvier 2015 en vue de procéder à un contrôle sur place le 20 février 2015 à 9h00 'au siège de votre entreprise', concernant la période courant à compter du 1er janvier 2012. Dans ce courrier figure la liste des documents devant être mis à la disposition de l'inspecteur, dont les duplicatas des bulletins de salaire.

La date du contrôle a été reportée au 26 février 2015 à la demande effectuée par mail du 22 janvier 2015 de Mme [L], gestionnaire de paie au sein de l'EURL [5], l'expert-comptable du centre, afin que M. [J], le directeur de l'association, puisse être présent dans les meilleures conditions.

Par mails du 3 mars 2015, Mme [L] a transmis à l'inspecteur les bulletins de salaire pour les années 2012, 2013 et 2014.

Puis, par mail du 16 avril 2015, l'inspecteur a sollicité de Mme [L] la transmission des bulletins de salaire des moniteurs en CDD pour les années 2012, 2013 et 2014 et les contrats de travail correspondants, ce qu'elle a fait.

' Le centre fait valoir en premier lieu qu'aucun texte ne prévoit que le contrôle sur place puisse être converti en contrôle sur pièces ; que l'intégralité des bulletins de salaire avait été mise à la disposition de l'inspecteur sur support papier lors du contrôle sur place ; que l'inspecteur ne pouvait sans raison, et alors que l'ensemble des documents lui avait été remis lors du contrôle, en demander la transmission par la voie informatique ; que ce faisant ni la procédure du contrôle sur place, ni celle du contrôle sur pièces n'ont été respectées ; qu'au surplus, le principe du contradictoire n'a pas été respecté en ce qu'il n'a pu faire valoir des observations orales sur les pièces demandées.

L'URSSAF réplique que le contrôle a bien été diligenté dans le cadre d'un contrôle sur place prévu à l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale ; que rien n'indique que le contrôle a eu lieu dans le cadre de l'article R. 243-59-3 du code de la sécurité sociale ; que les procédures sont bien distinctes ; que dans le cadre du contrôle sur place, l'inspecteur peut, après son passage dans les locaux, poursuivre son contrôle en demandant à la personne contrôlée de lui fournir d'autres documents sociaux et poursuivre son contrôle dans les locaux de l'URSSAF ; que dans la liste des documents à présenter à l'inspecteur, ne figuraient pas les bulletins de salaire et contrats de travail des salariés en CDD ; que cette étude complémentaire n'a pas pour conséquence de transformer la procédure de contrôle sur place en contrôle sur pièces.

Il est certain que le contrôle mis en oeuvre par l'URSSAF est un contrôle sur place régi par les dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable à l'espèce.

Dans ce cadre et en application de l'article sus-visé, les employeurs sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.

Le fait que l'inspecteur demande, une fois le contrôle sur place réalisé, des documents, déjà mis ou non à disposition sur place, pour poursuivre son contrôle ne modifie pas la nature du contrôle et n'est pas de nature à rendre irrégulière la procédure.

Aucun manquement au principe du contradictoire n'est au surplus à retenir dès lors que le centre a été destinataire de la lettre d'observations et a pu adresser des observations sur les points redressés au regard des développements de l'inspecteur.

' Le centre fait valoir en second lieu que les demandes de documents permettant à l'inspecteur d'effectuer son contrôle ne peuvent être formulées qu'auprès de l'employeur ; que par mail du 16 avril 2015, l'inspecteur a sollicité, pour la première fois, du cabinet d'expertise comptable, la transmission des bulletins de salaire des moniteurs en CDD sur les années 2012, 2013 et 2014 ; qu'aucune demande en ce sens n'a été formulée à l'employeur ; qu'en conséquence, les opérations de contrôle sont entachées de nullité ; qu'à aucun moment le centre n'a donné mandat à l'expert-comptable pour le représenter dans le cadre des opérations de contrôle ; que l'URSSAF ne saurait invoquer l'existence d'un mandat implicite.

L'URSSAF réplique que depuis le début des opérations, le cabinet comptable avait été identifié comme son interlocuteur dans le cadre du contrôle et comme mandataire de l'association en ce qu'il avait notamment sollicité le report de la date de contrôle ; que c'est en vain que le centre fait valoir l'irrégularité de la procédure au motif que les documents comptables auraient été réclamés à son insu au cabinet comptable.

Il résulte de l' article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale, dont les dispositions sont d'interprétation stricte, que les agents de contrôle ne peuvent recueillir des informations qu'auprès de la personne contrôlée et des personnes rémunérées par celle-ci.

Dès lors, constitue une violation des articles L. 243-7 et R. 243-59 du Code de la sécurité sociale le fait pour un organisme en charge du recouvrement de cotisations et contributions sociales de recueillir des documents auprès de tiers sans que ces renseignements n'aient été préalablement demandés à la société contrôlée ( Cass. 2e civ., 7 juillet 2022, n° 20-18.471 ; Cass. 2e civ., 7 avril 2022, n° 20-17.655).

En l'espèce, de la teneur des premiers mails du 3 mars 2015, il se déduit que la transmission à l'inspecteur des bulletins de salaire pour les années 2012, 2013 et 2014 par Mme [L] fait suite à une demande qui avait été formulée à l'association lors du contrôle sur place. Cette transmission est par conséquent régulière.

En revanche, il apparaît que l'inspecteur, par mail du 16 avril 2015, a sollicité directement Mme [L] en vue de leur transmission non seulement les bulletins de salaire des moniteurs en CDD pour les années 2012, 2013 et 2014 mais encore les contrats de travail correspondants.

Il sera souligné que les contrats de travail n'étaient pas mentionnés dans la liste des pièces que le centre devait tenir à la disposition de l'inspecteur lors du contrôle sur place.

Il ne saurait être conclu, comme le fait l'URSSAF, à l'existence d'un mandat implicite du centre au profit du cabinet d'expertise comptable du fait que la demande de report de la date de contrôle a été effectuée par ce cabinet.

De même, la transmission des bulletins de salaire des années 2012 à 2014 à l'inspecteur par le cabinet comptable, à qui était confiée la gestion des paies, à la suite des opérations sur place ne permet nullement de retenir l'existence d'un tel mandat de représentation.

Ainsi, dès lors que les contrats de travail des moniteurs en CDD n'ont pas été demandés à l'association contrôlée mais à un tiers, la procédure de contrôle est irrégulière et le redressement doit être annulé.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

2 - Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge du centre ses frais irrépétibles.

L'URSSAF sera en conséquence condamnée à lui verser à ce titre la somme de 1 500 euros.

Les dépens de la présente procédure d'appel seront laissés à la charge de l'URSSAF qui succombe à l'instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l'application des dispositions l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

CONDAMNE l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bretagne à verser au Centre municipal de voile de la ville de [Localité 4] une indemnité de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bretagne aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 20/02664
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;20.02664 ?
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