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04/06/2024 | FRANCE | N°21/06260

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 04 juin 2024, 21/06260


2ème Chambre





ARRÊT N°197



N° RG 21/06260

N° Portalis DBVL-V-B7F-SCZG



(Réf 1ère instance : 16/00899)



(2)





CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE PAYS DE LOIRE



C/



M. [C] [P]

Mme [K] [V] épouse [P]



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















Copie exécutoire délivr

ée



le :



à :

- Me NAUX

- Me PETIT







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 JUIN 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur...

2ème Chambre

ARRÊT N°197

N° RG 21/06260

N° Portalis DBVL-V-B7F-SCZG

(Réf 1ère instance : 16/00899)

(2)

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE PAYS DE LOIRE

C/

M. [C] [P]

Mme [K] [V] épouse [P]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me NAUX

- Me PETIT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 JUIN 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Morgane LIZEE, lors des débats, et Mme Ludivine BABIN, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 Janvier 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 Juin 2024, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE Bretagne Pays de Loire

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représentée par Me Louis NAUX de la SELARL L.R.B. AVOCATS CONSEILS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

INTIMÉS :

Monsieur [C] [P]

né le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 10] (Algérie)

[Adresse 5]

[Localité 8]

Madame [K] [V] épouse [P]

née le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 11] (Algérie)

[Adresse 5]

[Localité 8]

Tous deux représentés par Me Laurent PETIT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

EXPOSE DU LITIGE :

Selon offre acceptée le 03 septembre 2003, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire (la Caisse d'Epargne) a consenti à M. [C] [P] et Mme [K] [V] son épouse (les époux [P]) deux prêts immobiliers pour l'acquisition d'un terrain et la construction de leur résidence principale :

- un prêt de la somme de 138 700,12 euros au taux fixe de 4,80 % remboursables en 240 mensualités de 948,65 euros assurance incluse,

- un prêt de la somme de 18 293,88 euros à taux zéro remboursables après un différé de 180 mois en 48 mensualités de 387,52 euros assurance incluse ; durant la période de différé, les emprunteurs devaient s'acquitter de l'assurance par mensualités de 6,40 euros.

Une hypothèque conventionnelle a été consentie au prêteur.

L'immeuble a été vendu le 24 novembre 2011 au prix de 244 000 euros la banque ayant été remboursée des sommes de 98 384,60 euros et 18 293,88 euros au titre du capital restant dû sur les deux emprunts.

Un compte a été ouvert au nom de M. et Mme [P] le 26 novembre 2011 puis a été souscrit un contrat d'assurance vie pour une somme de 151 000 euros.

Par acte du 25 janvier 2012, M. et Mme [P] ont acquis un appartement au moyen, notamment, d'un prêt relais de 185 000 euros souscrit auprès de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire, dans l'attente de la vente d'un autre bien immobilier.

Par acte daté des 24 et 25 mai 2012, un prêt de 25 000 euros a été souscrit au nom de M. [P] auprès de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire.

Se plaignant d'opérations réalisées à leur insu qu'ils attribuaient à un employé de la banque les époux [P] ont saisi un conciliateur de justice.

Le 25 juin 2013, les époux [P] et la Caisse d'Epargne concluaient un accord transactionnel au terme duquel

- la banque acceptait de rembourser à M. et Mme [P] la somme de 4 071,09 euros au titre d'intérêts normaux et moratoires et de frais au titre du découvert du compte chèque, du prêt relais et du prêt personnel de 25 000 euros

- M. et Mme [P] s'engageaient à rembourser le solde du prêt relais par un apport personnel, financé notamment par un prélèvement sur un contrat d'assurance vie nanti en sûreté du prêt relais

- la banque s'engageait à prêter à M. et Mme [P] la somme de 135 000 euros sur 24 ans et à remplacer le prêt de 25 000 euros par un prêt du même montant à taux 0.

Par acte authentique du 27 septembre 2013, la Caisse d'Epargne a prêté à M. et Mme [P] la somme de 135 000 euros remboursable en 288 mois avec une période de préfinancement de 36 mois.

Par courrier du 25 janvier 2015, M. et Mme [P] ont demandé à la banque de cesser de procéder au prélèvement des échéances des prêts de 2003 puisqu'ils avaient été remboursés.

Faute d'avoir obtenu satisfaction, ils ont saisi le juge des référés et par ordonnance de en date du 23 avril 2015, le président du tribunal de grande instance de Nantes a :

- ordonné la cessation par la Caisse d'Épargne de tout prélèvement au titre des mensualités des prêts souscrits par les époux [P],

- condamné par provision la Caisse d'Épargne à leur payer la somme de 36 291,90 euros au titre des prélèvements arrêtés au 10 janvier 2015, avec intérêts au taux légal,

- condamné la banque à leur payer la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- renvoyé les parties à se pourvoir devant le juge du fond pour le surplus,

- condamné la banque aux dépens.

Par arrêt du 24 juin 2016, l'ordonnance a été confirmée.

Par acte d'huissier du 2 février 2016, les époux [P] ont assigné la caisse d'épargne aux fins d'obtenir sa condamnation à les indemniser des préjudices consécutifs aux fautes qu'ils lui imputent.

Par jugement en date du 11 mai 2021, le tribunal judiciaire de Nantes a :

- déclaré irrecevables les moyens nouveaux formés par la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 octobre 2020,

- déclaré irrecevable la demande subsidiaire formée par M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] de voir condamner la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire à leur rembourser tout ou partie des intérêts versés et de dire que le capital restant dû sera versé selon un échéancier uniquement en capital sur la durée restante du prêt en cas de sanction de la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts par le prêteur,

- débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande de voir ordonner, au besoin sous astreinte, la production de l'accord de la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire sur la levée de l'hypothèque suite à la vente de la maison de [Localité 9] par Maître [B], notaire,

- débouté M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] de voir prononcer la nullité du protocole transactionnel conclu entre eux et la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire le 25 juin 2013,

- débouté les parties de leur demande de voir désigner un expert judiciaire,

- débouté M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] de voir constater le caractère erroné du taux effectif global du prêt notarié du 27 septembre 2013 et de prononcer la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels et subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts,

- débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande de condamnation solidaire de M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] au paiement de la somme de 136 497,09 euros en remboursement du prêt notarié du 23 septembre 2013 offre de prêt primo Plus n°8434308 demeuré impayé,

- condamné solidairement M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire la somme de 36 291,90 euros correspondant à la provision acquittée en exécution de l'ordonnance de référé du 23 avril 2015,

- autorisé la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire à prélever sur le compte de M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] conformément aux stipulations contractuelles du prêt n° 0507820 Pas Primo conclu le 3 septembre 2003 les mensualités dont M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] sont solidairement tenus,

- condamné M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] d'une part, la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire d'autre part, aux dépens de l'instance et dans leurs rapports entre eux, chacun pour moitié,

- dit n'y avoir lieu l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires.

La Caisse d'Epargne est appelante du jugement, et les époux [P] appelants incidents.

Par ordonnance du 6 janvier 2023, le conseiller de la mise en état a ordonné une expertise graphologique aux fins de vérifier les signatures attribuées à M. [P] sur :

- un bordereau d'opération pour l'ouverture d'un compte sur le livret avec le chèque du notaire daté du 26 novembre 2011,

- une demande d'adhésion au contrat Nuances Privilège en date du 2 décembre 2011,

- le verso du chèque de la SCP [B] du 24 novembre 2011,

Le rapport a été déposé et conclut que les signatures ne sont pas de la main de M. [P].

Par dernières conclusions notifiées le 3 janvier 2024 la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire demande de :

- Réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nantes le 11 mai 2021 en ce qu'il a :

- Débouté la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande de voir ordonner au besoin sous astreinte la production de l'accord de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire sur la levée d'hypothèque suite à la vente de la maison de [Localité 9] par Maître [B] notaire

- Débouté la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande de condamnation solidiaire de M [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] au paiement de la somme de 136 497,09 euros en remboursement du prêt notarié du 23 septembre 2013 offre de prêt Primo Plus n°8434308 demeuré impayé

- Débouté la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande de condamnation solidaire de M [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] à la reprise du paiement des échéances du prêt 0507819

- Débouté la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande de 5000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile.

Statuant à nouveau,

- Ordonner la production par les époux [P], au besoin sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir de la pièce justifiant de l'accord de la Caisse d'Epargne sur la mainlevée de l'hypothèque judiciaire au moment de la vente du bien de [Localité 9],

Au fond,

- Condamner solidairement M. et Mme [P] à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire la somme de 136 497, 09 euros,

- Autoriser la Caisse d'Epargne à reprendre les prélèvements correspondant au prêt n°0507819

- Condamner M. [C] [P] et Mme [K] [V] à rembourser à la Caisse d'Epargne la somme de 36 291,90 euros que celle-ci a été contrainte de leur verser, à titre de provision au titre d'une ordonnance de référé rendue le 12 mars 2015.

- Condamner les époux [P] à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée.

Subsidiairement, s'il était fait droit à la demande d'expertise comptable des époux [P],

- Juger que la mission de l'expert devra comporter les chefs suivants :

- Rechercher si des irrégularités ont été commises par la Caisse d'Epargne dans la gestion du compte des époux [P] ;

- Donner éventuellement à la cour tous éléments lui permettant de chiffrer le préjudice financier qu'auraient subi les époux [P] en liaison avec ces irrégularités.

- Donner à la cour tous éléments permettant d'apprécier si la SARL Kam a vu son activité retardée du fait de la situation des comptes des époux [P] et si, de ce fait, ceux-ci ont subi un préjudice financier.

En tout état de cause,

- Débouter purement et simplement les époux [P] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

- Débouter les époux [P] de l'ensemble de leurs demandes incidentes,

- Juger fautive la carence des demandeurs dans l'administration de la preuve d'une erreur,

- Débouter purement et simplement les époux [P] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- Condamner les époux [P] à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- Condamner les époux [P] en tous les dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 13 octobre 2023, M. et Mme [P] demandent de :

- Infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau,

Sur le remboursement des emprunts :

- Confirmer les dispositions provisoires prises par l'ordonnance de référé intervenue le 23 avril 2015, et confirmées par l'arrêt du 24 juin 2016.

En conséquence,

- Constater la résiliation des deux prêts n° 0507819 et 0507820 conclus entre les parties, par remboursement du capital restant dû en novembre 2011.

- Prononcer la nullité du protocole d'accord transactionnel conclu le 25 juin 2013 entre les parties.

- Ordonner compensation de la somme de 4 071,09 euros restituée aux époux [P] en application du protocole transactionnel, et la créance de même montant due aux époux [P]

- Condamner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire à payer à M. et Mme [P] les sommes de :

- 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour leur préjudice moral,

- 344 260,91 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, et capitalisation annuelle des intérêts.

- 2 440,21 euros au titre de la perte financière pour rachat du plan épargne retraite, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, et capitalisation des intérêts

- 313,56 euros au titre de la perte liée à l'achat sans ordre de titres BPCE, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, et capitalisation des intérêts.

Sur le prêt N° 8434308 de 135 000 euros :

- Prononcer la nullité du prêt n° 8434308 de 135 000 euros, comme conséquence de la nullité du protocole transactionnel du 25 juin 2013

- Dire qu'en conséquence de cette nullité, les époux [P] devront rembourser le capital restant dû, et la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire devra rembourser aux époux [P] l'ensemble des intérêts et accessoires perçus par la banque, en ce inclus les frais de garantie et de notaire supportés par les emprunteurs.

- Accorder aux époux [P] un délai de trois mois, à compter du jour où la décision sera devenue exécutoire, pour trouver les fonds nécessaires au remboursement du capital restant dû.

Sur les frais du procès :

- Condamner dès à présent la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire à payer à M. et Mme [P] la somme de 18 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance exposés à ce jour, comprenant les frais d'expertise d'écriture de 1 805,00 euros.

Subsidiairement si la cour juge nécessaire pour la détermination du préjudice financier des époux [P] :

- Réserver la liquidation du préjudice financier définitif des époux [P] au vu du résultat de l'expertise à venir.

- Ordonner avant dire droit une expertise et commettre à cette fin tel expert-comptable avec la mission suivante :

- réunir les parties en présence de leurs conseils

- se faire remettre tous documents utiles à sa mission

- déterminer les irrégularités commises par la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire dans la gestion du compte des époux [P], notamment les mouvements sans ordre ou avec des ordres revêtus de fausses signatures, les écritures libellées « mouvements internes », etc.

- donner au tribunal tous éléments permettant de chiffrer le préjudice financier lié à ces irrégularités, tels que distorsions entre crédits et débits, agios abusifs, frais divers, etc.

- déterminer les liquidités dont auraient pu disposer les époux [P], et sur quelles périodes, et les liquidités dont ils ont effectivement pu disposer.

- dire dans quelle mesure ces circonstances ont pu affecter la vie quotidienne des époux [P], et retarder le début de la nouvelle activité de M. [P].

- donner tous éléments permettant de chiffrer le préjudice financier des époux [P] consécutif au retard dans le début d'activité du fonds de commerce de la SARL Kam

- établir les comptes entre les parties

- du tout dresser rapport qui sera remis au greffe du tribunal dans un délai de quatre mois de la consignation de la provision à valoir sur les frais d'expertise fixée par la cour.

- Mettre les provisions à valoir sur les frais d'expertise à la charge de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire, et à toutes fins utiles l'y Condamner.

- Condamner dès à présent la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire à payer aux époux [P] l'ensemble des chefs de demandes ci-dessus, hormis leur préjudice financier estimé à 344 260,91 euros.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions visées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande de production des pouvoirs donnés aux fins de mainlevée de l'hypothèque.

La Caisse d'Epargne conteste avoir reçu remboursement des emprunts consentis le 3 septembre 2003 et avoir donné au notaire pouvoir de procéder à mainlevée de l'hypothèque. Dans son courrier du 10 mars 2015 adressé au juge des référés, le notaire explique avoir donné mainlevée au vu de l'engagement de la banque par courrier du 4 novembre 2011 de procéder à la mainlevée contre remboursement des sommes visées au décompte de remboursement anticipé qu'elle lui avait transmis et suite à l'encaissement le 28 novembre 2011 du chèque du même montant qu'elle lui avait adressé.

Le courrier du 4 novembre 2011 adressé au notaire par la banque produit aux débats par les époux [P] consiste en une transmission du ' décompte des sommes dues au titre du remboursement du prêt' et ne comporte pas de mention particulière sur la mainlevée de l'hypothèque.

Le notaire n'évoquant pas d'autre courrier postérieur apparaît avoir procédé à la mainlevée de l'hypothèque sur la seule base de ce courrier et de l'encaissement du chèque libellé à l'ordre de la banque du montant correspondant aux sommes dues par les emprunteurs au vu du décompte de remboursement anticipé qui lui avait été communiqué.

Si la banque conteste formellement avoir ainsi donné son accord à la mainlevée il n'est aucunement établi que cette dernière serait intervenue sur la base d'autres documents non communiqués qui seraient détenus par les époux [P].

La Caisse d'Epargne sera déboutée de sa demande de communication sous astreinte le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur la demande de remboursement du prêt notarié du 27 septembre 2013 :

La Caisse d'Epargne fait grief au jugement d'avoir rejeté sa demande en paiement au titre des impayés de ce prêt.

Les époux [P] soulèvent la nullité de ce prêt en ce que ce dernier a été conclu en exécution des termes du protocole conclu entre les parties le 25 juin 2013 dont ils soulèvent la nullité.

Il est constant que le prêt du 27 septembre 2013 a été conclu conformément aux termes d'un accord transactionnel conclu le 25 juin 2013.

Suivant les mentions de cet accord, celui-ci est intervenu à la suite du refus de la banque de convertir un prêt relais de 185 000 euros consenti aux époux [P] le 18 janvier 2012 en un prêt amortissable, ce dont il ressortait que le prêt était impayé depuis le 5 février 2013 pour un total en capital et intérêts de 193 084,25 euros.

Les époux [P] ont également fait valoir qu'ils avaient relevé la mise en place de prélèvements sur leur compte au titre d'un prêt de 25 000 euros mis à disposition sur leur compte joint le 31 mai 2012 et qu'ils contestent avoir sollicité.

Au terme de l'accord, la banque a accepté de consentir un prêt amortissable de 135 000 euros pour rembourser partiellement le prêt relais, les époux [P] s'engageant à solder le reliquat par un apport personnel de 58 084,25 euros.

S'agissant du prêt de 25 000 euros, la banque a accepté de procéder à son rachat par un prêt à taux zéro et au remboursement des intérêts et frais perçus.

En contrepartie de ces engagements, les époux [P] renonçaient à toute action amiable ou judiciaire à l'encontre de la Caisse d'Epargne.

A l'appui de leur demande de nullité, les époux [P] exposent que cette transaction a été obtenue par dol.

Si les époux [P] font valoir que ce protocole leur a été imposé par la banque il sera relevé qu'il a été conclu à la suite d'un courrier qu'ils avaient adressé au responsable contentieux de la Caisse d'Epargne le 16 mars 2013 en suite d'un entretien du 13 mars 2013 et dans lequel ils sollicitaient la communication du contrat de prêt de 25 000 euros qui 'aurait' été souscrit avant d'étudier la proposition de renégociation de l'ensemble de leurs prêts. Ils précisaient à cette occasion être assistés dans leur démarche par la délégation de l'association française des usagers des banques.

Il ressort par ailleurs d'un courrier adressé à la Caisse d'Epargne le 16 avril 2013 par un conciliateur de justice que les époux [P] avaient saisi ce dernier relativement à des opérations préjudiciables réalisées par un conseiller de la banque qui concernent un prêt relais inutile et des assurances vies souscrites sans leur accord.

Dans un courrier du 11 avril 2013, M. [P] faisait part à la Caisse d'Epargne de son mécontentement relativement aux agissements de leur conseiller bancaire 'qui a fait n'importe quoi' sur leur compte et pour lesquels il demandait à la banque de 'trouver une solution'.

Il en ressort que le protocole a été conclu à la suite de la dénonciation par les époux [P] d'irrégularités dans la tenue de leur compte qu'ils avaient eux-même identifiées et conformément à leurs voeux d'y voir apporter une solution d'ensemble.

En outre les époux [P] avaient recueillis des conseils et apparaissaient dès lors à même d'apprécier l'opportunité de signer ou non les termes de l'accord qui leur était proposé par la banque. Ils ne justifient pas de ce que les circonstances de la signature aient été telles qu'elles auraient été de nature à altérer la validité de leur consentement étant relevé en outre qu'ils ont exécuté les termes de l'accord sans réserve.

En considération de ces éléments, les époux [P] ne justifient pas que leur consentement a été surpris par dol.

Le rapport d'expertise graphologique établi le 26 juin 2013 conclut que ni le bordereau d'ouverture de compte sur livret B du 26 novembre 2011, ni le verso du chèque de la SCP [B] du 24 novembre 2011 ni la demande d'adhésion au contrat Nuances privilège du 2 décembre 2011, ne sont signés de la main de M ou Mme [P].

Les époux [P] sont constants dans leurs dénégations de signature et il sera retenu que ces pièces portent des signatures falsifiées.

La Caisse d'Epargne fait valoir à juste titre qu'il est de principe que la transaction établie sur un titre ultérieurement reconnu faux est nulle pour défaut de cause à moins que les parties n'aient expressément traité de cette nullité.

Or il sera constaté que le protocole transactionnel conclu le 25 juin 2013, ne porte que sur l'état d'impayé du prêt relais conclu le 18 janvier 2012, la régularisation de la mise en place sans l'accord des époux [P] d'un emprunt de 25 000 euros et le remboursement de frais. Il en résulte que cette transaction n'a pas été établie sur l'un des titres reconnu comme faux de sorte qu'elle ne saurait être annulée de ce chef. Il apparaît en outre que protocole traite expressément de la nullité du prêt de 25 000 euros.

Contrairement aux affirmations des époux [P], la transaction comporte des concessions de la banque en ce que cette dernière a accepté de consentir aux époux [P] un emprunt amortissable postérieurement à l'échéance du prêt relais ce à quoi elle n'était aucunement tenue et auquel elle se refusait jusqu'alors.

Les époux [P] ne sauraient utilement invoquer avoir conclu le protocole sous une contrainte économique leur permettant de solliciter son annulation pour violence du seul fait qu'ils ont été mis en demeure de régulariser les sommes dues au titre du prêt relais. Il apparaît en effet qu'ils ont eux-même renoncé à la mise en vente du bien devant permettre d'apurer le prêt relais pour le mettre en location se privant ainsi volontairement des capitaux destinés à rembourser le prêt relais alors que la banque n'était pas tenue de leur consentir un prêt amortissable sur leur simple demande et pouvait légitimement les mettre en demeure d'exécuter leur engagement.

Les époux [P] ne sauraient enfin prétendre à l'annulation de la transaction au motif d'un manquement à un devoir d'information qui ne pourrait leur ouvrir droit qu'à une indemnisation, au titre d'une perte de chance de ne pas conclure le protocole querellé.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il débouté les époux [P] de leurs demandes en annulation du protocole transactionnel.

La Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire est en conséquence recevable en sa réclamation au titre des causes impayées de l'emprunt consenti le 23 septembre 2013.

Pour débouter la banque de sa demande en paiement, le premier juge a relevé que si le prêteur justifiait de la notification des mises en demeure de régler les échéances impayées le 21 septembre 2018, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire ne justifiait pas de la notification des courriers du 23 octobre 2018 par lesquels elle a notifié la déchéance du terme des contrats.

En cause d'appel, le prêteur produit les accusés de réception en date du 24 octobre 2018 des lettres de la notification de la déchéance du terme du prêt.

Il apparaît ainsi que la banque justifie avoir régulièrement prononcé et notifié la déchéance du terme du prêt à la suite d'une vaine mise en demeure de régulariser les échéances impayées.

Au vu des termes du contrat, du tableau d'amortissement et du décompte de créance, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire est fondée en sa réclamation du paiement de sommes suivantes arrêtées au 23 octobre 2018 au titre des échéances échues impayées, capital restant du intérêts de retard et indemnité de défaillance réclamée pour la somme de 136 497,09 euros.

Les époux [P] seront condamnés au paiement de cette somme le jugement étant infirmé à ce titre.

Sur les prêts n° 0507819 et 0507820 consentis le 3 septembre 2003 :

La Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire demande la confirmation du jugement en ce qu'il a constaté que les époux [P] ne justifient pas du règlement de ces emprunts.

Elle sollicite l'autorisation de procéder à la reprise des échéances du prêt n° 0507819 et le remboursement de la somme de 36 291,90 euros correspondant à la provision qu'elle a été contrainte de verser aux époux [P] en exécution d'une ordonnance de référé du 12 mars 2015.

Les époux [P] demandent de constater que ces prêts ont été remboursés à la Caisse d'Epargne au mois de novembre 2011 et sollicitent le rejet des demandes de la banque et sa condamnation à les indemniser de leurs préjudices.

S'agissant du remboursement des prêts, il est constant que suite à la vente de l'immeuble financé le 24 novembre 2011 pour la somme de 244 000 euros le notaire a adressé à la Caisse d'Epargne, créancier hypothécaire, un chèque d'un montant de 116 678,48 euros et a procédé à un virement d'une somme de 126 646,52 euros sur le compte n° [XXXXXXXXXX03] des époux [P].

Il ressort des relevés de compte produits par la banque que le chèque libellé à l'ordre de la Caisse d'Epargne n'a pas été encaissé par cette dernière mais a été porté le 26 novembre 2011 au crédit d'un compte n° [XXXXXXXXXX01] ouvert au nom de M. [C] [P].

Le rapport d'expertise a mis en évidence que c'est sur la base d'une fausse signature d'endossement attribuée à M. [P] que le chèque établi au bénéfice de la Caisse d'Epargne a été porté au crédit d'un compte qui lui même avait été ouvert au nom de M. [P] sur la foi d'une fausse signature.

S'agissant d'opérations réalisées sur la base de fausses signatures la Banque ne saurait se prévaloir de ce que le changement de destination des fonds a été effectué à la demande des époux [P] et aux fins de bénéficier d'un placement.

S'il apparaît que postérieurement à l'encaissement du chèque, les échéances des prêts ont continué à être prélevées sur leur compte et que les emprunteurs ont bénéficié d'une prise en charge de l'assurance, ces événements sont postérieurs à l'encaissement du chèque et ne permettent aucunement d'établir que ces opérations réalisées sur la base de fausses signatures correspondaient à un changement de destination des fonds souhaité par les emprunteurs.

Il sera par ailleurs constaté que les relevés du compte n°[XXXXXXXXXX01] font apparaître qu'outre l'encaissement du chèque du notaire de 116 678,48 euros, plusieurs opérations de virement au crédit pour une somme totale de 251 000 euros ont été réalisées antérieurement à la souscription du contrat Nuance privilège à hauteur de la somme de 151 000 euros.

Dès lors, il n'est aucunement établi que les sommes perçues par les époux [P] à l'occasion du rachat du contrat Nuance privilège au mois de juillet 2013 devaient être considérées comme intégrant la somme de 116 678,48 euros destinée au remboursement des emprunts et il ne saurait leur être opposé de ne pas avoir procédé au remboursement anticipé des emprunts à cette occasion.

Il est suffisamment établi que le chèque a été adressé par le notaire à la demande des parties à l'acte de vente aux fins de solder les deux prêts n° 0507819 et 0507820 et pouvoir ainsi procéder à la mainlevée de l'hypothèque grevant l'immeuble vendu. Il en résulte que la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire ne pouvant se prévaloir d'une modification licite de l'objet de ce paiement, n'est plus fondée à se prévaloir de ces contrats de prêts qui sont soldés depuis le 24 novembre 2011.

C'est en conséquence à juste titre que les époux [P] s'opposent à tout paiement en exécution de ces contrats et ont obtenu en référé la restitution à titre de provision des sommes versées postérieurement au 24 novembre 2011.

La Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire sera déboutée de sa demande de reprise des échéances et restitution des provisions versées le jugement étant infirmé de ces chefs.

Sur les pertes financières

Sur l'indemnisation des pertes subies en suite d'un placement non autorisé :

Les époux [P] exposent que le 17 décembre 2011, une somme de 14 999,06 euros a été débitée de leur compte aux fins de placement sur un compte titre alors qu'ils indiquent n'avoir jamais approuvé cette opération.

Ils font valoir qu'ils n'ont pu obtenir la revente de ces titres que le 2 mai 2012 pour une somme de 14 685,50 euros et demandent à être indemnisés de la différence soit la somme de 313,56 euros.

Ils produisent à l'appui de leur demande les avis d'opéré dont ils ont été destinataires.

La banque ne justifiant pas que cette opération avait été réalisée sur la demande des époux [P], ces derniers sont fondés à solliciter l'indemnisation de leur perte et il sera fait droit à leur demande d'indemnité à ce titre.

Sur le surplus des pertes financières :

Les époux [P] sollicitent le paiement d'une somme de 344 260,91 euros au titre des pertes financières qu'ils affirment avoir subi par suite d'opérations sur leur compte faisant valoir que les relevés font apparaître de multiples opérations de 'virement interne' incompréhensibles.

Se fondant sur les falsifications ayant pu être établies par l'expertise des signatures et sur une analyse des opérations sur leur compte réalisée par un conseiller en entreprise qui a relevé des écarts entre les entrées et sorties, ils sollicitent qu'il soit fait droit à leur demande en paiement d'une somme de 344 260,91 euros à ce titre.

Ils formulent subsidiairement une demande d'expertise comptable.

Le fait que l'expertise des signatures ait établi le caractère falsifié de certaines pièces ne saurait avoir effet au delà des pièces effectivement soumises à la mesure d'investigation. Il a été statué sur les conséquences des nullités encourues relativement au remboursement anticipé des prêts n° 0507819 et 0507820 auquel il a été donné effet. Ils ont obtenu la restitution des sommes prélevées par l'octroi d'une provision.

Le protocole transactionnel conclu entre les parties a traité des conséquences de la nullité de la souscription du contrat Nuance privilège, les époux [P] ayant renoncé à toutes actions à ce titre. S'agissant de l'ouverture du compte livret B n° [XXXXXXXXXX01] elle n'emporte par elle-même aucune perte financière.

Pour le surplus, le rapport produit aux débats par les époux [P] relève l'impossibilité de retracer certaines opérations réalisées sur leur compte. Il ne saurait cependant en être déduit un caractère frauduleux ou suspect de l'ensemble des opérations listées.

Il sera rappelé que les époux [P] ont la charge de la preuve du préjudice dont ils demandent réparation et qu'ils disposent de leur relevés de compte retraçant l'ensemble des opérations. Ils sont dès lors parfaitement en mesure d'indiquer quelles sont les opérations dont ils contestent être les auteurs permettant à la banque de fournir les éléments propres à les justifier et le cas échéant de représenter les fonds et ce sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure d'expertise.

Il convient à cet égard de relever que les époux [P] ont été en mesure de contester les conditions d'octroi du prêt de 25 000 euros du mois de mai 2012 et de contester utilement le placement effectué le 17 décembre 2011.

Les époux [P] ne font pas la preuve d'autres préjudices résultant de prélèvements injustifiés autres que ceux dont ils ont obtenu restitution et il seront déboutés de leurs demandes sans qu'il y ait lieu de faire droit à leur demande d'expertise.

Sur la demande au titre de la résiliation d'un placement retraite :

Les époux [P] sollicitent le paiement d'une somme de 2 440,21 euros au titre d'un rachat en mars 2013 d'un plan d'épargne retraite souscrit par Mme [P] faisant valoir qu'ils ont été contraints de procéder au rachat de contrat par suite des difficultés financières imputables aux agissements de la banque.

Si les époux [P] justifient que leur compte ouvert dans les livres de la Caisse d'Epargne était débiteur d'une somme de 7 213,54 euros à la date du 1er mars 2013, ce seul élément est insuffisant à faire la démonstration de ce que le rachat du contrat d'assurance était la conséquence d'un impératif économique consécutif à des difficultés financières imputables à la banque alors même que le fonctionnement de leur compte a régulièrement présenté des situations de débit supérieures à celle existant à la date du rachat.

Ils seront déboutés de leurs demandes à ce titre.

Sur le préjudice économique et le préjudice moral :

Les époux [P] exposent que les interventions réalisées sur leur compte sans autorisation les ont placés dans une situation financière difficile qui les a conduit à différer l'ouverture du nouvel établissement professionnel de M. [P] qui n'a été effectif qu'au mois d'avril 2014 par suite d'une insuffisance de trésorerie imputable à la banque. Il conviendra cependant de relever qu'il n'est pas justifié du montant des sommes effectivement investies. Il n'est pas établi en quoi, la situation financière du couple était de nature à faire obstacle à l'ouverture d'un nouvel établissement professionnel. Sur ce point, s'il apparaît que la souscription du contrat Nuance privilège n'est pas intervenue sur la base d'une signature authentique, il demeure que les fonds ont été placés à leur nom et qu'ils étaient en tant que de besoin à même de procéder au rachat de ce placement antérieurement à la conclusion du protocole du 25 juin 2013.

Si les époux [P] produisent des attestations de proches attestant les avoir aidés financièrement au cours des années 2012/2013, ces attestations ne sont aucunement circonstanciées quant aux montants et moyens de cette assistance. Les relevés de compte produits aux débats font également apparaître que le compte des époux [P] fonctionnait régulièrement à découvert. Il n'en résulte pas la démonstration de ce que cette situation ait par elle-même placé les époux [P] dans une situation difficile dans la mesure où ces découverts ont été régulièrement couverts et que ces relevés ne font pas apparaître d'incidents de paiement relevés par la banque.

Les époux [P] seront déboutés de leurs demandes au titre d'un préjudice économique sans qu'il y ait lieu de faire droit à leur demande d'expertise.

Il est en revanche établi au vu du rapport d'expertise des signatures que des opérations bancaires ont été réalisées sur les comptes ouverts dans les livres de la Caisse d'Epargne au nom des époux [P] au moyen de signatures falsifiées.

Au regard de la confiance qu'un client doit pouvoir légitimement placer dans son établissement bancaire, la découverte par les époux [P] de l'existence d'opérations réalisées au sein de la banque à leur insu et sur la base de signatures falsifiées est à l'origine d'un préjudice moral dont ils sont fondés à obtenir réparation et qui sera justement et complètement réparé par l'allocation d'une somme de 2 000 euros à chacun des titulaires.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive :

L'action des époux [P] étant partiellement fondée ne saurait être considérée comme abusive et la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur les demandes accessoires :

Partie succombante, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise.

La Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire sera également condamnée à payer aux époux [P] une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 11 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Nantes en ce qu'il a :

- débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande de condamnation solidaire de M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] au paiement de la somme de 136 497,09 euros en remboursement du prêt notarié du 23 septembre 2013 offre de prêt primo Plus n°8434308 demeuré impayé,

- condamné solidairement M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire la somme de 36 291,90 euros correspondant à la provision acquittée en exécution de l'ordonnance de référé du 23 avril 2015,

- autorisé la Caisse d'épargne et de prévoyance Bretagne Pays de Loire à prélever sur le compte de M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] conformément aux stipulations contractuelles du prêt n° 0507820 Pas Primo conclu le 3 septembre 2003 les mensualités dont M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] sont solidairement tenus,

Statuant à nouveau sur ces chefs infirmés

Condamne solidairement M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire la somme de 136 497,09 euros en remboursement du prêt notarié du 23 septembre 2013

Dit que les prêts n° 0507819 et 0507820 conclus le 3 septembre 2003 par M. [C] [P] et Mme [K] [V] épouse [P] ont été soldés le 24 novembre 2011.

Déboute la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande tendant à être autorisée à reprendre le prélèvement des échéances sur les prêts n° 0507819 et 0507820

Déboute la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire de sa demande en remboursement de la provision de 36 291,90 euros correspondant à la provision acquittée en exécution de l'ordonnance de référé du 23 avril 2015.

Confirme le jugement pour le surplus sauf en ses dispositions relatives aux dépens.

Y ajoutant

Condamne la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire à payer à M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] la somme de 313,56 euros au titre des pertes consécutives à l'achat de titre sans ordre et ce avec intérêts au taux légal et capitalisation à compter de l'assignation.

Condamne la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire à payer à M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] la somme de 2 000 euros à chacun en réparation de leur préjudice moral

Condamne la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise.

Condamne la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Bretagne Pays de Loire à payer à M. [C] [P] et de Mme [K] [V] épouse [P] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/06260
Date de la décision : 04/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-04;21.06260 ?
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