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04/06/2024 | FRANCE | N°21/04989

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 04 juin 2024, 21/04989


1ère Chambre





ARRÊT N°172



N° RG 21/04989

N° Portalis

DBVL-V-B7F-R43G



(Réf 1ère instance : 19/00498)









M. [F] [I]

Mme [P] [X] épouse [I]



C/



M. [L] [Z]

Mme [U] [M] épouse [Z]









Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 4 JUIN 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et...

1ère Chambre

ARRÊT N°172

N° RG 21/04989

N° Portalis

DBVL-V-B7F-R43G

(Réf 1ère instance : 19/00498)

M. [F] [I]

Mme [P] [X] épouse [I]

C/

M. [L] [Z]

Mme [U] [M] épouse [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 4 JUIN 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 19 février 2024 devant Monsieur Philippe BRICOGNE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 juin 2024 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré annoncé au 7 mai 2024 à l'issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [F] [I]

né le 24 Juillet 1951 à [Localité 8] (07)

[Adresse 5]

[Localité 4]

Madame [P] [I] née [X]

née le 20 Octobre 1951 à [Localité 10]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentés par Me Benoît BOMMELAER de la SELARL Cornet-Vincent-Ségurel, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Monsieur [L] [Z]

né le 08 Février 1982 à [Localité 9] (49)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Madame [U] [M] épouse [Z]

née le 19 Septembre 1971 à [Localité 9] (49)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentés par Me Cyril DUBREIL de la SCP OUEST AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de NANTES

EXPOSÉ DU LITIGE

1. Le 6 mai 1961, les consorts [C] ont procédé à la division de leur propriété du Croisic en quatre lots desservis par un passage commun.

2. Le 3 avril 1964, un lotissement a été autorisé sur ces lots.

3. Finalement, les consorts [C] ont redistribué les parcelles précédemment divisées en huit lots en 1965.

4. Il a été stipulé que les lots 3, 4, 5, 6, 7 et 8 du lotissement seraient desservis par un passage commun de 540 m², cadastré [Cadastre 2]p de la section C, sur lequel les titulaires de ces lots seront en indivision forcée.

5. La parcelle constituant le chemin commun est aujourd'hui cadastrée AO [Cadastre 3].

6. M. [F] [I] et Mme [P] [X] épouse [I] (les époux [I]) ont acquis le lot n° 3 (AO 91) de ce lotissement le 30 juin 2008. Ce lot comprend le 1/6ème de la parcelle AO [Cadastre 3] constituant le passage commun.

7. M. [L] [Z] et Mme [U] [M] épouse [Z] (les époux [Z]) ont acquis le lot n° 8 (AO [Cadastre 6]) du même lotissement le 28 juin 2017. Ce lot comprend le 1/6ème de la parcelle AO [Cadastre 3] constituant le passage commun et la propriété de la parcelle AO [Cadastre 6].

8. Les époux [Z] ont effectué des démarches pour clôturer leur propriété selon les limites de leur acte de propriété.

9. Les époux [I] s'y sont opposés, en faisant valoir que la clôture envisagée porte atteinte à leurs droits indivis de propriété sur le chemin desservant leur propriété.

10. Par acte d'huissier du 23 novembre 2018, les époux [I] ont fait assigner les époux [Z] devant le tribunal de grande instance de Saint-Nazaire aux fins de voir juger qu'ils ont acquis la propriété de droits indivis à hauteur de 1/ 6ème dans la portion de l'aire de retournement du lotissement Penn Castel située à l'intérieur de la parcelle cadastrée section AO [Cadastre 6] [Adresse 12] par usucapion et de voir ordonner aux époux [Z] de faire cesser toute atteinte à leur droit de propriété indivise et de faire procéder à toutes formalités pour reconnaître leurs droits sur cette partie du chemin litigieux.

11. Par jugement du 1er avril 2021, le tribunal a :

- dit les époux [I] recevables en leurs demandes,

- débouté les époux [I] de toutes leurs demandes,

- condamné les époux [I] aux dépens de l'instance,

- condamné les époux [I] à verser aux époux [Z] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

12. Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu le caractère conservatoire de l'action des époux [I] qui rend recevable leur revendication d'une propriété indivise mais aussi le caractère équivoque de l'acte matériel par lequel ils entendent établir l'acte originel de possession de la partie litigieuse de la parcelle AO [Cadastre 6] à titre de propriété indivise par l'ensemble des copropriétaires du chemin commun, les demandeurs ne justifiant pas d'actes de possession matérielle, ni de leur part, ni de la part de leurs auteurs, sur la partie litigieuse de la parcelle AO [Cadastre 6] sur laquelle ils revendiquent des droits de propriété indivis depuis la réalisation de la voirie en 1968.

13. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Rennes du 30 juillet 2021, les époux [I] ont interjeté appel de cette décision.

* * * * *

14. Dans leurs dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 13 avril 2022, les époux [I] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il jugé qu'ils étaient recevables à agir,

- pour le surplus,

- infirmer le jugement,

- en conséquence,

- juger que l'aire commune de retournement du lotissement [Adresse 11] dont les propriétaires des lots n° 3 à 8 inclus sont propriétaires indivis de façon perpétuelle par titre, depuis 1965, a pour assiette depuis 1965 et au plus tard 1968 une partie de la parcelle actuellement cadastrée section AO [Cadastre 6] [Adresse 12],

- juger qu'ils sont donc propriétaires par titre, et en tant que de besoin par usucapion, de droits indivis à hauteur de 1/6ème de l'aire de retournement du lotissement Pen Castel, telle qu'elle a été aménagée par les colotis dès 1965, et par voie de conséquence de la portion de ladite aire de retournement située à l'intérieur de la parcelle cadastrée section AO [Cadastre 6] [Adresse 12],

- en conséquence,

- faire interdiction aux époux [Z], sous astreinte de 5.000 € par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt, de réaliser quelque aménagement que ce soit dans l'aire commune de retournement située à l'intérieur de la parcelle cadastrée AO [Cadastre 6] [Adresse 12], et également de stationner à l'intérieur de celle-ci,

- désigner tel notaire qu'il plaira aux requérants avec pour mission d'effectuer toutes les démarches consécutives à la revendication de la bande de terrain litigieuse, en ce compris les formalités de publicité foncière, étant précisé que ce notaire pourra s'adjoindre un géomètre expert aux fins notamment d'établir un nouveau plan masse du lotissement,

- juger que les frais de notaire, de publicité et de géomètre-expert seront supportés par moitié par les époux [Z],

- condamner les époux [Z] à remettre en état l'aire commune de retournement du lotissement située à l'intérieur de la parcelle cadastrée section AO [Cadastre 6], [Adresse 12], dans son état initial soit notamment :

* remise en l'état initial de la buse de ruissellement des eaux de pluie,

* suppression de tous les obstacles placés sur l'aire commune (haies, murets, poteau de basket, déchets divers '.),

* suppression du système électronique de surveillance de l'aire commune,

* restitution de l'aire gravitaire entourant la buse de ruissellement des eaux de pluie de l'aire commune,

* réfection complète du trottoir et de l'empierrement de la route (avec gravillonnage),

* suppression du ou des regard(s) situé(s) sur l'aire commune,

* enlèvement du ou des canalisation(s) enfouies depuis 2017,

et ce, sous astreinte de 300 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt, étant précisé que ces travaux devront être justifiés par la production de factures acquittées d'entreprises spécialisées dans ce type de travaux,

- condamner solidairement les époux [Z] à leur payer la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les époux [Z] en tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par la SELARL d'avocats interbarreaux (Nantes - Paris - Rennes - Lille - Bordeaux - Lyon) Cornet-Vincent-Ségurel (C.V.S. - Me Benoît Bommelaer), avocats aux offres de droit.

15. À l'appui de leurs prétentions, les époux [I] font en effet valoir :

- qu'ils sont recevables à agir en leur qualité de propriétaires indivis du passage commun,

- que des indivisaires, et donc plusieurs possesseurs, peuvent prescrire un bien,

- que le passage commun et l'aire de retournement tels qu'ils existent aujourd'hui, ont été aménagés entre 1965 et 1968, aux frais des 6 colotis,

- que l'aire commune de retournement du lotissement, située dans le prolongement du chemin commun du lotissement, a pour assiette une partie de la parcelle AO [Cadastre 6], le cadastre figurant cette aire,

- que, conformément à ce qui avait été prévu à l'origine, le passage commun et son aire de retournement, en ce compris la partie située dans la parcelle cadastrée AO [Cadastre 6], ont été aménagés avec un revêtement de type ' bicouche ' et sont bordés d'un trottoir, signes extérieurs, avec la buse destinée à recevoir les eaux de ruissellement du lotissement, parfaitement visibles et continus depuis plus de trente ans,

- que cette buse était prévue dans le programme de travaux du lotissement et devait être réalisée dans le cadre des travaux de voirie, lesquels ont été effectués en 1968,

- que le stationnement ponctuel de quelques véhicules légers, simplement tolérés par les autres colotis, ne fait pas obstacle au passage et au retournement des autres véhicules,

- que les époux [Z] sont incapables de rapporter la preuve de ce qu'ils seraient propriétaires à titre privatif et exclusif de la portion de terrain, objet du litige, leur titre de propriété étant insuffisant à cet égard, tout comme les énonciations cadastrales et le plan de masse dont ils font état.

* * * * *

16. Dans leurs dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 18 janvier 2022, les époux [Z] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit les époux [I] recevables en leur demande,

- statuant à nouveau,

- déclarer les époux [I] irrecevables en leur action,

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

- y ajoutant,

- condamner les époux [I] à leur payer la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les époux [I] aux entiers dépens.

17. À l'appui de leurs prétentions, les époux [Z] font en effet valoir :

- que les époux [I] ne peuvent prétendre agir au nom et pour le compte de l'indivision alors qu'ils assignent un indivisaire,

- que le programme de travaux du lotissement prévoyant un rond-point a été abandonné,

- que les actes accomplis par un indivisaire sont équivoques sauf s'ils expriment manifestement l'intention de leur auteur de se comporter comme seul et unique propriétaire du bien indivis,

- que le seul acte matériel de possession réside en la création de la voirie en 1965, qui n'a plus été entretenue depuis,

- que leurs vendeurs, les époux [C], ont installé sur la portion litigieuse la buse, qu'ils entretiennent, afin de pallier les problèmes d'évacuation devant leur maison,

- que les époux [I] n'ont jamais eu l'utilité de cette aire de retournement puisqu'ils disposent d'un accès direct à la voie publique,

- que cet espace a pu notamment servir d'aire de stationnement, notamment par les époux [I] eux-mêmes, la simple tolérance n'ayant pu dégénérer en droit,

- que la surface dont les époux [I] sont propriétaires indivis de 554 m² n'inclut pas l'aire revendiquée leur appartenant.

* * * * *

18. L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2024.

19. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'action en revendication

20. L'article 815-2 du code civil dispose en son 1er alinéa que 'tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence'.

21. L'action par laquelle est revendiquée la propriété indivise d'une parcelle, ayant pour objet la conservation des droits des indivisaires, entre dans la catégorie des actes conservatoires que tout indivisaire peut accomplir seul.

22. En l'espèce, les époux [I], qui ont acquis le lot n° 3 du lotissement Pen Castel le 30 juin 2008 (acte rectifié le 10 octobre 2018), lequel comprend le 1/6ème en indivision forcée de la parcelle AO [Cadastre 3] constituant le passage commun, sont recevables à revendiquer, au-delà de l'assiette de ce passage, la propriété indivise par prescription de l'aire de retournement pour laquelle les époux [Z], qui indiquent en être seuls propriétaires, doivent être considérés comme des tiers à l'indivision.

23. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré les époux [I] recevables à agir.

Sur le bien-fondé de l'action en revendication

24. L'article 2261 du code civil dispose que, 'pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire'.

25. Aux termes de l'article 2262, 'les actes de pure faculté et ceux de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni prescription'.

26. L'article 2272 prévoit en son 1er alinéa que 'le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans'.

27. En l'espèce, en agissant en revendication de propriété par prescription trentenaire, les époux [I] admettent implicitement que l'aire de retournement litigieuse ne figure pas dans l'assiette de la parcelle AO [Cadastre 3] constituant le passage commun indivis et donnée, en vertu de leur titre, pour 540 m².

28. D'ailleurs, le cadastre et le plan de masse indiquent clairement que la zone revendiquée se trouve sur la parcelle AO [Cadastre 6], propriété des époux [Z], laquelle est mentionnée pour 784 m² dans leur titre. Ce point est encore confirmé par le plan du lotissement ('propriété [C]') : la parcelle AO [Cadastre 6] était auparavant constituée du 'lot n° 4 de la première division' (acte du 5 janvier 1961, propriété de M. [R] [C], époux de Mme [D] [S], auteur des époux [Z]) et la 'voirie' (passage commun) n'y empiète pas sur l'actuel lot AO [Cadastre 6].

29. La contenance de 784 m² est reprise dans l'acte notarié de création du lotissement en 1965. Il y est indiqué que cette superficie procède d'un arpentage et que ce lot joint 'au nord et à l'est la fédération des Elèves des Ecoles publiques d'Eure et Loir, au sud M. [J] et à l'ouest le lot n° 7 et la voie paraissant cadastrée section C n° [Cadastre 2]p'. Il n'y a donc aucun doute que la portion de terrain revendiquée se trouve sur la parcelle appartenant époux [Z].

30. À ce sujet, il convient de noter que, si l'acte de propriété des époux [Z] mentionne la même superficie de 540 m² pour le passage commun, il rappelle que ce passage, jadis identifié sous le n°213p de la section C, est donné pour deux superficies différentes dans un acte de dépôt de pièces du 5 janvier 1961 (600 m²) et dans un acte de dépôt de pièces du 10 août 1965 (550 m²).

31. Quoi qu'il en soit, si l'aménagement de la voirie qui prévoyait un rond-point de 15 mètres de largeur dans l'acte de 1961 a été annulé pour prévoir une voirie constituée d'un chemin d'une emprise de 6 mètres, dont 4 mètres de chaussée, il ressort des photographies et des différents constats d'huissier versés aux débats, notamment celui du 11 août 2015, que les travaux de voirie de 1965 ou 1968 sur le lotissement ont inclus une partie de la parcelle AO [Cadastre 6], en contradiction avec les prévisions des actes de 1961 et de 1965. Les trottoirs ont notamment été réalisés en bordure des maisons des parcelles AO [Cadastre 7] et AO [Cadastre 6] et rien ne distingue la voie constituant le chemin commun sur l'emprise prévue à l'origine de sa prolongation sur la parcelle AO [Cadastre 6]. Cette situation peut s'expliquer par une forme de continuité en l'absence de toute clôture.

32. Si la date de l'installation d'une buse destinée à recevoir les eaux de ruissellement de la rue sur la parcelle AO [Cadastre 6] n'est pas définie (un additif de la commune du 10 août 1965 mentionne toutefois cette installation à l'occasion du programme de travaux portant sur la création de la voirie), elle est conforme à l'acte de création du lotissement de 1965 qui la prévoyait pour dérouter les eaux de ruissellement vers le fossé.

33. À suivre la thèse développée par les époux [I], l'occupation des époux [Z] et de leurs auteurs sur cette portion de la parcelle AO [Cadastre 6] constitutive de l'aire de retournement pouvait procéder tant de leur statut de propriétaires privatifs que de celui de propriétaires indivis du passage commun. Il leur était loisible de clore ou pas leur fonds, le litige étant né précisément quand les époux [Z] ont effectué des démarches pour clôturer leur propriété (déclaration préalable du 9 mars 2018). C'est toutefois de façon inopérante que les premiers juges, pour rejeter l'action en revendication fondée sur la prescription, ont relevé le caractère équivoque de la situation des époux [Z] alors que c'est la possession de celui qui dit avoir prescrit qui ne doit souffrir d'aucune équivoque.

34. En toute hypothèse, les époux [I] ne justifient pas d'actes de possession matérielle sur la partie litigieuse de la parcelle AO [Cadastre 6] sur laquelle ils revendiquent des droits de propriété indivis depuis la réalisation de la voirie en 1968.

35. En effet, les attestations qu'ils versent au débat (M. [Y], M. et Mme [G]) mentionnent essentiellement l'usage de cette partie de voirie litigieuse par des commerçants ou des véhicules de service public, mais pas par les co-indivisaires du chemin. Cette commodité d'usage a pu être simplement tolérée par les propriétaires de la parcelle AO [Cadastre 6]. Les époux [I] ne prouvent pas que leurs auteurs ont accompli des actes de possession sur cette parcelle litigieuse depuis l'aménagement de la voirie ni en avoir accompli eux-mêmes, par exemple en entretenant la voirie.

36. Par ailleurs, M. [T] et Mme [A], qui sont propriétaires indivis du passage commun (parcelle AO [Cadastre 3]) et qui avaient certes un temps mandaté le même avocat que les époux [I] pour se plaindre auprès de Mme [C] de la clôture projetée par ses acquéreurs pressentis les époux [Z], attestent qu'ils n'utilisent pas le fond de l'impasse comme voie de retournement.

37. Différentes photographies, notamment une prise en 1969 et une photographie satellite de 2018, mais aussi les procès-verbaux de constat d'huissier établis le 11 août 2015 et le 15 janvier 2019 montrent que les occupants de la parcelle AO [Cadastre 6] (comme d'ailleurs ceux de la parcelle voisine AO [Cadastre 7]) garent depuis l'origine leurs véhicules devant la maison construite sur cette parcelle, sur la partie de la voirie revendiquée, niant à cette impasse la fonction de retournement qui a pu y être à l'origine assignée.

38. Les époux [I] échouent donc à caractériser une possession paisible, continue, publique et non équivoque, à titre de propriétaires même seulement indivis, pendant trente ans, de la portion de la parcelle AO [Cadastre 6].

39. Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les dépens

40. Les époux [I], partie perdante, seront condamnés aux dépens d'appel.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

41. L'équité commande de faire bénéficier les époux [Z] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 2.000 €.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Saint-Nazaire du 1er avril 2021 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [F] [I] et Mme [P] [X] épouse [I] aux dépens d'appel,

Condamne in solidum M. [F] [I] et Mme [P] [X] épouse [I] à payer à M. [L] [Z] et Mme [U] [M] épouse [Z] ensemble la somme de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/04989
Date de la décision : 04/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-04;21.04989 ?
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