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26/05/2024 | FRANCE | N°24/00215

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 26 mai 2024, 24/00215


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 2024/92

N° RG 24/00215 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UZ2G



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





O R D O N N A N C E



articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile



Nous, Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'a

sile, assisté de Philippe LE BOUDEC, greffier,





Statuant sur l'appel formé le 26 Mai 2024 à 11h10 par Monsieur le Préfet de l'Orne, d...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 2024/92

N° RG 24/00215 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UZ2G

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Nous, Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Philippe LE BOUDEC, greffier,

Statuant sur l'appel formé le 26 Mai 2024 à 11h10 par Monsieur le Préfet de l'Orne, dans l'affaire concernant :

M. [K] [T]

né le 17 juin 2002 à [Localité 2] (Tunisie)

de nationalité Tunisienne

ayant pour avocat Me Léo-Paul BERTHAUT, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 25 Mai 2024 à 17h15 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiaire de RENNES qui a constaté l'irrégularité de la procédure, dit n'y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de l'intéressé et a mis fin à la rétention administrative de M. [K] [T] ;

En l'absence de représentant du préfet de ORNE, dûment convoqué,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, ayant fait connaitre son avis par voie électronique à 16h35, lequel a été mis à disposition des parties,

En l'absence de [K] [T], représenté par Me Léo-Paul BERTHAUT, avocat, ce dernier ayant communiqué à 16h18 par voie électronique ses observations, lesquelles ont été mises à disposition des parties,

Après avoir entendu en audience publique le 26 Mai 2024 à 18 H 00 Maitre Léo-Paul BERTHAUT, avocat au barreau de RENNES, conseil de M. [K] [T], en ses observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et le 26 Mai 2024 à 18h30, avons statué comme suit :

[K] [T] a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français, sans délai pris le 6 juillet 2022 par le préfet de Seine-Maritime.

Par arrêté du 9 octobre 2023, le préfet de L'Orne a fait obligation à [K] [T] de quitter sans délai le territoire français, avec interdiction de retour pour une durée de trois ans.

[K] [T], incarcéré à compter du 6 juillet 2022, a été élargi du centre de détention d'[Localité 1] le 24 mai 2024.

Par arrêté du 24 mai 2024, il a été placé en rétention administrative par le préfet de l'Orne à l'issue de l'exécution de ses peines d'emprisonnement.

Par requête du 24 mai 2024, [K] [T] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes d'une requête en annulation de cet arrêté portant placement en rétention administrative.

Par requête du 25 mai 2024, le préfet de l'Orne a saisi le juge des libertés et de la détention de Rennes d'une demande de première prolongation de la rétention administrative de [K] [T]

Par ordonnance rendue le 25 mai 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a dit n'y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de [K] [T] et condamné le préfet de l'Orne à payer à Me Léo Paul Berthaud, conseil de l'intéressé, la somme de 400 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Cette décision a été notifiée à [K] [T] le 25 mai 2024 à 20 heures.

Le 26 mai 2024 à 11 heures 10, Monsieur le Préfet de l'Orne a interjeté appel de cette décision rendue le 25 mai 2024 à 17 heures 15.

Le préfet de l'Orne, appelant, fait valoir, au soutien de sa demande d'infirmation de la décision entreprise, les moyens suivants :

- [K] [T] est dépourvu de documents de voyage et d'identité en cours de validité, de sorte qu'une demande de laissez-passer consulaire est essentielle afin de permettre son éloignement ;

- depuis le 12 octobre 2023, les autorités consulaires tunisiennes ont été saisies et le 2 février 2024, celles-ci ont fait savoir qu'elles avaient transmis ce dossier au niveau des autorités consulaires en Tunisie. Les diligences ont donc été réalisées en amont de la sortie dans des délais leur permettant de se prononcer et il a été effectué plusieurs relances.

- [K] [T] a délibérément fait obstacle à son éloignement en refusant son identification et de se présenter aux autorités consulaires tunisiennes.

- [K] [T] représente une menace grave pour l'ordre public et représente un risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement.

- il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir sollicité les pays voisins du maghreb alors que [K] [T] est détenteur d'un passeport tunisien expiré, de la copie des passeports de ses parents et d'un extrait d'acte de naissance officiel de Tunisie.

En réponse, le conseil de [K] [T] fait valoir que :

- aucune diligence tant envers la TUNISIE que vers d'autre pays limitrophes n'a été entreprise après la non-reconnaissance par la TUNISIE de Monsieur [T] en date du 26 avril 2024, soit près d'un mois avant son placement en rétention.

- dès lors, Monsieur [T] est fondé à solliciter de la Cour la confirmation de l'ordonnance rendue et la condamnation de l'Etat, pris en la personne de Monsieur le Préfet de l'ORNE à payer à son Conseil la somme de 700€ au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, moyennant la renonciation de l'avocat à percevoir l'aide juridictionnelle.

Le Procureur Général, suivant avis écrit du 26 mai 2024, s'en rapporte.

Les mémoires et avis susvisés ont été mis à disposition des parties avant l'audience.

À l'audience, le conseil de [K] [T] maintient les termes de son mémoire d'appel.

SUR QUOI,

L'appel est recevable pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.

L'article L-741-3 du CESEDA prévoit qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration exerce toute diligence à cet effet.

En l'espèce, alors que [K] [T] était encore détenu au Centre de détention d'[Localité 1] pour l'exécution de plusieurs peines d'emprisonnement, la préfecture de l'Orne a saisi les autorités consulaires tunisiennes le 12 octobre 2023, aux fins de délivrance d'un laissez-passer. Il y était joint le dossier complet de l'intéressé comprenant des photos d'identité, un procès-verbal d'audition et un relevé d'empreintes, un extrait d'acte de naissance et une copie de son passeport.

La préfecture a réitéré sa demande le 15 janvier 2024, le 21 février 2024, le 14 mars 2024 puis le 25 avril 2024 avec la réservation du routing pour le 24 mai 2024, date de son élargissement.

Dans un courrier du 2 février 2024, le consulat général de Tunisie à [Localité 3] a informé les autorités françaises que la demande d'identification de [K] [T] en vue de sa reconduite à la frontière a été transmis aux autorités compétentes en Tunisie et, le 26 avril 2024, le consulat général de Tunisie en France a fait connaître à la France que 'à la suite des recherches entreprises par les services compétents en Tunisie sur la base de ses empreintes digitales, la nationalité de l'intéressé n'a pas été établie', le contenu de ce courrier étant en contradiction avec un autre reçu le 27 septembre 2022 par l'ambassade de France en Tunisie, confirmant une note verbale du 1er septembre 2022, aux termes duquel les autorités tunisiennes avaient reconnu comme un de leurs ressortissants, [K] [T].

Il convient de souligner que [K] [T] a refusé le 6 septembre 2023 le relevé décadactylaire, ainsi que la prise de photos d'identité, et qu'il a refusé de se rendre le 12 avril 2024 au centre de rétention administrative de [Localité 4] pour une audition consulaire.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que [K] [T] a délibérément fait obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement, en refusant de se soumettre à tout moyen permettant son identification et la délivrance d'un laissez-passer.

Il n'a revendiqué aucune autre identité, si bien qu'il ne peut être reproché à la préfecture de ne pas avoir sollicité d'autres Etats souverains.

Il apparaît enfin que [K] [T] se déclare sans domicile fixe, ce qui fait obstacle à une assignation à résidence.

Par conséquent, le grief invoqué par [K] [T] n'est pas démontré et il y a lieu de constater que les services de la Préfecture ont bien fait les diligences utiles pour mettre à exécution l'arrêté d'éloignement de l'intéressé.

Aucune autre diligence n'est requise et l'administration, qui ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités étrangères, ne peut être tenue responsable du défaut de réponse de ces dernières ou de réponses contradictoires. Les diligences effectuées ont donc été utiles et suffisantes.

Le moyen n'est pas fondé et il y a lieu d'infirmer l'ordonnance déférée.

- sur les frais irrépétibles :

Au regard de l'équité, et par application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle, il n'y a pas lieu de condamner le préfet de l'Orne au paiement de frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Infirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes en date du 25 mai 2024,

Et statuant à nouveau,

Ordonnons la prolongation de la rétention administrative de [K] [T] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-huit jours, à compter du 26 mai 2024 à 11 heures 40,

Rejetons la demande formée par le conseil de [K] [T] au titre des frais irrépétibles,

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Fait à Rennes, le 26 Mai 2024 à 18h30

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [K] [T], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00215
Date de la décision : 26/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-26;24.00215 ?
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