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22/05/2024 | FRANCE | N°24/00189

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 22 mai 2024, 24/00189


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/98

N° RG 24/00189 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UYRF



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E





article L 3211-12-4 du code de la santé publique



Nous, Benoit LHUISSET, Conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Elodie CLOATRE, greffière,



Statuant sur l'appel formé par lettre simple postée le 07 ma

i 2024 et reçue le 13 Mai 2024 adressé par :



M. [Z] [U]

né le 14 Mai 1988 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Actuellement hospitalisé...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/98

N° RG 24/00189 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UYRF

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Nous, Benoit LHUISSET, Conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Elodie CLOATRE, greffière,

Statuant sur l'appel formé par lettre simple postée le 07 mai 2024 et reçue le 13 Mai 2024 adressé par :

M. [Z] [U]

né le 14 Mai 1988 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Actuellement hospitalisé au centre hospitalier [3]

ayant pour avocat désigné Me Marie-laure LEVILLAIN, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 30 Avril 2024 par le Juge des libertés et de la détention de NANTES qui a rejeté la demande de mainlevée et autorisé le maintien de son hospitalisation complète ;

En présence de [Z] [U], régulièrement avisé de la date de l'audience, assisté de Me Marie-laure LEVILLAIN, avocat

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 15 mai 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé, ayant transmis l'avis médical le 17 mai 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

Après avoir entendu en audience publique le 21 Mai 2024 à 14 H 00 l'appelant et son avocat en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 21 avril 2024 , M. [Z] [U] était admis en soins psychiatriques dans le cadre de la procédure sur péril imminent.

Le certificat médical du 20 avril 2024 du Dr [V] [X], n'exerçant pas dans l'établissement d'accueil, indiquait que M. [Z] [U] souffrait d'une tension psychique palpable, d'un délire de persécution et d'influence, tenait des propos mégalomaniaques et se trouvait en rupture de soins ainsi que dans l'opposition au traitement et à l'hospitalisation. Les troubles ne permettaient pas à M. [Z] [U] d'exprimer un consentement. Le médecin estimait que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte et que cette situation présentait un péril imminent.

Par une décision du 21 avril 2024 du directeur du centre hospitalier [3], M. [Z] [U] était admis en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète.

Le certificat médical des ' 24 heures établi le 21 avril 2024 à 11 heures 05 par le Dr [R] [T] et le certificat médical des ' 72 heures établi le 23 avril 2024 par le Dr [S] [C] préconisaient la poursuite de l'hospitalisation complète.

Par décision du 23 avril 2024, le directeur du centre hospitalier [3] maintenait les soins psychiatriques de M. [Z] [U] sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par courrier reçu au greffe le 23 avril 2024, M. [Z] [U] saisissait le tribunal judiciaire de Nantes afin d'obtenir la levée de la mesure d'hospitalisation complète.

L'avis motivé établi le le 26 avril 2024 par le Dr [I] [J] indiquait que l'état de santé de M. [Z] [U] relevait de l'hospitalisation complète.

Par requête reçue au greffe le 26 avril 2024, le directeur du centre hospitalier [3] saisissait le tribunal judiciaire de Nantes afin qu'il soit statué sur la mesure d'hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 30 avril 2024, le tribunal judiciaire de Nantes rejetait la demande de mainlevée de M. [Z] [U] et maintenait l'hospitalisation complète de ce dernier au centre hospitalier [3].

M. [Z] [U] a interjeté appel de l'ordonnance du 30 avril 2024 par un courrier posté par lettre simple le 07 mai 2024 et reçu le 13 mai 2024.

Le ministère public a indiqué solliciter la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention par avis écrit en date du 15 mai 2024.

Dans un avis motivé du Dr [D] [W] en date du 17 mai 2024, il est noté qu'il persiste chez M. [Z] [U] des troubles du comportement avec des bizarreries au sein de l'unité, qu'il peut par exemple pousser des bruits guturraux au sein d'un patio dans l'unité, ce qu'il explique par la résolution de conflits, voire des combats internes, par ce biais.

Il est noté un déni massif des troubles avec de multiples rationalisations morbides, que ce dernier reste très revendiquant vis-à-vis des soins en hospitalisation et estime ne pas nécessiter de traitement de fond malgré la chronocité de ses troubles et leurs conséquences sur son insertion socio-professionnelle.

Il est indiqué que ce patient est très isolé socialement, qu'il a coupé les liens avec toute une partie de sa famille, qu'il ne travaille plus depuis maintenant deux ans et demi, qu'il a engrangé une dette qu'il estime d'environ 400 000 euros du fait de loyers impayés aussi bien sur ses locaux professionnels que son logement personnel, et qu'il semble être actuellement sous la menace d'une expulsion.

Le médecin estime que l'hospitalisation et la mesure de contrainte sont justifiées et à maintenir afin d'assurer une contenance suffisante pour le patient et poursuivre ainsi avec lui la construction d'une alliance thérapeutique, afin également d'obtenir un recul suffisant vis-à-vis de l'introduction du traitement et lui apporter une aide indispensable sur le plan social, étant précisé qu'il se sent extrêmement persécuté par son entourage et garde une grande rancoeur vis-à-vis d'eux concernant les précédentes mesures d'hospitalisations en soins psychiatriques à la demande d'un tiers. Dans ce contexte, la mesure de soins psychiatriques en cas de péril imminent est donc justifiée pour protéger l'entourage de représailles.

A l'audience du 21 mai 2024, M.[Z] [U] a estimé ne pas être malade mais simplement exprimer librement sa pensée. De ce fait, il lui semblait nocif d'être suivi par le biais d'un traitement chimique qui ne pouvait que lui nuire. Il reprenait les termes de son écrit en date du 4 mai 2024 pour soutenir son souhait de sortir au plus rapidement de l'établissement et de retrouver ses conditions de vie antérieures qui lui apparaissaient parfaitement adaptées à ses besoins.

Son conseil, a soulevé un moyen de droit en ce qu'il a relevé qu'aucun avis n'avait été donné à la famille de la mesure d'hospitalisation alors que M.[Z] [U] avait fait l'objet d'une mesure fondée sur les dispositions de l'article L.3212-1 du code de la santé publique, nécessitant le principe d'un péril imminent pour la santé de la personne et d'un avis à la famille ou à des proches dans les 24 heures de l'entrée au sein de l'établissement. Il relevait notamment qu'aucune diligence n'avait été entreprise et qu'acune investigation n'avait été menée auprès de M.[Z] [U] pour déterminer qui pourrait être recherchée comme personne de confiance pour délivrer cette information.

Au surplus, il a soutenu que son état s'était amendé et qu'il ne relevait plus d'une telle prise en charge.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, M. [Z] [U] a formé le 07 mai 2024 un appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nantes du 30 avril 2024.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité de la procédure :

Aux termes de l'article L. 3216-1 du Code de la Santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge des libertés et de la détention, et en cas d'irrégularité, celle-ci n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

La saisine du juge des libertés et de la détention prévue par l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.

En l'espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.

Sur l'avis à tiers ou famille dans le cadre d'une mesure d'hospitalisation complète en soins psychiatriques sous contrainte pour péril imminent :

Le conseil de M.[Z] [U] conteste la procédure en ce que le péril imminent, bien que retenu, n'aurait donné lieu à aucun avis à tiers ou famille.

Il résulte des dispositions de l'article L 3212-1 que si le directeur de l'établissement peut prononcer la décision d'admission :

2° Soit lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

Il ressort en effet de l'examen de la procédure transmise qu'aucun document n'atteste que cet avis à famille, qui doit intervenir dans les 24 h, n'a été réalisé ni même tenté.

La seule mention informelle de la présence d'un frère lors de l'intervention initiale des forces de l'ordre au domicile de M.[Z] [U] et de l'arrivée concomitante d'un médecin, dont l'intervention aurait été sollicitée afin de formaliser le certificat initial de la procédure, ne pouvant être assimilée à une telle information puisque rien n'établit que ce proche aura été précisément éclairé sur les suites procédurales données à cette prise en charge.

A défaut des diligences strictement utiles, le non respect de cette exigence légale porte nécessairement atteinte aux droits de la personne hospitalisée, qui n'a pu informer un proche qui aurait pu agir sur son mandat ou dans son intérêt. Aucun développement ne justifie d'une démarche alternative qui aurai pu éteindre ce grief.

En conséquence, la procédure d'hospitalisation doit être regardée comme irrégulière et la mesure de contrainte levée, sans qu'il soit nécessaire d'opérer un examen du bien-fondé de cette mesure.

Toutefois, cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi puisqu'il apparaît que dans son dernier état, [Z] [U] reste particulièrement désorganisé, porteur d'un discours délirant dans le cadre duquel apparaît une adhésion totale aux troubles (sentiment de persécution), outre le fait qu'il est totalement opposant à tout traitement et à toute alliance thérapeutique. La mesure d'hospitalisation complète prendra fin dès l'établissement de ce programme de soins ou au plus tard à l'issue du délai précité.

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Benoit LHUISSET, conseiller de la chambre 6C, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit M. [Z] [U] en son appel,

Infirme l'ordonnance entreprise,

Ordonne la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète de M.[Z] [U].

Dit que cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi,

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 22 Mai 2024 à 11 heures 00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Benoit LHUISSET,

Conseiller

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [Z] [U] , à son avocat, au CH et ARS/tiers demandeur/curateur-tuteur

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00189
Date de la décision : 22/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-22;24.00189 ?
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