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17/05/2024 | FRANCE | N°24/00187

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 17 mai 2024, 24/00187


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/97

N° N° RG 24/00187 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UYN5



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E





article L 3211-12-4 du code de la santé publique



Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Sandrine KERVAREC, greffière,



Statuant sur l'appel formé le 10 Mai 2024 à 14 h 54 par :





M. [C] [J]

né le 16 Novembre 1994 à [Localité 1] (49)

[Adresse 9]

[Localité 5]



hospitalisé à l'UMD de [Localité 8]

ayant pour avocat Me Aud...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/97

N° N° RG 24/00187 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UYN5

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Sandrine KERVAREC, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 10 Mai 2024 à 14 h 54 par :

M. [C] [J]

né le 16 Novembre 1994 à [Localité 1] (49)

[Adresse 9]

[Localité 5]

hospitalisé à l'UMD de [Localité 8]

ayant pour avocat Me Aude MARQUIS, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 06 Mai 2024 par le Juge des libertés et de la détention de SAINT- BRIEUC qui a débouté M [J] de ses demandes aux fins que soit ordonné la mainlevée de son placement en UMD ;

En présence de [C] [J], régulièrement avisé de la date de l'audience, assisté de Me Aude MARQUIS, avocat

En l'absence de l'UDAF de la Vendée, curateur, régulièrement avisé,

En l'absence du représentant du préfet des Côtes d'Armor, régulièrement avisé, (mémoire du 15 mai 2024)

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, M. FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 15 mai 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé,

Après avoir entendu en audience publique le 16 Mai 2024 à 14 H 00 l'appelant et son avocat en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :

EXPOSÉ DU LITIGE

Par arrêté du 01er mars 2019, le maire de [Localité 1] a ordonné l'admission en soins psychiatriques à titre provisoire de M. [C] [J].

Le certificat médical du 01er mars 2019 du Dr [Z] a indiqué que M. [C] [J] souffrait d'un trouble du cours de la pensée à minima, d'un discours inadapté, d'un trouble du sommeil important, d'un emoussement affectif et qu'il présentait une anosognosie totale ainsi qu'un déni des troubles.

Les troubles ne permettaient pas à M.[C] [J] d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte.

Par arrêté du 03 mars 2019, le préfet de la Vendée a ordonné l'admission en soins psychiatriques de M.[C] [J] au centre hospitalier [2] - Etablissement public de santé mentale de Vendée de [Localité 4].

Le certificat médical des ' 24 heures établi le 02 mars 2029 à 10 heures 21 par le Dr [T] [N] et le certificat médical des ' 72 heures établi le 04 mars 2019 à10 heures 08 par le Dr [F] ont préconisé la poursuite de l'hospitalisation complète de M. [C] [J].

Par arrêté du 05 mars 2019, le préfet de la Vendée a maintenu les soins psychiatriques de M. [C] [J] sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par arrêté du 30 juin 2023, le préfet de la Vendée a maintenu les soins psychiatriques de M. [C] [J] sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par arrêté du 20 septembre 2023, le préfet de la Vendée a décidé de la prise en charge en soins psychiatriques de M. [C] [J] sous une autre forme qu'en hospitalisation complète.

Par arrêté du 01er décembre 2023, le préfet de la Vendée a décidé que les soins psychiatriques de M. [C] [J] se poursuivent sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 08 décembre 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de [Localité 3] a maintenu la poursuite de l'hospitalisation complète de M. [C] [J].

Par arrêté du 29 décembre 2023, le préfet de la Vendée a maintenu les soins psychiatriques de M. [C] [J] sous la forme d'une hospitalisation complète à compter du 01er janvier 2024 jusqu'au 01er juillet 2024.

Par arrêté du 04 mars 2024, le préfet de la Vendée a ordonné le transfert de M. [C] [J] en soins psychiatriques en unité pour malades difficiles au centre hospitalier spécialisé de [Localité 8].

Par requête reçue au greffe le 26 avril 2024, M. [C] [J] a saisi le tribunal judiciaire de Saint-Brieuc afin d'obtenir la levée de la mesure d'hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 06 mai 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a rejeté la requête et ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques.

M. [C] [J] a interjeté appel de l'ordonnance du 06 mai 2024 par courrier manuscrit transmis à la cour d'appel de Rennes le 10 mai 2024.

Le certificat de situation du Dr [Y] [P] en date du 14 mai 2024 indique que depuis son admission à [Localité 8], M. [C] [J] n'a pas présenté de trouble majeur du comportement dans le service, que la clinique qu'il présente est néanmoins toujours dominée par une froideur relationnelle et émotionnelle et par un déni sinon une minimisation de ses troubles mentaux. Il est noté que la critique de ses comportements inadaptés et dangereux reste superficielle et l'adhésion au soins et au traitement médicamentaux est circonstantielle.

Il est noté également que le traitement sédatif a été réduit sans qu'il n'y ait de recrudescence de la tension psychique à court terme mais une observation sur la durée s'impose et que le travail sur la prise de conscience des troubles, la gestion des frustrations et l'acceptation du traitement antipsychotique doit se poursuivre.

Il est précisé qu'il a été convenu avec M. [C] [J] qu'il serait à nouveau présenté devant une commission en juin 2024 dans la perspective d'un retour à l'EPSM de Vendée - [Localité 3], sous réserve de la bonne évolution et d'une stabilisation de son état psychique et que d'ici là, une surveillance médicale rapprochée et des soins psychiatriques intensifs restent nécessaires afin d'éviter une nouvelle décompensation psychotique et la survenue de comportements dangereux pour lui-même et autrui dont le patient est coutumier dans ces moments-là.

Le médecin estime que les soins psychiatriques doivent être maintenus sous la forme d'une hospitalisation complète à l'Unité pour Malades Difficiles de [Localité 8] et que M. [C] [J] est à même de comparaître devant la cour d'appel de Rennes sans que cela nuise à son état mental.

L'UDAF 85, curatrice de M. [J] [C] depuis le 6 Février 2020 suite à la demande de dessaisissement de ses parents, nommés curateurs dans un premier temps a fait parvenir des observations aux termes desquelles le service estime que le temps de soins en UMD pour M. [J] est nécessaire pour tenter de trouver un équilibre et lui permettre d'avoir la possibilité d'une vie autonome dans son logement.

L'Udaf précise avoir joint le dernier rapport transmis au juge des tutelles pour renouveler la mesure et demander le changement de curateur, rapport qui détaille la situation très dégradée avant son hospitalisation et la mise en danger pour lui ou son entourage.

Le préfet par observations du 15 mai 2024 a fait valoir que la situation clinique que présente M. [J] [C] est toujours dominée par une froideur relationnelle et émotionnelle et un déni, sinon une minimisation, de ses troubles mentaux, que la critique de ses comportements inadaptés et dangereux reste superficielle et l'adhésion aux soins et au traitement médicamenteux est circonstancielle, qu'il a sollicité l'avis de la commission de suivi médical de l'UMD et que celle-ci a émis le 17/04/2024, un avis défavorable à son retour dans son établissement d'origine afin d'évaluer son évolution clinique au regard de la gravité de ses agissements en phase de décompensation.

Il est conclu qu'au vu de ces éléments cliniques et dans l'attente de son transfert, les soins psychiatriques doivent étre maintenus sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par ailleurs il a été mentionné que la procédure concernant ce patient n'appelle aucune remarque particuliére et qu'il est demandé le maintien de la mesure de soins psychiatriques en hospitalisation complète de M. [J] [C].

Le ministère public a sollicité par avis écrit la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention.

Le conseil de M.[J] a fait parvenir des écritures le 15 mai 2024 aux termes desquelles il soulève les moyens suivants:

- l'irrégularité du certificat médical motivant la poursuite des soins et par voie de conséquence l'irrégularité de l'arrêté de maintien en date du 29 décembre 2023.

A titre subsidiaire, il demande la mainlevée du placement en Unité pour Malade Difficile de M. [C] [J] arguant du fait que:

- l'arrêté portant transfert de M.[J] en UMD en date du 4 mars 2024 pris par le Préfet de la Vendée n'a nullement été transmis au Préfet des Côtes d'Armor, Préfet du département dans lequel se situe l'établissement de rattachement de l'UMD de [Localité 8] ni au Procureur compétent du lieu d'accueil qui n'ont de ce fait pas eu la possibilité de saisir la CSM de la situation de M.[J], ce qui porte nécessairement atteinte aux droits de ce dernier. .

-sur le fond les certificats médicaux établis par le Docteur [P], Chef de service de l'UMD permettent de constater que les conditions ayant entrainé le placement en UMD de M. [J] ne sont aujourd'hui plus réunies. :

En conséquence il demande de voir

INFIRMER l'ordonnance prononcée le 6 mai 2023 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Saint-Brieuc

Statuant à nouveau,

DECLARER la procédure irrégulière et non fondée,

A titre principal

ORDONNER la mainlevée immédiate de la mesure d'hospitalisation sous contrainte à laquelle M. [C] [J] est soumis,

A titre subsidiaire

ORDONNER la mainlevée du placement en Unité pour Malade Difficile de de M. [C] [J] et dire qu'en l'état, la poursuite de l'hospitalisation complète devra se faire hors l'Unité pour Malade Difficile

En tout état de cause :

DEPENS comme de droit

A l'audience du 16 mai 2024,M. [C] [J] a déclaré ne rien avoir à préciser.

Son conseil demande à ce que les écritures de l'ARS soit déclarées irrecevables car il n'y a pas de déclaration de pouvoir de son auteur et à ce qu'il y ait une levée de la mesure. A titre subsidiaire il sollicite la levée de la mesure en UMD car il fait valoir que le certificat médical en date du 28 décembre 2023 est irrégulier car il n'est pas suffisamment circonstancié et que l'on ne sait pas si le patient a pu faire valoir ses observations, ce qui porte nécessairement atteinte à ses droits, qu' une copie de l'arrêté devrait être transmise à l'ARS 22, or rien ne l'indique et l'ARS 22 pouvait saisir la commission des soins pour refuser le transfert (article R3222-6 du code de la santé publique).

Son conseil explique qu'il n'avait pas d'information sur la commission (qu'il a déjà saisie en avril 2024) , qu'il devait être auditionné en mai 2024, que cela devait avoir lieu hier mais qu'il n'a pas été présenté et qu'il ne sera donc auditionné qu'en juin.

Il fait valoirdans ces conditions l'ineffectivité du recours à la commission.

Il soutient que les conditions du placement ne sont plus réunies car les trois certificats médicaux indiquent une amélioration depuis son arrivée à l'UMD et que son état de santé ne justifie plus le placement en UMD.

Son conseil précise que M. [C] [J] a toute sa famille en Vendée et demande son retour à l'EPSM de Vendée.

M. [C] [J] déclare en fin d'audience souhaiter un retour à domicile pour retrouver du travail, qu'il a des choses à faire à l'extérieur et qu'il souhaite se rapprocher de sa famille.

Il indique qu'il connait son traitement et que s'il sort, il le prendra car sinon ils vont venir le chercher. Il dit ne jamais avoir menacé quelqu'un et avoir seulement fermé une porte sur la personne.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, M. [C] [J] a formé le 10 mai 2024 un appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc du 06 mai 2024.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité de la procédure :

Aux termes de l'article L. 3216-1 du Code de la Santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge des libertés et de la détention, et en cas d'irrégularité, celle-ci n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

La saisine du juge des libertés et de la détention prévue par l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.

En l'espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.

Sur l'irrecevabilité des écritures de l'Ars:

Le conseil de M.[J] sollicite que les observations du préfet des Côtes d'Armor

soient écartées des débats à défaut de justificati du pouvoir de la signataire.

L'article 761 prévoit que ' les parties sont dispensées de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement [...]. L'Etat, les départements, les régions, les communes et les établissements publics peuvent se faire représenter ou assister par un fonctionnaire ou un agent de leur administration .

L'article 762 dispose que, ' lorsque la représentation par avocat n'est pas obligatoire, les parties se défendent elles-mêmes (...). Le représentant, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial .

Les observations présentées par le préfet des côtes d'Armor sont signées de Mme [W] [V], directrice de cabinet .

En cas de contestation il appartient au juge de vérifier la qualité et le pouvoir de la personne qui signe les actes de procédure .

En cours de délibéré il a été sollicité des services de l'ARS de justifier du pouvoir de Mme [V] et il a été transmis le recueil des actes administratifs publié le 12 juin 2023 dans lequel figure en page 29 l'arrêté portant délégation à Mme [V], sous-préfête, directrice de cabinet du préfet des Cotes-d'Armor, à l'effet de signer les arrétés (ainsi que Ies recours et Ies saisines du juge des libertes et de la détention et de la Cour d'Appel Iiées aux mesures d'hospitalisation sous contrainte et Ies mémoires afferents), décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents administratifs et règlementaires relevant des attributions du cabinet, à l'exclusion:

- des réquisitions de la force armée;

~ des arrétes pris sur le fondement de |'article 5 de Ia loi du 3 avril 1955 sur l'état

d'urgence;

- des courriers adressés aux parlementaires, au president du conseil départemental

et au président du conseil régional.

Cette pièce a été transmise au conseil de M.[J].

Il s'ensuit que Mme [V] est parfaitement habilitée pour signer, la demande de voir écartées les observations de la Préfecture sera donc rejetée.

Sur l'irrégularité du certificat médical motivant la poursuite des soins et par voie de conséquence l'irrégularité de l'arrêté de maintien en date du 29 décembre 2023 :

Le conseil de M.[J] fait valoir que le certificat médical du 28 décembre 2023 établi par le Docteur [K] ne remplit nullement les conditions légales en ce qu'il

énonce uniquement :

« Persistance des éléments d'agressivités. [Y] des troubles. Vécu des persécutions. Refus des soins ».

Il rappelle que selon la Haute Autorité de la Santé, les certificats mensuels établis dans le cadre d'une mesure de SDRE doivent notamment :

- confirmer les certificats précédents qui justifient la mesure de contrainte

- préciser les caractéristiques de l'évolution des troubles

- expliquer pourquoi la prise en charge est toujours adaptée

- confirmer que l'information a été donnée au patient du maintien des soins et que ce dernier a été mis à même de faire valoir ses observations.

L'article L.3212-1 du Code de la Santé publique dispose :

« Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état. »

L'article L.3213-3 du même code précise :

« I.-Dans le mois qui suit l'admission en soins psychiatriques décidée en application du présent chapitre ou résultant de la décision mentionnée à l'article 706-135 du code de procédure pénale et ensuite au moins tous les mois, la personne malade est examinée par un psychiatre de l'établissement d'accueil qui établit un certificat médical circonstancié confirmant ou infirmant, s'il y a lieu, les observations contenues dans les précédents certificats et précisant les caractéristiques de l'évolution des troubles ayant justifié les soins ou leur disparition. Ce certificat précise si la forme de la prise en charge du malade décidée en application de l'article L. 3211-2-1 du présent code demeure adaptée et, le cas échéant, en propose une nouvelle. Lorsqu'il ne peut être procédé à l'examen du patient, le psychiatre de l'établissement établit un avis médical sur la base du dossier médical du patient. »

Au regard de la jurisprudence constante en la matière, il est constant que les certificats médicaux établis par les médecins psychiatres doivent permettre au magistrat d'appréhender les motifs de la mesure et d'en apprécier sa proportionnalité eu égard à l'atteinte qu'elle suppose aux libertés fondamentales du patient.

En l'espèce, le certificat médical du 28 décembre tout en étant très succint, résume parfaitement la situation par ailleurs bien connue, de l'intéressé et il est clair que les mentions qui y sont apposées permettent de constater que M.[J] est dangereux pour les autres, qu'il refuse les soins et donc que l'hospitalisation complète se justifie.

Dès lors l'arrêté en date du 29 décembre 2023 portant maintien d'une mesure en soins psychiatriques au visa du certificat médical du 28/12/2023 établi, précisant

qu'il résulte de ce certificat médical que les troubles mentaux présentés par M. [J] [C] nécessitent des soins et compromettent la sureté des personnes et ou portent atteinte à l'ordre public et rendent nécessaire son maintien en soins psychiatrique ne souffre aucune critique.

Le moyen ne saurait prospérer.

Sur la mainlevée du placement en Unité pour Malade Difficile :

Selon la décision du tribunal des conflits en date du 3 juillet 2023, la juridiction judiciaire est également compétente pour connaître de tout litige relatif aux décisions par lesquelles le préfet compétent admet dans une UMD un patient placé en soins psychiatrique sans son consentement sous la forme d'une hospitalisation complète, ou refuse sa sortie d'une telle unité.

A/ Sur l'irrégularité du placement en Unité pour Malade Difficile

Le conseil de M.[J] soutient que l'arrêté portant transfert de M. [J] en UMD en date du 4 mars 2024 pris par le Préfet de la Vendée n'a pas été transmis au Préfet des Côtes d'Armor, Préfet du département dans lequel se situe l'établissement de rattachement de l'UMD de [Localité 8] ni au Procureur compétent du lieu d'accueil.

L'article R 3222-2 du Code de la santé publique dispose :

« (') II.-L'admission du patient dans une unité pour malades difficiles est prononcée par arrêté du préfet du département ou, à [Localité 6], du préfet de police, où se trouve l'établissement dans lequel est hospitalisé le patient avant son admission en unité pour malades difficiles. Dans l'objectif de maintenir ou de restaurer les relations du patient avec son entourage, cet arrêté détermine le lieu de l'hospitalisation en considération de ses intérêts personnels et familiaux. Une copie de l'arrêté est transmise au préfet du département dans lequel se situe l'établissement de rattachement de l'unité pour malades difficiles qui reçoit le patient.

Il convient de relever que la transmission au procureur de la république a été supprimée.

Si l'arrêté du 4 mars 2024 mentionne en effet simplement une information au Procureur de la République de la Roche-sur-Yon, aux maires de [Localité 5] et de [Localité 4] ainsi qu'à la CDSP, à la famille, à la personne chargée de la protection juridique de M.[J] et pour notification à ce dernier,le ourrier de transmission du directeur général de l'UMD de [Localité 7] en date du 29 février 2024 au centre hospitalier de [Localité 3] l'informant de l'accord pour l'admission de M.[J] en UMD et de la date de celle-ci a été transmis à l'ARS d'Ille et Vilaine .

Les services dépendant du préfet du département dans lequel se situe l'établissement de rattachement de l'UMD étaient donc informés et auraient pu saisir la commission de suivi médical pour refuser le transfert.

Cette branche du moyen ne saurait prospérer.

Le conseil de M.[J] soutient dans sa deuxième branche du moyen que cette notification de l'arrêté est irrégulière puisque l'arrêté de placement en UMD de M.[J] ne mentionne nullement la possibilité de saisine de la commission de suivi médical (CSM) dans le cadre des placements en UMD régit par les articles R 3222-4 à R 3222-7 du Code de la santé publique.

L'article R.3222-6 précise en effet :

' Lorsque la commission du suivi médical prévue à l'article R. 3222-4, saisie le cas échéant par le psychiatre responsable de l'unité pour malades difficiles, constate que les conditions mentionnées à l'article R. 3222-1 ne sont plus remplies, elle saisit le préfet du département d'implantation de l'unité ou, à [Localité 6], le préfet de police, qui prononce, par arrêté, la sortie du patient de l'unité pour malades difficiles et informe de sa décision le préfet ayant pris l'arrêté initial d'admission dans cette unité ainsi que l'établissement de santé qui avait demandé l'admission du patient. La sortie peut être décidée sous forme....'

Si cette mention ne figure pas sur l'arrêté du 29 décembre 2023 , force est de constater que M.[J] a déjà saisi la commission de suivi médical laquelle a examiné sa situation le 17 avril 2024 et a émis un avis défavorable.

Il ressort du certificat médical de situation établi le 14 mai 2024 par le Dr [P] que sa situation sera réexaminée en juin prochain.

Outre que le médecin précise que cet examen a été fixé en juin pour bénéficier du recul suffisant pour apprécier son évolution clinique, il ajoute que cette date a été convenue avec M.[J] .

Il ne peut donc être soutenu que le recours serait inefficient .

Il s'avère en conséquence qu'il n'existe aucun grief pour M.[J] de l'absence de mention du recours possible devant cette commission et que le moyen pris en sa seconde branche ne sera pas non plus retenu.

B /Sur le bien-fondé de la mesure d'un placement UMD :

Selon le conseil de M.[J] les certificats médicaux établis par le Docteur [P], Chef de service de l'UMD permettent de constater que les conditions ayant entrainé le placement en UMD du patient ne sont aujourd'hui plus réunies.

Aux termes de l'article L. 3212-1, I du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1

Lorsqu'il est saisi sur le fondement du second texte, aux fins de se prononcer sur le maintien de l'hospitalisation complète d'un patient, le juge doit examiner le bien-fondé de la mesure au regard des éléments médicaux, communiqués par les parties ou établis à sa demande.

Il lui appartient à ce titre d'examiner les certificats médicaux et plus précisément leurs caractères réguliers et circonstanciés aux fins d'apprécier leurs régularités.

L'article L3211-3 du Code de la santé publique dispose en effet que :

« Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux fait l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée. »

Ainsi que l'a rappelé le premier juge il n'entre pas dans ses compétences de se substituer aux décisions médicales relatives à une décision d'admission fondée sur une évaluation de l'état psychique et mental du patient .

En l'espèce la commission de suivi médical a émis le 17 avril 2024 un avis défavorable

Le dernier avis du Dr [P] enn date du 14 mai 2024 fait état de ce que la situation clinique que présente M. [J] [C] est toujours dominée par une froideur relationnelle et émotionnelle et un déni, sinon une minimisation, de ses troubles mentaux, que la critique de ses comportements inadaptés et dangereux reste superficielle et l'adhésion aux soins et au traitement médicamenteux circonstancielle

Le médecin précise qu'il s'agit d'un patient suivi depuis de nombreuses années pour une schizophrénie héboïdophrénique caractérisée par des manifestations délirantes de grandeur, une altération grave de la relation au mode et des phases d'exaltation ainsi que la survenue de nombreux épisodes d'agressivité (notamment agression de forces de l'ordre, dégradation des locaux d'une banque suite à un refus de crédit ) .

Il explique l'admission en UMD par le refus des soins et des menaces de mort sur les soignants de son lieu d'hospitalisation (ainsi que sur ses proches et sa curatrice).

Le médecin estime nécessaire qu'une observation se poursuive.

Ces éléments sont parfaitement décrits, clairs et circonstanciés .

En conséquence il est établi, en l'état, par les pièces au dossier le bien fondé de l'hospitalisation complète et de la prise en charge en UMD.

Cette décision n'apparaît pas par ailleurs disproportionnée par rapport à la situation personnelle du patient laquelle sera examinée à nouveau par la commission de suivi médical en juin prochain.

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Catherine LEON, présidente de chambre, statuant publiquement, en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit M. [C] [J] en son appel,

Confirme l'ordonnance entreprise,

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 17 Mai 2024 à 14 heures

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Catherine LEON, Présidente

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [C] [J] , à son avocat, au CH et ARS

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00187
Date de la décision : 17/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-17;24.00187 ?
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