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07/05/2024 | FRANCE | N°24/00179

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 07 mai 2024, 24/00179


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/72

N° RG 24/00179 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UYC2



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





O R D O N N A N C E



articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile



Nous, Benoit LHUISSET, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Elod

ie CLOATRE, greffière,





Statuant sur l'appel formé le 06 Mai 2024 à 12 heures 11 par Me Nicolas KERRIEN pour :



M. [T] [Y]

né le...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/72

N° RG 24/00179 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UYC2

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Nous, Benoit LHUISSET, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Elodie CLOATRE, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 06 Mai 2024 à 12 heures 11 par Me Nicolas KERRIEN pour :

M. [T] [Y]

né le 18 Mai 1974 à [Localité 1] (MALI)

de nationalité Malienne

ayant pour avocat Me Nicolas KERRIEN, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 04 Mai 2024 à 18 heures 23 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de RENNES qui a déclaré parfait le désistement de M. [Y] de l'ensemble de ses moyens initialement formés à l'appui de sa contestation de la légalité de son placement en rétention, rejeté le moyen tiré de l'avis anticipé au procureur de la République, rejeté la fin de non recevoir, et ordonné la prolongation du maintien de M. [T] [Y] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-huit jours à compter du 05 mai 2024 à 09 heures 25;

En l'absence de représentant du préfet de l'Eure, dûment convoqué, ayant transmis ses observations par écrit déposé le 6 mai 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 6 mai 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En présence de [T] [Y], assisté de Me Nicolas KERRIEN, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 07 Mai 2024 à 10 H 30 l'appelant et son avocat en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et le 07 Mai 2024 à 15 heures 00, avons statué comme suit :

Monsieur [T] [Y] a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai, pris par le préfet de L'Eure en date du 15 avril 2024, notifié le 22 avril 2024.

Le préfet de L'Eure a placé en rétention administrative le 3 mai 2024, notifié le même jour, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 2] pour une durée de 48 heures, Monsieur [T] [Y] du fait qu'il ne dispose d'aucune pièce d'identité ou de voyage régulière, qu'il représente une grave menace pour l'ordre public et qu'il s'est maintenu en situation irrégulière depuis 2013.

Par requête introduite par Monsieur [T] [Y], l'appelant a contesté l'arrêté de placement en rétention administrative, avant de se désister de ses moyens.

Par requête motivée en date du 4 mai 2024, reçue le 4 mai 2024 à 8h57 au greffe du tribunal de Rennes, le représentant du préfet de L'Eure a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes d'une demande de prolongation pour une durée de 28 jours de la rétention administrative de Monsieur [T] [Y].

Par ordonnance rendue le 4 mai 2024, le juge des libertés et de la détention, a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [T] [Y] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 28 jours.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 6 mai 2024 à 12h11, le conseil de Monsieur [T] [Y] a formé appel de cette ordonnance.

L'appelant fait valoir, au soutien de sa demande d'infirmation de la décision entreprise, les moyens suivants :

- le défaut de production de l'avis de la commission d'expulsion qui constituerait une pièce justificative utile à la recevabilité de la requête

- le défaut d'avis au procureur de la république nécessaire à la légalité de l'arrêté de placement en rétention administrative

Le procureur général, suivant avis écrit du 6 mai 2024 sollicite la confirmation de la décision entreprise.

Monsieur [T] [Y] est présent à l'audience et indique, pour sa défense, qu'il est étonné de l'absence de l'enquête JAP réalisée courant 2021 pour préparer sa sortie et qui se montrait favorable à son maintien sur le territoire. En outre, il indique produire la preuve de ce que son frère va pouvoir l'héberger de manière pérenne sur le territoire national et de ce que la COMEX a donné avis défavorable à son expulsion en date du 20 mars 2023. Enfin, il ajoute regretter les faits pour lesquels il a été condamné, s'agissant d'une première mise en cause judiciaire et que pour le reste, il souhaite prolonger son action d'intégration, notamment professionnelle.

Son conseil soutient ses prétentions, conformément à ses écritures.

En réponse, le représentant de la Préfecture de L'Eure sollicite la confirmation de l'ordonnance entreprise en indiquant que la forme donnée à l'avis au procureur de la république le rend conforme aux exigences textuelles et que le défaut de production de l'avis de la commission d'expulsion est sans effet sur la procédure puisqu'elle ne porte pas sur la régularité de la procédure de rétention.

SUR QUOI :

L'appel est recevable pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.

Sur le moyen tiré du non-respect des conditions fixées par l'article L741-8 du CESEDA :

Le conseil de Monsieur [T] [Y] soutient que la mesure de rétention est irrégulière dès lors que l'avis qui en a été donné au procureur de la république s'est fait préalablement à l'organisation de la mesure, alors que les dispositions précitées évoquent un avis à destination de ce magistrat dès le placement en rétention.

L'article L.741-8 du CESEDA dispose que le procureur de la république est informé immédiatement de tout placement en rétention administrative.

En l'espèce, il n'est pas contesté que l'avis donné au procureur de la république l'a été par voie de mail le 2 mai 2024 à 13h01, de manière circonstanciée, dès lors que cet écrit précisait que l'appelant serait pris en charge dans un centre dédié, à sa levée d'écrou, le 3 mai 2024, alors qu'il était incarcéré au centre de détention de Val-de-reuil et que dans l'attente de son départ, il serait placé en rétention administrative au visa d'un arrêté préfectoral d'expulsion régulièrement pris en date du 14 avril 2024.

Ce faisant, et alors que l'intéressé était détenu à cette date, cet avis ne constitue pas une hypothèse, ni ne comporte aucun caractère d'incertitude puisque Monsieur [T] [Y] ne disposait alors d'aucune liberté d'aller et venir et que l'arrêté d'expulsion avait d'ores et déjà été formalisé, de sorte que la mise en 'uvre de la procédure administrative a pu s'organiser conformément aux prévisions annoncées.

En outre, il convient de considérer que si cet avis a été donné en amont de l'organisation de la mesure, il l'a été à bref délai et sans qu'il ait ensuite été observé de modification de la situation qui soit de nature à rendre caduque les observations produites dans cet écrit.

Se faisant, l'avis a bien été donné sans retard à l'autorité judiciaire et qu'il ne résulte pas de cette situation un grief pour Monsieur [T] [Y], ses droits en la matière ayant été respectés.

La cour considère donc qu'il convient de rejeter ce moyen comme étant inopérant.

Sur le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article R.743-2 du CESEDA

Le conseil de Monsieur [T] [Y] soutient que ces dispositions auraient été violées dès lors que l'avis de la commission d'expulsion relative à Monsieur [T] [Y], bien qu'énoncée au soutien de la requête, n'aurait pas été produite alors qu'il s'agissait manifestement d'une pièce utile au débat, rendant, de ce fait, la requête irrecevable.

L'article R743-2 du CESEDA dispose qu'à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.
Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2.
Lorsque la requête est formée par l'étranger ou son représentant, la décision attaquée est produite par l'administration. Il en est de même, sur la demande du juge des libertés et de la détention, de la copie du registre.

Il convient toutefois de rappeler que ces documents utiles sont les pièces qui, par nature, doivent permettre de vérifier la validité et la régularité de la procédure de retention administrative.

Or, l'avis de la commission d'expulsion, qui se rapporte exclusivement à la procedure permettant l'éventuelle adoption d'un arrêté d'expulsion selon les dispositions de l'article L.632-2 du CESEDA, est parfaitement étranger à l'organisation de la mesure de retention.

Au delà, il n'est pas contesté que le moyen soulevé n'est aucunement lié à la contestation de cet arrêté d'expulsion, dont la légalité est de la seule compétence du juge administratif.

Par suite, il doit être relevé que cet avis ne constitue pas un document utile de nature à supporter la recevabilité de la requête contestée et par voie de conséquence, sa production au présent débat n'est ni exigée, ni attendue.

Dès lors, il convient de rejeter le moyen présenté comme étant inoperant.

Sur le fond :

Monsieur [T] [Y] n'est porteur d'aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité. Il n'a pas de domicile stable et ne justifie d'aucune forme d'installation pérenne et régulière sur le territoire national dès lors que l'accueil proposé par son frère ne dit rien des conditions durables de ce séjour, ce dernier ne l'ayant visité qu'à 4 reprises depuis avril 2022. Ses relations fragiles et très ponctuelles avec l'unique fille qui accepte encore de le fréquenter ne constituent pas plus une forme de garantie, ses autres enfants étant ceux de sa victime, avec lesquels il a rompu tout lien. Il n'est plus inséré sur le plan professionnel.

Il est, de ce fait, dépourvu de toutes garanties sérieuses de représentation et dans ces circonstances, la mesure d'éloignement est de nature à assurer l'exécution de l'obligation de quitter le territoire national délivrée contre l'intéressé.

Enfin, en conformité avec les dispositions de l'article L.741-3 et L.751-9 du CESEDA, cette prolongation est strictement motivée par l'attente d'un plan de voyage, dont la concrétisation à court délai ne saurait être remise en cause puisqu'un laissez-passer consulaire a été obtenu le 3 mai 2024 auprès des autorités consulaires maliennes et qu'une nouvelle demande de vol est en cours (premier vol en date du 3 mai 2024 annulé).

En conséquence, c'est à bon droit que la requête entreprise a été accueillie par le premier juge et il y a lieu d'ordonner la prolongation de la rétention, à compter du 5 mai 2024, pour une période d'un délai maximum de vingt-huit jours dans des locaux non pénitentiaires.

La décision dont appel est donc confirmée.

Dit n'y avoir lieu à condamner le Préfet de L'Eure sur la base des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes en date du 4 mai 2024,

Rejette les demandes Monsieur [T] [Y] sur la base des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.

Rappelons à Monsieur [T] [Y] qu'il a l'obligation de quitter le territoire français,

Laissons les dépens à la charge du trésor public,

Fait à Rennes, le 07 Mai 2024 à 15 heures 00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [T] [Y], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00179
Date de la décision : 07/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-07;24.00179 ?
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