La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2024 | FRANCE | N°21/05043

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 07 mai 2024, 21/05043


2ème Chambre





ARRÊT N°156



N° RG 21/05043

N° Portalis DBVL-V-B7F-R5D3













M. [G] [M] [R]



C/



S.A. FINANCO



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée













Copie exécutoire délivrée



le :



à :

- Me LE COULS-BOUVET

- Me TROADEC



RÉPUB

LIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 MAI 2024





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,



...

2ème Chambre

ARRÊT N°156

N° RG 21/05043

N° Portalis DBVL-V-B7F-R5D3

M. [G] [M] [R]

C/

S.A. FINANCO

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me LE COULS-BOUVET

- Me TROADEC

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 MAI 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Pierre DANTON, lors des débats, et Mme Ludivine BABIN, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Novembre 2023

devant Madame Hélène BARTHE-NARI, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Mai 2024, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats et signé par Monsieur David JOBARD, Président de Chambre, ayant participé au délibéré collégial, pour le Président empêché,

****

APPELANT :

Monsieur [G] [M] [R] (devenu [P])

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 7]

Centre de détention de [6], écrou [Numéro identifiant 5]

[Localité 2]

Représenté par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

S.A. FINANCO

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Nolwenn TROADEC, postulant, avocat au barreau de LORIENT

Représentée par Me Stéphanie BORDIEC, plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX

EXPOSE DU LITIGE

Suivant offre préalable acceptée le 20 août 2018, la société Financo a consenti à M. [G] [M] [R], désormais M. [G] [M] [P], à la suite d'un changement de nom intervenu en octobre 2022, un prêt d'un montant de 15 000 euros, au taux contractuel de 4,20%, remboursable en 108 mensualités de 185,74 euros.

Se prévalant d'échéances impayées et après vaine mise en demeure, la société Financo a prononcé la déchéance du terme le 21 octobre 2019.

Sans réponse à ses courriers ultérieurs, elle a, par acte du 2 mars 2020, fait assigner M. [R] devant le tribunal judiciaire de Quimper en vue d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme en principal de 16 137,98 euros actualisée au 06 février 2020, assortie des intérêts.

Par jugement du 2 novembre 2020, le tribunal a ordonné la réouverture des débats après avoir relevé un moyen d'office s'agissant de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur.

Par jugement du 8 janvier 2021, le juge des contentieux de la protection de Quimper a :

- condamné M. [R] [G] à payer à la société Financo la somme de 14 771 euros avec intérêt au taux contractuel de 4,20% à compter du 31 janvier 2020, au titre du solde du prêt, et la somme de 185,30 euros au titre des intérêts de retard avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2020,

- condamné M. [R] [G] à payer à la société Financo la somme de 1 euro au titre de l'indemnité légale avec intérêt au taux légal à compter du 31 janvier 2020,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté toute autre demande,

- condamné M. [R] [G] aux dépens,

- rappelé qu'en cas de mise en place d'une procédure de surendettement, la créance sera remboursée selon les termes et conditions fixées dans ladite procédure.

Par déclaration en date du 4 août 2021, M. [R] a relevé appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 1er juillet 2022, le conseiller de la mise en état saisi d'une demande de radiation par la société Financo, a débouté celle-ci de sa demande, considérant que la précarité de la situation de M. [R] rendait impossible l'exécution de la décision.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 6 septembre 2023, M. [R], désormais dénommé [P], demande à la cour de :

- déclarer recevable et dire bien fondé son appel,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- débouter la banque de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- déchoir la banque du droit aux intérêts,

- accorder à M. [P] les plus larges délais de paiement pour le règlement de sa dette,

- dire que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

Selon ses dernières conclusions rendues le 27 janvier 2022, la société Financo demande à la cour de :

- débouter M. [P] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- condamner M. [P] à payer à la banque la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [P] aux dépens de la procédure d'appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision ainsi qu'aux dernières conclusions précitées, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 12 octobre 2023.

EXPOSE DES MOTIFS :

Au soutien de son appel tendant à voir débouter la société Financo de sa demande en paiement ou déchue à tout le moins de son droit aux intérêts, M. [P] fait valoir d'une part qu'il n'a jamais reçu la moindre mise en demeure ni l'assignation devant le juge des contentieux de la protection, celles-ci étant adressées à son domicile alors qu'il était incarcéré depuis le début de l'année 2019, ce que la société Financo ou l'huissier de justice ne pouvaient ignorer selon lui, et d'autre part que l'organisme prêteur n'a jamais vérifié sa solvabilité ni ne l'a informé sur les offres de crédit ou sur ses facultés de rétractation.

La société Financo expose de son côté qu'elle ignorait totalement l'incarcération de M. [P] au moment de la délivrance des courriers de mise en demeure et souligne que celui-ci produit des bulletins de paie de décembre 2020 à mai 2021 laissant supposer qu'il n'était plus incarcéré à la date de la délivrance de l'assignation ni à la date de délibéré du jugement. Elle fait valoir que la lettre de mise en demeure lui est revenue avec la mention 'pli avisé non réclamé' et non avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse', que l'huissier de justice à toutes les diligences pour vérifier l'adresse de M. [P]. Enfin, elle rappelle qu'aux termes du contrat de prêt, il appartenait à M. [P] de faire connaître au prêteur tout changement d'information le concernant, notamment concernant son domicile.

S'agissant de la solvabilité de l'emprunteur, la société Financo soutient qu'elle n'est pas tenue de contrôler la véracité des déclarations faites par celui-ci et qu'elle avait eu communication d'un bulletin de salaire dont il ressortait que M. [P] était fonctionnaire et disposait d'un revenu mensuel de 2 180,54 euros.

Il convient de rappeler que, si le contrat de prêt peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier, sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, la société Financo justifie avoir adressé à M. [P], sous le nom de [R], le 20 septembre 2019, une mise en demeure de payer sous huitaine l'arriéré des échéances échues impayées par courrier recommandé et que cette lettre lui est revenue avec la mention 'pli avisé non réclamé'. L'appelant n'établissant ni ses dates d'incarcération ni la connaissance par l'organisme financier de son incarcération et ne rapportant pas davantage la preuve d'un règlement dans le délai imparti par le courrier de mise en demeure, la déchéance du terme est bien acquise à la société Financo.

De même, contrairement à ce que soutient M. [P], la société Financo démontre qu'elle a vérifié sa solvabilité puisqu'elle produit une fiche de dialogue en date du 20 août 2018, dans lequel celui-ci a indiqué être enseignant dans la fonction publique et disposer d'un salaire mensuel net de 2 200 euros et sur laquelle il n'a déclaré aucune charge mensuelle. En l'absence d'anomalies apparentes, la banque n'était pas tenue de vérifier l'exactitude des informations ainsi communiquées. La société Financo justifie en outre avoir, préalablement à la conclusion du contrat de prêt, consulté le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.

En revanche, s'agissant de son obligation de délivrer à l'emprunteur les informations précontractuelles nécessaires à la comparaison de différentes offres et lui permettant d'appréhender clairement l'étendue de son engagement, prévues par l'article L. 111-1 du code de la consommation, la société Financo, qui n'a pas conclu sur ce point, ne justifie pas de la délivrance de ces informations ni ne produit la fiche d'informations précontractuelles qui aurait été remise à M. [P].

Il est de principe que la seule mention sur l'offre de ce que l'emprunteur a reconnu avoir reçu une fiche d'informations précontractuelles ne permet pas de considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur puisque reconnaître le plein effet d'une telle clause entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l'exécution des obligations du prêteur de nature à compromettre l'effectivité du droit européen du crédit à la consommation.

De surcroît, à supposer même que la remise de ce document soit ainsi établie, le défaut de production d'une copie de la fiche d'information, dont l'existence même est donc douteuse, fait obstacle à ce que la cour en contrôle le contenu.

Il convient donc de prononcer la déchéance du droit du prêteur aux intérêts, M. [P] n'étant plus tenu, conformément à l'article L. 341-1 du code de la consommation, qu'au paiement du seul capital. La date du premier impayé non régularisé se situant au 4 mai 2019, M. [P] sera condamné au paiement, selon le tableau d'amortissement produit, de la somme de 14 252,02 euros.

Par ailleurs, la société Financo qui demande la confirmation du jugement, ne remet pas en cause en appel la réduction du montant de la clause pénale par le tribunal à un euro de sorte que cette disposition sera donc confirmée.

M. [P] sollicite, à titre subsidiaire, les plus larges délais de paiement pour s'acquitter du paiement de sa dette. A l'appui de cette demande, il produit son avis d'imposition de l'année 2020 sur ses revenus de l'année 2019 et des bulletins de salaires pour les mois de décembre 2020 à mai 2021. Mais ne justifiant pas de sa situation économique actuelle et alors qu'il a déjà bénéficié des délais inhérents à la procédure, sa demande sera rejetée.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné M. [G]-[M] [R] à payer à la société Financo la somme de 14 771 euros avec intérêt au taux contractuel de 4,20% à compter du 31 janvier 2020, au titre du solde du prêt, et la somme de 185,30 euros au titre des intérêts de retard avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2020 et confirmer sur le surplus sauf à préciser que les condamnations concernent désormais [G]-[M] [P].

Comme en première instance, il n'y a pas matière à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque en cause d'appel.

Néanmoins, partie principalement succombante, M. [P] supportera les entiers dépens de d'appel, après réformation du jugement attaqué en ce sens.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Constate que M. [G]-[M] [R] a changé de nom et s'appelle désormais [G]-[M] [P],

Infirme le jugement rendu le 8 janvier 2021par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Quimper en ce qu'il a condamné M. [G]-[M] [R] à payer à la société Financo la somme de 14 771 euros avec intérêt au taux contractuel de 4,20% à compter du 31 janvier 2020, au titre du solde du prêt, et la somme de 185,30 euros au titre des intérêts de retard avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2020,

Statuant à nouveau sur ce point :

Condamne M. [G]-[M] [P] à payer à la société Financo la somme de 14 252,02 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Confirme le jugement sur ses autres dispositions sauf à préciser qu'elles concernent désormais M. [G]-[M] [P],

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [G]-[M] [P] aux entiers dépens,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/05043
Date de la décision : 07/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-07;21.05043 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award