1ère Chambre
ARRÊT N°134
N° RG 21/02995
N° Portalis DBVL-V-B7F-RUGR
M. [F] [R]
C/
Me [T] [A]
Me [J] [E]
S.C.P. ROCHELOIS BESINS BENOIT GOUGUENHEIM GRANDIN LEDEC
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARI S ET D'ILE DE FRANCE
Société PROMOBAT
S.A. CNP ASSURANCES
SAS PROMOTION PICHET
S.A.R.L. PATRIMOINE HORIZON
Société OFFICE NOTARIAL B'A
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 7 MAI 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,
Assesseur : Monsieur Philippe BRICOGNE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 novembre 2023 tenue en double rapporteur sans opposition des parties, par Mme Véronique Veillard, présidente de chambre entendue en son rapport, et M. Philippe Bricogne, président de chambre
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 7 mai 2024 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré annoncé au 30 janvier 2024 à l'issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [F] [R]
né le 22 Février 1965 à [Localité 17] (27)
[Adresse 10]
[Localité 15]
Représenté par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Valérie PLOUTON, Plaidant, avocat au barreau de LYON
INTIMÉS :
Maître Dominique POIRAUD
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représenté par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX
Maître Marie LEDUC
[Adresse 4]
[Localité 12]
es qualité de notaire procurateur
Représenté par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Michel RONZEAU, Plaidant, avocat au barreau de VAL D'OISE
La SCP ROCHELOIS BESINS BENOIT GOUGUENHEIM GRANDIN LEDEC, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 4]
[Localité 12]
Représentée par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Michel RONZEAU, Plaidant, avocat au barreau de VAL D'OISE
La société PROMOBAT, SARL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX
La société PROMOTION PICHET, SAS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX
La société OFFICE NOTARIAL B'A, anciennement dénommée SCP [N] [K] DELEGLISE-HAUTEFEUILLE MOGA, SARL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX
La société PATRIMOINE HORIZON, SARL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 9]
[Localité 13]
Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Laurence GUEGAN-GELINET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
La société CNP ASSURANCES, SA agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 8]
[Localité 11]
Représentée par Me Valérie DOUARD de VDH AVOCAT, avocat au barreau de RENNES
La CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 18] ET D'ILE DE FRANCE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 5]
[Localité 14]
Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Eric GILLERON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
FAITS ET PROCÉDURE
1. Courant 2006 à 2008, la sarl Promobat a entrepris de faire construire au [Adresse 1]) un programme immobilier dénommé 'Pavillon Morgan' éligible au dispositif fiscal de Robien dit 'recentré', composé de 50 logements du T2 au T4 à usage d'habitation, dont elle a, par l'intermédiaire de la sarl G2P Développement - filiale du groupe Pichet - confié la commercialisation en l'état futur d'achèvement à la sarl Patrimoine Horizon en vertu d'un mandat du 15 septembre 2005.
2. En mains une simulation fiscale du 17 novembre 2006 mentionnant :
- un gain fiscal de 27.296 € au bout de 10 années,
- une capitalisation de 65.221 € au terme d'une période de 10 années,
- une revente du bien à 199.479 € au terme d'une durée de 10 années,
M. [F] [R] a signé le 17 novembre 2006 avec la sarl Promobat un contrat de réservation d'un appartement au pavillon Morgan puis a, le 9 juillet 2007, par l'intermédiaire d'une procuration préalablement donnée le 6 avril 2007 à maître [E], notaire procurateur à [Localité 18], fait l'acquisition par acte reçu par maître [A], notaire à [Localité 16], chargé de recevoir la vente, au prix de 175.700 €, frais de notaire inclus, intégralement financé par un crédit octroyé par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et Île-de-France (ci-après le Crédit agricole) remboursable sur 25 ans, d'un appartement de type T3 d'une superficie de 60,50 m² avec parking aérien (lots n° 53 et 78) qui lui a été livré le 8 avril 2008 et dont il confiait la gestion locative à la société Gestia (filiale du groupe Pichet) suivant mandat de gestion du 7 novembre 2007 avec une assurance de loyers souscrite auprès de la Lyonnaise de garanties.
3. Reprochant des carences locatives, des loyers revus à la baisse, des changements incessants de locataires et une surévaluation de la valeur de l'appartement, M. [R] a, par actes d'huissier des 25 et 26 octobre 2016, fait assigner devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc (devenu tribunal judiciaire le 1er janvier 2020) :
- la sas Promotion Pichet, société promotrice,
- la sarl Promobat, société venderesse,
- la sarl Patrimoine Horizon, société commercialisatrice,
- maître [A] et la scp Poiraud Foucaud Jean, notaires instrumentaires,
- maître [E] et la scp Rochelois Besins Benoît Gouguenheim Grandin [E], notaires procurateurs,
- l'établissement financier, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et Île-de-France,
- et la sa Cnp Assurances, assureur du prêt,
aux fins d'une part d'annulation de la vente pour dol et non-respect des dispositions du code de la consommation et, d'autre part, d'obtention de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis du fait des fautes commises par ces intervenants.
4. La société de gestion et l'assureur locatif (ou les assureurs locatifs successifs) n'ont pas été assignés.
5. Par jugement du 15 février 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a :
- rejeté l'exception d'irrecevabilité fondée sur le défaut de publication de l'assignation au service de publicité foncière de [Localité 19],
- dit que l'action en nullité de la vente pour dol de M. [R] est prescrite,
- déclaré irrecevables ses prétentions dirigées contre les sociétés Promobat, Promotion Pichet, Patrimoine Horizon, maître [E] et la scp Rochelois- Besins associés, maître [A] et la scp [K] Deleglise Hautefeuille Moga, anciennement dénommée scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et [O] [K],
- déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de M. [R] dirigées contre la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] Île-de-France,
- dit n'y avoir lieu à statuer sur les demandes reconventionnelles des sociétés Promobat, Promotion Pichet et Patrimoine Horizon, maître [E] et la scp Rochelois Besins associés, maître [A] et la scp [K] Deleglise Hautefeuille Moga, anciennement dénommée scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et [O] [K], la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] Île-de-France et de la société Cnp Assurances,
- rejeté la demande de résiliation du contrat d'assurance,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné M. [R] à payer aux sociétés Promobat et Promotion Pichet la somme de 200 €, à la société Patrimoine Horizon la somme de 200 €, à maître [E] et à la scp Rochelois Besins associés la somme de 200 €, à maître [A] et la scp Foucaud Jean Deleglise Hautefeuille Moga anciennement dénommée scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et Philippe Jean la somme de 200 €, à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] Île-de-France la somme de 200 € et à la société Cnp Assurances la somme de 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [R] aux dépens dont distraction au profit de la scp Duval, de maître Bellier, de maître Renard conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- rejeté la demande relative à l'exécution provisoire.
6. M. [R] a interjeté appel le 14 mai 2021 sauf du rejet de l'irrecevabilité tirée de l'absence de publication de l'assignation au service de la publicité foncière.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
7. M. [R] expose ses prétentions et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 23 août 2023 aux termes desquelles il demande à la cour d'appel de Rennes de :
I - in limine litis, sur les fins de non-recevoir opposées par les parties adverses,
1/ sur la fin de non-recevoir tirée de la non publication de l'assignation,
- confirmant le jugement dont appel,
- rejeter la fin de non-recevoir opposée à ce titre,
2/ sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de 5 ans s'agissant de la demande en nullité de la vente pour dol ou de la reconnaissance de la responsabilité des différents intervenants pour dol,
- infirmant le jugement dont appel,
- déclarer recevable la demande en nullité de la vente pour dol et ou l'action en responsabilité contre les différents intervenants pour dol comme n'étant pas prescrite,
- rejeter la fin de non-recevoir pour cause de prescription opposée par les différents défendeurs,
II - à titre principal, sur la nullité de la vente pour dol,
- infirmant le jugement dont appel,
- prononcer la nullité de la vente immobilière consentie par la sarl Promobat à M. [R] pour dol,
- à titre complémentaire, sur les demandes résultant du prononcé de la nullité de la vente immobilière intervenue entre la sarl Promobat et M. [R],
1/ sur la vente,
- en conséquence directe de la nullité de la vente,
- condamner la sarl Promobat à rembourser à M. [R] le prix de la vente, soit la somme de 175.700 €, assorti des intérêts au taux légal à compter de la date de la vente définitive, soit le 9 juillet 2007,
- dire et juger que la restitution du bien par M. [R] à la sarl Promobat est subordonnée à la restitution préalable de son prix de vente,
2/ sur le prêt,
- dire et juger que l'annulation de la vente intervenue entre M. [R] et la sarl Promobat entraine de facto l'annulation pure et simple du prêt souscrit pour financer cette acquisition,
- en conséquence,
- prononcer la nullité du prêt souscrit par M. [R] avec la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et d'Île-de-France,
- se prononcer sur la restitution de la somme (non chiffrée) restant due au titre du prêt souscrit auprès de la caisse régionale Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et d'Île-de-France par lui, déduction faite des remboursements (non chiffrés) effectués par lui au titre de ce prêt à la date du prononcé de la décision à intervenir,
- prononcer en outre, à compter du prononcé de la décision à intervenir, la résiliation du contrat d'assurance affecté à ce prêt,
- condamner la Banque au remboursement de la totalité des sommes versées (non chiffrées) au titre de la conclusion du contrat de prêt, et en particulier les intérêts conventionnels, les frais de dossier, et les frais d'assurance-crédit emprunteur,
- ordonner la compensation judiciaire entre lesdites sommes (non chiffrées) et celles devant lui être restituées par la banque,
- condamner in solidum la sarl Promobat et la sas Pichet Promotion à garantir le paiement de ces sommes (non chiffrées),
3/ sur les dommages et intérêts,
- condamner in solidum les sociétés Promobat, Pichet Promotion et ACE (sic) si l'annulation de la vente est prononcée pour dol à lui verser les sommes de :
- 37.963 € au titre du préjudice subi du fait de la carence locative, arrêtée au 31 décembre 2019 à titre de dommages et intérêts complémentaires,
- 20.000 € en réparation du préjudice moral né des obstacles et inquiétudes rencontrées depuis la réalisation de l'opération,
- condamner in solidum les sociétés Promobat, Pichet Promotion et Patrimoine Horizon si l'annulation de la vente est prononcée pour dol à :
- le relever et garantir à première demande de toute reprise fiscale éventuelle effectuée par l'administration des impôts du fait de la rétroactivité de la nullité de la vente,
- le rembourser de toutes les dépenses et sommes (non chiffrées) afférentes à la signature de la vente en état futur d'achèvement du 7 juillet 2007, en ce compris les frais notariés et les droits d'enregistrement,
- le rembourser des dépenses (non chiffrée) liées au contrat de gestion immobilière avec la société Gestia, filiale du groupe Pichet,
- ordonner qu'il conservera les loyers perçus jusqu'au jour du jugement, à titre de dommages-intérêts complémentaires, ainsi que les éventuelles indemnités d'assurance en cas de période de carence locative indemnisée,
III - à titre infiniment subsidiaire, sur la responsabilité des différents intervenants,
- infirmant le jugement dont appel, en ce qu'il l'a déclaré irrecevable en ses demandes comme étant prescrites,
- déclarer recevable son action en responsabilité engagée contre les intimés sur le fondement de la responsabilité extra contractuelle des différents intervenants à l'opération d'acquisition immobilière,
1/ sur la responsabilité de la sarl Promobat, venderesse,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner la sarl Promobat à l'indemniser de ses préjudices de perte de chance de ne pas s'être engagé dans l'opération,
2/ sur la responsabilité de Pichet Promotion, promoteur,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner la sarl Promobat à l'indemniser de son préjudice de perte de chance de ne pas s'être engagé dans l'opération,
3/ sur la responsabilité la société Patrimoine Horizon, commercialisatrice,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner la société Patrimoine Horizon à l'indemniser de son préjudice de perte de chance de ne pas s'être engagé dans l'opération,
4/ sur la responsabilité du notaire instrumentaire, maître [A] et la scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et Philippe Jean,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner maître [A] et la scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et [O] [K] à l'indemniser de ses différents préjudices sur le fondement du manquement au devoir de conseil et d'information,
5/ sur la responsabilité du notaire procurateur maître [E] et la scp Rochelois Besins [V] Gouguenheim Grandin et [E], notaires associés,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner maître [V] [P] (sic) à l'indemniser de ses différents préjudices, en solidarité avec les autres intervenants, en ce qu'il a manqué à son obligation de conseil, de loyauté, et d'information générale,
6/ sur les condamnations solidaires des différents intervenants à indemniser les préjudices de M. [R] :
6-1/ sur la réparation de perte de chance,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner la sarl Promobat, la sas Pichet Promotion, la sarl Patrimoine Horizon, maître [A], notaire instrumentaire et la scp [A], Foucaud et [K] et la scp Rochelois Besins [V] Gouguenheim Grandin et [E], notaires associés, notaire procurateur, à l'indemniser de la perte d'une chance de n'avoir pas contracté, ou d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses et plus conformes au marché immobilier local, selon les montants qui suivent :
- à titre principal, 175.700 € correspondant au prix d'acquisition, au titre de la perte de chance de ne pas avoir contracté,
- à titre subsidiaire, et si la cour d'appel ne retenait pas la perte de chance de ne pas avoir contracté, 105.420 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice de perte de chance de ne pas avoir contracté à de meilleures conditions,
- outre intérêts aux taux légal depuis la date d'acquisition,
6-2/ à titre complémentaire de la réparation de perte de chance,
- condamner solidairement la sarl Promobat, la sas Pichet Promotion, la sarl Patrimoine Horizon, maître [A] et la scp Poiraud, Foucaud et [K], maître [E] et la scp Rochelois Besins [V] Gouguenheim Grandin et [E], notaires associés, notaire procurateur, et le Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et Île-de-France au paiement de la somme de 37.963 € au titre du préjudice subi du fait de la carence locative à date du 30 décembre 2019 à titre de dommages-intérêts complémentaires,
- condamner solidairement la sarl Promobat, la sas Pichet Promotion, la sarl Patrimoine Horizon, maître [T] [A] et la scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et [O] [K], maître [G] [E] et la société civile professionnelle Rochelois Besins [V] Gouguenheim Grandin et [E], notaires associés, notaire procurateur, et le Crédit Agricole mutuel de [Localité 18] et Ile de France au paiement de la somme de 118.292 € au titre du préjudice financier, complémentaire subi du fait de la non-conformité de la réalité du ratio coût par rapport à la simulation présentée par la société Groupe Pichet et ses filiales, conduisant à une perte importante, à titre de dommages et intérêts complémentaires au profit de M. [R],
- rejeter toutes demandes reconventionnelles formulées par les codéfendeurs en lien avec la demande de réparation des préjudices du concluant,
IV - sur les demandes à l'égard de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et d'Île de France,
- infirmant le jugement dont appel,
1/ sur la responsabilité de la banque au regard du prêt proposé à M. [R],
- condamner le Crédit agricole au paiement de la somme de 20.000 € à titre d'indemnisation de son préjudice spécifique à ce titre, à savoir la perte de chance de ne pas s'être engagé dans cette opération, et plus précisément dans ce type d'emprunt, à défaut d'information, pour lui avoir fait souscrire un prêt particulièrement onéreux, inaccessible en termes de compréhension, aléatoire quant à l'évolution de son coût pour l'avenir et beaucoup trop long, ainsi qu'au paiement des sommes suivantes (non chiffrées) à titre de dommages et intérêts complémentaires :
- remboursement des frais de dossier du prêt,
- remboursement des frais de caution,
- remboursement de la commission réglée par la banque à ACE,
- remboursement de l'assurance de prêt souscrite, pour les échéances payées à ce jour,
- remboursement de l'assurance de prêt souscrite pour l'avenir qui prendra la forme de la diminution de la mensualité,
- remboursement de tous les frais annexes perçus sur le relevé de compte afférent à ce prêt.
2/ sur le caractère erroné du TEG,
- prononcer la nullité du taux d'intérêt contractuel tel que mentionné dans l'offre de prêt du 2 février 2007 et la déchéance du droit aux intérêts contractuels du prêteur,
- en conséquence,
- et à titre de sanction, dire et juger que le Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et Île-de-France devra appliquer le taux d'intérêt légal au lieu et place du taux d'intérêt conventionnel, et ce pour toute la période de l'emprunt y compris de manière rétroactive,
- l'enjoindre de communiquer un nouveau décompte des intérêts jusqu'au jour du jugement, avec application du taux d'intérêt légal depuis le début de la période,
- condamner le Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et Île-de-France à lui rembourser le montant (non chiffré) du trop-perçu au regard des intérêts au taux contractuel sur l'antériorité, avec capitalisation des intérêts à compter de l'assignation introductive d'instance,
IV - à titre complémentaire, sur les autres demandes formulées dans tous les cas de condamnation,
1/ sur le préjudice moral, administratif et psychologique,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner solidairement la sarl Promobat, la sas Pichet Promotion, la sarl Patrimoine Horizon, maître [T] [A] et la scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et [O] [K], maître [E] et la scp Rochelois Besins [V] Gouguenheim Grandin et [E], notaires associés, notaire procurateur, et le Crédit agricole au paiement de la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral, administratif, et psychologique, de M. [R],
- dans tous les cas, rejeter tout appel incident qui serait formulé par l'une des parties intimées à quelque titre que ce soit,
2/ sur l'article 700 du code de procédure civile,
- infirmant le jugement dont appel,
- dans un souci d'équité, et pour le cas où la cour d'appel devrait confirmer la décision de première instance, et compte tenu notamment du fait qu'il ne saurait être occulté que le concluant reste une victime du système mis en place pour le convaincre de cette acquisition, réformer la décision en ce qu'elle a accordé une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- y ajoutant en cause d'appel,
- en raison de l'important travail sur ce type de dossier et de la multiplicité de demandes et de défendeurs impliquant des frais d'avocat importants, condamner la sarl Promobat, la sas Pichet Promotion, la sarl Patrimoine Horizon, maître [T] [A], notaire instrumentaire, la scp [T] [A], [W] [N] et [O] [K] et maître [E] et la scp Rochelois Besins [V] Gouguenheim Grandin et [E], notaires associés, notaire procurateur, à verser à M. [R] la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles,
- rejeter les demandes reconventionnelles formulées à ce titre par les parties adverses en cause d'appel,
3/ sur les dépens,
- infirmant le jugement dont appel,
- condamner en outre, sous la même solidarité, la sarl Promobat, la sas Pichet Promotion, la sarl Patrimoine Horizon, maître [T] [A] et la scp Dominique Poiraud, Denys Foucaud et [O] [K], maître [E] et la scp Rochelois Besins [V] Gouguenheim Grandin et [E], notaires associés, notaire procurateur, et le Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et Île-de-France aux entiers dépens de premier instance et d'appel, et ce incluant le coût :
- des frais de signification des assignations dans le cadre de l'instance,
- de leurs publications à la conservation des hypothèques,
- de la publication de l'arrêt à intervenir à la conservation des hypothèques,
- de la signification de l'arrêt à intervenir aux différentes parties,
- rejeter les demandes reconventionnelles formulées à ce titre par les parties adverses en cause d'appel.
8. La sarl Promobat et la sas Promotion Pichet exposent leurs prétentions et moyens dans leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 13 octobre 2023 aux termes desquelles elles demandent à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,
- en conséquence,
- juger irrecevables les demandes formulées par l'appelant à leur encontre,
- à titre subsidiaire et si par extraordinaire la cour devait réformer le jugement entrepris et déclarer les demandes de M. [R] recevables, l'en débouter,
- Ã titre plus subsidiaire,
- si la nullité du contrat de vente était prononcée,
- condamner l'appelant à restituer le bien libre de toute inscription,
- le condamner, en plus de la restitution du bien, à verser à la sarl Promobat l'ensemble des loyers et des indemnités d'assurance (non chiffrés) au titre de la vacance locative perçus entre le jour de la vente et la restitution effective du bien,
- si la nullité du contrat de prêt était prononcée,
- ordonner à la sarl Promobat de verser directement entre les mains du Crédit agricole le montant des sommes (non chiffrées) prêtées au demandeur dans la limite du prix de vente à restituer,
- ordonner l'annulation et la mainlevée des inscriptions d'hypothèques et de privilèges prises sur le bien, du chef du requérant,
- en tout état de cause,
- débouter le Crédit agricole ainsi que la sarl Patrimoine Horizon de leurs demandes à leur encontre,
- condamner l'appelant au paiement d'une indemnité de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner au paiement des dépens dont distraction au profit de la selarl Ab Litis, avocat, sur ses affirmations de droit.
9. La sarl Patrimoine Horizon expose ses prétentions et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 10 novembre 2021 aux termes desquelles elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- y ajoutant,
- condamner M. [R] au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [R] aux entiers dépens de l'instance,
- à titre subsidiaire, en cas d'infirmation ou de réformation du jugement,
- Ã titre principal,
- dire et juger que la société Patrimoine Horizon n'a commis aucune faute,
- Ã titre subsidiaire,
- dire et juger que M. [R] ne subit aucun préjudice,
- à titre très subsidiaire,
- dire et juger qu'il n'existe aucun lien de causalité entre la prétendue faute de la société Patrimoine Horizon et le préjudice de M. [R],
- Ã titre infiniment subsidiaire,
- débouter M. [R] de sa demande de condamnation in solidum,
- dire et juger que ses demandes sont manifestement disproportionnées,
- en tout état de cause,
- le débouter de ses demandes,
- rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,
- condamner in solidum les sociétés Promobat et Promotion Pichet à la relever et garantir des éventuelles condamnations prononcées à son encontre,
- condamner M. [R], ou toute autre partie succombante, au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner, ou toute autre partie succombante, aux dépens de l'instance.
10. Maître [A] et la sarl Office notarial B'A anciennement dénommée scp Foucaud Jean Deleglise Hautefeuille Moga [A] exposent leurs prétentions et moyens dans leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 9 novembre 2021 aux termes desquelles ils demandent à la cour de :
- confirmer le jugement déféré,
- à titre subsidiaire et si par extraordinaire la cour devait réformer le jugement entrepris et déclarer les demandes de M. [R] recevables,
- débouter l'appelant de ses demandes à leur encontre,
- en tout état de cause,
- débouter le Crédit agricole de ses demandes à leur encontre,
- condamner M. [R] à leur payer ensemble une indemnité de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux dépens,
- autoriser la scp Ab Litis maîtres Pelois Amoyel Vicquelin avocats postulants à les recouvrer conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
11. Maître [E] et la scp Rochelois Besins Benoît Gouguenheim Grandin Leduc exposent leurs prétentions et moyens dans leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 4 février 2022 aux termes desquelles elles demandent à la cour de :
- déclarer M. [R] irrecevable, et en tout cas mal fondé, en son appel,
- le débouter de ses demandes dirigées à leur encontre,
- confirmer le jugement rendu,
- très subsidiairement,
- constater l'absence de faute du notaire et l'absence de préjudice actuel et certain en lien avec une hypothétique faute de l'étude,
- en conséquence,
- débouter l'appelant, la banque et tous succombants, de leurs demandes dirigées à l'encontre du notaire concluant,
- Ã titre infiniment subsidiaire,
- condamner tous succombants à relever et garantir le notaire concluant de toutes condamnations prononcées à son encontre,
- les condamner à lui payer la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner aux dépens dont distraction au profit de maître Pelois.
12. La caisse régionale de Crédit agricole mutuel de [Localité 18] et d'Île-de-France expose ses prétentions et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 26 janvier 2022 aux termes desquelles elle demande à la cour de :
- la dire recevable et bien fondée en ses demandes,
- en conséquence, confirmer le jugement entrepris,
- subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour infirmait le jugement en tout ou partie,
- juger qu'elle est étrangère au litige en annulation de la vente du bien immobilier et s'en rapporte à justice sur les mérites de cette demande, sa recevabilité et son bien-fondé,
- si la cour prononçait l'annulation du contrat de vente et par voie de conséquence la résolution du contrat accessoire de prêt,
- condamner M. [R] à lui rembourser la somme de 175.700 € correspondant au montant du prêt immobilier consenti déduction faite du montant des sommes déjà versées au jour du remboursement au titre du capital et des intérêts.
- débouter M. [R] de sa demande de remboursement des primes d'assurance décès invalidité perçues par l'assureur et non pas le Crédit Agricole d'Ile-de-France,
- condamner in solidum la ou les parties succombantes à lui payer à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier une somme de 84.506,31 € correspondant au montant des intérêts acquittés au titre du prêt, après paiement de l'échéance du 5 octobre 2021, à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir,
- condamner in solidum la ou les parties succombantes à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 26.000 € en réparation de son préjudice financier correspondant à la perte des intérêts à échoir sur la période allant du 5 octobre 2021 au 5 mars 2033, à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir,
- condamner in solidum la ou les parties succombantes, à supporter les frais d'inscription d'hypothèque et les frais de main levée d'hypothèque en cas d'annulation (non chiffrés),
- condamner in solidum la ou les parties succombantes à lui régler à titre de dommages et intérêts complémentaires une somme équivalente au montant (non chiffré) des primes d'assurance si, par impossible, la cour ordonnait leur restitution par le Crédit Agricole d'Ile-de-France à M. [R],
- ordonner à la sarl Promobat de lui verser directement le montant des sommes prêtées (non chiffrées) dans la limite du prix de vente à restituer,
- débouter M. [R] de ses demandes de dommages et intérêts dirigées à son encontre,
- débouter M. [R] de sa demande de nullité du TEG,
- débouter M. [R] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
- condamner M. [R], ou toute partie succombante, solidairement, à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
- le condamner, ou toute partie succombante, aux dépens dont distraction au profit de maître Chaudet, avocat constitué, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
13. La Cnp Assurances expose ses prétentions et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 10 novembre 2021 aux termes desquelles elle demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- dans l'hypothèse où la cour d'appel prononcerait la nullité du contrat de vente et la nullité ou résolution subséquente du contrat de prêt,
- prononcer la résiliation du contrat d'assurance emprunteur conclu entre M. [R] et la société Cnp Assurances, avec effet au jour où l'arrêt à intervenir deviendra définitif,
- débouter M. [R] de sa demande tendant à obtenir la restitution des primes d'assurance versées en exécution du contrat d'assurance emprunteur jusqu'au caractère définitif de la décision à intervenir,
- à titre subsidiaire, condamner M. [R] à verser une indemnité compensatrice correspondant aux primes encaissées (non chiffrées) du 2 février 2007 jusqu'au caractère définitif de la décision à intervenir,
- constater qu'aucune demande n'est formulée à son encontre,
- en tout état de cause,
- condamner in solidum toutes parties succombantes à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les mêmes aux dépens.
14. L'instruction de l'affaire a été clôturée le 31 octobre 2023.
15. Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.
MOTIFS DE L'ARRÊT
16. À titre liminaire, il convient de rappeler que l'office de la cour d'appel est de trancher le litige et non de donner suite à des demandes de 'constater', 'dire' ou 'dire et juger' qui, hors les cas prévus par la loi, ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile lorsqu'elles sont seulement la reprise des moyens censés les fonder.
1) Sur la fin de non-recevoir tirée de la non publication de l'assignation
17. M. [R], qui n'a pas interjeté appel de ce chef de jugement, demande la confirmation du rejet de l'exception d'irrecevabilité de son action fondée sur l'absence de publication de l'assignation au service de la publicité foncière.
18. Il n'a pas non plus été interjeté appel incident de ce chef de jugement.
19. La cour n'en est donc pas saisie et n'a pas à statuer sur ce point qui se trouve confirmé faute d'appel.
2) Sur la prescription de l'action en nullité de la vente pour dol
20. M. [R] soutient que :
- le point de départ de l'action en nullité de la vente immobilière fondée sur le dol n'est ni la date de conclusion du contrat ni celle de la livraison du bien immobilier dès lors que les difficultés locatives ne sont pas encore connues à ces dates respectives, mais bien la date de la découverte des faits dolosifs, qui, en matière d'opération de défiscalisation immobilière, se révèlent de manière progressive, notamment à la faveur de la consultation d'un avocat en 2016 ou d'une estimation immobilière réalisée en l'espèce en 2018, tandis qu'une première longue période carence de location couverte par une assurance locative, qui a réglé les loyers manquants, ne permet pas à l'acquéreur confronté par ailleurs à un promoteur puissant et peu scrupuleux d'avoir la pleine conscience du dol,
- en l'espèce, ce n'est qu'à compter de la notification par Gestia le 11  décembre 2014 de la résiliation de la police d'assurance à effet au 1er janvier 2015 que, bien que par ailleurs étonné des périodes de non location et des baisses de loyer, il s'est inquiété de la viabilité de son investissement et de sa conformité aux stipulations contractuelles, que la compagnie d'assurance ne lui a du reste adressé au 1er janvier 2014 aucun versement pour la carence locative démarrée en 2013 et que le point de départ de la prescription de son action doit donc se situer :
- soit à l'issue de la période de vacance locative significative fin 2013, de sorte que la prescription avait une date d'échéance à fin 2018,
- soit à compter de la date de résiliation du contrat assurance locative à effet du 1er janvier 2015 qui était un élément majeur et essentiel de cet investissement, de sorte que la prescription se terminait le 1er janvier 2020,
- s'agissant du point de départ de la prescription au regard du prix de revente, il se situe selon lui au 8 avril 2017, soit 9 ans après la date de livraison, période obligatoire de conservation du bien dans le cadre de la loi Robien,
- de sorte qu'engagée par assignations des 25 et 26 octobre 2016, son action n'est pas prescrite,
21. Les sociétés Pichet et Promobat soutiennent que l'appelant avait en sa possession dès l'origine tous les éléments lui permettant de se forger une opinion sur les caractéristiques du bien vendu, qu'il n'est certainement pas resté dix ans dans l'ignorance des manquements prétendument commis à son détriment, surtout au vu de leur gravité alléguée, que le point de départ de la prescription ne peut être fixé à une date aussi subjective que celle de l'estimation diligentée par ses soins mais que le prix de vente était connu et aurait pu et dû être analysé par l'acquéreur dès la signature du contrat de réservation, ou au plus tard dès la livraison du bien, que les vacances locatives dès 2008 doublées de la résiliation de la première police d'assurance en 2010 étaient de nature à faire courir la prescription, que les difficultés dont se plaint l'appelant tiennent à l'évolution du marché immobilier postérieurement à la conclusion de la vente, notamment au regard de la crise imprévisible et sans précédent intervenue à compter de 2008, que sur le fond, les man'uvres dolosives ne sont pas établies, que les demandes au titre des préjudices devront être rejetées.
22. La sarl Patrimoine Horizon soutient que la prescription de l'action en nullité débute au jour de la signature de l'acte authentique de vente, soit le 9 juillet 2007, et que M. [R] avait jusqu'au 9 juillet 2012 pour introduire son action en justice de sorte qu'introduite par assignation du 25 octobre 2016, elle est prescrite, que par ailleurs ce point de départ ne peut se situer au jour où il a fait estimer le bien puisque cela reviendrait à donner à son délai de prescription un caractère purement potestatif.
23. Sur ce, l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme des contrats, dispose que 'Dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.
Ce temps ne court dans le cas de violence que du jour où elle a cessé, dans le cas d'erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts.'
24. S'agissant du dol concernant la valeur et la rentabilité locatives, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, l'acquisition de l'appartement s'inscrivait dans un dispositif complexe faisant intervenir plusieurs sociétés du groupe [L] Pichet, promoteur, commercialisateur et gestionnaire, dans la perspective d'une mise en location permettant aux acquéreurs d'appartements dans le pavillon Morgan à [Localité 19], dont M. [R], de bénéficier du dispositif de défiscalisation de Robien.
25. Ingénieur au moment de l'opération immobilière, M. [R] disposait à cette époque d'un revenu net imposable de 51.774 €, avec une évolution évaluée à 60.086 € en 2016, de sorte qu'il pouvait être légitimement intéressé à réduire son imposition.
26. En ce sens, la simulation fiscale personnalisée remise le 17 novembre 2006 par la société Patrimoine Horizon à M. [R] lui a annoncé une économie d'impôts de 27.296 € sur 10 ans, doublée d'une évaluation du capital net d'impôts au terme de l'acquisition à 199.479 €.
27. Le descriptif de l'opération a ainsi vanté les atouts de la commune de [Localité 19] comme suit : 'Dynamique, [Localité 19] rassemble de nombreuses entreprises et tous les services publics. Des secteurs très diversifiés sont représentés de l'agroalimentaire à l'industrie en passant par le zoo Pôle centre de recherche internationalement reconnu' Ville universitaire depuis 1987, [Localité 19] offre à ses étudiants une qualité d'enseignement identique à celle des grandes villes. Ce sont 3800 étudiants qui se répartissent dans les établissements supérieurs de [Localité 19] et de son agglomération. Saint-Brieuc, c'est la ville universitaire par excellence.'
28. Il a adossé l'investissement à une assurance locative garantissant l'indemnisation des carences et des vacances locatives et des non-paiements des loyers.
29. L'appartement a été livré le 8 avril 2008, ce n'est que le 9 septembre 2008 que le 1er locataire est entré dans les lieux, soit au début du 6ème mois suivant cette livraison.
30. Puis l'appartement s'est trouvé à nouveau vide de tout occupant dès le 15 janvier 2010 et ce jusqu'au 14 février 2011 au montant du loyer tel qu'espéré de 580 € par mois, soit pendant 13 mois consécutifs.
31. Dans ce contexte locatif défavorable, il a été notifié à M. [R] une baisse de loyer à 520 € par mois à compter du 14 février 2011 au lieu de 580 € tel que fixé depuis octobre 2010.
32. Ainsi, contrairement au tableau synthétique établi par M. [R] lui-même, le loyer mensuel n'était plus de 580 € en février 2011 comme il le mentionne à tort au titre de la vacance locative alors en cours mais bien de 520 € par mois, ce qu'il n'ignorait pas à cette époque. Cette baisse de loyer sera du reste acceptée par lui pour le nouveau bail souscrit à compter du 1er septembre 2011.
33. En dépit de cette baisse de loyer, à partir du mois de février 2011 jusqu'au mois d'aout 2011, l'appartement n'a pas pu être loué de sorte que la vacance locative s'est prolongée de 6 mois ¿. Une location est intervenue seulement le 1er septembre 2011 et ce jusqu'au 19 octobre 2012 moyennant ce loyer revu à la baisse de 520 € au lieu de 580 €. L'appartement connaîtra une nouvelle période de vacance locative entre le mois d'octobre 2012 et le mois de décembre 2013 puis sera loué à nouveau moyennant un loyer de 530 €.
34. Ainsi, privé dès le départ de locataire et ce jusqu'en septembre 2008 (et non pas 2010 comme retenu à tort dans les écritures de M. [R]), soit pendant près de 5 mois, puis à nouveau entre janvier 2010 et février 2011 (et non pas entre 2012 et 2013 comme retenu à tort dans les écritures de M. [R]), soit pendant 13 mois, l'investissement immobilier a donc présenté dès son origine en 2008 une carence locative significative, qui s'est à nouveau reproduite après seulement une année de location, soit dès janvier 2010, et cette fois pour une durée de 13 mois consécutifs.
35. De sorte que le temps de vacance locative écoulé totalise une durée de 18 mois en deux périodes sur une durée initiale de 34 mois, ce qui permet de qualifier ce déficit locatif de structurel, ayant du reste appelé une baisse de loyer dès le 14 février 2011, élément qui vient au renfort du caractère structurel du déficit dudit potentiel locatif.
36. M. [R] ne justifie pas de démarches de réclamation à cette époque sur les raisons de l'absence de candidats à la location bien qu'il s'en soit, selon ses propres termes, 'étonné'.
37. Il soutient que l'assurance a pris le relais des loyers manquants de sorte que la carence locative et la vacance locative ont été sans incidence sur la rentabilité de l'investissement.
38. Il s'appuie à cet égard sur le tableau synthétique établi par ses soins retraçant les périodes de location, le montant des loyers pratiqués, les périodes de carence et vacance locatives et les montants des pertes de loyers.
39. Le montant des loyers non perçus pendant les périodes de carence et vacance locatives n'y est pas chiffré et il est porté dans la colonne 'commentaire' la mention 'Perte couverte par l'assurance'. Aucun justificatif du paiement effectif des loyers par l'assurance n'est produit.
40. Les chiffres établis par M. [R] seul n'ont pu être discutés ni par la société de gestion locative ni par l'assurance elle-même (ou les assureurs) puisque ni l'une ni l'autre n'ont été attraites à la cause de sorte que la cour ne dispose d'aucun élément lui permettant de vérifier le fonctionnement effectif de l'assurance : pas de contrat, pas de précision quant aux modalités de la compensation, pas de décompte certifié des sommes réellement versées à l'assuré.
41. En admettant néanmoins que les loyers aient été effectivement compensés, il reste que ce recours immédiat, massif et durable à l'assurance était révélateur d'une difficulté locative structurelle affectant le programme immobilier, support de l'investissement.
42. Difficulté locative structurelle que connaissait M. [R] dès son origine au cours de l'année 2008 lors de la première carence locative et au plus tard le 14 février 2011 à l'issue de la deuxième période de vacance de 13 mois consécutifs accompagnée d'une baisse de loyer, puisqu'il reconnaissait s'étonner à cette époque de la 'non-location' et de la nécessité de réviser le loyer à la baisse.
43. Il est encore à noter que M. [R] a mentionné dans son tableau synthétique que la prise en charge des loyers est, sur la seconde vacance locative, intervenue pour une période de 12 mois, soit de mi-janvier 2010 à mi-janvier 2011, et qu'aucune prise en charge n'est intervenue pour la période du 14 février 2011 au 1er septembre 2011 au cours de laquelle les loyers n'ont donc pas été compensés. Ainsi, cette vacance locative n'était pas, contrairement à son assertion, indolore jusqu'à cette date.
44. Il est par ailleurs relevé que ce déficit locatif n'était pas lié à une autre cause que celle liée au seul potentiel locatif du bien. En effet, ces périodes de non-location ne s'expliquent par aucune raison technique (malfaçons, dégâts quelconques, etc') ', du moins n'en est-il pas justifié ', autre que tout simplement l'impossibilité de louer par faute de candidat.
45. Or, la compensation par l'assurance n'a pas fait disparaître ce déficit locatif structurel qu'elle n'a, au contraire, fait que confirmer tandis que l'assureur n'avait pas vocation à se substituer au locataire pendant une durée quasi-totale de la période de défiscalisation, ce que n'ignorait pas non plus M. [R] depuis l'origine du programme, à tout le moins dès à compter du 14 février 2010, date à laquelle les loyers n'ont pas été compensés pendant 6 mois ¿.
46. Là encore, couplée à la carence locative d'origine d'une durée de 5 mois, suivie un an après d'une vacance locative d'une durée de 13 mois consécutifs, couplée à une diminution du loyer et à une absence de prise en charge assurantielle, ce défaut d'attractivité locative était significatif et anormal pour un investissement immobilier dont la rentabilité était précisément fondée sur la mise en location immédiate et permanente au prix initialement annoncé.
47. Pour M. [R], la surévaluation du potentiel locatif a été connue de lui au plus tard le 14 février 2011, ce qu'il ne conteste pas lorsqu'il écrit qu'il s'étonnait des périodes de non-location. Elle était par ailleurs aisément traduisible en chiffres ainsi que l'a du reste fait M. [R] qui, dans un tableau de synthèse annuelle établi par ses soins, a fait apparaître que la balance mensuelle de l'investissement était négative dès 2008 et l'est demeurée chaque année en s'aggravant, sans jamais devenir positive.
48. C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu la date du 14 février 2011 comme point de départ du délai de prescription, date à laquelle M. [R] disposait des éléments pour savoir que l'objectif contractuel de rentabilité financière tel qu'initialement annoncé ne serait en toute hypothèse jamais atteint et ce, indépendamment du prix de revente à la fin de la période de défiscalisation, revente dont il n'est du reste rien dit par l'acquéreur, pas plus que du montant des déductions fiscales dont il a bénéficié et dont le montant n'est pas non plus communiqué.
49. Le caractère structurel des difficultés locatives trouvera son point d'orgue dans le fait qu'en raison de l'augmentation du nombre des sinistres, le contrat d'assurance sera dénoncé avec effet au 1er janvier 2015. Il est sur ce point invoqué par maître [A] une première résiliation d'une police d'assurance qui serait survenue en 2010 de sorte que le caractère structurel des difficultés locatives était caractérisé dès cette date et également connu de M. [R] dès cette même année. Néanmoins, il n'est produit aucune pièce quant à cette première résiliation qui serait survenue en 2010, la première non prise en charge des loyers datant en réalité de février 2011 pour les loyers au-delà d'une période de 12 mois.
50. Il s'évince de l'ensemble de ces observations que l'action de M. [R] intentée par voie d'assignations des 25 et 26 octobre 2016 à l'encontre du promoteur, du vendeur et du commercialisateur du chef de la surévaluation du potentiel locatif est prescrite.
51. Le jugement sera confirmé sur ce point.
52. S'agissant du dol portant sur la valeur réelle du bien, la surévaluation du bien acquis par M. [R] ne peut pas se situer à une date où il a accompli une diligence ' en l'espèce une estimation en 2018 ' qu'il avait toute latitude de réaliser plus tôt, ce qui reviendrait pour lui, qui est demandeur, à fixer unilatéralement le point de départ de la prescription en contradiction avec le principe de sécurité juridique.
53. De plus, ladite évaluation immobilière de 2018, qui est postérieure de plus de sept années à la vente, si elle fait état d'une perte de valeur relativement importante, ne justifie pas d'une surévaluation du prix au jour de l'acquisition, dès lors que, par l'écoulement du temps, les aléas du marché de l'immobilier ont nécessairement influé sur cette valeur. Ainsi, une surévaluation au jour de l'acquisition n'est pas en soi caractéristique d'un dol.
54. De même, l'état du marché immobilier local et les charges inhérentes à l'opération étaient des éléments que M. [R] pouvait appréhender au moment de la conclusion du contrat, d'autant qu'il a disposé d'un long délai de réflexion entre l'acte de réservation du 17 novembre 2006 et l'acte authentique de vente du 9 juillet 2007 pour s'interroger sur l'opportunité et l'économie générale de l'opération envisagée et, plus particulièrement, sur le prix moyen du mètre carré dans le secteur qu'il pouvait obtenir au moyen d'une simple estimation du bien et ce, sans avoir à attendre la fin de la période de défiscalisation.
55. Surtout, la valeur locative d'un bien immobilier étant corrélée à sa valeur, M. [R], qui connaissait le défaut de rendement locatif annoncé, avait dans le même temps connaissance de la dépréciation de la valeur réelle de son bien sans devoir attendre le terme de la période de défiscalisation puisqu'il ne pouvait ignorer que la piètre valeur locative révélait également et nécessairement une bien moindre valeur du bien. En d'autres termes, ce qui se loue mal ne peut se vendre bien.
56. Dès lors, le délai de prescription quinquennale ayant couru à compter du 14 février 2011 sans être valablement interrompu par M. [R], son action introduite les 25 et 26 octobre 2016 est prescrite.
57. La décision du tribunal ayant déclaré cette action irrecevable pour cause de prescription sera confirmée.
3) Sur la prescription de l'action en responsabilité pour manquements à l'obligation d'information et au devoir de conseil
58. M. [R] soutient que le promoteur, la sas Promotion Pichet, la venderesse, la société Promobat, et la société commercialisatrice, la sarl Patrimoine Horizon, ont manqué à leur devoir de conseil, en particulier au titre de l'obligation précontractuelle, en promouvant un programme immobilier défiscalisé trompeur au regard des plaquettes et descriptifs réalisés et remis à son domicile, en surévaluant le prix de l'appartement artificiellement gonflé par les commissions versées aux différents intervenants, en construisant le projet dans une zone géographique inhabitée et en faisant une présentation mensongère du projet dans le cadre de la simulation précontractuelle alors que le bien acquis est situé dans un secteur à faible potentiel locatif, avec une rotation rapide et importante des locataires et qu'en outre, le prix de marché de revente des biens est très inférieur au prix d'acquisition.
59. M. [R] reproche également au notaire instrumentaire de ne pas l'avoir renseigné sur les caractéristiques de l'opération en loi de Robien, sur la pertinence du prix d'acquisition au regard du prix moyen de vente sur le secteur géographique concerné et sur les modalités exactes de son acquisition au regard par ailleurs d'une acquisition dans le cadre d'une loi de défiscalisation alors qu'il détenait l'ensemble des éléments d'information sur la résidence, son lieu d'implantation, la valeur d'acquisition dans ce secteur géographique et, en tant que notaire unique pour tous les acquéreurs, aurait dû solliciter plus d'informations de la part du promoteur notamment quant à l'évaluation du prix de vente, puis du prix locatif afin de pouvoir se faire son propre avis sur l'opportunité économique de l'opération, et aurait surtout dû dans le cadre d'un devoir d'information et de conseil minimum adresser à l'ensemble des acquéreurs une note sur l'acquisition en loi de défiscalisation de Robien, ainsi que sur les risques éventuels qu'elle peut faire peser sur l'équilibre de l'opération en cas de carence locative, et, ou d'une valeur d'acquisition surdimensionné par rapport au prix du marché local.
60. Il fait le même reproche au notaire procurateur, relevant qu'en présence d'un mécanisme de procuration, sa situation était rendue encore plus fragile pour connaître les données exactes de l'opération, en particulier lorsque le contact initial était pris par le commercial du promoteur, et non par le client lui-même.
61. Enfin, il reproche à l'établissement bancaire un manquement à son obligation d'information et à son devoir de conseil tant au titre de l'absence de renseignement sur la globalité de l'opération que sur l'absence d'information sur le prêt proposé qui s'est selon lui avéré inapproprié à sa situation en particulier au regard de sa durée, à savoir une durée maximale de 300 mois.
62. S'agissant de la prescription de l'action, il estime que le point de départ ne peut être la date de l'acquisition, ni celle de la livraison de l'appartement, ni même la première longue période de carence locative, mais doit se situer, en présence d'une opération d'investissement portée par un promoteur puissant, peu scrupuleux et âpre au gain, oeuvrant dans un système intégré et en apparence sécurisé, au jour où il a été en possession de l'ensemble des informations permettant de caractériser le défaut de rentabilité tant dans sa consistance que dans son ampleur, à savoir une carence locative significative ayant duré anormalement, doublée de l'information de la résiliation de l'assurance empêchant toute prise en charge des loyers impayés, et une évaluation du bien à la fin de la période de défiscalisation bien inférieure à celle annoncée.
63. Il demande réparation du préjudice de perte de chance de ne pas s'être engagé dans l'opération.
64. Les intimés répliquent que le point de départ du délai de prescription ne saurait être fixé au jour de l'estimation sollicitée par l'acquéreur, date laissée à sa discrétion, ou bien au jour de l'apparition du dommage ou encore au dénouement de l'opération fiscale dès lors qu'en présence d'un potentiel locatif insuffisant, celui-ci était en mesure d'agir dès 2008 ou à tout le moins dès février 2011, outre qu'il pouvait faire évaluer son bien dès la signature du contrat de réservation ou au jour de la signature de l'acte authentique ou encore au jour de la livraison de l'appartement. Ils soulignent par ailleurs que M. [R] a bénéficié des déductions fiscales attendues.
65. Sur ce, l'article 2224 du code civil dispose que 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'
66. L'ancien article 2270-1 prévoyait un délai de prescription de dix ans pour les actions en responsabilité civile extra-contractuelle. La loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile a réduit ce délai de prescription à cinq ans sans pour autant modifier le point de départ de l'action, qui se trouve consolidé 'au jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'
67. Lorsqu'est alléguée la violation d'une obligation précontractuelle d'information et de conseil ou un dol, la prescription de l'action en responsabilité ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.
68. Il est de jurisprudence désormais établie qu'en matière d'investissement immobilier locatif avec défiscalisation, la manifestation du dommage pour l'acquéreur ne peut résulter que de faits susceptibles de lui révéler l'impossibilité d'obtenir la rentabilité prévue lors de la conclusion du contrat (Cass. civ. 3ème, 26 octobre 2022, n° 21-19.898, Cass. civ. 3ème, 26 oct. 2022, n° 21-19.900).
69. En matière de défiscalisation, le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité civile, qui doit être objectivé et apprécié in concreto, correspond au jour où le risque s'est réalisé, c'est-à -dire le jour où l'acquéreur a appris qu'il serait dans l'impossibilité d'atteindre la rentabilité annoncée et non au jour de l'acte de vente, même lorsque le préjudice allégué réside dans la surévaluation du bien au moment de son acquisition.
70. Pour fixer le point de départ de l'action en responsabilité civile, il convient de rechercher la date à laquelle M. [R] a eu une connaissance ou aurait dû connaître les faits susceptibles de fonder son action.
71. S'agissant du promoteur, de la venderesse et de la société commercialisatrice, M. [R] invoque un manquement à l'obligation d'information et au devoir de conseil sur la rentabilité de l'opération financière et sur son effort d'épargne total, qui dépend de la rentabilité locative, des coûts de l'opération, des réparations locatives, des garanties et assurances et des réductions d'impôt.
72. Le point de départ de la prescription ne peut pas être la signature de l'acte authentique de vente, ni la livraison du bien, dès lors que M. [R] ne pouvait pas savoir à ces dates que la location de celui-ci engendrerait notamment une perte de loyers et sa dépréciation.
73. Il n'a pu découvrir l'impossibilité d'obtenir la rentabilité prévue lors de la conclusion du contrat avant la mise effective de son bien sur le marché locatif dont le faible potentiel dénoncé était de nature à créer des périodes de vacance locative incompatibles avec l'avantage fiscal espéré et source de dévalorisation du bien.
74. Pour les motifs indiqués ci-dessus, c'est à compter du 14 février 2011 que M. [R] a été en mesure d'appréhender toutes les conséquences induites par la vacance locative significative et la baisse des loyers, qu'il s'agisse des qualités de l'investissement réalisé ou des avantages escomptés ou encore de la valeur du bien immobilier.
75. Compte tenu de cette date, son action en responsabilité exercée les 25 et 26 octobre 2016 est prescrite. La décision des premiers juges l'ayant déclaré irrecevable sera confirmée.
76. S'agissant des notaires, ceux-ci sont tenus de veiller à l'efficacité des actes qu'ils établissent et d'éclairer les parties sur les conséquences qui s'y attachent.
77. Plus particulièrement, le notaire instrumentaire est tenu d'informer et d'éclairer les parties sur la portée, les effets et les risques, notamment juridiques et fiscaux, de l'acte par lequel elles s'engagent, dans la limite des possibilités de contrôle et de vérification qui lui sont offertes, des informations connues des parties et sans avoir à porter d'appréciation sur l'opportunité économique de l'opération (Cass. civ. 3ème, 20 avril 2022, n° 21-12.300). Ainsi, en l'absence d'éléments de nature à alerter le notaire sur des difficultés à venir, celui-ci n'a pas l'obligation de vérifier la faisabilité et les risques de l'opération (Cass. civ. 1ère, 2 févr. 2 022, n° 20-14.296). En cela, il n'est pas garant de la rentabilité économique de l'investissement immobilier, objet de l'acte authentique en ce qu'en l'absence d'éléments de nature à l'alerter sur des difficultés à venir, il n'a pas l'obligation de vérifier la faisabilité et les risques de l'opération (Cass. 1ère civ., 2 févr. 2022, n° 20-14296).
78. L'action en responsabilité pour faute est soumise au délai de prescription de l'article 2224 ci-dessus rappelé.
79. Pour le notaire procurateur ' une procuration ayant pour objet de consentir à un tiers un pouvoir déterminé en vue de réaliser une opération définie ', le devoir de conseil et d'efficacité a trait à ce seul objet et non à l'acte en vue duquel la procuration est consentie de sorte que le point de départ de l'action en responsabilité pour manquement au devoir d'information se situe au jour de l'acte lui-même.
80. Au cas particulier, maître [E] a reçu la procuration le 6 avril 2007, qui a été donnée à un clerc de notaire de l'étude de maître [A], notaire du programme, qui a régularisé l'acte authentique de vente le 9 juillet 2007. M. [R] n'a formulé aucun grief à l'égard de cet acte de procuration.
81. L'action en responsabilité civile dirigée contre le notaire procurateur, intentée par voie d'assignations des 25 et 26 octobre 2016, est prescrite.
82. Le jugement sera confirmé sur ce point.
83. En revanche, en qualité de notaire instrumentaire du programme défiscalisé, maître [A] connaissait quant à lui la finalité des acquisitions réalisées dans le pavillon Morgan et était tenu d'informer et d'éclairer M. [R] sur la portée, les effets et les risques, notamment juridiques et fiscaux, de l'acte par lequel celui-ci s'est lui engagé dans la limite des possibilités de contrôle et de vérification offertes, des informations connues des parties et sans avoir à porter d'appréciation sur l'opportunité économique de l'opération.
84. En ce sens, le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité civile délictuelle fondée sur le manquement à l'obligation d'information et au devoir de conseil se situe au jour où l'acquéreur sait ou aurait dû savoir que la rentabilité financière de l'investissement ne sera pas atteinte.
85. En matière d'investissement locatif, le dommage consistant en la perte de chance d'éviter un investissement déceptif se manifeste lorsqu'il est établi que la rentabilité financière de l'investissement ne sera pas atteinte par suite de la défaillance de l'une ou l'autre des composantes de ladite rentabilité : mise en location insuffisante, déductions fiscales moindres, revente à un prix inférieur à la prévision annoncée, étant précisé qu'un potentiel locatif structurellement insuffisant est un indicateur défavorable pour la revente.
86. Ainsi que ci-dessus retenu, c'est à compter du 14 février 2011 que M. [R] a été en mesure d'appréhender toutes les conséquences induites par la vacance locative significative et la baisse des loyers, qu'il s'agisse des qualités de l'investissement réalisé ou des avantages escomptés ou encore de la valeur du bien immobilier.
87. Ayant assigné seulement les 25 et 26 octobre 2016, soit plus de 5 ans après la connaissance du dommage, son action en responsabilité du notaire instrumentaire est prescrite.
88. Le jugement sera confirmé sur ce point.
89. Enfin, s'agissant de la caisse de Crédit agricole, M. [R] reproche à la banque un manquement à son obligation d'information et de conseil tant au regard de l'opération dans sa globalité que de la durée du prêt laquelle est de 25 ans et inappropriée à sa situation personnelle puisqu'elle le conduit à rembourser l'emprunt jusqu'à l'âge de 67 ans, soit à une période où ses revenus auront considérablement diminué du fait de sa situation de retraite.
90. Il reproche également au contrat de prêt de contenir un TEG non conforme aux dispositions des articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation comme ne mentionnant pas un certain nombre d'indications telles que les sommes versées à des intermédiaires comme la société IG2P qui a perçu une double commission et sollicite la nullité du taux d'intérêt contractuel, la déchéance du droit aux intérêts contractuels et différentes demandes accessoires à la nullité du TEG.
91. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité dirigée à l'encontre du banquier pour défaut de conseil ou manquement à son devoir de mise en garde, court à compter de la réalisation du dommage ou de sa révélation à la victime.
92. Plus précisément, la prescription applicable à la perte d'une chance de n'avoir pas contracté ou de n'avoir pas pu contracter à de meilleures conditions commence à courir à compter de la date du prêt tandis que celle applicable à l'obligation d'information sur la valeur du bien et son potentiel locatif court à compter de la survenance ou de la révélation du dommage à la victime.
93. La jurisprudence retient que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance, que le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste dès l'octroi des crédits (Cass. com., 26 janvier 2010, n° 08-18.354, Cass. com., 27 mars 2012, n° 11-13.719, Cass, com., 3 décembre 2013, n° 12-26.934), sauf si la preuve est rapportée par l'emprunteur pouvait légitimement ignorer ce dommage. (Cass. civ. 1ère, 12 décembre 2018, pourvoi n° 17-18.434).
94. De même, la prescription de l'action en nullité du TEG court à compter du jour où l'emprunteur connaissait ou aurait dû connaître l'erreur affectant le TEG, la qualité de consommateur non averti de ce dernier demeurant indifférente à cet égard.
95. En l'espèce, il ressort des pièces produites que l'offre de crédit a été établie le 2 février 2007 pour 175.700 €, qu'elle a été signée le 24 février 2007 ainsi que cela résulte de la date apposée sur le tableau d'amortissement y afférent, que le coût total maximum du crédit y est mentionné pour 146.721,37 €, que le tableau d'amortissement fait apparaître des mensualités de 942,02 € et que l'assurance a été souscrite le 21 décembre 2006. Le contrat de prêt a donc été formé le 24 février 2007, date de l'acceptation de l'offre de prêt par l'emprunteur. Il contenait la durée d'emprunt soit 25 ans, à laquelle M. [R] a donné son accord.
96. Le prêt ayant été signé le 24 février 2007, le délai de cinq ans applicable à l'action en réparation de la perte de chance de n'avoir pas contracté à de meilleures conditions a du fait de la loi du 17 juin 2008 commencé à courir à cette date pour s'achever le 18 juin 2013. Elle est prescrite à la date des assignations des 25 et 26 octobre 2016.
97. Par ailleurs, M. [R] était en mesure de découvrir à la lecture de l'offre de prêt qu'il a acceptée qu'aucun renseignement portant sur les commissions perçues par des intermédiaires tels que la société G2P n'y figurait. La prescription est acquise à la même date du 18 juin 2013.
98. La prescription de l'action en responsabilité liée au manquement au devoir d'information a quant à elle commencé à courir à compter du 14 février 2011, date à laquelle M. [R] connaissait le caractère structurellement défavorable du potentiel locatif de son bien et l'impossibilité d'atteindre la rentabilité espérée, y compris au moment de la revente.
99. Le jugement qui a déclaré prescrite l'action dirigée contre la caisse de Crédit agricole sera confirmé sur ce point.
4) Sur les demandes reconventionnelles
100. Dans la mesure où les prétentions de M. [R] sont déclarées irrecevables comme étant prescrites, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes reconventionnelles des parties défenderesses qui demeurent en lien avec les demandes principales.
101. Le rejet de celles-ci sera en conséquence confirmé.
5) Sur les dépens et les frais irrépétibles
102. Succombant, M. [R] supportera les dépens d'appel. Le jugement sera confirmé s'agissant des dépens de première instance.
103. Enfin, eu égard aux circonstances de l'affaire, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés par elles dans la présente instance et qui ne sont pas compris dans les dépens.
104. Le jugement sera confirmé s'agissant des frais irrépétibles de première instance.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Constate qu'il n'a pas été interjeté appel du chef de jugement ayant écarté l'irrecevabilité fondée sur l'absence de publication de l'assignation au service de la publicité foncière,
Dit que la cour n'est pas saisie de ce chef de jugement non déféré et n'a pas à statuer à nouveau dessus,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc du 15 février 2021,
Condamne M. [F] [R] aux dépens d'appel,
Rejette le surplus des demandes.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE