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04/04/2024 | FRANCE | N°24/00126

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 04 avril 2024, 24/00126


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/69

N° RG 24/00126 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UUIA



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E



article L 3211-12-4 du code de la santé publique



Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Julie FERTIL, greffière,



Statuant sur l'appel formé le 26 Mars 2024 à 17h52 par Mme. LEBRETON, substi

tut du procureur de la République rès du Tribunal Judiciaire de Saint-Nazaire concernant l'hospitalisation de :



Mme [F] [N]

née le 15 Août...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/69

N° RG 24/00126 - N° Portalis DBVL-V-B7I-UUIA

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Julie FERTIL, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 26 Mars 2024 à 17h52 par Mme. LEBRETON, substitut du procureur de la République rès du Tribunal Judiciaire de Saint-Nazaire concernant l'hospitalisation de :

Mme [F] [N]

née le 15 Août 1997 à [Localité 1]

de nationalité Française

Sans domicile fixe

anciennement hospitalisée au centre hospitalier [2] ([Localité 3])

ayant pour avocat Me Olivier CHAUVEL, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 18 Mars 2024 par le Juge des libertés et de la détention de SAINT-NAZAIRE qui a ordonné la mainlevée de son hospitalisation complète ;

En l'absence de [F] [N], régulièrement avisée de la date de l'audience (convocation à la dernière adresse connue), représentée par Me Olivier CHAUVEL, avocat

En l'absence du tiers demandeur, M. [N] [R], régulièrement avisé,

En l'absence du curateur, l'UDAF de Maine et Loire pris en la personne de Mme. [K], régulièrement avisée,

En présence de l'avocat général, M. FICHOT, après avis écrit déposé le 27 mars 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En présence du représentant de l'établissement de soins, Mme. [X] [A] munie d'un pouvoir, après communication de pièces le 28 mars 2024, lequelles ont été mis à disposition des parties,

Après avoir entendu en audience publique le 02 Avril 2024 à 14 H 00 l'appelant en la personne de M. FICHOT, le conseil de Mme. [N] et le centre hospitalier en la personne de Mme. [A] en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :

Le 08 mars 2024, Mme [F] [N] a été admise en soins psychiatriques en urgence à la demande d'un tiers, en l'espèce M. [R] [N], son père.

Le certificat médical du 08 mars 2024 du Dr [M] [I] a indiqué que Mme [F] [N] présente un état d'agitation dans la rue, très agitée aux urgences avec notion de suivi psychologique irrégulier et erratique ainsi qu'une notion de schizophrénie et qu'elle est incapable de donner des explications cohérentes sur son consentement. Les troubles ne permettaient pas à Mme [F] [N] d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte et a estimé que cette situation relevait de l'urgence.

Par une décision du 08 mars 2024 du directeur du centre hospitalier de [Localité 3], Mme [F] [N] a été admise en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète en urgence.

Le certificat médical des ' 24 heures établi le 09 mars 2024 à 12 heures 03 par le Dr [H] [P] et le certificat médical des ' 72 heures établi le 11 mars 2024 à 17 heures 50 par le Dr [T] [D] ont préconisé la poursuite de l'hospitalisation complète.

Par décision du 11 mars 2024, le directeur du centre hospitalier de [Localité 3] a maintenu les soins psychiatriques de Mme [F] [N] sous la forme d'une hospitalisation complète.

Le certificat médical de saisine du juge des libertés et de la détention établi le 14 mars 2024 par [T] [D] a estimé que l'état de santé de Mme [F] [N] relèvait de l'hospitalisation complète.

Par décision du 13 mars 2024 Mme [N] a été autorisée à quitter l'établissement sans être accompagnée de 15 à 18h le 14 mars 2024.

Par requête du 14 mars 2024, le directeur du centre hospitalier de Saint a saisi le tribunal judiciaire de St-Nazaire afin qu'il soit statué sur la mesure d'hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 18 mars 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de St-Nazaire a ordonné la mainlevée de l'hospitalisation complète de Mme [F] [N], dont la fugue a été constatée le 17 mars 2024, la patiente n'étant pas revenue d'une promenade dans le parc.

Le procureur de la République a interjeté appel de l'ordonnance du 18 mars 2024 par courriel électronique en date du 26 mars 2024. Il soutient que si l'audition du patient au cours de l'audience est obligatoire, sauf avis médical contraire émanant d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de l'interessé, la fugue du patient ne saurait de facto fonder une mainlevée de la mesure car celle-ci doit être analysée comme une circonstance insurmontable faisant échec au principe de l'audition obligatoire du patient et que cette fugue vient témoigner de ce que Mme [F] [N] n'est pas consciente de ses troubles et n'adhère pas aux soins.

Le ministère public a solicité l'infirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention par avis écrit du 27 mars 2024 s'appropriant les termes de l'appel du procureur de la République de Saint Nazaire.

A l'audience du 02 avril 2024 le ministère public a réitéré sa demande et développé ses arguments.

La représentante du centre hospitalier a indiqué que la décision de levée s'était imposée du fait de la décision du premier juge.

Le conseil de Mme [N] a déclaré s'en rapporter.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, le ministère public a formé le 26 mars 2024 un appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de St-Nazaire du 18 mars 2024.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur l'absence de Mme [F] [N] aux débats :

Le procureur de la République soutient que la fugue du patient ne saurait de facto fonder une mainlevée de la mesure car celle-ci doit être analysée comme une circonstance insurmontable faisant échec au principe de l'audition obligatoire du patient et que cette fugue vient témoigner de ce que Mme [F] [N] n'est pas consciente de ses troubles et n'adhère pas aux soins.

L'article L3211-12-2 du code de la santé publique prévoit que : 'A l'audience, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est entendue, assistée ou représentée par un avocat choisi, désigné au titre de l'aide juridictionnelle ou commis d'office. Si, au vu d'un avis médical motivé, des motifs médicaux font obstacle, dans son intérêt, à son audition, la personne est représentée par un avocat dans les conditions prévues au présent alinéa.'

Il s'ensuit que des soins sous contrainte ne peuvent pas être maintenus en l'absence de l'audition du patient sans qu'il ne ressorte ni de la décision ni des pièces de la procédure que la dispense d'audition était fondée sur un avis médical ou une circonstance insurmontable.

En l'espèce, Mme [F] [N] n'a pas comparu devant le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de St-Nazaire lors de l'audience du 18 mars 2024 car cette dernière était en fugue de l'hôpital depuis la veille.

Or la fugue constitue un obstacle insurmontable empêchant l'audition de la personne admise en soins sans consentement.

Sur l'absence de certificat médical récent:

Le juge des libertés et de la détention peut être saisi à tout moment par la personne malade, ne peut décider la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement en se fondant sur l'absence de renseignements fournis par le centre hospitalier sur la situation actuelle du patient en fugue, sans avoir cherché à réunir les certificats et avis médicaux établis par les psychiatres nécessaires au constat que les conditions ayant conduit à l'admission en soins psychiatriques contraints ne sont plus réunies.

Les premiers certificats médicaux des 08 et 09 mars 2024 précisent que Mme [F] [N] présentait un état d'agitation dans la rue ayant amené les passagers des transports en commun à appelé le 15, qu'elle était très agitée aux urgences ayant nécessité sédation et contention, logorrhéique, tachypsychie avec désorganisation du cours de la pensée, propos délirant de filiation et de persécution à thématiques multiples, avec notion de suivi psychologique irrégulier et erratique ainsi qu'une notion de schizophrénie. Il était également précisé qu'elle était incapable de donner des explications cohérentes sur son consentement. Le certificat des 24h confirme qu'elle a cessé son traitement et son suivi psychiatrique.

Le dernier certificat au dossier en date du 14 mars 2024 établi par le Dr [T] [D] précise que cliniquement il existe une tachypsychie et un relâchement des associations, que le discours présente par moments des propos délirants à thématique mégalomaniaque et érotomaniaque, que bien qu'elle accepte le traitement, la reconnaissance des troubles est fragile et que l'hospitalisation doit se poursuivre pour éviter toute mise en danger.

Par ses seuls éléments, il ressort que la patiente a besoin de soins, que son comportement est susceptible de porter atteinte à son intégrité physique et de causer un trouble à l'ordre public. Depuis le 17 mars 2024 elle est en fugue. Le fait d'étre en fugue démontre qu'elle n'adhère toujours pas à la nécessité de se soigner et qu'elle n'a pas conscience de l'état décrit dans les différents certificats médicaux.

Ainsi, au seul motif de Ia fugue il ne peut étre prononcé la main levée de la mesure d'hospitalisation. Au contraire cette fugue avec les éléments médicaux et les circonstances de l'hospitalisation rappelés plus haut caractérise clairement sa mise en danger dans l'espace public puisque l'état de la patiente et l'admission en soins contraints initiale étaient liés à une rupture de soins dans le cadre d'un suivi irrégulier et erratique avec notion de schizophrénie, situation qui ne peut que se poursuivre dès lors qu'elle est en fugue.

La décision attaquée sera en conséquence infirmée.

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Catherine LEON, présidente de chambre, statuant publiquement en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit le Procureur de la République en son appel,

Infirme l'ordonnance entreprise,

Ordonne la poursuite des soins contraints au bénéfice de Mme [F] [N]

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 04 Avril 2024 à 15h00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Catherine LEON, Présidente

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [F] [N], à son avocat, au CH, au tiers demandeur et curateur

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00126
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;24.00126 ?
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