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19/03/2024 | FRANCE | N°24/00115

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 19 mars 2024, 24/00115


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/62

N° RG 24/00115 - N° Portalis DBVL-V-B7I-USYC



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E





article L 3211-12-4 du code de la santé publique



Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Sandrine Kervarec, greffière,



Statuant sur l'appel formé le 11 Mars 2024 à 16 heures 25 par

Me Eva DUBOIS pour Me Lucie MARCHIX concernant :



Mme [H] [R]

née le 27 Novembre 1989 à [Localité 3] ([Localité 3])

[Adresse 2]

[Localité 1]

...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/62

N° RG 24/00115 - N° Portalis DBVL-V-B7I-USYC

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Catherine LEON, Présidente à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Sandrine Kervarec, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 11 Mars 2024 à 16 heures 25 par Me Eva DUBOIS pour Me Lucie MARCHIX concernant :

Mme [H] [R]

née le 27 Novembre 1989 à [Localité 3] ([Localité 3])

[Adresse 2]

[Localité 1]

Actuellement hospitalisée au centre hospitalier [4]

d'une ordonnance rendue le 05 Mars 2024 par le Juge des libertés et de la détention de RENNES qui a autorisé le maintien de son hospitalisation complète ;

En présence de [H] [R], régulièrement avisée de la date de l'audience, assistée de Me Eva DUBOIS, avocat

En l'absence de L'ATI d'Ille et Vilaine, curateur, régulièrement avisé,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 12 mars 2024, lequel a été mis à disposition des parties,

En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé,

Après avoir entendu en audience publique le 18 Mars 2024 à 14 H 00 l'appelant et son avocat en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 23 février 2024, Mme [H] [R] a été admise en soins psychiatriques à la demande de Mme [P] [C], directrice de l'Association Tutélaire d'Ile-et-Vilaine.

Le certificat médical du 23 février 2024 du Dr [L] [O] a indiqué que Mme [H] [R] est une patiente présentant un trouble psychiatrique chronique actuellement en rupture de traitement, qu'elle se présente accélérée sur le plan idéique avec logorrhée, tachypsychie, coq à l'âne, qu'elle tient des propos délirants de thématique persécutive, qu'elle est agitée sur le plan psychomoteur avec des menaces hétéro-agressives. Les troubles ne permettaient pas à cette dernière d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte.

Par une décision du 23 février 2024 du directeur du centre hospitalier [4] à [Localité 1], Mme [H] [R] a été admise en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète.

Le certificat médical des ' 24 heures établi le 24 février 2024 à 10 heures 16 par le Dr [M] [S] et le certificat médical des ' 72 heures établi le 20 février 2024 à 12 heures 20 par le Dr [E] [X] ont préconisé la poursuite de l'hospitalisation complète.

Par décision du 26 février 2024, le directeur du centre hospitalier [4] à [Localité 1], a maintenu les soins psychiatriques de Mme [H] [R] sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par requête reçue au greffe le 28 février 2024, le directeur du centre hospitalier [4] à [Localité 1] a saisi le tribunal judiciaire de Rennes afin qu'il soit statué sur la mesure d'hospitalisation complète.

Par ordonnance en date du 05 mars 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné le maintien de l'hospitalisation complète de Mme [H] [R].

Mme [H] [R] a interjeté appel de l'ordonnance du 05 mars 2024, par l'intermédiaire de son avocat, par courriel électronique en date du 11 mars 2024. L'appelante soutient que :

- la notification de la décision de maintien des soins psychiatriques a été tardive ;

- la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète n'est pas bien-fondée.

Elle sollicite ainsi l'infirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et la mainlevée de la mesure d'hospitalisation psychiatrique sous contrainte prise à son égard.

Le ministère public a indiqué solliciter la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention par avis écrit du 12 mars 2024.

Dans un avis motivé du Dr [E] [X] en date du 18 mars 2024, il est indiqué que Mme [H] [R] est à ce jour calme et de bon contact mais qu'il persiste une labilité émotionnelle, une irritabilité et une hypersynthonie chez cette dernière. Il est également noté que son discours est cohérent et organisé sans idée délirante, que la conscience de ses troubles et l'adhésion aux soins sont améliorés mais demeurent fragiles. Il est conclu à la nécessité d'une poursuite des soins sous la forme d'une hospitalisation complète malgré l'amélioration partielle des troubles.

A l'audience du 18 mars 2024, Mme [H] [R] a comparu assistée de son conseil.

Elle a expliqué qu'elle avait menacé l'ATI car elle ne pouvait plus se nourrir et allait très mal, ce qui a justifié son passage en chambre d'isolement au début de son hospitalisation.

Elle a souhaité rentrer chez elle tout en soulignant qu'elle a conscience d'avoir besoin de soins et qu'elle accepte le passage d'une infirmière pour lui donner ses médicaments et qu'il n'y ait pas d'erreur.

Son conseil a repris les moyens soulevés dans ses écritures.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, Mme [H] [R] a formé le 11 mars 2024 un appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 05 mars 2024.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité de la procédure :

Aux termes de l'article L. 3216-1 du Code de la Santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge des libertés et de la détention, et en cas d'irrégularité, celle-ci n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

La saisine du juge des libertés et de la détention prévue par l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.

En l'espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.

Sur la notification tardive de la décision de maintien des soins psychiatriques :

Le conseil de Mme [H] [R] relève que la décision de maintien des soins psychiatriques de cette dernière sous la forme d'une hospitalisation complète a été prise par le directeur du centre hospitalier [4] le 26 février 2024 et que la notification de cette décision à Mme [H] [R] n'a été effectuée que le 29 février 2024, soit tardivement.

Il ajoute que l'absence de notification de la décision de maintien en soins psychiatriques a causé grief à cette dernière car celle-ci n'a pas été mise en mesure d'exercer les droits qui étaient les siens durant les trois jours d'hospitalisation sous contrainte séparant la décision de maintien du jour de la notification.

L'article L3211-3 alinéas 3,4 et 5 du code de la santé publique prévoit que : 'En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1. '

En l'espèce, la notification de la décision de maintien des soins contraints a été réalisée plus de 48 h après la prise de cette décision sans qu'aucun élément ne permette d'en comprendre les raisons.

En effet si Mme [R] a indiqué lors de l'audience du 18 mars 2024 avoir été placée à l'isolement à son arrivée en soins psychiatriques pendant une durée de quelques jours, aucune pièce de la procédure ne mentionne cette mise à l'isolement

et son éventuel état clinique ne permettant pas la notification de la décision de maintien avant le 29 février 2024.

Toutefois l'irrégularité constatée ne peut entraîner main-levée de la mesure d'hospitalisation sous contrainte que s'il est rapporté la preuve in concreto d'un grief lié à celle-ci. Or Mme [R] se contente d'invoquer la privation de ses droits sans préciser l'exercice de quel droit elle s'est vue privée.

De plus ainsi que l'a relevé le juge de première instance, elle ne démontre pas avoir, après le 29 février 2024, exercé un droit qu'elle aurait pu exercer plus tôt.

La patiente justifie d'autant moins d'une atteinte à ses droits que le directeur du centre hospitalier [4] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes le 28 février 2024 aux fins de vérification de la procédure.

Dès lors, la notification tardive de la décision de maintien en soins psychiatriques n'a concrètement pas fait grief à Mme [R] et le moyen ne sera pas retenu.

Sur le bien-fondé de la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète :

Le conseil de Mme [H] [R] soutient que la poursuite de l'hospitalisation complète sous contrainte de cette dernière ne parait plus justifiée dans la mesure où les certificats médicaux versés au dossier constatent une amélioration de son état de santé au fur et à mesure de la mesure dont elle fait l'objet.

L'article L. 3211-3 al.1er du code de la santé publique prévoit que : 'Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux fait l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée.'

Il convient de rappeler, qu'en application de l'article L3212-1 I du code de la santé publique, le juge statue sur le bien fondé de la mesure et sur la poursuite de l'hospitalisation complète au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, sans substituer sa propre appréciation des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins, à celle des médecins.

En l'espèce,s'il est exact que l'état clinique de Mme [R] s'est amélioré au fur et à mesure de l'hospitalisation et des soins reçus, le certificat médical de saisine du juge des libertés et de la détention établi le 29 février 2024 par le Dr [E] [X] indique que persiste une présentation étrange avec des lunettes de soleil, une sublogorrhée avec quelques diffluences dans le discours , une discrète labilité et une augmentation pathologique de l'estime de soi avec une multiplicité des projets d'avenir, que la conscience des troubles demeure fragile.

Le certificat médical de situation établi le 18 mars 2024 par le Dr [E] [X] fait état de ce que bien qu'il y ait une amélioration partielle, il persiste une labilité émotionnelle, une irritabilité et une hypersynthonie chez cette dernière.

Au cours de l'audience elle est apparue très fragilisée et émotive.

Ainsi, il résulte suffisamment de ce qui précède que la mesure d'hospitalisation sous contrainte demeure encore nécessaire malgré une amélioration.

La décision déférée sera confirmée.

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Catherine LEON, présidente de chambre, statuant publiquement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Reçoit Mme [H] [R] en son appel,

Confirme l'ordonnance entreprise,

Laisse les dépens à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 19 Mars 2024 à 16 heures 00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Catherine LEON,

Présidente

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [H] [R] , à son avocat, au CH et curateur-tuteur

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00115
Date de la décision : 19/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-19;24.00115 ?
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