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11/07/2023 | FRANCE | N°22/04480

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 11 juillet 2023, 22/04480


6ème Chambre B





ARRÊT N° 344



N° RG 22/04480 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S6IW













M. [J] [N]



C/



Mme [M] [S]

































Copie exécutoire délivrée

le :



à : Me TROMEUR

Me CELERIER





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 JUILLET

2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame [M] CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle DESVALOIS, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Aurélie MARIAU, lors du prononcé,




...

6ème Chambre B

ARRÊT N° 344

N° RG 22/04480 - N° Portalis DBVL-V-B7G-S6IW

M. [J] [N]

C/

Mme [M] [S]

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me TROMEUR

Me CELERIER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 JUILLET 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame [M] CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle DESVALOIS, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Aurélie MARIAU, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 Mai 2023 devant Madame [M] CADORET, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement après prorogation, le 11 Juillet 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué

****

APPELANT :

Monsieur [J], [I], [G] [N]

né le 30 Septembre 1971 à [Localité 18] (35)

[Adresse 8]

[Localité 10]

Rep/assistant : Me Nathalie TROMEUR de la SCP LARMIER - TROMEUR-DUSSUD, avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉE :

Madame [M], [T] [S]

née le 18 Mai 1976 à [Localité 10]

Chez Mr et Mme [I] [S]

[Adresse 12]

[Localité 10]

Rep/assistant : Me Isabelle CELERIER de la SELARL CELERIER, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [N] et Madame [S] se sont mariés le 19 mai 2001 devant l'officier de l'état civil de [Localité 10] sans contrat de mariage préalable. De leur union est issu un enfant [P], née le 27 août 2002.

Par ordonnance de non-conciliation du 10 février 2015, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Quimper a notamment :

- constaté l'acceptation par les époux du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci,

- attribué la jouissance du domicile conjugal à Monsieur [N], à titre onéreux,

- statué sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale,

- fixé à la somme de 400 euros par mois la contribution due par le père à l'entretien et l'éducation de l'enfant,

- désigné, avec l'accord des parties, Maître [U], en qualité de notaire expert, dans le cadre des dispositions de l'article 255-10° du code civil.

Par jugement en date du 24 mars 2017, le juge aux affaires familiales a notamment :

- prononcé le divorce des époux sur le fondement de l'article 233 du code civil,

- ordonné la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux,

- débouté Madame [S] de sa demande de prestation compensatoire,

- statué sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale,

- fixé à la somme de 300 euros par mois la contribution due par le père à l'entretien et l'éducation de l'enfant.

Par arrêt en date du 14 mai 2019, la cour d'appel de Rennes a confirmé le jugement de divorce sur l'ensemble de ses dispositions, à l'exception de celle relative à la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant qu'elle a fixée à la somme de 400 euros par mois à compter du 24 mars 2017.

Par acte d'huissier du 29 avril 2021, Madame [S] a fait assigner Monsieur [N] aux fins de voir procéder à la liquidation et au partage judiciaire du régime matrimonial ayant existé entre les ex-époux.

Par jugement en date du 1er juillet 2022, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Quimper a notamment :

- ordonné la poursuite des opérations de compte, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux,

- débouté Monsieur [N] de ses demandes de récompenses dues par la communauté,

- débouté Madame [S] de sa demande de récompenses due par la communauté,

- dit que devaient être intégrés à la masse active à partager :

. le bien immobilier, sis [Adresse 8] à [Localité 10] cadastré section BB n°[Cadastre 7] pour une contenance de 25 ares et 39 centiares, et le mobilier le garnissant pour une valeur totale de 400.000 euros,

. les comptes bancaires suivants dont les montants sont arrêtés au 10 février 2015 à savoir :

- CMB n°351 2206741 - compte joint - 3.152,30 euros

- CMB n°74181 - M. [N] - 8.265,07 euros

- CMB Livret Bleu - M. [N] - 12.780,02 euros

- CMB Ldd - M. [N] - 5.661,18 euros

- CMB compte titre - M. [N] - 26.000,00 euros

- CMB assurance Previ Option - M. [N] - 57,26 euros

- CMB Compte Epargne Logement - Mme [S] - 519,78 euros

- CMB Livret Bleu - Mme [S] 10.668,19 euros

- CMB Ldd - Mme [S] - 6.553,70 euros

- CMB compte titre - Mme [S] - 26.510,00 euros

total comptes CMB = 100.167,50 euros

et

- Crédit Agricole compte chèque [XXXXXXXXXX02] - compte joint - 241,79 euros

- Crédit Agricole compte titre n°67196 - compte joint - 16.045,00 euros

- Crédit Agricole compte Carré Bleu [XXXXXXXXXX04] - M. [N] - 26.887,50 euros

- Crédit Agricole compte chèque [XXXXXXXXXX014] - Mme [S] - 6.012,95 euros

- Crédit Agricole compte Carré Jaune [XXXXXXXXXX015] - Mme [S] - 404,71 euros

- Crédit agricole compte Carré bleu [XXXXXXXXXX03] - Mme [S] - 41.853,31 euros

total comptes CRÉDIT AGRICOLE = 91.445,26 euros

ainsi que

- compte Boursorama [XXXXXXXXXX01] - Mme [S] - 5.072,06 euros

pour un total général de 196.684,82 euros

- fait injonction au notaire désigné de consulter les fichiers FICOBA et AGIRA, afin de déterminer l'ensemble des comptes bancaires détenus par Monsieur [N] et Madame [S],

- dit que devait être intégrée à la masse active à partager la somme de 301.434,80 euros au titre du boni de liquidation de la S.A.R.L. ISOLOR,

- dit que devait être intégrée à la masse active à partager la somme de 39.948 euros au titre du compte courant associés des époux au sein de la S.A.R.L. ISOLOR,

- dit que devait être intégrée à la masse active à partager le scooter Yamaha X Max immatriculé 5BMTL

- débouté Mme [S] de sa demande visant à fixer la valeur de ce véhicule à la somme 2.500 euros,

- dit que la valeur vénale du dit scooter serait déterminée par le notaire chargé de la liquidation,

- dit que devaient être intégrées à la masse active à partager les sommes de 9.158,02 euros et 9.477 euros,

- dit que Monsieur [N] était redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation du 10 février 2015 jusqu'au jour du partage d'un montant de 1.000 euros par mois et, au besoin, l'a condamné à ce paiement,

- dit que l'indivision était redevable envers Monsieur [N] d'une somme globale de 22.497 euros au titre des dépenses de conservation du bien immobilier,

- dit que Monsieur [N] était titulaire d'une créance d'un montant de 3.978 euros à l'encontre de Madame [S],

- rejeté le surplus des demandes,

- renvoyé les parties devant Maître [R] [V], notaire à [Localité 10], pour établir l'acte de partage sur la base des dispositions du jugement,

- commis un juge du tribunal judiciaire de Quimper pour en surveiller le déroulement et dresser rapport en cas de difficultés,

- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seraient employés en frais privilégiés de compte, liquidation et partage et supportés par les parties à proportion de leur part dans l'indivision.

Par déclaration électronique du 13 juillet 2022, Monsieur [N] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il l'avait débouté de ses demandes de récompenses dues par la communauté.

Par ordonnance en date du 09 mai 2023, le magistrat de la mise en état a rejeté la demande de Monsieur [N] tendant à écarter des débats les conclusions d'intimée de Madame [S] notifiées le 02 mai 2023 et les pièces n°40 à 42 communiquées par celle-ci et a dit que les dépens de l'incident suivraient le sort des dépens de l'instance au fond.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 27 avril 2023, Monsieur [N] demande à la cour de :

- réformer la décision dont appel en ses chefs de jugement critiqués,

et, statuant à nouveau,

- dire qu'il est titulaire d'une récompense due par la communauté au titre de l'acquisition du terrain situé [Adresse 8] à [Localité 10], cadastré section BB n°[Cadastre 7],

- dire que la communauté lui doit récompense d'un montant de 267.000 euros au titre du financement du prix et des frais relatifs à l'acquisition du terrain indivis sis [Adresse 8] à [Localité 10], cadastré section BB n° [Cadastre 7], pour une contenance de 25 a 39 ca,

- dire que la communauté lui est redevable d'une récompense d'un montant de 75.000 euros,

- dire que l'indivision lui est redevable d'une somme de 22.053 euros au titre des dépenses de conservation du bien immobilier,

- confirmer pour le surplus la décision entreprise en toutes ses dispositions,

- débouter Madame [S] de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

- condamner Madame [S] au paiement d'une indemnité de 4.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP LARMIER-TROMEUR-DUSSUD, avocats.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 2 mai 2023, Madame [S] demande à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'elle a été déboutée de sa demande de récompense due par la communauté,

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que devaient être intégrés à la masse active à partager les comptes bancaires dont la liste figure au dispositif et dont les montants sont arrêtés au 10 février 2015,

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que devait être intégrée à la masse active à partager la somme de 39.948 euros au titre du compte courant associé des époux au sein de la S.A.R.L. ISOLOR,

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que devait être intégrée à la masse active à partager la somme de 9.477 euros,

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que l'indivision était redevable envers Monsieur [N] d'une somme globale de 22.497 euros au titre des dépenses de conservation du bien immobilier,

et, statuant à nouveau,

- dire que la communauté doit à Madame [S] une récompense de 30.800 euros au titre d'une donation reçue de ses parents suivant acte notarié en date du 16 février 2007,

- dire que doit être intégrée à la masse active à partager l'intégralité des comptes bancaires et placements détenus par Monsieur [N] et Madame [S] à leur seul nom et aux deux noms, à leur montant arrêté au 10 février 2015,

- faire injonction au notaire désigné de solliciter la communication auprès de FICOBA, FICOVIE et AGIRA de la liste des comptes et placements détenus par Monsieur [N] et par Madame [S] et des avoirs figurant à ces comptes et placements au 10 février 2015,

- dire que doit être intégrée à la masse active à partager la somme de 22.187 euros au titre du compte courant associés des époux au sein de la S.A.R.L. ISOLOR,

- dire qu'il n'y a pas lieu d'intégrer à la masse active à partager la somme de 9.477 euros au titre de la restitution de l'acompte versé à la société ARMOR TOURISME,

- dire que l'indivision est redevable envers Monsieur [N] d'une somme globale de 22.053 euros au titre de son compte d'administration,

- dire que Madame [S] est titulaire d'une créance à l'encontre de Monsieur [N], au titre du "montant des impôts payés en sus par elle sur la part du boni de liquidation de M. [N] qui sera calculée par le notaire désigné",

- débouter Monsieur [N] de sa demande tendant à dire qu'il est titulaire d'une récompense due par la communauté au titre de l'acquisition du terrain situé à [Localité 10] à hauteur de 267.000 euros,

- débouter Monsieur [N] de toutes ses demandes de récompense qui lui seraient dues par la communauté,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- débouter Monsieur [N] de tout demande plus ample ou contraire,

- condamner Monsieur [N] à lui régler la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de compte liquidation et partage et supportés par les parties à proportion de moitié,

- débouter Monsieur [N] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de sa demande au titre des dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux dernières conclusions susvisées.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 mai 2023.

MOTIFS

I - Sur les récompenses invoquées à son profit par l'une ou l'autre des parties

Aux termes de l'article 1433 du code civil, la communauté doit récompense à l'époux propriétaire toutes les fois qu'elle a tiré profit de biens propres.

Il en est ainsi, notamment, quand elle a encaissé des deniers propres ou provenant de la vente d'un propre, sans qu'il en ait été fait emploi ou remploi.

Si une contestation est élevée, la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomptions.

A- Sur la récompense invoquée par Monsieur [N] au titre du financement par des fonds propres d'un terrain acquis par la communauté

1°) sur le principe de ladite récompense

En application de l'article 1433 précité en son alinéa 3ème, il incombe à celui qui demande récompense à la communauté d'établir, par tous moyens laissés à l'appréciation souveraine des juges du fond, que les deniers provenant du patrimoine propre de l'un des époux autres que ceux encaissés par la communauté ont profité à celle-ci.

En l'espèce Monsieur [N] soutient avoir financé le prix d'acquisition du terrain sur lequel a été édifié le domicile du couple, pour un montant de 22.867,35 euros, ainsi que les droits et frais afférents à cette acquisition soit un total de 26.089,59 euros et ce, à l'aide de fonds propres provenant d'un PEL dont il était titulaire depuis 1990, soit antérieurement à son mariage avec Madame [S].

Il affirme que les fonds détenus sur ce PEL sont nécessairement propres puisque détenus par lui avant le mariage, que de mai 2001 au mois d'avril 2002 il n'a pas été alimenté par des fonds communs et que la somme de 32.011,79 euros a été virée au crédit d'un compte de dépôt dont il était également titulaire avant qu'il ne procède, le 4 avril 2002, à l'aide de ce montant, au règlement auprès de Maître [H], notaire, de la somme de 26.089,59 euros, correspondant au prix d'acquisition du terrain par les époux.

Aussi il soutient être ainsi établie l'origine propre des fonds ayant permis l'acquisition du bien commun et il se prévaut de l'évaluation faite par le notaire de sa récompense soit la somme de 267.000 euros, sachant qu'une partie du terrain a été vendue par le couple le 4 juillet 2005 pour la somme de 87.000 euros et que l'appelant fait valoir une valeur actuelle du terrain conservé par les indivisaires de 180.000 euros, au vu du marché immobilier actuel.

Madame [S] rappelle que le contenu de l'acte authentique d'acquisition ne contient aucune clause précisant un paiement par des fonds appartenant en propre à Monsieur [N], qu'il s'agit d'un bien commun financé par la communauté pour une somme totale de 28.376,33 euros, que Monsieur [N] ne justifie ni qu'il était titulaire du PEL dont il se prévaut au jour du mariage et qu'il détenait à la même date la somme ayant permis l'acquisition du terrain, ni que les fonds figurant sur ce plan d'épargne logement étaient des fonds propres dès lors que le compte a été abondé pendant le mariage par des fonds communs, entre le 19 mai 2001 et la date de clôture le 2 avril 2002, ni que les fonds issus dudit compte ont financé l'acquisition du terrain.

Le premier juge a débouté Monsieur [N] de sa demande de récompenses dues par la communauté après avoir relevé, d'une part que le prix de 22.867,35 euros avait été payé comptant par l'acquéreur le jour même, sans référence à une clause précisant un paiement par des fonds appartenant en propre à l'époux, d'autre part que celui-ci ne justifiait pas que les chèques reçus de ses parents avaient été encaissés par la communauté ni que ces sommes avaient profité à ladite communauté.

La cour note qu'il est constant que, selon compromis de vente signé sous conditions suspensives (l'obtention d'un certificat d'urbanisme et "sous réserve de l'alignement actuel") le 3 décembre 2001 avec Monsieur [O], vendeur, les parties se sont engagées pour l'achat d'un terrain de 2.530 m2 au prix de 150.000 francs ou 22.687,35 euros, outre 16.110 euros pour provision sur frais d'acte et 20.000 francs pour frais de négociation à la charge de l'acquéreur, soit une somme totale de 186.110 francs. Aux termes de cet acte, l'acquéreur déclarait que son acquisition serait financée à l'aide de ses deniers personnels à hauteur de 86.110 euros et à l'aide d'un ou plusieurs prêts bancaires d'un montant global de 100.000 francs, mention étant faite d'une somme séquestrée entre les mains de la BPBA à hauteur de 15.000 francs.

Il est également constant que l'acte authentique d'acquisition du terrain au prix principal de 22.867,35 euros, passé le 4 avril 2002 par devant Maître [H], notaire à [Localité 17], ne contient aucune clause d'emploi ou de remploi, qu'il y est fait référence au prix sus-visé du terrain, aux droits de mutation à hauteur de 1.120 euros et à la commission de négociation due par l'acquéreur à l'Agence Immobilière Le Biavant à hauteur de 3.048,98 euros TTC.

Pour justifier de l'origine des fonds propres lui appartenant et qu'il soutient avoir servis à cette acquisition, Monsieur [N] verse aux débats un relevé du compte [XXXXXXXXXX06] afférent à un plan d'épargne logement ouvert à son nom dans les livres du CRÉDIT LYONNAIS, notamment un extrait n° 80 au 2 février 2001 dont il résulte que le solde s'élevait à cette date à la somme de 201.152,34 francs, le dernier virement permanent à hauteur de 300 francs ayant été effectué le 15 juillet 2000, veille de la date d'échéance du plan qui avait été ouvert en 1990.

Monsieur [N], marié à Madame [S] le 19 mai 2001, démontre ainsi qu'il détenait cette somme avant son mariage et qu'aucun autre versement ne pouvait intervenir sur ce plan postérieurement à sa date d'échéance, hormis le paiement d'intérêts en attente de son utilisation et de sa clôture. Il est encore établi, par la production aux débats d'un relevé de compte n°82 mentionnant l'existence à cette date d'un solde positif de 32.011,79 euros (209.983,58 euros), que ce plan d'épargne logement a été soldé le 2 avril 2002.

Cette somme a été versée sur un compte de dépôt n° [XXXXXXXXXX016] ouvert au nom de Monsieur [N] dans les livres du CRÉDIT LYONNAIS, ainsi qu'il résulte d'un relevé n°96 attestant du versement au crédit dudit compte de ce solde positif, porté ensuite à la somme de 32.891,55 euros (32.011,79 euros + 33 euros), tandis que le relevé n° 97 de ce même compte à la date du 2 mai 2002 fait état de la reprise de ce solde de 32.858,55 euros, de la perception des intérêts bancaires 2002 du compte PEL 5831 940628 à hauteur de 351,16 euros et, en débit, du prélèvement de la CSG et CRDS dues sur les intérêts et sur une prime ainsi que, à la date du 4 avril 2002, d'un chèque de banque au profit de Maître [H] à hauteur de la somme de 26.089,59 euros outre, toujours en débit du compte qui en définitive affichait un solde de 4,74 euros au 2 mai 2022, un "virement [N]" de 6.500 euros.

Aussi, il existe une concomitance entre la clôture le 2 avril 2002 par Monsieur [N] de son PEL, du reste venu à échéance antérieurement au mariage des époux et dont le solde s'élevait à cette date à 32.011,79 euros, et l'émission par ce même époux du chèque de banque de 26.089,59 euros (prix principal 22.867,35 euros) le 4 avril 2002 au profit du notaire rédacteur de l'acte en règlement de l'acquisition du terrain par les deux époux.

L'appelant fait ainsi la preuve de ce que le terrain en cause a été financé à hauteur de 26.089,59 euros par des fonds lui appartenant.

La décision dont appel doit être réformée de ce chef et un droit à récompense doit être reconnu à ce titre à Monsieur [N].

2°) sur le calcul de la récompense

Aux termes des dispositions de l'article 1469 du code civil, la récompense ne peut être moindre que le profit subsistant quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l'aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien.

En l'espèce, dans une disposition non contestée du jugement déféré, le premier juge a dit que le bien immobilier, sis [Adresse 8] à [Localité 10] cadastré section BB n°[Cadastre 7] pour une contenance de 25 ares et 39 centiares, et le mobilier le garnissant devaient être intégrés à la masse active à partager pour une valeur totale de 400.000 euros.

Au titre de la récompense revendiquée Monsieur [N] réclame la somme de 267.000 euros, montant figurant dans une lettre de Maître [U] du 11 mai 2021, adressée au conseil de Monsieur [N]. Aux termes de cette lettre, d'une part une partie du terrain a été vendue par le couple le 4 juillet 2005 moyennant la somme de 87.000 euros encaissée par la communauté, d'autre part la valeur du terrain conservé pourrait être, 'au vu du marché immobilier actuel', évaluée à la somme de 180.000 euros.

Cette récomponse due au titre d'une dépense d'acquisition faite par Monsieur [N] durant la communauté, au profit de cette-ci et sur des fonds propres, doit être calculée au regard du profit subsistant.

Madame [S] conteste le montant sollicité à ce titre par l'appelant principal en faisant valoir que la demande de Monsieur [N] ne repose sur aucun calcul applicable en matière de liquidation de régime matrimonial, aucun rapport d'expertise n'ayant été établi, ni sur aucun projet d'état liquidatif, qu'il ne tient compte ni des travaux de viabilisation effectués au cours du mariage par la communauté et qui pourtant ont permis la vente le 4 juillet 2005 au prix de 87.000 euros d'une partie du terrain, ni du montant de l'imposition sur la plus-value, soit 20.085 euros, réglée par la communauté. Elle ajoute, en se prévalant d'un avis de valeur du terrain, que les sommes sollicitées par Monsieur [N] sont "exorbitantes" et que rien ne fonde la demande de celui-ci au titre d'une récompense.

Il est établi en effet qu'à la suite de la cession de partie du terrain intervenue en 2005, les époux ont effectué une déclaration de plus value soit un montant d'impôt à payer de 20.085 euros. Ce document mentionne un prix d'acquisition en valeur vénale de 9 euros/ m2 soit, pour 1.142 m2, la somme de 10.278 euros et une valeur vénale corrigée de 11.612 euros.

Madame [S] verse aux débats un avis de valeur du terrain, sur lequel est localisée la maison, étant précisé qu'il s'agit de l'évaluation en terrain non viabilisé et situé en zone constructible. Cette évaluation se situe dans une fourchette de prix de 28 à 34 euros le m2 soit, pour un ensemble de 1.339 m2 parcelle BB[Cadastre 9], de 37.492 euros à 45.526 euros net vendeur. Ce même document indique le prix qui aurait pu s'appliquer en 2014 soit un prix "dans une fourchette de prix de 8 à 12 euros le m2". Cette évaluation n'est pas une expertise et ne peut jamais servir que comme élément de comparaison avec la valeur vénale visée à la déclaration de plus value ci-dessus, qui faisait état d'un prix de 9 euros le m2.

Monsieur [N] verse quant à lui une capture d'écran se rapportant au prix moyen au m2 des terrains à vendre à [Localité 10] soit 301 euros, le prix minimum s'élevant à 65 euros et le prix maximum à 620 euros. Cette pièce ne reprend toutefois aucune des caractéristiques du terrain en cause et est sans pertinence dans le présent litige. Il reste que la valeur d'un terrain supportant déjà une construction, ainsi de la partie du terrain conservée par les parties, n'est pas celle d'un terrain nu tandis que celle d'un terrain ayant fait l'objet de travaux de viabilisation n'est pas davantage celle d'un terrain non viabilisé.

Or, pour déterminer la récompense due à Monsieur [N] il y a lieu, au-delà des éléments d'évaluation à préciser, de prendre en compte, sous réserve de leur financement par la communauté, d'une part les travaux de viabilisation du terrain réalisés après son acquisition et, le cas échéant, la proportion dans laquelle ces travaux sont venus accroître la valeur de ce terrain en sa partie revendue comme en sa partie conservée par la communauté, d'autre part l'imposition sur la plus-value, soit la somme de 20.085 euros, supportée à la revente de partie du terrain, enfin la nature du terrain conservé par les parties à savoir un terrain non pas nu mais supportant une construction.

La cour ne possédant pas, en l'état des pièces produites, les éléments d'évaluation utiles, il appartiendra au notaire de les réunir au regard des éléments précités, au besoin en s'adjoignant un expert en application de l'article 1365 alinéa 3 du Code de procédure civile, pour une détermination ultérieure de la récompense due par la communauté à Monsieur [N] au titre de la dépense d'acquisition du terrain, au regard du profit subsistant et sur la base d'une revente de partie du terrain le 4 juillet 2005 pour la somme de 87.000 euros et d'une valeur actuelle du bien immobilier avec construction de 400.000 euros.

B - Sur la récompense invoquée par Monsieur [N] pour la somme de 75.000 euros au titre du versement de fonds propres au crédit du compte joint

Monsieur [N] soutient avoir bénéficié de plusieurs donations de ses parents pour un montant total de 75.000 euros au moyen de 4 chèques :

- 30.000 euros n°332 le 28 février 2012,

- 20.000 euros n°325 le 19 décembre 2005,

- 5.000 euros n°330 le 19 décembre 2005,

- 20.000 euros n°328 le 19 décembre 2005.

Madame [S] conteste cette demande, que le premier juge a rejetée après avoir indiqué que Monsieur [N] ne justifiait pas que les chèques dont il se prévalait aient été "encaissés par la communauté" ou que "ces sommes aient profité à la communauté".

Monsieur [N] précise que le chèque de 30.000 euros du 28 février 2012 a été porté au crédit du compte CMB n°[XXXXXXXXXX05] "dont les époux étaient conjointement titulaires".

Certes, selon attestations du CRÉDIT MUTUEL DE BRETAGNE des 17 septembre 2022 et 26 avril 2023, la référence indiquée au verso du chèque de 30.000 euros tiré sur le LCL n°3403838 "correspond à un relevé d'identité bancaire du CMB au nom de M ou Mme [N] [J] : 15589 code banque, 29715 code guichet, [XXXXXXXXXX05] numéro de compte". Par ailleurs, deux relevés de compte corroborent le fait que les époux étaient titulaires, au nom de M ou Mme [N] [J], en août et septembre 2006, d'un compte joint sous cette référence. Pour autant, ils ne permettent pas de faire la preuve de la remise du chèque de 30.000 euros sur ce compte dès lors que cette remise, datant de 2012, est bien postérieure à 2006, date de ces relevés.

S'agissant des trois autres chèques, Monsieur [N] affirme qu'ils ont été déposés sur le compte n°[XXXXXXXXXX013] dont il était titulaire dans les livres du LCL jusqu'en 2009 et sur lequel il soutient que "Madame [S] détenait une procuration". Il ajoute que ces trois chèques ont ensuite été déposés au crédit du compte joint n°[XXXXXXXXXX05] dont les époux étaient titulaires au CMB.

Les photocopies des trois chèques émis en 2005 par les parents de Monsieur [N] à son profit font apparaître des endos au profit d'un compte ouvert dans les livres du CRÉDIT LYONNAIS, qui toutefois n'est pas le compte LCL N°[XXXXXXXXXX013]. Par ailleurs si les deux relevés du compte chèque joint des époux [XXXXXXXXXX05] ouvert dans les livres du CMB en date des 1er août 2006 et 1er septembre 2006 font apparaître la remise au 30 juillet 2006 de 5 chèques pour un montant de 51.805,67 euros, puis deux virements au débit en date du 3 août 2006 au profit d'un livret B ("vir domi livret b") à hauteur des sommes respectives de 48.000 euros et de 1.500 euros, aucun autre élément ne permet de relier ces opérations à la remise antérieure par Monsieur [N] desdites sommes émises à son profit sur un compte LCL qui lui était personnel.

Ces seuls éléments précités dont se prévaut l'appelant ne suffisent donc pas à faire la preuve de l'encaissement par la communauté du montant des chèques émis au profit de Monsieur [N] ni d'un profit tiré par la communauté des sommes correspondant à ces chèques.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de récompense soutenue de ce chef par Monsieur [N].

C - Sur la récompense invoquée par Madame [S] pour la somme de 30.800 euros

Le premier juge a rejeté ce chef de demande en considérant que Madame [S] ne démontrait pas que les fonds avaient été encaissés par la communauté ou lui avaient profité.

Madame [S] produit à nouveau l'acte de donation partage dressé le16 février 2007 au rapport de Maître [C], notaire à [Localité 10], aux termes duquel ses parents lui ont fait donation de la somme de 30.800 euros et elle affirme, sans viser de nouvelles pièces, que cette somme a profité à la communauté.

En l'absence de nouvelles pièces permettant d'établir la destination des fonds ni donc le profit tiré de ceux-ci par la communauté, la décision dont appel doit être confirmée en ce qu'elle a débouté Madame [S] de sa demande de récompense de ce chef.

II - Sur la consistance de l'actif partageable

A - Sur les valeurs bancaires

Le premier juge a dit que devait être intégré à la masse active à partager les comptes bancaires listés au dispositif de la décision et rappelés ci-dessus dans l'exposé du litige du présent arrêt, pour des montants arrêtés au 10 février 2015 et pour un total de 196.684,82 euros. Il a par ailleurs fait injonction au notaire désigné de consulter les fichiers "FICOBA et AGIRA" afin de déterminer l'ensemble des comptes bancaires détenus par Monsieur [N] et par Madame [S].

Cette dernière conteste les soldes ainsi comptabilisés au motif que le montant arrêté ne correspond pas aux sommes figurant sur les comptes au 10 février 2015, date des effets du divorce entre époux. Elle sollicite en conséquence que soit intégrée à la masse active à partager l'intégralité des comptes bancaires et placements détenus par Monsieur [N] et par elle-même à leur seul nom et aux deux noms mais "à leur montant arrêté au 10 février 2015" et qu'il soit fait injonction au notaire désigné de solliciter la communication, auprès des fichiers "FICOBA, FICOVIE et AGIRA", de la liste de ces comptes et placements et des avoirs y figurant à la date sus-dite du 10 février 2015.

Monsieur [N] rappelle que Maître [U] avait pu obtenir, en 2021 du CRÉDIT AGRICOLE, le relevé des comptes bancaires à la date de l'ordonnance de non conciliation et il renvoie à cet égard à une pièce 29 de son bordereau de communication de pièces, en sorte que selon lui le solde des comptes détenus dans les livres du CRÉDIT AGRICOLE au jour des effets du divorce est incontestable, tout comme celui des comptes détenus dans les livres du CMB que Madame [S] n'a jamais contesté, versant elle-même aux débats les relevés correspondants.

Il indique pour le surplus ne pas être opposé à ce qu'il soit enjoint au notaire liquidateur de consulter les fichiers "FICOBA et AGIRA", afin de déterminer l'ensemble des comptes bancaires dont les époux étaient titulaires.

Les comptes bancaires doivent être valorisés au jour de la date de dissolution du régime matrimonial.

Or, l'attestation du CRÉDIT AGRICOLE, dont se prévaut Monsieur [N] et qui reprend la liste des comptes détenus par les époux dans ses livres, mentionne des soldes de comptes arrêtés à une date antérieure à celle des effets du divorce, tandis que le document relatif aux comptes bancaires détenus par les époux dans les livres du CMB a été édité à la date du 3 juillet 2014.

En conséquence et alors que la date des effets du divorce n'est pas contestée par les parties, il convient de réformer le jugement dont appel en ce qu'il a retenu que la somme de 196.684,82 euros correspondait aux avoirs figurant sur les comptes bancaires au 10 février 2015, ce qui ne résulte pas des documents produits aux débats.

Il appartiendra au notaire désigné d'obtenir l'état du solde de ces comptes à la date du 10 février 2015, afin de pouvoir intégrer à la masse active à partager l'intégralité des comptes bancaires et placements, détenus par les parties à leur seul nom et aux deux noms, à leur montant arrêté à la date des effets du divorce.

Madame [S] demande pour ce faire qu'il soit fait injonction au notaire désigné de solliciter la communication, auprès des fichiers FICOBA, FICOVIE et AGIRA, de la liste des comptes et placements détenus par les époux et des avoirs figurant à ces comptes et placements au 10 février 2015. Monsieur [N] ne fait valoir aucune opposition quant à cette demande, sur laquelle il a déjà été statué en partie. Le premier juge a, en effet, d'ores et déjà fait injonction au notaire désigné de consulter les fichiers "FICOBA et AGIRA" afin de déterminer l'ensemble des comptes bancaires détenus par Monsieur [N] comme par Madame [S].

Aussi, il sera ajouté à la décision et aux noms des fichiers à consulter le fichier FICOVIE et la date du 10 février 2015 dans les termes du dispositif ci-après du présent arrêt.

B - Sur le solde du compte courant associés de la S.A.R.L. ISOLOR

La cour rappelle que le compte courant d'associé est une créance de l'associé à l'encontre de la société pour mise à disposition de fonds. Il constitue un actif à insérer dans l'acte de liquidation partage.

En l'espèce le premier juge a dit que devait être intégrée à la masse active à partager la somme de 39.948 euros "au titre du compte courant associés des époux au sein de la S.A.R.L. ISOLOR".

Monsieur [N] conclut à la confirmation de la décision de ce chef tandis que Madame [S] soutient que c'est une somme de 22.187 euros qui doit ainsi être intégrée à la masse active, telle que figurant au bilan de la société arrêté au 31 août 2015.

Monsieur [N] rappelle que les époux étaient conjointement titulaires au sein de la Société ISOLOR d'un compte courant d'associé dont le solde était, au jour de la liquidation, de 39.948 euros et non de 22.187 euros.

Il produit le rapport spécial des co-gérants à l'assemblée générale ordinaire annuelle du 16 janvier 2015, relatif à des conventions anciennes portant sur la prise en charge par la société de l'ensemble des charges sociales dont sont redevables les gérants au titre de leur régime TNS (y compris la CSG déductible) et qui mentionne que le compte courant non rémunéré, ouvert dans les livres de la société au nom de Monsieur [N] et de Madame [S], présente "un solde au 31 août 2014 de 39.948 euros". Les comptes de la S.A.R.L. ISOLOR, établis le 30 mars 2016 pour la période du 1er septembre 2014 au 31 août 2015, confortent cet élément en ce que les concours bancaires courants s'élevaient à la somme de 39.948 euros au 31 août 2014 et à la somme de 22.187 euros au 31 août 2015.

Monsieur [N] soutient que ce bilan n'est pas le bilan liquidatif de la société, en faisant observer qu'à défaut "Madame [S] n'aurait pas fait l'objet d'un redressement fiscal", et il admet avoir perçu la somme de 10.078 euros le 20 décembre 2018 après, selon lui, que Madame [S] ait opéré une retenue au titre de la CSG à hauteur de 1.925 euros et du RSI à hauteur de 2.997 euros..

Il est constant que, selon procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 5 juin 2015, la dissolution anticipée de la société ISOLOR et sa mise en liquidation amiable à compter de ce même jour ont été prononcées, la société subsistant pour les besoins de sa liquidation jusqu'à la clôture de celle-ci. Madame [S] a été désignée en qualité de liquidateur pour la durée de la liquidation et ses obligations sont rappelées à la deuxième résolution.

Elle justifie dans ce cadre de l'émission de deux chèques le 20 décembre 2018 par la S.A.R.L. ISOLOR en liquidation, l'un de 10.078 euros au profit de Monsieur [N] et l'autre de 12.070,48 euros à son profit, soit ensemble la somme de 22.148,48 euros, montant qui se retrouve à hauteur de 22.187 euros sur l'extrait du grand livre général pour l'exercice du 1er septembre 2014 au 31 août 2015.

Madame [S] précise dans ses écritures que ce bilan a été contrôlé par l'administration fiscale et il est justifié de ce que la somme de 343.025 euros, reprise par l'administration fiscale dans sa proposition de rectification, figure au chapitre "capitaux propres" du dernier bilan comptable de la S.A.R.L. ISOLOR pour 343.026 euros.

La dissolution anticipée de la S.A.R.L. ISOLOR datant du 5 juin 2015 et la société ayant ensuite subsisté pour les besoins de sa liquidation, c'est la somme de 22.187 euros existant au 31 août 2015 qu'il convient de porter à l'actif, étant précisé qu'elle a d'ores et déjà été répartie entre les époux.

La décision doit être réformée de ce chef et la somme de 22.187 euros intégrée à la masse active à partager au titre du compte courant associés des époux au sein de la S.A.R.L. ISOLOR.

C - Sur la restitution de l'acompte versé à la société ARMOR TOURISME

1°) Sur la demande principale portant sur la somme de 9.477 euros

Le premier juge a fait droit à la demande de Monsieur [N] et dit qu'il convenait d'inscrire à la masse active à partager la somme de 9.477 euros, qui correspondait à un acompte versé par les époux pour un projet de voyage auquel ils ont finalement renoncé.

Madame [S] sollicite la réformation de ce chef et rappelle que, durant la période de séparation de fait, elle a contribué à l'entretien et l'éducation de l'enfant commun et a dû exposer des frais de logement tandis que Monsieur [N] s'est maintenu au domicile conjugal jusqu'à ce que le juge conciliateur détermine les mesures provisoires. Elle fait valoir que l'encaissement de cette somme est intervenu sur son compte Boursorama le 8 août 2014, compte figurant à l'actif de la communauté à la date du 10 février 2015 pour la somme de 5.072,06 euros et qu'il n'est dès lors "pas possible d'intégrer deux fois la même somme au sein de la masse active de la communauté".

Madame [S] fait également observer que Monsieur [N] a sollicité la réintégration à l'actif du solde créditeur de son compte n°[XXXXXXXXXX011] ouvert dans les livres du CMB à hauteur de 8.265,70 euros au 28 janvier 2015, alors pourtant que le relevé de compte à cette date fait apparaître des dépenses "purement personnelles" selon l'intimée, notamment des dépenses "IKEA" et ce, sur une simple période d'un mois.

Monsieur [N], relevant des dépenses personnelles à Madame [S] sur le relevé de compte Boursorama au 29 août 2014, fait valoir qu'il lui appartiendra de justifier de l'ensemble des opérations enregistrées sur ce compte du 8 août 2014 au 10 février 2015 et indique que, faute pour Madame [S] de justifier précisément des opérations enregistrées sur ce compte depuis son ouverture "postérieure à l'ordonnance de non-conciliation," la somme de 9.477 euros devra être comptabilisée à l'actif partageable. A défaut, il demande que soit comptabilisée à l'actif la somme de 4.4004,94 euros (9.477 - 5.072,06) en sus du solde du compte bancaire Boursorama.

Selon attestation du 7 août 2015, l'agence ARMOR TOURISME a confirmé à Monsieur [N] avoir remboursé, le 11 août 2014, les sommes déposées à l'agence, moins la commission, soit une chèque de 9.477 euros tiré sur le CRÉDIT AGRICOLE.

Madame [S] justifie d'un relevé de compte d'août 2014, afférent au compte ouvert à son nom dans les livres de la Banque Boursorama et faisant apparaître, le 8 août 2014, la remise d'un chèque corroborant ce remboursement.

Il est constant par ailleurs que le solde de ce compte Boursorama au 10 février 2015 doit figurer à l'actif de la communauté.

Un autre relevé de compte au 27 février 2015 fait du reste mention d'un solde à cette date de 5.072,06 euros, montant énoncé à la décision dont appel.

Le remboursement du chèque étant intervenu sur un compte ouvert au nom de l'épouse avant l'ordonnance de non-conciliation, contrairement aux affirmations de Monsieur [N], la décision doit être réformée en ce qu'elle a omis de prendre en considération le fait que la somme de 9.477 euros a d'ores et déjà été intégrée dans les avoirs bancaires antérieurement à la dissolution de la communauté et ce, alors même qu'aucun des époux n'a souhaité durant la procédure de divorce faire rétroagir les effets du divorce à une autre date que celle de l'ordonnance de non-conciliation.

2°) Sur la demande subsidiaire portant sur la somme de 4.404,94 euros

En application des dispositions de l'article 1421 du code civil, l'époux qui a disposé seul de deniers communs doit, lors de la liquidation, s'il en est requis, informer son conjoint de l'affectation des sommes importantes prélevées sur la communauté qu'il soutient avoir employées dans l'intérêt commun.

S'agissant de la demande subsidiaire de Monsieur [N], tendant au rapport par Madame [S] à la communauté de la somme de 4.404,94 euros, Madame [S] soutient que les dépenses qu'elle a effectuées postérieurement à l'encaissement de cette somme, sur son compte et jusqu'à l'ordonnance de non conciliation, sont des dépenses effectuées pour faire face aux besoins du ménage.

Madame [S], qui avait le pouvoir d'accepter le paiement de ce chèque en application de ce texte, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté, a justifié des débits effectués à compter du 18 août 2014 et jusqu'au 29 août 2014 puis des dépenses effectuées postérieurement au 23 février et jusqu'au 27 février 2015. Or, les dépenses d'août 2014, dont la plus importante est celle relative à une dépense effectuée au magasin à l'enseigne "IKEA" à hauteur de 931,66 euros, ne sont pas des sommes importantes au sens de l'article précité, le solde du compte s'élevant à la somme de 9.279,07 euros au 29 août 2014.

Au vu de l'ensemble de ces éléments et au regard du train de vie des époux, il convient de rejeter les demandes de Monsieur [N] tendant au rapport à la communauté de la somme de 9.477 euros et, à défaut, de 4.404,94 euros par Madame [S].

III - Sur le compte d'administration de Monsieur [N]

En application de l'article 815-13 du code civil, figurent au compte d'administration de l'indivisaire les taxes foncières et d'habitation et l'assurance habitation dont il s'est acquitté seul depuis la date de l'ordonnance de non-conciliation.

En l'espèce, le premier juge a dit que l'indivision était redevable à Monsieur [N] d'une somme globale de 22.497 euros au titre des dépenses de conservation du bien immobilier.

Devant la cour, les deux parties s'accordent pour modifier ce montant dès lors que l'assurance habitation relative à l'année 2014 a été comptabilisée alors que l'ordonnance de non-conciliation est intervenue le 10 février 2015.

L'indivision est redevable envers Monsieur [N] de la somme de la somme de 22.053 euros, en sorte que la décision dont appel doit être réformée de ce chef.

IV - Sur la créance invoquée par Madame [S]

Après avoir relevé que la société ISOLOR avait été constituée durant le mariage et qu'il n'était pas contesté qu'elle l'avait été uniquement avec des fonds communs, le premier juge a dit que la somme de 301.434,80 euros, au titre du boni de la liquidation de ladite S.A.R.L. ISOLOR, devait être intégrée à la masse active à partager et que Monsieur [N] était titulaire d'une créance d'un montant de 3.978 euros à l'encontre de Madame [S].

Le montant de cette pénalité se retrouve dans un courrier en date du 8 février 2020 de Maître [U] qui indiquait au notaire conseil de Madame [S] que, concernant les impôts dus en 2015 sur le boni de la société ISOLOR, la somme de 48.625 euros pour le règlement de l'impôt ainsi que les documents y afférents avaient été adressés par Madame [S] à Monsieur [N] le 16 juin 2019, "ce qui a engendré 3.978 euros de pénalités".

Ces chefs de décision ne sont pas critiqués.

Or, dans le cadre de son appel incident Madame [S] demande désormais à la cour de dire qu'elle est titulaire d'une créance à l'encontre de Monsieur [N] "au titre du montant des impôts payés en sus par elle sur la part du boni de liquidation de Monsieur [N], qui sera calculée par le notaire désigné".

Elle fait valoir qu'à la suite d'une proposition de rectification fiscale, elle a subi un rehaussement de 183.615 euros à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2015, que Monsieur [N] a subi un rehaussement de 122.410 euros à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2015, " qu'elle a donc payé sur ses deniers personnels une imposition qui était due par Monsieur [N]".

Ce dernier relève que Madame [S] forme une demande qu'elle ne chiffre pas sur le montant des impôts payés en sus de sa part sur le boni de liquidation et il rappelle qu'elle s'est "refusée, malgré les demandes qui lui étaient faites, à justifier des comptes de liquidation de la société". Il cite un courrier de Maître [U] en date du 11 mai 2021 aux termes duquel Madame [S], bien que nommée liquidatrice de la société, "n'avait pas établi d'exercice de clôture, qu'il y avait lieu de s'interroger sur le sort des liquidités bancaires figurant sur les comptes en 2016, intégralement consommés sans que la liquidatrice ne fournisse de justificatif," que ces sommes devaient revenir aux deux époux et être partagés entre eux, "soit sur la somme de 367.000 euros, celle de 122.410 euros à revenir à Monsieur [N] et celle de 244.590 à revenir à Madame [S]".

Il a été jugé que la société ayant été exclusivement constituée à l'aide de fonds communs, peu important la répartition des parts entre les époux, la totalité du boni de liquidation doit être comptabilisée à l'actif partageable et doit être répartie par moitié entre les indivisaires. Le dividende perçu vient accroître les acquêts réalisés.

Madame [S] a sollicité la déduction du boni de liquidation, qui s'élevait à 306.025 euros après déduction des apports des associés, de certaines sommes justifiées et visées au jugement. Des demandes de régularisation de TVA n'ont, en particulier, pas été admises par le premier juge faute de justificatifs.

Non seulement la demande soutenue devant la cour par Madame [S] est indéterminée mais Madame [S] ne justifie pas du paiement des sommes qu'elle soutient avoir personnellement acquittées pour le compte de Monsieur [N] au titre de l'imposition des dividendes.

Il convient dès lors de la débouter de ce chef de prétention.

V - Sur les frais et dépens

S'agissant d'une procédure de partage, les dépens seront employés en frais privilégiés de compte liquidation et partage et supportés entre les parties par moitié.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de sorte que les demandes respectives des parties soutenues de ce chef seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant dans la limite des appels principal et incident,

Confirme la décision déférée en ses dispositions contestées sauf celles se rapportant à la récompense due à Monsieur [N] au titre de l'acquisition d'un terrain, aux soldes des comptes à intégrer à la masse active à partager à la date du 10 février 2015, à la somme à intégrer à la masse active à partager au titre du compte courant d'associés des époux au sein de la S.A.R.L. ISOLOR, à l'inscription d'une somme de 9.477 euros et à défaut de 4.404,94 euros relative au remboursement d'un acompte versé à la société ARMOR TOURISME et à la somme dont est redevable l'indivision envers Monsieur [N] au titre de son compte d'administration, dispositions qui sont infirmées ;

Statuant à nouveau de ces chefs infirmés et ajoutant à la décision déférée,

Dit que Monsieur [N] est titulaire d'une récompense due par la communauté par suite des fonds propres apportés lors de l'acquisition le 4 avril 2002 du terrain situé [Adresse 8] à [Localité 10] ;

Dit qu'il appartiendra au notaire, au besoin en s'adjoignant un expert en application de l'article 1365 alinéa 3 du Code de procédure civile, de réunir les éléments d'évaluation utiles à la détermination ultérieure de la récompense, due par la communauté à Monsieur [N] au titre de la dépense d'acquisition du terrain, au regard du profit subsistant et sur la base d'une revente de partie du terrain le 4 juillet 2005 pour la somme de 87.000 euros et d'une valeur actuelle de bien immobilier avec construction de 400.000 euros et ce, en prenant en compte,

- d'une part, sous réserve de leur financement par la communauté, les travaux de viabilisation du terrain réalisés après son acquisition et, le cas échéant, la proportion dans laquelle ces travaux sont venus accroître la valeur de ce terrain en sa partie revendue comme en sa partie conservée par la communauté,

- d'autre part, sous réserve de son financement par la communauté, l'imposition sur la plus-value soit la somme de 20.085 euros supportée à la revente de partie du terrain et venue s'imputer sur le prix net de vente,

- enfin la valeur actuelle du terrain conservé, déduction faite de celle du bâti, avec cette caractéristique qu'il n'est pas un terrain nu mais qu'il supporte une construction ;

Dit qu'il appartiendra au notaire désigné de réunir les états des soldes de comptes à la date du 10 février 2015, afin d'intégrer à la masse active à partager l'intégralité des comptes bancaires et placements, détenus par Monsieur [N] et par Madame [S] à leur seul nom et aux deux noms, à leur montant arrêté à la date des effets du divorce ;

Dit que doit être intégrée dans la masse active à partager la somme de 22.187 euros, et non celle 39.948 euros, au titre du compte courant associés des époux au sein de la S.A.R.L. ISOLOR ;

Rejette la demande de Monsieur [N] tendant à l'inscription à la masse active à partager de la somme de 9.477 euros et sa demande subsidiaire pour l'inscription à défaut de la somme de 4.404,94 euros, au titre du remboursement d'un acompte versé à la société ARMOR TOURISME ;

Dit l'indivision redevable envers Monsieur [N], au titre de son compte d'administration, de la somme de 22.053 euros et non de celle de 22.497 euros ;

Déboute Madame [S] de sa demande au titre d'une créance à l'encontre de Monsieur [N] pour le montant des impôts payés en sus par elle sur la part du boni de liquidation de Monsieur [N] ;

Fait injonction au notaire désigné par le premier juge de consulter le fichier FICOVIE, en sus de la consultation des fichiers FICOBA et AGIRA déjà ordonnée et confirmée, afin de déterminer l'ensemble des comptes bancaires détenus par Monsieur [N] et Madame [S] à la date du 10 février 2015 ;

Rejette les autres demandes plus amples ou contraires des parties ;

Rejette les demandes respectives des parties soutenues au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de compte liquidation et partage et supportés par les parties par moitié chacune ;

Renvoie les parties devant le notaire désigné par le jugement déféré, pour la poursuite des opérations de liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux dans le respect des dispositions du présent arrêt et du jugement de première instance en ses dispositions non infirmées, sous le contrôle et le suivi du juge désigné par la décision dont appel pour la surveillance des opérations et pour faire rapport au tribunal en cas de difficultés.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 22/04480
Date de la décision : 11/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-11;22.04480 ?
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