8ème Ch Prud'homale
ARRÊT N°261
N° RG 20/02975 -
N° Portalis DBVL-V-B7E-QXGF
S.A.S. [Adresse 5]
C/
M. [H] [B]
Confirmation
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Bruno CARRIOU
Me Xavier CORNUT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 26 JUIN 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,
Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,
Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 Avril 2023
devant Monsieur Philippe BELLOIR, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
En présence de Madame Laurence APPEL, Médiatrice judiciaire
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Juin 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
La S.A.S. [Adresse 5] prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Samir LAABOUKI substituant à l'audience Me Bruno CARRIOU de la SCP IPSO FACTO AVOCATS, Avocats au Barreau de NANTES
INTIMÉ :
Monsieur [H] [B]
né le 27 Août 1967 à [Localité 4] (ROUMANIE)
demeurant [Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Xavier CORNUT, Avocat au Barreau de NANTES
La S.A.S. [Adresse 5] est une société d'exploitation viticole.
M. [H] [B] a été embauché par la SAS [Adresse 5] selon plusieurs contrats à durée déterminée comme saisonnier à la tâche du 2 novembre 2015 au 22 février 2016, puis du 2 janvier 2018 au 22 février 2018, la relation étant régie par la Convention collective du 15 avril 2003 réglementant les conditions de travail et de rémunération des salariés et apprentis des exploitations de polyculture, de viticulture et d'élevage de Loire-Atlantique (IDCC 9441).
M. [B] a pour mission l'entretien des ceps (pré-taille, taille et pliage de la branche sur le fil).
En 2018, M. [B] a constaté que sa rémunération n'était pas conforme à ce que prévoit la convention collective applicable.
Le 17 décembre 2018, M. [B] a sollicité la régularisation de son salaire brut auprès de la SAS [Adresse 5].
Le 25 janvier 2019, la SAS [Adresse 5] a répondu à M. [B] que sa rémunération était conforme à la convention collective en précisant que la rémunération au titre de la taille était amputée de celle de la pré-taille.
Le 26 février 2019, M. [B] a saisi le Conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de :
' Condamner la SAS [Adresse 5] à lui verser les sommes suivantes :
- 5.197,44 € bruts à titre de rappel de salaires,
- 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
' Condamner aux entiers dépens.
La cour est saisie de l'appel régulièrement formé le 2 juillet 2020 par la SAS [Adresse 5] contre le jugement du 28 mai 2020, par lequel le Conseil de prud'hommes de Nantes a :
' Condamné la SAS [Adresse 5] à verser à M. [B] la somme de 5.197,44 € bruts à titre de rappel de salaire, ladite condamnation étant assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du Conseil, soit le 26 février 2019,
' Condamné la SAS [Adresse 5] à verser à M. [B] la somme de 750 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' Ordonné l'exécution provisoire du jugement,
' Condamné la SAS [Adresse 5] aux éventuels dépens.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 28 octobre 2022, suivant lesquelles la SAS [Adresse 5] demande à la cour de :
' Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Nantes du 28 mai 2020,
' Débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
' Condamner M. [B] à verser la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 27 novembre 2020, suivant lesquelles M. [B] demande à la cour de :
' Confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
' Condamner la SAS [Adresse 5] à lui verser la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 mars 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le paiement des heures
Pour infirmation à ce titre, la SAS [Adresse 5] soutient que l'ensemble des opérations de taille (pré-taille, taille et pliage) fait l'objet d'une rémunération globale (0,1616 € + 10% de congés payés) et que la rémunération de la pré-taille constitue 30% de cette rémunération et n'est qu'une rémunération spécifique pour les salariés qui n'effectuent que l'acte de pré-taille.
Pour confirmation à ce titre, M. [B] soutient que sa rémunération n'est pas conforme aux dispositions de la convention collective au motif que la pré-taille et la taille sont payées de manière distincte. Il affirme qu'il devrait être payé 0,16 € pour la taille (+10% de congés payés) et 0,05 € pour la pré-taille. Il précise que le montant de la rémunération de la pré-taille est fixé sur la base de la rémunération de la taille à hauteur de 30 % de ce prix, ce qui signifie qu'elle n'est pas incluse dans la rémunération globale. M. [B] indique que pour la saison 2012 - 2013, l'employeur réglait la taille et la pré-taille de manière distincte.
Suivant l'article L. 3243-3 du code du travail qui dispose : 'L 'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d'une convention ou d'un accord collectif de travail ou d'un contrat'.
L'article 7.02 relatif à la rémunération à la tâche des tailleurs de vignes de la convention collective en date du 15 avril 2003 réglementant les conditions de travail et de rémunération des salariés et apprentis des exploitations de polyculture, de viticulture et d'élevage de Loire Atlantique dispose que :
'Sur la base d'un rendement de 500 ceps taillés durant une journée de 8 heures, le montant du salaire à la tâche s'obtient de la façon suivante :
* salaire du coefficient 210 x 8 heures/500 ceps (selon mode guyot avec longs bois) auquel s'ajoute l'indemnité compensatrice de congés payés égale à 1/10ème.
Le prix de la pré-taille équivaut à 3/10ème du salaire de la taille.
La rémunération des tailleurs à la tâche est calculée sur la base du salaire correspondant au coefficient 210 en vigueur le 1er novembre de l'année en cours'.
Par ailleurs, selon la fiche n°5 édictée par la DIRECTE (pièce n°10), les conditions de rémunération des tailleurs de vigne pour la campagne 2017/2018 sont fixées comme suit :
'Pour la taille :
(...)
- Rémunération à la tâche :
Sur la base d'un rendement de 500 ceps taillés durant une journée de 8 heures, le salaire à la tâche est de 0,18 euros par cep (0,16 € + 10 % congés payés).
La taille servant de référence pour la définition de ce salaire est la taille [Z] avec long bois.
(...)
Pour la pré-taille ou déracage :
(...)
- Rémunération à la tâche :
Le salaire dû pour la pré-taille est égal aux 3/10èmes du salaire dû pour la taille. Pour la campagne 2017-2018, il est fixé à 0,05 euros par cep (y compris les 10% de congés payés)'.
La cour observe que la convention collective applicable ne précise nullement que le salaire de la pré-taille doit être déduit du salaire de la taille et prévoit deux rémunérations pour deux tâches distinctes. De même, le document de la DIRECCTE sur la taille de la vigne n'indique pas que la rémunération de la pré-taille est égale à 3/10ème du salaire dû pour la taille sans indiquer qu`elle est incluse dans la rémunération globale.
L'article 5 du contrat de travail du salarié stipule la rémunération suivante : 0,05 € pour les opérations de la pré-taille, autrement appelée déracage de la vigne et 0,16 € pour les opérations de la taille de la vigne.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments et sans qu'il y ait lieu de distinguer puisque la convention collective prévoit, sans exception ou modulation, deux rémunérations pour deux tâches différentes, c'est à juste titre que les premiers juges ont fixé le rappel de salaire du salarié à la somme brute de 5.197,44 €. Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
En application de l'article 696 du code de procédure civile, la SAS [Adresse 5], partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Condamnée aux dépens, elle sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande en revanche de la condamner, sur ce même fondement juridique, à payer à M. [B] une indemnité d'un montant de 1.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
CONFIRME le jugement entrepris ;
RAPPELLE qu'en application de l'article 1231-6 du code civil les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation ;
et y ajoutant,
CONDAMNE la SAS [Adresse 5] à verser à M. [B] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre la somme déjà allouée en première instance sur ce fondement ;
DÉBOUTE la SAS [Adresse 5] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS [Adresse 5] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.