La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2023 | FRANCE | N°23/00137

France | France, Cour d'appel de Rennes, Contestations honoraires, 12 juin 2023, 23/00137


Contestations Honoraires





ORDONNANCE N° 45



N° RG 23/00137

N° Portalis DBVL-V-B7H-TM7Y













S.E.L.A.R.L. CABINET [H]



C/



Groupement UDAF DU MORBIHAN

Mme [F] [O]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES





ORDONNANCE DE TAXE

DU 12 JUIN 2023







Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre,

délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,



GREFFIER :



Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 22 Mai 2023



ORDONNANCE :



Contra...

Contestations Honoraires

ORDONNANCE N° 45

N° RG 23/00137

N° Portalis DBVL-V-B7H-TM7Y

S.E.L.A.R.L. CABINET [H]

C/

Groupement UDAF DU MORBIHAN

Mme [F] [O]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE TAXE

DU 12 JUIN 2023

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre,

délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 22 Mai 2023

ORDONNANCE :

Contradictoire,

prononcée à l'audience publique du 12 Juin 2023, date indiquée à l'issue des débats

****

ENTRE :

S.E.L.A.R.L. CABINET [H] prise en la personne de Me [C] [V] [H]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée à l'audience par Me [C] [H], avocat au barreau de VANNES

ET :

Madame [F] [O] placée sous curatelle renforcée par jugement du 08/11/2021 rendu par le juge des tutelles de Vannes

[Adresse 5]

[Localité 4]

non comparante, représentée à l'audience par Me Benoît MARTIN de la SELARL GRUNBERG & ASSOCIES, avocat au barreau de VANNES

UDAF DU MORBIHAN

association désignée en qualité de curateur de Mme [F] [O]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Intervenant volontaire

représentée à l'audience par Me Benoît MARTIN de la SELARL GRUNBERG & ASSOCIES, avocat au barreau de VANNES

****

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [F] [O] a confié à Me [C] [V] [H], membre de la Selarl Cabinet [H], avocat au barreau de Vannes, la défense de ses intérêts dans un litige l'opposant à la Caisse d'Epargne.

Les parties ont signé le 21 février 2018 une convention d'honoraires au temps passé dans la limite de dix heures sur la base d'un honoraire de 65 euros HT/heure pour une prestation juridique et de 50 euros HT/heure pour une prestation de communication et autres, afférente à une mission précisée dans une lettre de mission signée simultanément (appel d'une décision de surendettement).

Le 10 avril 2018, les parties ont signé un premier avenant prévoyant une renonciation à l'aide juridictionnelle et un honoraire de résultat de 5 000 euros en cas de levée de l'irrecevabilité. Parallèlement une lettre de mission complémentaire (n° 2) a porté sur une demande de relevé de forclusion de la procédure d'appel.

Par avenant n° 3, Mme [O] a renoncé à l'aide juridictionnelle et les parties ont convenu d'un honoraire de 5080 euros HT outre une somme de 5000 euros à titre d'honoraire de résultat.

Enfin un avenant n° 4 a été signé le 25 février 2020 pour étendre la mission à un autre créancier (BPCE) et convenir d'un honoraire de résultat de 1000 euros en cas d'accord.

La Selarl [V] [H] a émis, suivant son décompte récapitulatif plusieurs factures provisionnelles (' non produites aux débats à l'exception des trois dernières) :

- VT n° 149 du 21 février 2018 d'un montant de 500 euros TTC,

- VT n° 327 du 7 mars 2019 d'un montant de 11 596,50 euros TTC,

- VT n° 406 du 17 septembre 2019 d'un montant de 541,62 euros TTC,

- VT n° 530 du 7 février 2020 d'un montant de 499,02 euros TTC,

- VT n° 621 du 13 octobre 2020 d'un montant de 720 euros TTC,

- VT-679 du 31 décembre 2020 d'un montant de 2 206,74 euros TTC au titre de compléments de missions réalisées (juridiques et administratives)

- VT-824 du 13 septembre 2021 d'un montant de 1 200 euros TTC au titre d'honoraires de résultat,

- VT-825 du 13 septembre 2021 d'un montant de 850,75 euros TTC au titre du solde des prestations et des frais.

Il résulte de ce décompte qu'elle a perçu 14 358 euros de provisions et que la cliente lui doit un solde de 3 877 euros TTC.

Ne parvenant à obtenir le règlement du solde lui restant dû, soit la somme de 3 907,49 euros, la Selarl Cabinet [H] a, par requête reçue au secrétariat de l'ordre le 15 mars 2022, saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Vannes d'une demande aux fins de fixation de sa rémunération à cette somme, outre une somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles et 75 euros de frais de taxe.

Par ordonnance du 8 juillet 2022, le bâtonnier a prorogé de quatre mois le délai pour statuer.

Par décision du 10 novembre 2022 notifiée le 15 novembre, le bâtonnier a débouté la Selarl Cabinet [H], de sa demande retenant une absence de facturation récapitulative détaillée.

Par lettre reçue le 14 décembre 2022 , la Selarl Cabinet [H] a formé un recours (non motivé) contre cette ordonnance dont elle sollicite l'infirmation, réclamant à son adversaire les sommes de :

- 3 907,49 au titre des honoraires restant dus,

- 2 005,14 euros au titre de l'indemnisation des dommages et intérêts de retards,

- 2 400 euros destinés à compenser le préjudice contractuel subi par l'avocat,

- 2 222 euros en réparation du préjudice moral,

- 1 475 euros au titre des frais irrépétibles en première instance et en appel,

- 75 euros de frais de taxation forfaitaires,

- le bénéfice de l'exécution provisoire.

Aux termes de ses conclusions des 16 et 17 mai 2023, elle rappelle qu'elle a conclu le 21 février 2018 une convention d'honoraires et une lettre de mission prévoyant une tarification sur la base de 65 euros HT/h pour la prestation juridique et 50 euros HT/heure pour la prestation de communication et que les parties ont signé trois avenants les 10 avril 2018, 19 mars 2019 et 25 février 2020. Elle précise avoir émis trois factures d'honoraires (4 357,49 euros - et non 4 057,49 euros comme indiqué) sur lesquelles reste due une somme de 3 907,49 euros après déduction d'une somme de 350 euros réglée.

Elle précise avoir saisi la commission de surendettement et avoir agi en relevé de forclusion, diligences qui ont permis à sa cliente d'éviter la vente de sa maison.

Pour le surplus, elle soutient être créancière d'intérêts de retard et de diverses sommes à titre de dommages et intérêts.

À l'audience, elle a ajouté que c'est avec une déloyauté certaine, voire avec fraude, que Mme [O], arguant d'une prétendue vulnérabilité, s'est fait placer, à sa demande, sous curatelle renforcée ce dont, au demeurant, elle ne l'a pas informée. Elle soutient donc qu'elle ne pouvait attraire devant le bâtonnier le curateur dont elle ignorait l'existence.

Aux termes de ses écritures (19 mai 2023) développées à l'audience, Mme [F] [O] assistée de sa curatrice, l'association UDAF du Morbihan nous demande :

1° à titre principal et in limine litis :

- prononcer la nullité de la requête en taxation d'honoraires reçue le 14 mars 2022 ainsi que tous les actes subséquents,

- prononcer la nullité de l'ordonnance de taxe du 8 novembre 2022 rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats de Vannes,

en conséquence,

- constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel et l'extinction de la présente instance,

- renvoyer les parties à mieux se pourvoir,

2° à titre subsidiaire et in limine litis :

- prononcer la nullité de la déclaration d'appel formalisée le 13 décembre 2022 par la Selarl Cabinet [H],

- constater en conséquence que la cour n'est pas saisie et l'extinction de l'instance,

2° à titre infiniment subsidiaire et avant-dire-droit :

- enjoindre la Sélarl Cabinet [H] de produire les éléments suivants :

' un historique du compte CARPA de l'affaire concernant la défense de Mme [F] [O], actualisé à une date postérieure à la décision avant-dire-droit à intervenir,

' l'intégralité des pièces de son dossier afférent à la défense de Mme [F] [O], et tous justificatifs des diligences accomplies pour sa défense,

- dire que cette injonction sera assortie d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter

de l'expiration du délai de 15 jours suivant le rendu de la décision à intervenir,

- dire que la cour se réservera la liquidation de l'astreinte,

- surseoir à statuer sur l'ensemble des demandes des parties dans l'attente de la production des éléments objets de l'injonction,

3° à titre très infiniment subsidiaire :

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le bâtonnier de l'ordre des avocats de Vannes en date du 8 novembre 2022,

- rejeter en conséquence toutes les demandes, fins et prétentions formulées par la Selarl Cabinet [H],

Y ajoutant à titre reconventionnel :

- prononcer la nullité de la convention d'honoraires du 21 février 2018, l'avenant du 10 avril 2018, l'avenant du 13 mars 2019 et l'avenant du 25 février 2000,

- condamner la Selarl Cabinet [H] à payer à Mme [F] [O], la somme de 14 358 euros au titre des honoraires indûment perçus,

4° en tout état de cause :

- donner acte à l'Udaf du Morbihan de son intervention volontaire es qualité de curateur de Mme [F] [O],

- condamner la Selarl Cabinet [H] à payer à Mme [F] [O], la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Selarl Cabinet [H] aux éventuels dépens,

- rejeter toutes autres demandes, plus amples ou contraires.

Mme [O] et l'Udaf soulèvent la nullité de la requête de la Selarl [H] au motif que celle-ci ne fait pas état de ce que Mme [O] était à la date du 14 mars 2022 sous curatelle depuis le 8 novembre 2021. Elles ajoutent que l'ordonnance rendue hors la présence du curateur est nulle.

Elles ajoutent que la curatrice aurait dû être intimée ce qui entache également de nullité l'acte d'appel.

Elles sollicitent la communication sous astreinte de diverses pièces et observent que contrairement à ce qui est soutenu l'avocat a perçu non une somme de 350 euros comme il le mentionne mais une somme globale 14 358 euros comprenant un virement Carpa de 11 946,90 euros, provenant du règlement d'une succession dont Me [H] n'a jamais été saisi mais que le notaire lui a adressé pour un montant de 25 688,11 euros.

Elles rappellent que Mme [O] bénéficiait de deux décisions d'aide juridictionnelle auxquelles elle aurait renoncé.

Elles observent que l'avocat ne justifie pas de ses prestations ni du solde d'honoraires dont il soutient être créancier au regard des sommes qu'il a perçues.

Elles font valoir l'état de santé de Mme [O] soutenant que son consentement n'était pas éclairé lorsqu'elle a signé la convention et renoncé à l'aide juridictionnelle.

Elles contestent l'argumentation soulevée tirée de l'irrecevabilité de leurs demandes en appel ne s'agissant que de moyens de défense et de demandes se rattachant par un lien suffisant aux prétentions originaires.

Mme [O] et l'UDAF ont sollicité le rejet des écritures adressées par la Selarl Cabinet [H] le dimanche 21 mai 2023, veille de l'audience. Cette dernière a sollicité le rejet des écritures de Mme [O] et de sa curatrice en date du vendredi 19 mai.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les écritures des parties échangées les 19 et 21 mai 2023 :

Il convient de rappeler que la Selarl Cabinet de Calle a formé un recours non motivé. Elle a donc été invitée par lettre du 24 janvier 2023 à conclure avant le 24 février suivant de sorte que l'intimée puisse conclure avant le 24 mars et l'appelante y répondre avant le 24 avril.

La Selarl [H], qui n'a nullement observé ce calendrier, a attendu les 5, 16 et 17 mai (à 21h35), soit moins d'une semaine avant l'audience, pour déposer deux jeux d'écritures successifs. Elle ne peut dès lors sérieusement reprocher à Mme [O] et à l'UDAF, qui après avoir réclamé des pièces que la requérante a refusé de communiquer, d'y avoir répondu le vendredi 19 (alors que le jeudi 18 mai était férié). Les conclusions en réplique qu'elle a adressées le dimanche 21 mai, veille d'une audience fixée le lundi 22 à 9h, ne peuvent qu'être écartées des débats, l'avocat des intimées n'ayant pu en prendre connaissance en temps utile et les communiquer à ses clientes.

La Selarl Cabinet [H] nous a adressé, sans que nous l'ayons autorisée, une note en délibéré laquelle doit être écartée des débats en application de l'article 445 du code de procédure civile.

Sur la nullité de l'acte de saisine et de l'ordonnance subséquente du bâtonnier :

Il ressort d'un jugement rendu le 8 novembre 2021 par le juge des tutelles du tribunal judiciaire de Vannes que Mme [F] [O] a, du fait d'une altération de ses facultés personnelles médicalement constatée, été placée sous le régime de la curatelle renforcée, la durée de cette mesure étant fixée 60 mois, le curateur désigné (l'UDAF du Morbihan) ayant plus particulièrement pour mission de percevoir ses revenus et d'assurer le règlement de ses dépenses auprès des tiers.

Contrairement à ce que prétend la Selarl Cabinet [H] qui a fait état à l'audience d'une prétendue vulnérabilité et d'un détournement de la procédure de curatelle, rien ne permet de supposer que cette décision a été rendue frauduleusement au bénéfice d'une personne saine d'esprit qui se serait placée sous protection dans le dessein de (lui) nuire.

Il résulte en tout état de cause de l'article 468 al 3 du code civil que l'assistance du curateur est requise pour introduire une action en justice ou y défendre.

La circonstance tirée du fait - vraisemblable - que la Selarl Cabinet [H] ignorait le placement sous curatelle de sa cliente lorsqu'elle a saisi, le 15 mars 2022, le bâtonnier, est sans conséquence sur l'irrégularité de l'acte de saisine lequel était nul, Mme [O], atteinte d'une incapacité d'exercice, ne pouvant valablement être attraite dans le cadre d'une instance, y compris en fixation d'honoraires, hors la présence de sa curatrice.

La nullité encourue est, comme le soutiennent Mme [O] et l'UDAF du Morbihan, une nullité de fond qui ne peut être couverte y compris par l'intervention, dans le cadre d'un recours du curateur.

L'acte de saisine qui ne fait pas état de situation juridique d'incapable de Mme [O] est en conséquence nul et l'ordonnance rendue dans ce cadre doit également être annulée, la Selarl Cabinet [H] étant invitée ressaisir si elle l'estime utile le bâtonnier en faisant état de la situation de son ancienne cliente.

Partie succombante, la Selarl Cabinet [H] supportera la charge des dépens.

Les circonstances de l'espèce ne justifient pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement,

Ecartons des débats les conclusions adressées le dimanche 21 mai 2023 par la Selarl Cabinet [H].

Ecartons des débats la note en délibéré adressée par la Selarl Cabinet [H].

Rejetons la demande de la Selarl Cabinet [H] tendant à ce que soient écartées des débats les écritures et les pièces de Mme [O] et de sa curatrice en date du 19 mai 2023.

Annulons la requête de la Selarl Cabinet [H] reçue le 15 mars 2022 par le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Vannes.

Annulons par voie de conséquence l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Vannes du 10 novembre 2022.

Renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront.

Condamnons la Selarl Cabinet [H] aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Contestations honoraires
Numéro d'arrêt : 23/00137
Date de la décision : 12/06/2023
Sens de l'arrêt : Annulation

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-12;23.00137 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award