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31/05/2023 | FRANCE | N°23/00253

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 31 mai 2023, 23/00253


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 23/115

N° N° RG 23/00253 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TYRV



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



O R D O N N A N C E





article L 3211-12-4 du code de la santé publique



Nous, Philippe BRICOGNE, Président à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Sandrine Kervarec lors des débats et de Elodie CLOATRE, lors du prononcé, greffières,

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Statuant sur l'appel formé le 22 Mai 2023 à 15 h 50 par :



M. [E] [B]

né le 23 Juillet 1986 à ST BRIEUC (22)



hospitalisé au Centre Hospi...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 23/115

N° N° RG 23/00253 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TYRV

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3211-12-4 du code de la santé publique

Nous, Philippe BRICOGNE, Président à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Sandrine Kervarec lors des débats et de Elodie CLOATRE, lors du prononcé, greffières,

Statuant sur l'appel formé le 22 Mai 2023 à 15 h 50 par :

M. [E] [B]

né le 23 Juillet 1986 à ST BRIEUC (22)

hospitalisé au Centre Hospitalier [3] de [Localité 2]

ayant pour avocat Me Aurélie CHEVET, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 19 Mai 2023 par le Juge des libertés et de la détention de GUINGAMP qui a rejeté la demande de mainlevée et ordonné le maintien de son hospitalisation complète ;

En présence de [E] [B], régulièrement avisé de la date de l'audience, assisté de Me Aurélie CHEVET, avocat

En l'absence du représentant du préfet des Côtes d'Armor, régulièrement avisé, (mémoire écrit)

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, M. Yves Delperie, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 23 mai 2023, lequel a été mis à disposition des parties,

En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé,

Après avoir entendu en audience publique le 30 Mai 2023 à 11 H 00 l'appelant et son avocat en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :

M. [E] [B] a été incarcéré au centre de détention d'[Localité 1] avant d'être hospitalisé sous contrainte le 21 septembre 2021 dans l'UHSA du centre hospitalier [4] de [Localité 7], mesure maintenue le 8 novembre 2021 lors de sa levée d'écrou, ce qui a conduit à son transfert au centre hospitalier de [Localité 2].

Par arrêté du 18 janvier 2023 reconduit le 20 janvier 2023, le préfet des Côtes d'Armor a décidé de la prise en charge de M. [E] [B] sous une autre forme qu'en hospitalisation complète, en suite d'une ordonnance du délégué du premier président du 17 janvier 2023 ayant ordonné la mainlevée de cette mesure.

Sur la base d'un certificat médical circonstancié établi le 11 mai 2023 par le Dr. [D] décrivant des troubles du comportement avec agitation, hétéro-agressivité physique et verbale, accélération du cours de la pensée, menace de mort sur soignant aux urgences de [Localité 5], dans un contexte de rupture de traitement depuis sa sortie ainsi qu'un refus de soins et d'hospitalisation, le préfet des Côtes d'Armor a, par arrêté du même jour, décidé de la réintégration de M. [E] [B] en hospitalisation complète.

Sur requête du préfet des Côtes d'Armor du 17 mai 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal de proximité de Guingamp a autorisé le maintien de la mesure d'hospitalisation complète de M. [E] [B] par ordonnance du 19 mai 2023, fondée notamment sur le certificat médical de situation établi par le Dr. [X] le 17 mai 2023 qui mentionne un contexte délirant.

Le 22 mai 2023, M. [E] [B] a fait appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention.

À l'audience du 30 mai 2023 à 14 heures, M. [E] [B] indique qu'il n'a jamais menacé ni blessé personne et avoir suivi son programme de soins à la lettre. Il n'a jamais refusé de signer quoi que ce soit. Il est à l'isolement depuis trois semaines. Il s'en sortait jusque-là avec son allocation adulte handicapé et vivait dans un camping sous une tente.

Son avocate soulève l'irrégularité de la notification de l'arrêté de réintégration et sollicite en conséquence la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète, le cas échéant après l'établissement d'un programme de soins.

Le centre hospitalier n'a pas comparu mais a produit des éléments complémentaires, notamment un certificat médical de situation établi le 26 mai 2023 par le Dr. [Z] qui décrit un patient très exalté et persécuté, au comportement difficile, avec des contestations permanentes, de la provocation et des menaces verbales, cette difficulté de prise en charge ayant conduit de nouveau son admission sur l'UMD de [Localité 6].

Le préfet des Côtes d'Armor n'a pas comparu mais a demandé le maintien de M. [E] [B] en hospitalisation complète.

Le ministère public requiert la confirmation de l'ordonnance.

DISCUSSION

Sur la recevabilité de l'appel

Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

En l'espèce, M. [E] [B] a formé le 22 mai 2023 un appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal de proximité de Guingamp du 19 mai 2023.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité de la procédure

Aux termes de l'aticle L. 3211-3 du code de la santé publique :

'Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux fait l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée.

Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.

En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1.

L'avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible.

En tout état de cause, elle dispose du droit :

1° De communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4 ;

2° De saisir la commission prévue à l'article L. 3222-5 et, lorsqu'elle est hospitalisée, la commission mentionnée à l'article L. 1112-3 ;

3° De porter à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence ;

4° De prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix ;

5° D'émettre ou de recevoir des courriers ;

6° De consulter le règlement intérieur de l'établissement et de recevoir les explications qui s'y rapportent ;

7° D'exercer son droit de vote ;

8° De se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix.

Ces droits, à l'exception de ceux mentionnés aux 5°, 7° et 8°, peuvent être exercés à leur demande par les parents ou les personnes susceptibles d'agir dans l'intérêt du malade'.

Cette obligation d'information correspond à un droit essentiel du patient, celui d'être avisé d'une situation de soins contraints et des droits en découlant, étant ici rappelé que le juge européen assimile l'hospitalisation d'office à une arrestation et lui applique donc les obligations de l'article 5, § 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, relatif au droit d'information de la personne détenue.

En l'espèce, le préfet des Côtes d'Armor a, par arrêté du 11 mai 2023, décidé de la réintégration de M. [E] [B] en hospitalisation complète. L'encart relatif à la notification de cet arrêté est dépourvu de la signature du patient et ne comporte, sans autre explication, que la signature de deux infirmières, avec la date du 12 mai 2023 à 10 heures 05, alors que le document d'information préalable renseigné par les mêmes infirmières et daté du 11 mai 2023 à 10 heures 50 mentionne que l'intéressé a refusé de signer.

Il en résulte que l'arrêté de réintégration n'a jamais été valablement notifié à M. [E] [B], situation qui lui cause nécessairement grief puisqu'il ignore les considérations qui ont présidé à sa réadmission.

Il conviendra donc d'infirmer l'ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, de déclarer la procédure irrégulière et d'ordonner la mainlevée de l'hospitalisation complète de M. [E] [B].

Toutefois, cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi. La mesure d'hospitalisation complète prendra fin dès l'établissement de ce programme de soins ou au plus tard à l'issue du délai précité.

Sur le fond

Sur les dépens

Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Nous, Philippe BRICOGNE, président de chambre, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Recevons M. [E] [B] en son appel,

Infirmons l'ordonnance entreprise,

Statuant à nouveau,

Déclarons la procédure irrégulière,

Ordonnons la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l'hospitalisation complète de M. [E] [B],

Disons toutefois que cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi et que la mesure d'hospitalisation complète prendra fin dès l'établissement de ce programme de soins ou au plus tard à l'issue du délai précité,

Laissons les dépens de première instance et d'appel à la charge du trésor public.

Fait à Rennes, le 31 Mai 2023 à 14 heures

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Philippe BRICOGNE, Président

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [E] [B] , à son avocat, au CH et ARS

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 23/00253
Date de la décision : 31/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-31;23.00253 ?
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