2ème Chambre
ARRÊT N° 274
N° RG 20/04255 - N° Portalis DBVL-V-B7E-Q4S6
(1)
S.A. BANQUE SOLFEA
C/
M. [P] [M]
Mme [C] [T] épouse [M]
S.C.P. BTSG
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN
- Me Hugo CASTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 26 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 Mars 2023 , tenue en double rapporteur , sans opposition des parties par Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre, et Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 26 Mai 2023 par mise à disposition au greffe
****
APPELANTE :
S.A. BANQUE SOLFEA désormais dénommée SA SOLFINEA
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP LECLERCQ & CASTRES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par la SCPA RD AVOCATS &ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Monsieur [P] [M]
né le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 9]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représenté par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Samuel HABIB, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Madame [C] [T] épouse [M]
née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 9]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Samuel HABIB, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
S.C.P. BTSG représentée par Maître [Z] [W] es qualité de mandataire liquidateur de la société NEXT GENERATION
[Adresse 4]
[Localité 7]
N'ayant pas constitué avocat, assigné(e) par acte d'huissier le 29 Octobre 2020 à personne
2
EXPOSÉ DU LITIGE :
À la suite d'un démarchage à domicile, M. [P] [M] et Mme [C] [T] (les époux [M]) ont, selon bon de commande du 30 mai 2012, commandé à la société Next Génération France (la société Next Génération) la fourniture et l'installation de 14 panneaux photovoltaïques, moyennant le prix de 18 100 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société Banque Solfea a, selon offre acceptée le même jour, consenti aux époux [M] un prêt de 18 100 euros au taux de 5,13 % l'an, remboursable en une mensualité de 82 euros, 178 mensualités de 152 euros et une mensualité de 112,52 euros, hors assurance emprunteur, après un différé d'amortissement de 11 mois.
Les fonds ont été versés à la société Next Generation au vu d'une attestation de fin de travaux du 29 juin 2012, et le prêt a été remboursé par anticipation.
Prétendant avoir été victimes de manoeuvres dolosives de la part du démarcheur, et soutenant que le bon de commande était irrégulier et que l'installation n'atteignait pas le niveau de performance attendu, les époux [M] ont, par actes des 1er et 2 août 2018, fait assigner la société Banque Solfea et la société BTSG, ès-qualités de liquidateur de la société Next Génération, dont la liquidation judiciaire avait été prononcée par jugement du tribunal de commerce de Paris du 25 juin 2013, devant le tribunal d'instance (devenu le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire) de Saint-Brieuc, en annulation des contrats de vente et de prêt, et en remboursement des sommes versées au titre du prêt.
La banque a soulevé l'irrecevabilité des demandes des époux [M] en application des règles des procédures collectives, la prescription de leur action sur le fondement de l'article 2224 du code civil et a contesté sur le fond la nullité du prêt, sa faute dans le déblocage des fonds et l'existence d'un préjudice en découlant.
Par jugement 16 juin 2020, le juge des contentieux de la protection a :
débouté la société Banque Solfea de sa demande 'd'incompétence' en application de l'article 622-21 du code du commerce et déclaré recevable l'action des époux [M] à l'égard de la banque,
débouté la société Banque Solfea de sa demande de prescription quinquennale de l'action des époux [M] et déclaré recevable leur action à l'égard de la banque,
débouté la société Banque Sofea de sa demande d'application du code de commerce et dit que les contrats sont soumis au code de la consommation,
prononcé la nullité du contrat de vente signé entre les époux [M] et la société Next Génération,
prononcé, en conséquence, la nullité du contrat de crédit signé entre les époux [M] et la société Banque Solfea,
condamné la société Banque Solfea à rembourser aux époux [M] l'intégralité des sommes perçues au titre du remboursement du prêt (capital, intérêts et frais divers),
condamné, en conséquence, la société Banque Solfea à communiquer le décompte de ces sommes aux époux [M] dans le mois suivant la signification du jugement et passé ce délai sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard,
constaté que la société Banque Solfea a commis des fautes personnelles dans l'exécution de ses obligations professionnelles,
débouté, en conséquence, la société Banque Solfea de sa demande de restitution de la somme de 18 100 euros, correspondant au montant total financé,
débouté les époux [M] de leur demande de dommages et intérêts au titre de leur préjudice financier, économique, trouble de jouissance, et préjudice moral,
condamné la société Banque Solfea à verser aux époux [M] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, aini qu'aux dépens,
ordonné l'exécution provisoire.
La société Solfea, devenue Solfinea (la société Solfinea), a relevé appel de cette décision le 4 septembre 2020.
Par ordonnance du 16 avril 2021, le conseiller de la mise en état a débouté les époux [M] de leur demande tendant à voir déclarer irrecevable, comme prétendument formé hors délai, l'appel de la société Solfinea.
La société Solfinéa demande à la cour de :
réformer le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré recevables les demandes des époux [M], prononcé l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté liés, retenu la responsabilité de la société Banque Solfea et condamné cette dernière à restituer aux emprunteurs l'ensemble des sommes perçues au titre du crédit,
dire prescrites les demandes des époux [M] et les déclarer irrecevables en leurs demandes,
subsidiairement, en cas de recevabilité, dire que les contrats ne sont pas soumis aux dispositions du code de la consommation et dire n'y avoir lieu à prononcer l'annulation du contrat principal de vente et à retenir la responsabilité de la société Solfinéa sur le fondement de ces dispositions,
plus subsidiairement, en cas d'application des dispositions du code de la consommation, dire n'y avoir lieu à prononcer l'annulation du contrat principal de vente, et du contrat de crédit affecté,
par conséquent, débouter les époux [M] de l'intégralité de leurs demandes,
à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation des contrats, dire que la société Solfinéa n'a commis aucune faute et que les époux [M] ne justifient pas de l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité à l'encontre du prêteur,
par conséquent, débouter les époux [M] de leur demande visant à voir condamner le prêteur à leur reverser l'intégralité des sommes perçues au titre du crédit, en ce compris le montant du capital prêté,
dire que la société Solfinea devra rembourser aux époux [M], le montant des sommes reçues (hors capital prêté), après justification par ces derniers de la résiliation du contrat auprès d'ERDF, de la restitution des sommes perçues au titre du contrat de revente, ainsi que de la restitution au Trésor des crédits d'impôts perçus,
en tout état de cause, condamner in solidum les époux [M] à payer à la société Solfinea une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel.
Les époux [M] demandent quant à eux à la cour de :
confirmer le jugement attaqué, sauf en ce qu'il les déboutés de leurs demande de dommages-intérêts au titre de leur préjudice financier, économique et moral,,
à titre subsidiaire, si le jugement était infirmé s'agissant de la restitution des échéances versées par les époux [M], condamner la société Solfinea à leur verser la somme de 18 100 euros, à titre de dommage et intérêts, du fait de la négligence fautive de la banque,
à titre infiniment subsidiaire, prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la société Solfinea,
par conséquent, condamner la société Solfinea à restituer les sommes perçues en sus du capital emprunté,
en tout état de cause, réformer le jugement en ce qu'il n'a pas condamné la banque à indemniser les époux [M] au titre de leur préjudice financier, économique et moral,
condamner la société Solfinea à leur verser les sommes de :
4 554 euros au titre de leur préjudice financier,
3 000 euros au titre de leur préjudice économique et du trouble de jouissance,
3 000 euros au titre de leur préjudice moral,
en tout état de cause, condamner la société Solfinea à leur à payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La SCP BTSG, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Next Generation, à laquelle la société Solfinea et les époux [M] ont signifié leurs conclusions le 6 novembre 2020 et le 29 décembre 2022, n'a pas constitué avocat devant la cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour la société Solfinea le 2 janvier 2023 et pour les époux [M] le 22 décembre 2022, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 12 janvier 2023.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Les dispositions pertinentes du jugement ayant débouté la société Banque Solfea de sa demande d'irrecevabilité fondée sur l'article 622-21 du code du commerce, exemptes de critique devant la cour, seront confirmées.
Sur la prescription
Devant la cour, les époux [M] agissent en annulation du contrat de vente pour non-respect du formalisme du code de la consommation et pour vice du consentement, en faisant grief à la société Solfinéa de leur avoir dissimulé des informations relatives au détail du coût de l'installation et de leur avoir communiqué des informations mensongères quant à la rentabilité de l'opération.
Ils invoquent en outre la responsabilité du prêteur pour s'être dessaisi des fonds entre les mains du fournisseur, sans s'assurer de la régularité du contrat principal et de l'exécution complète de la prestation du fournisseur, lui reprochant également de s'être rendu complice du dol du vendeur, ce dont ils déduisent que ces fautes priveraient la société Solfinéa de son droit à remboursement du prêt et justifieraient par surcroît le remboursement des sommes déjà réglées et l'octroi de dommages-intérêts complémentaires pour préjudice moral et financier.
Ils soutiennent enfin que le prêteur aurait manqué à son obligation de vérification de la solvabilité des emprunteurs en ne consultant pas le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) lors de l'octroi du prêt, ce qui justifierait la déchéance du droit du prêteur aux intérêts.
La société Solfinea soutient quant à elle que l'ensemble de ces demandes seraient prescrites comme ayant été formées plus de cinq ans après la signature du contrat principal du 30 mai 2012, ou en tout cas, après le déblocage des fonds du 5 juillet 2012.
En application de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, l'action en nullité d'un contrat se prescrit par cinq ans, commençant à courir à compter du jour où les vices ont été découverts.
Or, le défaut d'indication des caractéristiques du crédit ainsi que l'absence de précision du bon de commande sur les caractéristiques du bien et de la prestation accessoire de pose invoqués par les intimés au soutien de leur demande d'annulation du contrat de vente pour non-respect du formalisme imposé par le code de la consommation en matière de démarchage à domicile étaient visibles dès la signature de l'acte, étant au surplus observé que les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation imposant ce formalisme à peine de nullité du contrat conclu par démarchage étaient reproduites au verso du contrat principal.
La contestation portant sur la taille des caractères des conditions générales de vente, et l'irrégularité affectant le bordereau détachable de rétractation étaient également visibles à la simple lecture du contrat du 30 mai 2012, de sorte que le délai de prescription a commencé à courir dès sa conclusion.
De même, la prétendue tromperie portant sur le coût final de l'installation ne pouvait être ignorée des époux [M] après le raccordement au réseau réalisé, selon leurs propres explications, le 3 août 2012.
Dès lors, l'action en annulation du contrat de fourniture du 30 mai 2012 fondée sur ces vices du bon de commande ou du consentement, exercée par assignation du 2 août 2018, est irrecevable comme prescrite.
Il en est nécessairement de même de l'action en annulation du contrat de prêt, qui ne serait que la conséquence de plein droit de la nullité du contrat principal, et de la demande de restitution des sommes remboursées en exécution du contrat de prêt qui en découle.
Le jugement attaqué sera donc réformé en ce sens.
En revanche, rien ne démontre que les acquéreurs aient pu découvrir l'insuffisance de performance alléguée de l'installation photovoltaïque, celle-ci ne pouvant être constatée qu'après mise en service et utilisation de l'installation durant plusieurs mois, en tout cas moins de cinq ans avant l'assignation du 2 août 2018.
Il en résulte que la demande d'annulation du contrat de vente et, subséquemment de prêt, pour le dol procédant de l'insuffisance de performance de l'installation est recevable.
L'action en responsabilité du prêteur lors du déblocage des fonds est quant à elle soumise à la prescription quinquennale de l'article L. 110-4 du code de commerce, commençant à courir à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Il s'ensuit que, s'agissant du grief de défaut de vérification de la de la régularité du bon de commande, les époux [M] étaient en mesure, dès la date du déblocage des fonds entre les mains du fournisseur du 5 juillet 2012 dont ils ont été informés par courrier du même jour, de connaître les faits de nature à engager la responsabilité de la Banque Solféa, de sorte que cette action était prescrite au moment de l'assignation du 2 août 2018.
De même, il était visible dès le déblocage des fonds intervenu le 5 juillet 2012, que l'installation n'était pas raccordée au réseau, de sorte qu'ils sont irrecevables à rechercher la responsabilité du prêteur pour ne pas avoir vérifier l'exécution complète de la prestation du fournisseur avant de se dessaisir des fonds entre les mains du fournisseur.
En revanche, l'action en responsabilité du prêteur fondée sur une prétendue complicité de celui-ci dans le dol qu'aurait commis le fournisseur du fait d'une tromperie sur la rentabilité de l'installation n'a pu commencer à courir que du jour où les acheteurs ont été en mesure de constater l'insuffisance de performance alléguée, laquelle ne pouvait être observée qu'après mise en service et utilisation de l'installation durant plusieurs mois, c'est à dire moins de cinq ans avant l'assignation de la société Solfea en date du 1er août 2018.
Les intimés sont donc, de ce chef, recevables à agir.
Enfin, si la déchéance du droit du prêteur aux intérêts ne constitue qu'un moyen de défense sur lequel la prescription est inopérante lorsqu'elle est opposée au prêteur qui agit en paiement des sommes dues au titre du prêt, elle se trouve soumise à la prescription quinquennale de l'article L. 110-4 du code de commerce, commençant à courir à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, lorsqu'elle est invoquée au soutien d'une action en restitution d'un trop perçu d'intérêts exercée à l'initiative de l'emprunteur.
Or, en l'occurrence, ni l'offre préalable de crédit, ni aucun autre document ne contenaient d'information sur le fait que la banque devait consulter le FICP avant la conclusion du contrat, et rien ne démontre que les époux [M] aient pu avoir connaissance de ce que la société Banque Solféa se serait abstenue de le faire.
Il en résulte que la demande en déchéance du droit du prêteur aux intérêts n'est pas prescrite.
Sur le dol
Les époux [M] soutiennent avoir été victimes de pratiques trompeuses de la société Next Génération, qui leur aurait présenté une simulation fictive leur laissant croire que la centrale photovoltaïque générerait immédiatement des revenus dès son installation, et que ces revenus seraient largement supérieurs au coût de l'emprunt affecté pour le financer, alors que le démarcheur ne pouvait ignorer que le plan de financement était basé sur des perspectives de rendement inatteignables au regard de la puissance installée et du prix de revente à EDF à la signature du contrat.
Cependant, le dol ne se présume pas et suppose la démonstration par la victime de l'intention dolosive du cocontractant.
Or, rien ne démontre que le fournisseur ait sciemment fourni des informations mensongères aux époux [M], ou même une installation délibérément inapte à satisfaire à l'usage auquel elle était destinée.
Ils n'établissent au demeurant pas que la société Next Génération leur aurait contractuellement promis que le niveau de rémunération de l'électricité produite par l'installation devait leur permettre de couvrir les mensualités de remboursement.
Le bon de commande ne contient en effet aucun objectif chiffré de l'opération, celui-ci se contentant d'indiquer la puissance maximale de l'installation, et la simulation d'autofinancement produite, dont rien ne démontre qu'elle émanait de la société Next Génération, est dépourvue de valeur contractuelle et mentionnait au demeurant que 'les montants proposés dans le tableau sont des bases fournies à titre indicatif'.
Il n'y a donc pas matière à annulation du contrat pour dol.
Sur la responsabilité du prêteur
Le contrat principal n'ayant pas été annulé, les dispositions du jugement attaqué ayant prononcé par voie de conséquence l'annulation du contrat de crédit affecté ne pourront qu'être infirmées.
Toutefois, pour prétendre au remboursement des sommes déjà réglées en exécution du contrat de prêt, les époux [M] font aussi valoir que la banque aurait engagé sa responsabilité en ayant apporté son concours à des opérations nécessairement ruineuses, et en participant au dol du fournisseur par l'intermédiaire duquel elle plaçait ses crédits.
Cependant, le dol ne se présume pas, et les époux [M] allèguent par de pures conjectures, et sans en rapporter la preuve, que le prêteur aurait été complice de manoeuvres dolosives du fournisseur qui n'ont au demeurant pas été retenues.
Les demandes en paiement de dommages-intérêts formées contre la société Solfinéa pour préjudices moral, financier et de jouissance seront donc rejetées en l'absence de faute démontrée du prêteur.
Sur la déchéance du droit du prêteur aux intérêts
Les époux [M] demandent enfin à titre subsidiaire de prononcer la déchéance du droit du prêteur aux intérêts, faute par la banque d'avoir consulté le FICP préalablement à la conclusion du contrat.
Il est à cet égard exact que le prêteur doit pouvoir établir avoir satisfait à son obligation de consultation du FICP imposée par l'article L. 311-9 devenu L.312-16 du code de la consommation, l'article 13 de l'arrêté du 26 octobre 2010 disposant que les établissements de crédit doivent conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable, et être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées.
Or, en l'occurrence, la société Solfinea ne justifie, ni même n'allègue, avoir consulté le FICP avant le déblocage des fonds, aucun document n'étant produit à ce titre devant la cour.
Au regard de la gravité du manquement, il convient de prononcer une déchéance totale,
de sorte que les époux [M] n'étaient, conformément aux dispositions de l'article L. 311-48 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, tenus qu'au remboursement du seul capital.
Le prêt ayant été remboursé par anticipation, la société Solfinea sera donc condamnée à rembourser aux époux [M] les intérêts perçus en exécution du contrat de prêt.
À cet égard, la société Solfinéa n'est nullement fondée à demander à la cour de subordonner cette restitution à la restitution des sommes perçues au titre du contrat de revente à EDF et des crédits d'impôt perçus au Trésor public, alors que cette obligation de restitution des intérêts ne procède que des conséquences de la sanction de l'absence de diligence du prêteur dans son obligation de vérification de la solvabilité des emprunteurs.
Sur les demandes accessoires
Les parties, qui ont l'une et l'autre succombé, conserveront la charge de leurs propres dépens de première instance et d'appel.
Il n'y a enfin pas matière à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque, tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Confirme le jugement rendu le 16 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Brieuc en ce qu'il a :
rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Banque Solfea sur le fondement de l'article 622-21 du code du commerce,
déclaré recevables les actions en annulation des contrats de fourniture et de prêt et en responsabilité du prêteur fondées sur le dol et la complicité de dol par tromperie sur la rentabilité de l'installation,
débouté les époux [M] de leur demande en paiement de dommages-intérêts ;
L'infirme en ses autres dispositions ;
Déclare irrecevables les actions de M. et Mme [M] en annulation du contrat principal et du contrat de prêt pour irrégularité du bon de commande et tromperie sur le coût final de l'installation, ainsi qu'en responsabilité du prêteur pour défaut de vérification de la régularité du bon de commande et de l'achèvement complet de la prestation du fournisseur lors du déblocage des fonds ;
Déclare recevable la demande de déchéance du droit du prêteur aux intérêts ;
Déboute M. et Mme [M] de leur demande en annulation du contrats principal et du contrat de prêt pour dol et en responsabilité du prêteur fondées sur le dol et la complicité de dol par tromperie sur la rentabilité de l'installation ;
Prononce la déchéance totale du droit du prêteur aux intérêts ;
Condamne la société Solfinea à rembourser à M. et Mme [M] les intérêts perçues en exécution du contrat de prêt ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu'en cause d'appel ;
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT