La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2023 | FRANCE | N°23/00024

France | France, Cour d'appel de Rennes, Contestations honoraires, 15 mai 2023, 23/00024


Contestations Honoraires





ORDONNANCE N° 39



N° RG 23/00024

N° Portalis DBVL-V-B7H-TMSO













Société CYRFLO



C/



Société SELARL LES JURISTES ASSOCIES DE L'OUEST































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES
<

br>

ORDONNANCE DE TAXE

DU 15 MAI 2023







Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre,

délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,



GREFFIER :



Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 03 Avril 2023



ORDONNANCE :



Contradi...

Contestations Honoraires

ORDONNANCE N° 39

N° RG 23/00024

N° Portalis DBVL-V-B7H-TMSO

Société CYRFLO

C/

Société SELARL LES JURISTES ASSOCIES DE L'OUEST

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE TAXE

DU 15 MAI 2023

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre,

délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 Avril 2023

ORDONNANCE :

Contradictoire,

prononcée à l'audience publique du 15 Mai 2023, date indiquée à l'issue des débats

****

ENTRE :

Société CYRFLO, pris en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 1]

représentée à l'audience par Me Anne-Raphaëlle TOUSSAINT-LAYADI, avocat au barreau de RENNES, substituant Me Aurélie DUIGOU, avocat au barreau de BREST

ET :

Société SELARL LES JURISTES ASSOCIES DE L'OUEST prise en la personne de Maître [T] [X]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée à l'audience par Me Benjamin ENGLISH, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

****

EXPOSE DU LITIGE':

En novembre 2019, les époux [D] ont constitué, avec l'assistance de la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest, la société holding Cyrflo.

En avril 2021, la société Cyrflo a saisi la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest, prise en la personne de Me [I] [L], avocate à Rennes, pour l'accompagner dans l'acquisition des titres de la société Enplab, détenus par la société Kerdostin.

Le 5 mai 2021, l'avocate a adressé à sa cliente une proposition d'honoraires de 38'250 euros HT que cette dernière n'a pas acceptée. Par courrier du 17 mai, l'avocat a ramené sa proposition à la somme de 34'420 euros HT.

En désaccord avec les honoraires réclamés par Me [L] pour le compte de la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest, la société Cyrflo a demandé que son dossier soit suivi par Me'[T] [X], avocate au barreau de Saint Brieuc, associée au sein de la même structure d'exercice mais rattachée au bureau de Plérin.

L'acte de cession, rédigé par le conseil du cédant, a été signé le 30 juin 2021, moyennant le prix de 7'300'000 euros.

Le même jour, la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest a adressé à sa cliente une facture de 41'304 euros TTC correspondant au montant de sa dernière proposition.

Le protocole définitif de cession a été signé le 14 décembre 2021.

La société Cyrflo n'ayant pas réglé cette facture en dépit de relances, la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest a, par requête du 10 août 2022, saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Saint-Brieuc d'une demande aux fins de fixation de sa rémunération.

Par ordonnance du 2 décembre 2022 notifiée le 6 décembre, le bâtonnier a fixé le montant des honoraires de l'avocat à la somme de 41 304 euros TTC, rappelant que sa décision était exécutoire de plein droit.

Par une lettre recommandée adressée au greffe le 12 décembre 2022, la société Cyrflo a formé un recours contre cette ordonnance.

Aux termes de ses dernières écritures (30 mars 2023) développées lors de l'audience, elle nous demande de':

à titre principal,

' dire et juger que la convention d'honoraires entre la société Cyrflo et le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest nul et sans effet pour vice du consentement,

' infirmer l'ordonnance de taxation rendue par monsieur le bâtonnier de Saint-Brieuc le 2 décembre 2022 fixant le montant des honoraires à la somme de 41'304 euros TTC,

' débouter le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest au titre du paiement des honoraires à la somme de 41'304,00 euros TTC,

' constater l'absence de convention d'honoraires établie et signée entre elle et le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest.

à titre subsidiaire,

' dire et juger que la convention d'honoraires entre elle et le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest nulle et sans effet au regard des dispositions du code la consommation,

' infirmer l'ordonnance de taxation rendue par le bâtonnier de Saint-Brieuc le 2 décembre 2022 fixant le montant des honoraires à la somme de 41'304 euros TTC,

' débouter le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest au titre du paiement des honoraires à la somme de 41'304 euros TTC,

à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, le premier président de la cour d'appel ne devait pas retenir la nullité de la convention d'honoraires,

' dire et juger que les honoraires fixés par le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest sont excessifs et disproportionnés,

par conséquent,

' ramener le montant des honoraires à de plus justes proportions selon son appréciation souveraine,

en tout état de cause,

' débouter le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamner le cabinet Les Juristes Associes de l'Ouest à lui verser la somme de 3'000'euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamner le même aux entiers frais et dépens de l'instance.

Elle soutient qu'aucun accord relatif au montant des honoraires n'est intervenu de sa part et que si convention il y a celle-ci est nulle. Elle affirme que le cabinet ne l'a pas préalablement informée du montant de ceux-ci et qu'à réception de la facture ne contenant par ailleurs aucun détail quant aux diligences effectuées, elle s'y est opposée, malgré les propositions de révision du montant, toujours excessives. Aucune convention d'honoraire n'a donc, selon elle, été régularisée.

Elle estime, en outre, que le montant fixé n'est pas raisonnable au regard des diligences effectuées par le cabinet qui n'ont consisté qu'en une relecture des actes de cession rédigés par le conseil du cédant et la proposition d'éventuelles observations. Elle relève à cet égard que Me [X] a proposé le 11 février 2022 de réduire ses honoraires à la somme de 20'000 euros HT.

Aux termes de ses dernières écritures (2 avril 2023), la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest nous demande :

à titre principal :

- confirmer l'ordonnance dont appel en toutes ses dispositions,

à titre subsidiaire, si mieux n'aime Monsieur le premier président, et s'il devait entrer en voie de réformation :

- fixer le montant des honoraires dus à la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest à de plus justes proportions, qui seraient laissées à son appréciation souveraine,

en tout état de cause :

- débouter la société Cyrflo de ses demandes plus amples ou contraires,

- condamner la société Cyrflo à lui payer la somme de 5'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société CYRFLO aux dépens de l'instance.

Elle soutient que contrairement à ce que prétend la société Cyrflo, une proposition très détaillée d'honoraires a été transmise au client puis mise à jour, ce dont ce dernier a été informé.

Elle ajoute, s'agissant du montant, qu'un honoraire forfaitaire ne peut pas être modifié par le juge, et que la société ne démontre pas en quoi il serait excessif au regard des critères de fixation que sont notamment l'enjeu du litige et sa complexité.

La société Cyrflo a sollicité le rejet des dernières écritures de la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest, ce à quoi cette dernière a répondu qu'elle demandait le rejet des écritures de son adversaires notifiées le jeudi 30 mars, soit deux jours ouvrables avant l'audience, écritures auxquelles elle n'a fait que répondre.

SUR CE':

Sur le rejet des écritures':

Dans ses dernières écritures, la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest n'a fait que répondre aux derniers arguties soulevées (arrêt de la cour d'appel de Papeete du 2 août 2017 et article L 132-16 du code de la consommation) sans développer la moindre argumentation nouvelle. Il n'y a, dès lors, lieu d'écarter des débats ces écritures auxquelles la société Cyrflo a eu l'opportunité de répondre à l'audience, la procédure suivie en la matière étant la procédure orale.

Sur les honoraires de l'avocat':

Préliminairement, il doit être rappelé qu'en matière de fixation d'honoraires d'avocat, la décision du bâtonnier n'est pas exécutoire de plein droit contrairement à ce qu'a indiqué le bâtonnier dans sa décision, l'article 175-1 du décret du 27 novembre 1991 lui permettant seulement de rendre sa décision exécutoire dans certaines limites (1 500 euros en l'absence d'accord des parties sur tel montant...) et sous certaines conditions.

Si la société Cyrflo invoque le code de la consommation, se présentant comme consommateur, il semble utile de rappeler qu'aux termes de l'article liminaire de ce code': «'Pour l'application du présent code, on entend par : 1° consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole...'», ce que n'est évidemment pas la société Cyrflo, personne morale ayant une activité de holding de plusieurs sociétés exploitantes de grandes surfaces alimentaires.

L'argumentation fondée sur ce code est inapplicable.

Si comme l'intimée le fait valoir, à juste titre, un échange de correspondances peut suffire à caractériser un accord des parties sur les honoraires de l'avocat et constituer une convention d'honoraires (laquelle n'est pas soumise à un formalisme particulier), il n'est, en l'espèce, nullement justifié de ce que les honoraires de l'avocat aient été acceptés par la cliente.

Il est certes établi que Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest a adressé successivement deux propositions d'honoraires à sa cliente les 5 et 17 mai 2021, respectivement de 38'250 euros HT puis de 34'420 euros HT, mais celui-ci ne les a aucunement approuvées, sollicitant, au contraire, que son dossier ne soit plus suivi par le cabinet de [Localité 4] ' c'est à dire par Me [L] ' mais par celui de [Localité 3] ' c'est à dire par Me [T] [X]. La Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest fait remarquer que cette dernière aurait indiqué à la société Cyrflo que, travaillant dans le même structure d'exercice, elle appliquerait les mêmes conditions financières mais force est de constater qu'elle n'en justifie aucunement, ne produisant aucune pièce à cet égard. Il ne peut, dès lors, être considéré qu'il y ait eu accord sur la rémunération de l'avocat. Il n'y a donc pas lieu d'annuler une convention inexistante.

Il sera toutefois rappelé (et au rebours de l'arrêt de cour d'appel isolé évoqué par la requérante) que l'absence de convention d'honoraires, pour regrettable qu'elle soit, n'a pas pour effet de priver l'avocat de rémunération, mais celle-ci doit alors être fixée par référence aux critères énoncés à l'article 10 al 4 de la loi du 31 décembre 1971, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences qu'il a accomplies.

La mission de l'avocate, non contestée, consistait à accompagner son client dans l'acquisition, moyennant le prix de 7'300'000 euros, des parts de la société Enplab. La société Cyrflo fait valoir, à juste titre, que l'acte a été rédigé par le conseil de la société Kerdostin, cédant. Cependant, le rôle de la société Les Juristes Associés de l'Ouest a consisté à vérifier cet acte et a suggéré les modifications qui lui paraissaient nécessaires à l'intérêt de son client ce qu'elle a fait ainsi qu'il en est justifié par les actes produits et leurs annexes qui font apparaître ces modifications.

La Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest est un cabinet spécialisé dans le droit des affaires, raisons pour laquelle la société Cyrflo a souhaité, pour cette acquisition, s'en assurer le concours. La transaction, par son montant, était importante ainsi, et par voie de conséquence, pour l'avocat que les responsabilités y afférentes. Les diligences de l'avocat ont été accomplies avec célérité dans un délai court puisque l'acte de cession et la convention de garantie d'actif et de passif (comprenant 182'annexes) qu'il avait pour mission de vérifier en suggérant toutes corrections, ont été signés les 25'mai (promesse) et 30'juin 2021 (acte).

Au regard des critères ci-dessus énoncés, les honoraires de l'avocat pour cette phase de la procédure seront arrêtés 26'000 euros HT soit 31'200 euros TTC que la société Cyrflo sera condamnée à payer, l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Saint Brieuc rendue le 2 décembre 2022 étant infirmée en toutes ses dispositions.

La société Cyrflo supportera la charge des dépens et devra verser à son adversaire une somme de 1'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS':

Statuant par ordonnance rendue publiquement et contradictoirement,

Disons n'y avoir lieu d'écarter des débats les conclusions de la société Cyrflo du 30 mars 2023 et celles de la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest du 2 avril 2023.

Infirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 2 décembre 2022 par le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Saint Brieuc.

Statuant à nouveau':

Fixons les honoraires dus par la société Cyrflo à la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest à la somme de 26'000 euros HT soit 31'200 euros TTC.

Condamnons la société Cyrflo à payer la somme de 31'200 euros TTC à la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest.

Condamnons la société Cyrflo aux dépens.

Condamnons la société Cyrflo à verser à la Selarl Les Juristes Associés de l'Ouest une somme de 1'000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Contestations honoraires
Numéro d'arrêt : 23/00024
Date de la décision : 15/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-15;23.00024 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award