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03/05/2023 | FRANCE | N°20/00276

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 03 mai 2023, 20/00276


5ème Chambre





ARRÊT N°-154



N° RG 20/00276 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QMUM













SA SURAVENIR *



C/



M. [M] [Y]



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















Copie exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇA

ISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 MAI 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,





GREFFIER :



Madame Catherine...

5ème Chambre

ARRÊT N°-154

N° RG 20/00276 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QMUM

SA SURAVENIR *

C/

M. [M] [Y]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 MAI 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 22 Février 2023

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 03 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SA SURAVENIR Société Anonyme à Directoire et Conseil de Surveillance, Agissant en la personne de son Président du Directoire, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me René GLOAGUEN de la SCP GLOAGUEN & PHILY, Plaidant, avocat au barreau de BREST

INTIMÉ :

Monsieur [M] [Y]

né le 27 Avril 1955 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Etienne BOITTIN de la SELARL AVOCATLANTIC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de [Localité 4]

Le 28 juillet 2007, les époux [Y] ont souscrit auprès de la société Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 4] trois prêts immobiliers aux montants respectifs de 20 000 euros, 53 220 euros et 22 800 euros.

M. [Y] a adhéré à un contrat d'assurance emprunteurs Prévi-Crédits n°501l souscrit par la société Crédit Mutuel auprès de la société Suravenir et garantissant le remboursement des prêts en cas de décès, de perte totale et irréversible d'autonomie (PTIA), d'incapacité temporaire totale de travail (ITT) ou d'invalidité permanente partielle ou totale (IPP/IPT).

Le 16 novembre 2010, M. [Y] a été victime d'un accident de la circulation lors duquel il a été gravement blessé.

Se trouvant en incapacité totale de travail, les échéances des emprunts ont été prises en charge par la société Suravenir, après l'application du délai de franchise, soit à compter du 14 février 2011 et ce, jusqu'à ce que la société d'assurances informe son assuré de l'arrêt des règlements à compter du 4 septembre 2012 au motif de ce que, selon le médecin conseil, le docteur [R], son état de santé était consolidé et permettait de retenir un taux d'incapacité fonctionnelle de 15 % et un taux d'incapacité professionnelle de 60 %.

En parallèle, M. [Y] a été soumis, suite à son accident, à différentes expertises médicales organisées par les assureurs des véhicules impliqués ainsi qu'à une expertise médicale judiciaire confiée au docteur [E].

Par courrier du 14 octobre 2014, M. [Y] a contesté l'interruption de la prise en charge des règlements des emprunts et a mis en demeure la société Suravenir de reprendre celle-ci.

Il a été placé en retraite le 1er novembre 2014 à l'âge de 59 ans.

Suivant ordonnance du 3 décembre 2014, le président du tribunal d'instance de [Localité 4] a ordonné la suspension des obligations des époux [Y] envers la société Crédit Mutuel, pendant une durée de deux ans, à l'exception du paiement des primes d'assurance.

Par courrier recommandé du 22 février 2016, M. [Y] a communiqué les conclusions du rapport du docteur [B], réalisé dans le cadre de la procédure d'accident de la circulation, à la société Suravenir et a souligné, qu'au vu du taux de l'atteinte à l'intégrité physique et psychique de 37 % avec incapacité professionnelle totale, il était éligible à bénéficier de l'assurance avec prise en charge comprise entre 35 et 65% des échéances d'emprunts.

Par exploit d'huissier en date du 15 septembre 2016, M. [Y] a assigné la société Suravenir.

Par jugement en date du 14 novembre 2019, le tribunal de grande instance de [Localité 4] a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en nullité du contrat d'assurance élevée par M. [Y],

- débouté la société Suravenir de son action en nullité du contrat d'assurance Prévi-Crédit n°5011 bénéficiant à M. [Y],

- condamné la société Suravenir à verser à M. [Y] la somme de 3 760,12 euros au titre de la garantie ITT,

- condamné la société Suravenir à verser à M. [Y] la somme de 5 103,02 euros au titre de la garantie IPP/IPT,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné la société Suravenir à verser à M. [Y] la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Suravenir aux entiers dépens.

Le 14 janvier 2020, la société Suravenir a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 1er février 2023, elle demande à la cour de :

- la dire et juger recevable en son appel,

- réformer le jugement frappé d'appel en ce qu'il :

* l'a déboutée de son action en nullité du contrat d'assurance Prévi-Crédits n° 5011 auquel M. [Y] a adhéré,

* l'a condamnée à payer à M. [Y] la somme de 3 760,12 euros au titre de la garantie ITT est la somme 5 103,02 euros au titre de la garantie IPP,

* l'a déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

- prononcer la nullité de l'adhésion de M. [Y] au contrat d'assurance Prévi-Crédits pour fausse déclaration intentionnelle par application de l'article L. 113'8 du code des assurances,

- condamner M. [Y] à payer à la société Suravenir la somme de 10 914,22 euros en conséquence de la nullité du contrat ou en tout état de cause en répétition de l'indu par application des articles 1235, 1376 anciens et 1302 du code civil, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt,

- à titre subsidiaire, dire et juger que M. [Y] a bénéficié de la garantie ITT conformément au contrat et ne peut revendiquer la mise en 'uvre de la garantie IPP en raison d'un taux d'invalidité inférieur au taux minimal contractuel,

- débouter M. [Y] de toutes ses demandes,

- condamner M. [Y] à lui payer la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées le 31 janvier 2023, M. [Y] demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en ses demandes,

- débouter la société Suravenir de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement objet de l'appel en toutes ses dispositions,

- condamner la société Suravenir au paiement des sommes suivantes, en exécution du contrat d'assurance emprunteur :

* remboursement des échéances au titre de la garantie ITT : 3 760,12 euros,

* remboursement des échéances au titre de la garantie IPP-IPT : 5 103,02 euros,

- condamner la société Suravenir au paiement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Suravenir aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en nullité

M. [Y] soutient que l'action en nullité du contrat d'assurance invoquée par la société Suravenir est prescrite. Il fait valoir que celle-ci a eu connaissance du motif allégué de nullité, à savoir la non-déclaration de l'accident survenu en 1971, le 4 septembre 2012 à l'occasion du rapport du docteur [R] mais qu'elle n'a pas, pour autant, soulevé la nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle dans le délai de deux ans.

La société Suravenir rétorque que la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances n'atteint que l'action dérivant du contrat et ne peut être étendue aux moyens de défense opposés à cette action. Elle rappelle que c'est M. [Y] qui a agi à son encontre et qu'elle a opposé ses moyens de défense en exposant les motifs du refus de garantie notifié le 2 octobre 2012 de sorte que son action n'est pas prescrite.

Aux termes des dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.

Par exception, les actions dérivant d'un contrat d'assurance relatives à des dommages résultant de mouvements de terrain consécutifs à la sécheresse-réhydratation des sols, reconnus comme une catastrophe naturelle dans les conditions prévues à l'article L. 125-1, sont prescrites par cinq ans à compter de l'événement qui y donne naissance.

Toutefois, ce délai ne court:

1 - En cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, que du jour où l'assureur en a eu connaissance,

2 - En cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré jusque-là,

Quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier.

La prescription est portée à dix ans dans les contrats d'assurance sur la vie lorsque le bénéficiaire est une personne distincte du souscripteur et, dans les contrats d'assurance contre les accidents atteignant les personnes, lorsque les bénéficiaires sont les ayants droit de l'assuré décédé.

Pour les contrats d'assurance sur la vie, nonobstant les dispositions du 2°, les actions du bénéficiaire sont prescrites au plus tard trente ans à compter du décès de l'assuré.

Comme l'a relevé à bon droit le premier juge, il est constant que la prescription biennale édictée par l'article L.144-1 du code des assurances n'atteint que l'action dérivant du contrat d'assurance et ne peut être étendue au moyen de défense opposé à une telle action.

En l'espèce, M. [Y] a assigné la société Suravenir le 15 septembre 2016 en sollicitant sa garantie au titre de l'assurance emprunteur. Celle-ci a invoqué comme moyen de défense les motifs du refus de garantie notifié le 2 octobre 2012 à savoir la nullité du contrat. Il s'ensuit que la nullité du contrat d'assurance invoquée par voie d'exception à l'action en garantie initiée par l'assuré n'est pas soumise à la prescription biennale.

Le jugement qui a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription en nullité du contrat d'assurance élevée par M. [Y] sera ainsi confirmé.

- Sur la demande en nullité du contrat d'assurance

La société Suravenir invoque, en défense à la demande de mise en oeuvre de la garantie, la nullité du contrat pour fausse déclaration. Elle reproche à M. [Y] d'avoir répondu faussement à deux reprises au questionnaire de santé en n'évoquant pas l'accident de la circulation grave dont il a été victime en 1971. Elle indique que les questions posées étaient claires, dépourvues d'ambiguïté et rédigées en langage courant et qu'il n'appartenait pas à M. [Y] de juger de ce qu'il pouvait déclarer ou non à l'assurance. Elle ajoute que la gravité de l'accident dont il a éte victime en 1971 et les séquelles qu'il a conservées au genou et à la cheville ainsi que ses troubles mnésiques établissent le caractère intentionnel de la fausse déclaration. Enfin, la société Suravenir considère que ces fausses déclarations intentionnelles ont changé le risque contrairement à ce qu'a retenu le jugement entrepris. A ce titre, elle produit une attestation de son médecin conseil, le docteur [U] qui certifie que si M. [Y] avait déclaré son antécédent de polytraumatisme de 1971, une surprime de 50% pour les garanties d'ITT/IPP/IPT aurait été appliquée sur préconisation du médecin conseil. En réponse à la critique de l'intimé sur la validité en la forme de cette attestation, l'appelante réplique que les prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité et que cette pièce conserve sa valeur probante.

En réponse, M. [Y] conteste avoir délibérément établi une fausse déclaration. Il fait valoir que lors de la souscription du contrat, il n'a pas pensé à faire état de l'accident dont il a été victime à l'âge de 16 ans en 1971, cet accident ne l'ayant pas impacté dans sa vie quotidienne.

Il ajoute que la société Suravenir ne démontre pas que cette fausse déclaration a entraîné une modification de l'appréciation du risque par l'assureur. Il conteste la validité en la forme de l'attestation du médecin-conseil produite pour la première fois en cause d'appel comme ne respectant pas les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile mais également au fond en reprochant à la société Suravenir de s'être constituée une preuve à elle-même en produisant une pièce émanant de l'un de ses préposés. Il relève également que l'appelante n'a pas produit d'autres pièces à l'appui de cette attestation.

Aux termes des dispositions de l'article L.113-2 du code des assurances, dans sa version applicable au litige, l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur s'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge.

Aux termes des dispositions de l'article L.113-8 du code des assurances, indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l'article L.132-26, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre.

En l'espèce, M. [Y], en demandant à adhérer au contrat d'assurance le 28 février 2007, a complété un questionnaire de santé de la sorte :

A la question n°6 : 'avez-vous ou devez-vous subir des interventions chirurgicales autres que celles des amygdales, végétations, appendicite ' Quand ' Lesquelles '': M. [Y] a répondu non.

A la question n°9 : 'avez-vous été victime d'un accident du travail, de la circulation ou autres ' Parties du corps atteintes 'Quand 'Séquelles ''/ M. [Y] a répondu non.

Or il est constant que M. [Y] a subi un accident de la circulation en 1971 quand il était âgé de 16 ans à la suite duquel il a été victime d'un traumatisme crânien, d'une fracture tibia/péroné avec greffe à gauche et d'une fracture du bassin.

Le docteur [R], mandaté par le médecin-conseil de la société Suravenir a fait état d'un courrier du médecin rééducateur qui précisait que M. [Y] présentait comme séquelles du traumatisme crânien des 'petites difficultés mnésiques qui n'avaient pas de retentissement particulier dans sa vie professionnelle'. Le docteur [R] a également relevé qu'il persistait un 'discret deficit de flexion du genou gauche persistant' depuis l'accident de 1971. M. [Y] a précisé, sur question du docteur [R], qu'il avait 'quelques douleurs climatiques persistantes du membre inférieur gauche'. M. [Y] concède avoir des marques cutanées au niveau de la jambe gauche et une raideur de la cheville qu'il décrit comme sans importance.

La société Suravenir invoque également le rapport du docteur [E], expert judiciaire mandaté par jugement du tribunal de grande instance de Saint Nazaire du 8 juin 2012, dans le cadre de l'accident de circulation dont M. [Y] a été victime le 26 novembre 2010 et suite auquel il sollicite la garantie souscrite auprès de la société Suravenir. L'expert indique en page 3 de son rapport 'M. [Y] a un statut de travailleur handicapé à la suite d'un accident de la voie publique en 1971 alors qu'il était en apprentissage'. M. [Y] n'a pas répondu sur ce point. L'appelante soutient également qu'il a été en arrêt de travail du 1er septembre 1971 au 31 juillet 1973 au vu du relevé de carrière produit par l'intimé. Celui-ci conteste le lien avec l'accident. En l'absence d'autres pièces ou précisions sur la date de l'accident de 1971 et la nature de cet arrêt de travail, il existe un doute sur son lien de causalité avec l'accident mais la concordance des dates interroge.

Si M. [Y] ne soutient pas avoir été induit en erreur par les questions posées dans le questionnaire médical, il conteste toute mauvaise foi. Toutefois, comme l'a relevé à juste titre le premier juge, il ne lui appartenait pas d'apprécier si l'accident de circulation dont il a été victime en 1971 devait ou non être mentionné mais se devait de répondre de manière exacte et sincère aux questions qui lui ont été posées.

Le fait que cet accident lui ait occasionné plusieurs blessures dont un traumatisme crânien et ait engendré des séquelles comme des troubles mnésiques légers et une raideur de genou et de la cheville gauche outre le fait qu'il ait le statut de travailleur handicapé depuis cet accident, ce dont justifie la société Suravenir, ne permet pas de soutenir que cet accident était sans importance comme le fait M. [Y] mais au contraire permet d'établir sa mauvaise foi lors de sa fausse déclaration.

Si le caractère intentionnel des fausses déclarations est établi, il incombe à l'assureur de démontrer également que ces fausses déclarations ont modifié l'appréciation du risque.

La société Suravenir, qui n'avait produit aucune pièce devant le premier juge, verse aux débats en cause d'appel l'attestation du docteur [U], médecin-conseil de l'appelante en date du 2 avril 2020, qui certifie que si M. [Y] 'avait déclaré son antécédent de polytraumatisme de 1971 associant plusieurs lésions orthopédiques (une fracture ouverte de jambe gauche ostéosynthèse, une fracture non déplacée du bassin, une fracture de 5ème métacarpien gauche à indication chirurgicale) et un traumatisme crânien, dans les suites duquel la prise en charge a justifié un arrêt de travail à temps complet prolongé, Suravenir aurait appliqué une surprime de 50% pour les garanties ITT/IPP/IPT des conditions normales pour les garanties décès/PTIA'.

Si cette attestation n'est pas régulière en la forme, les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité, de sorte qu'il convient d'examiner cette pièce. Or cette pièce qui émane effectivement d'un préposé de l'appelante, comme le relève l'intimé, est insuffisante, à elle seule, à être probante. En effet, les affirmations du médecin-conseil ne sont corroborées par aucun élément de littérature médicale et surtout ne font pas référence à la grille d'appréciation du risque et d'application des surprimes en vigueur lors de la souscription du contrat d'assurance. La société Suravenir ne produit pas, par ailleurs, cette pièce qui permettrait d'appréhender l'appréciation du risque. Il doit en être déduit que la société Suravenir échoue à démontrer que les fausses déclarations intentionnelles de M. [Y] ont modifié l'appréciation du risque. Le jugement, qui a écarté la demande en nullité du contrat d'assurance, sera confirmé. Il sera également confirmé en ce qu'il a écarté la demande en restitution de l'indû présentée par la société Suravenir.

- Sur l'application des conditions générales du contrat

La société Suravenir indique que les conditions et mises en oeuvre des garanties ITT et IPP sont celles figurant aux conditions générales du contrat et que de ce fait, M. [Y] ne peut invoquer la nomenclature Dinthilac. Elle ajoute que certaines des expertises invoquées par M. [Y] ont été réalisées à la demande d'autres assureurs et se fondaient sur des garanties différentes des siennes et qu'elles ne lui sont pas opposables.

Elle invoque l'expertise du docteur [B] pour considérer que la date de consolidation correspondant à la fin de l'incapacité temporaire et absolue doit être fixée au 4 septembre 2012 s'agissant de l'ITT et elle relève qu'elle l'a indemnisé jusqu'à cette date. Elle s'oppose à une indemnisation au-delà de cette date au motif que l'incapacité n'est plus totale.

S'agissant de l'IPP, elle se réfère à l'expertise du docteur [R] pour soutenir que le taux global est inférieur à 33 % de sorte que la garantie IPP ne peut pas être mise en oeuvre.

M. [Y] sollicite la confirmation du jugement. Il se fonde sur l'expertise du docteur [B], qui l'a examiné au contradictoire de l'assureur du conducteur de l'accident de la circulation dont il a été victime, et qui fixe une date de consolidation au 16 mars 2013. Il retient le taux d'IPP fixé à 37% pour solliciter cette garantie et la confirmation des sommes qui lui ont été allouées.

Aux termes des dispositions de l'article 1134 du code civil, dans sa version applicable au litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faîtes.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.

* S'agissant de la garantie ITT

Les conditions générales du contrat définissent l'ITT comme la situation de l'adhérent qui 'par suite de maladie ou d'accident, est dans l'impossibilité temporaire et absolue, constatée médicalement d'exercer sa profession ou toute occupation lui procurant gain ou profit.

L'adhérent n'exerçant pas ou plus d'activité professionnelle est en incapacité temporaire totale de travail lorsqu'une maladie ou un accident le contraint à observer un repos complet et à interrompre toutes ses activités habituelles'.

Il en résulte que l'incapacité doit être temporaire et totale.

La société Suravenir se fonde sur le rapport du docteur [R] qui fixe la date de consolidation au 4 septembre 2012. M. [Y] invoque, quant à lui, le rapport du docteur [B] qui fixe la date de consolidation au 16 mars 2013.

Toutefois, il convient de relever que le docteur [B] précise que M. [Y] a subi une gêne temporaire totale du 16 au 27 novembre 2010 et le 17 mars 2011, dates de ses hospitalisations puis des gênes temporaires partielles de classe IV du 28 novembre 2010 au 28 février 2011, des gênes temporaires partielles de classe III du 1er mars 2011 au 31 mars 2011 hors hospitalisation du 17 mars 2011 puis de classe II et III jusqu'à la date de consolidation. Le caractère partiel de ces périodes de gênes temporaires ne permet pas de les retenir au titre de l'ITT telle que définie au contrat d'assurance. Dans ces conditions, il convient de retenir la date de consolidation du 14 septembre 2012 étant précisé que M. [Y] a été indemnisé jusqu'à cette date. Le jugement qui a condamné la société Suravenir à verser une somme de 3 760,12 euros au titre de la garantie ITT pour la période du 5 septembre 2012 au 16 novembre 2013 sera réformé.

* S'agissant de la garantie IPP/T

Cette garantie est définie par le contrat comme la 'réduction permanente, partielle ou totale, des aptitudes de l'adhérent à exercer sa profession ou toute autre activité lui procurant gain ou profit. Elle doit être consécutive à la maladie ou l'accident ayant provoqué l'incapacité totale de travail.

Le taux de prise en charge de l'invalidité permanente partielle ou totale sera appréciée par expertise médicale telle que définie à l'article 7-2-3 qui précise que 'le taux de prise en charge est déterminé par combinaison :

- du taux d'incapacité fonctionnelle physique ou mentale, fixé sur la base du barème de droit commun,

- et du taux d'incapacité professionnelle fixée en tenant compte de la façon dont la profession est exercée antérieurement à la maladie ou l'accident, les conditions normales d'exercice de cette profession, des possibilités restantes d'exercice, et des possibilités de reclassement professionnel'.

Le docteur [B] a fixé le taux d'AIPP à 37% mais s'il a retenu l'existence d'un retentissement professionnel, il ne l'a pas évalué. C'est donc à tort que le premier juge a estimé que le taux d'incapacité professionnel pouvait être évalué à 80%. Au contraire le docteur [R] a fixé le taux d'incapacité fonctionnelle à 15% et le taux d'incapacité professionnelle à 60%. L'intimé ne produit aucun élément de nature à remettre en cause ces évaluations qui sont basées sur ces constatations médicales.

Il en résulte que la combinaison de ces taux, telle que cela résulte du tableau à double entrée produit dans la notice au paragraphe 2-4, révèle un taux inférieur à 33%, ce qui n'est pas contesté. Par conséquent, la garantie IPP ne peut pas être mise en cause et le jugement qui a condamné la société Suravenir à verser la somme de 5 103,02 euros sera réformé.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles seront réformées ainsi que celles relatives aux dépens. M. [Y] sera condamné aux dépens de première instance et en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription en nullité soulevée par M. [M] [Y] et en qu'il a débouté la société Suravenir de son action en nullité du contrat d'assurance Prévi-Crédit n°5011 bénéficiant à M. [M] [Y] ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Déboute M. [M] [Y] du surplus de ses demandes, fins et conclusions ;

Déboute la société Suravenir de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

Condamne M. [M] [Y] aux dépens de première instance et en cause d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/00276
Date de la décision : 03/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-03;20.00276 ?
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