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22/03/2023 | FRANCE | N°19/00407

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 22 mars 2023, 19/00407


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 19/00407 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PO6N













Organisme URSSAF DU [Localité 31]



C/



S.A.S. [11]























Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
>

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 22 MARS 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère



GREFFIER :



Monsieur Séraphin LARUELLE lors...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 19/00407 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PO6N

Organisme URSSAF DU [Localité 31]

C/

S.A.S. [11]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 22 MARS 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Monsieur Séraphin LARUELLE lors des débats et Mme Adeline TIREL lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 26 Octobre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Mars 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, après prorogation du délibéré initialement fixé au 04 Janvier 2023.

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 20 Décembre 2018

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de NANTES

Références : 21401720

****

APPELANTE :

URSSAF DU [Localité 31]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Julien ASTRUC de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substituée par Me Agathe HALKOVICH, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉE :

S.A.S. [11]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Benjamin GEVAERT, avocat au barreau de PARIS

EXPOSÉ DU LITIGE :

A la suite d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires 'AGS', opéré par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de [Localité 34] sur la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009 au sein des vingt établissements de la société [44] (la société), celle-ci s'est vue notifier une lettre d'observations du 24 octobre 2011 portant sur quatorze chefs de redressement pour un montant total de 1 760 406 euros.

Par lettre du 23 novembre 2011, la société a formulé des observations concernant l'ensemble des chefs de redressements notifiés, soit :

- taux accident du travail (chef n°1) ;

- réduction Fillon au 1er octobre 2007, déduction forfaitaire patronale, réduction salariale (chef n°2) ;

- allocations complémentaires aux indemnités journalières de la sécurité sociale (chef n°3) ;

- frais professionnels - déduction forfaitaire spécifique - règle de non-cumul : principe général (chef n°4)

- frais professionnels non justifiés - frais liés à la mobilité professionnelle (chef n°5) ;

- assiette maximales - plafond réduit (chef n°6) ;

- avantages en nature (chef n°7) ;

- contrat retraite supplémentaire conclu A/C au 1er janvier 2006 : non-respect du caractère collectif (chef n°8) ;

- écriture de paie non justifiée (chef n°9) ;

- frais professionnels - limite d'exonération : grands déplacements en métropole (chef n°10) ;

- frais professionnels : cumul déduction forfaitaire spécifique et remboursement d'indemnités kilométriques (chef n°11) ;

- prise en charge par l'employeur des cotisations ouvrières (chef n°12) ;

- CSG/CRDS sur indemnités transactionnelles (chef n°13) ;

- frais professionnels - limites d'exonérations : utilisation du véhicule personnel (indemnités kilométriques) (chef n°14).

En réponse, par lettre du 14 décembre 2011, l'inspecteur a :

- annulé le chef n°3 de redressement concernant les allocations complémentaires aux indemnités journalières de la sécurité sociale ;

- minoré les redressements appliqués aux chefs :

*n°4 concernant les frais professionnels - déduction forfaitaire spécifique - règle de non-cumul : principe général ;

*n°7 concernant les avantages en nature ;

* n°10 concernant les frais professionnels - limite d'exonération : grands déplacements en métropole ;

- confirmé le bien-fondé et les montants de l'ensemble des autres chefs de redressement contestés par la société.

L'URSSAF des [Localité 42], aux droits de laquelle vient l'URSSAF [Localité 31] (l'URSSAF), a notifié une mise en demeure du 21 février 2012 tendant au paiement des cotisations notifiées et des majorations de retard y afférentes soit la somme de 2 018 258,30 euros dont 1 748 924 euros de cotisations et 269 334,30 euros de majorations de retard.

Contestant la validité de la mise en demeure ainsi que le bien-fondé de l'intégralité des redressements notifiés par la lettre d'observations du 23 novembre 2011, la société a saisi la commission de recours amiable de l'organisme par lettre du 19 mars 2012.

La société n'a pas saisi à ce stade le tribunal des affaires de sécurité sociale en application de l'article R. 142-6 du code de la sécurité sociale. Cependant, il n'est pas justifié par l'URSSAF d'une lettre accusant réception de la saisine de la commission de recours amiable et informant la société sur les voies et délais de recours en cas d'absence de décision de cette commission.

L'URSSAF a ensuite délivré une contrainte du 7 novembre 2014 pour le recouvrement de la somme de 2 017 628,30 euros en cotisations, contributions et majorations de retard afférentes à l'année 2009, signifiée par acte d'huissier de justice du 17 novembre 2014.

Le 28 novembre 2014, la société a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes.

Ce recours a été enregistré au répertoire général sous le numéro 214-1692.

Le 3 décembre 2014, la société a formé opposition, devant ce même tribunal, à l'encontre d'une contrainte du 20 novembre 2014 décernée par l'URSSAF pour le recouvrement de la somme de 2 018 258,30 euros en cotisations, contributions et majorations de retard afférentes à cette même période de l'année 2009, signifiée par un acte d'huissier de justice du 21 novembre 2014, avec la mention 'annule et remplace un précédent acte du 17 novembre 2014'.

Ce recours a été enregistré au répertoire général sous le numéro 214-1720.

Par jugement du 20 décembre 2018, ce tribunal a :

- ordonné la jonction à l'instance enregistrée sous le numéro 214-1692 de l'instance enregistrée sous le numéro 214-1720 ;

- reçu l'URSSAF [Localité 31] en ses demandes ;

- déclaré recevables les recours des sociétés [44], [10] et [12] ;

- débouté les sociétés [44], [10] et [12] de leurs demandes d'annulation des procédures de contrôle et de recouvrement ;

- débouté les sociétés [44], [10] et [12] de leurs demandes d'annulation des mises en demeure et des contraintes ;

- annulé les chefs de redressement visés dans la lettre d'observations du 24 octobre 2011 aux points n°1 et 2 relatifs au taux accident du travail et à la réduction Fillon ;

- validé la contrainte du 20 novembre 2014 signifiée le 21 novembre 2014 à hauteur de la somme de 94 071 euros au titre des cotisations restant dues sur l'année 2009 ;

- condamné en conséquence la société [44], ainsi que les sociétés [10] et [12], celles-ci chacune en ce qui la concerne comme venant partiellement aux droits de celle-là, à payer en deniers ou quittance à l'URSSAF [Localité 31] au titre de la contrainte du 20 novembre 2014 la somme de 94 071 euros au titre des cotisations ;

- dit que la société [44], ainsi que les sociétés [10] et [12], celles-ci chacune en ce qui la concerne comme venant partiellement aux droits de celle-là, restent redevables à l'URSSAF [Localité 31] des majorations de retard afférentes aux cotisations restant dues, en ce incluses les majorations de retard complémentaires restant à courir jusqu'à complet paiement ;

- débouté l'URSSAF [Localité 31] et les sociétés [44], [10] et [12], de leurs demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- rappelé que la procédure est sans frais ni dépens.

Par déclaration faite par communication électronique au greffe le 18 janvier 2019, l'URSSAF a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 15 janvier 2019.

Par ses écritures parvenues par le RPVA le 29 avril 2021 auxquelles s'est référé son conseil à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris ce qu'il a :

* annulé les chefs de redressement visés dans la lettre d'observations du 24 octobre 2011 aux points n° 1 et 2 relatifs au taux accident du travail et à la réduction Fillon ;

* validé la contrainte du 20 novembre 2014 signifiée le 21 novembre 2014 à hauteur de la somme de 94 071 euros au titre de cotisations restant dues sur l'année 2009 ;

* condamné en conséquence la société [44] ainsi que les société [10] et [12], celles-ci chacune en ce qui la concerne comme venant partiellement aux droits de celle-là, à payer chacune en ce qui la concerne comme venant partiellement aux droits de celle-là, à payer en deniers ou quittance à l'URSSAF au titre de la contrainte du 20 novembre 2014 la somme de 94 071 euros au titre des cotisations ;

* débouté les parties du surplus de ses demandes.

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus :

Ce faisant :

- débouter les sociétés [44], [10], [12] de l'ensemble leurs demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le redressement entrepris pour son entier montant ;

- valider la mise en demeure du 21 février 2012 consécutive au contrôle ;

- condamner la société [44] à lui payer la somme de 1 748 924 euros, outre intérêts et majorations de retard à compter du 21 février 2012 ;

- condamner la société [44] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens.

Par ses écritures parvenues au greffe le 30 avril 2021 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, la société [11] qui vient aux droits des sociétés [10] et [12], elles-mêmes venues aux droits de la société [44], demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a annulé les chefs de redressement 1 et 2 ;

Et statuant de nouveau :

1. A titre principal : la nullité des contraintes et de leurs significations, au visa des articles L. 244-3, L. 244-9, R. 133-3 à R. 133-6 du code de la sécurité sociale,

- de dire et juger irrégulières au plan formel les contraintes des 7 et 20 novembre 2014 que de leurs significations ;

- de dire et juger que la contrainte du 7 novembre 2014 est nulle de l'aveu même de l'URSSAF ;

En conséquence,

- d'annuler les contraintes litigieuses des 7 et 20 novembre 2014 et leurs significations ;

- de dire juger encore que la commission de recours amiable de l'URSSAF a été régulièrement saisie le 19 mars 2012 en contestation de la mise en demeure du 21 février 2012, et de sorte que ladite mise en demeure n'est pas restée sans effet ;

En conséquence,

- d'annuler les contraintes des 7 et 20 novembre 2014 et leurs significations, faute de fondement ;

2. A titre subsidiaire : l'annulation des contraintes litigieuse de leurs significations et de la mise en demeure à laquelle elles se réfèrent en raison du caractère irrégulier du contrôle qui les a précédées, au visa notamment des articles R. 243-6, R. 243-59, L. 213-1, L. 225-1-1, et D. 213-1 à D. 231-6 du code de la sécurité sociale dont l'article D. 213-1-2, les lois n° 78-753 du 17 juillet 1978 et n° 79-587 du 11 juillet 1979, 2000-321 du 12 avril 2000 et de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (CEDH) :

- de dire et juger que I'URSSAF de [Localité 34] n'a pas avant le début des opérations de contrôle, ni même avant la fin de celui-ci justifié de l'existence d'une convention spécifique de réciprocité ;

- de dire et juger également que l'URSSAF de [Localité 34] était incompétente pour procéder au contrôle de la société [44] ;

En conséquence,

- de déclarer irrégulier le contrôle de la société [44] par l'URSSAF de [Localité 34] ;

- et par conséquent d'annuler le contrôle et la mise en demeure du 21 février 2012 et les contraintes litigieuses des 7 et 20 novembre 2014 et leurs significations ;

- de dire et juger également que l'URSSAF de [Localité 34] ne lui a adressé aucun avis de contrôle régulier ;

En conséquence :

- d'annuler le contrôle et le redressement de la société [44] devenue [11] ainsi que la mise en demeure litigieuse du 21 février 2012 et les deux contraintes litigieuses des 7 et 20 novembre 2014 et leurs significations ;

3. Plus subsidiairement : la nullité formelle de la mise en demeure du 21 février 2012 et partant des deux contraintes litigieuses,

- de dire et juger que la mise en demeure datée du 21 février 2012 ne contient pas les mentions nécessaires à sa validité, ni au respect du contradictoire et des droits de la défense ;

- de dire et juger que la mise en demeure datée du 21 février 2012 est erronée, irrégulière et ne permet pas à son destinataire de connaître la nature, la cause et l'étendue de sa prétendue obligation ;

En conséquence,

- d'annuler la mise en demeure du 21 février 2012, les deux contraintes litigieuses des 7 et 20 novembre 2014 et leurs significations ;

4. Au fond, l'annulation des deux contraintes et de la mise en demeure qui l'a précédée en raison du non-respect par les contrôleurs de leurs obligations, du recours irrégulier à la taxation forfaitaire et du caractère infondé des chefs de redressements retenus, au visa notamment l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, des lois n° 78-753 du 17 juillet 1978 et n° 79-587 du 11 juillet 1979, 2000-321 du 12 avril 2000, des articles R. 243-59, R. 243-59-1 et R. 242-5 du code de la sécurité sociale, et les différents textes visés dans chaque chef de redressements,

- de dire et juger que le contrôle et la lettre d'observations notifiée à la société [44] (aux droits de laquelle vient désormais la société [11]) ne satisfont pas aux exigences des articles R. 243-59, R. 242-5 et D. 241-13 du code de la sécurité sociale ni au principe du contradictoire et aux droits de la défense ;

- de dire et juger que l'URSSAF a recouru irrégulièrement et de manière infondée à la taxation forfaitaire, alors que les conditions d'un tel recours n'étaient pas réunies ;

- de dire et juger enfin que les différents chefs de redressement ne sont fondés ni en droit ni en fait ;

En conséquence :

- d'annuler le contrôle et tous les chefs de redressements, ainsi que la mise en demeure litigieuse datée du 21 février 2012 et les deux contraintes litigieuses des 7 et 20 novembre 2014 et leurs significations ;

Subsidiairement si par impossible tous les chefs de redressement ne devaient pas être annulés,

S'agissant du chef n°1 : taux AT :

- d'ordonner à l'URSSAF une réévaluation de ce chef, en faisant application :

* du code risque 742CC pour les salariés figurant à l'annexe 1.c de la réponse de [44] à la lettre d'observations ;

* des codes risques 472C et 481B et 486D pour les salariés figurant à l'annexe 1.e et 1.f de la réponse de [44] à la lettre d'observations ;

* du taux chantiers pour les salariés figurant à l'annexe 1.d de la réponse de

[44] à la lettre d'observations ;

S'agissant du chef n°2 : réduction Fillon au 1er octobre 2017, déduction forfaitaire patronale et réduction salariale :

- de valider les recalculs intégraux des sociétés [44], [10] et [12] ;

En conséquence,

- de réduire le montant en cotisations du redressement au titre du chef n°2 à 68 730,04 euros ;

S'agissant des chefs n°4, 5, 7, 7, 9, 10, 11 :

- de constater que pour chacun de ces chefs de redressement l'URSSAF a omis de mentionner les textes relatifs au FNAL et au versement transport, aux cotisations AGS et aux contributions assurance chômage ou encore à la CSG-CRDS ;

En conséquence,

- réduire le chef 4 à la somme totale de 18 256 euros,

- réduire le chef 5 à la somme totale de 4 264 euros,

- réduire le chef 7 à la somme totale de 14 840 euros,

- réduire le chef 8 à la somme totale de 146 euros,

- réduire le chef 9 à la somme totale de 4 773 euros,

- réduire le chef 10 à la somme totale de 23 564 euros,

- réduire le chef 11 à la somme totale de 5 669 euros,

- réduire le chef 12 à la somme totale de 2 343 euros,

- réduire le chef 14 à la somme totale de 2 418 euros,

Dans tous les cas :

- d'annuler les deux contraintes litigieuses et leurs significations ainsi que la mise en demeure du 21 février 2012 et le contrôle qui les a précédées ;

- de débouter l'URSSAF de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de déclarer que l'URSSAF reconnaît l'erreur de montant dans la mise en demeure pour ce qui concerne l'établissement de [Localité 46] et en ramène le montant le concernant à 52 925 euros en cotisations ;

- de déclarer également que l'URSSAF reconnaît que le montant des majorations de retard réclamé est erroné, et en réduit le montant total à 261 132 euros pour les majorations de retard et à 1 740 881 euros pour les cotisations ;

- de la déclarer irrecevable en sa demande au titre des dépens ;

- en toute hypothèse, de dire que les intérêts, frais visés et/ou droits réclamés dans la signification de contrainte ne sont pas dus ;

- de dire que l'URSSAF conservera à sa charge les frais de signification de contrainte ;

- de condamner l'URSSAF à verser à la société [11] la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

Par arrêt du 4 janvier 2023, la cour a ordonné la prorogation du délibéré et a enjoint aux parties de procéder aux diligences suivantes avant le 31 janvier 2023 :

- à l'URSSAF [Localité 31] de produire la lettre d'observations du 24 octobre 2011 dans son intégralité ;

- à la société [11] de remettre à la cour un dossier complet strictement conforme à son bordereau de production de pièces, avec des pièces non agrafées entre elles pour être exploitées individuellement, cotées sur la partie haute à droite de chaque pièce.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1. Sur la régularité des mises en demeure et des contraintes :

1.1 - S'agissant de la contrainte du 7 novembre 2014 :

L'URSSAF a émis deux contraintes pour la même période contrôlée, les références de la mise en demeure à laquelle il est renvoyé sur chacune d'elles étant identiques.

Elle ne sollicite que la validation de la contrainte du 20 novembre 2014.

Cette dernière contrainte a été signifiée par acte d'huissier de justice du 21 novembre 2014 avec la mention 'annule et remplace un précédent acte du 17 novembre 2014'.

Il sera en conséquence fait droit à la demande d'annulation de la société de la contrainte du 7 novembre 2014 dès lors que celle du 20 novembre 2014 remplace la première.

2.1 - S'agissant de la contrainte du 20 novembre 2014 :

La société fait valoir que le numéro de mise en demeure ne correspond pas à celui d'une mise en demeure notifiée à l'issue du contrôle, ni depuis ; que la mise en demeure notifiée à la suite du contrôle ne comporte pas de numéro ; qu'en outre, le numéro de compte URSSAF mentionné ne correspond pas à celui de la société [44], ni à celui d'aucun de ses anciens établissements ; que c'est la société [44] qui est mentionnée comme destinataire des contraintes alors que l'URSSAF savait que cette société n'avait conservé que son établissement du siège social, les autres établissements ayant été apportés aux sociétés [10] et [12] ; que la publication des modifications des Kbis des sociétés les rendent opposables aux tiers dont l'URSSAF ; que ces imprécisions et irrégularités ne permettent pas de connaître la nature, la cause et l'étendue de la prétendue obligation et affectent la validité de la contrainte.

L'URSSAF n'a présenté aucune observation sur ce moyen.

Sur ce :

En l'espèce, la contrainte renvoie à une mise en demeure du 21 février 2012 'N° AR 2C 046 211 54 197 - contrôle chefs de redressement précédemment communiqués - ARTICLE R. 243-56 CSS / année 2009 en date du 21 février 2012 - Période(s) 0962" (pièce n°2 de la société).

La mise en demeure du 21 février 2012 ne comporte en effet pas de numéro mais mentionne en dessous l'objet 'Recommandé avec AR n° 2C 046 211 5419 7".

Mais cette précision ainsi que la date de la mise en demeure permettent suffisamment d'identifier celle à laquelle il est fait référence dans la contrainte outre le fait que les sommes réclamées aux termes de la mise en demeure et de la contrainte sont strictement identiques (2 018 258,30 euros).

La société n'établit pas par ses pièces que le numéro de compte mentionné dans la contrainte (917 1230432405) ne correspond pas à celui de la société.

En revanche, il est certain que :

- l'avis de contrôle a été délivré à la société [44] le 10 janvier 2011 ;

- la mise en demeure du 21 février 2012 a été notifiée à la même société, les établissements suivants ayant été contrôlés:

* [Localité 5]

* [Localité 40]

* [Localité 9]

* [Localité 36]

* [Localité 38]

* [Localité 43]

* [Localité 45]

* [Localité 46]

* [Localité 39]

* [Localité 49]

* [Localité 30]

* [Localité 3]

* [Localité 18]

* [Localité 8]

* [Localité 4]

* [Localité 15]

* [Localité 26]

* [Localité 6]

* [Localité 33]

- la société [44] a procédé à un apport partiel d'actifs de la branche d'activité des travaux de production de matériaux et activités connexes situées dans les départements [Localité 13], de [Localité 19], du [Localité 14], d'[Localité 17], de [Localité 20], du [Localité 35], du [Localité 37], de [Localité 21], de [Localité 27], de [Localité 28] et de la [Localité 50] à la société [10] à compter du 29 mars 2013, tel que cela résulte de l'extrait Kbis de la société [44] à jour au 13 février 2017 produit aux débats et de l'extrait Kbis de la société [10] à jour au 31 juillet 2018 ; cette mention a été publiée au Kbis de la société [44] le 7 juin 2013 ;

- la société [44] a procédé à un apport partiel d'actifs de la branche d'activité des travaux de production de matériaux et activités connexes situées dans les départements de [Localité 22], de [Localité 24], de [Localité 23], des [Localité 29], des [Localité 41], des [Localité 16], du [Localité 47], du [Localité 48] et de [Localité 25] à la société [12] à compter du 29 mars 2013, tel que cela résulte de l'extrait Kbis de la société [44] à jour au 13 février 2017 produit aux débats et de l'extrait Kbis de la société [12] à jour au 21 octobre 2018 ; cette mention a été publiée au Kbis de la société [44] le 7 juin 2013 ;

- la contrainte du 20 novembre 2014 a été délivrée à la société [44].

Il résulte de l'article L. 236-22 du code de commerce que la société qui apporte une partie de son actif à une autre, ainsi que cette dernière peuvent décider, d'un commun accord, de soumettre l'opération aux dispositions relatives aux scissions, parmi lesquelles les articles L. 236-20 et L. 236-21.

Le premier de ces textes rend les sociétés bénéficiaires des apports débitrices solidaires des obligataires et des créanciers non obligataires de la société scindée, pour les créances nées avant la réalisation de l'opération, et le second permet de déroger à cette règle (Com., 12 décembre 2006, pourvoi n°05-15.619).

La société [44] ne justifiant pas des conditions de réalisation des apports partiels d'actifs intervenus, elle n'établit pas qu'au jour de la délivrance de la contrainte, elle n'était pas redevable des causes de ce redressement, ne serait-ce qu'au titre de la solidarité.

Ce moyen de nullité sera écarté.

2. Sur la régularité de la procédure de contrôle :

2.1 Sur la compétence de l'URSSAF de [Localité 34] pour procéder au contrôle et au redressement :

La société soutient que le contrôle ne s'inscrivait pas dans le cadre du protocole de versement en lieu unique (VLU) mais dans celui du plan de contrôle national 2011 de l'ACOSS régi par les dispositions des articles L. 225-1-1 et D. 231-1-2 du code de la sécurité sociale qui imposait à l'URSSAF de [Localité 34] contrôleuse de disposer obligatoirement d'une délégation de pouvoir prenant la forme de la convention spécifique de réciprocité établie par l'ACOSS ; que même en présence d'une convention générale de réciprocité, une convention de réciprocité spécifique reste indispensable dans le cadre, comme en l'espèce, d'un contrôle concerté ; que si la cour venait à considérer que la position de la Cour de cassation est fondée en droit, elle ne pourrait qu'écarter l'application de cette solution nouvelle à la présente instance en cours en vertu du principe de sécurité juridique qui impose la prévisibilité des décisions ; que par ailleurs l'URSSAF produit les conventions générales de réciprocité signée en 2002 ; qu'elles ne sont pas valables puisqu'elles ne sont pas signées par le directeur de l'ACOSS ; que quand bien même le renouvellement de l'adhésion à la convention générale de réciprocité s'opère par tacite reconduction, il est impératif que soit communiquée en début de chaque année la liste des organismes concernés et ce pour que cette liste soit opposable aux tiers ; que force est de constater que l'URSSAF ne communique pas cette liste ni dans le cadre de la présente procédure ni surtout avant le début des opérations de contrôle ; que le contrôle opéré par l'URSSAF est irrégulier et sera annulé de même que la mise en demeure qui en a résulté ; que surabondamment, l'URSSAF de [Localité 7] mentionnée comme URSSAF pilote et dont l'intervention dans les opérations de contrôle et de recouvrement a contribué à créer un climat de confusion pour le cotisant n'a pas davantage justifié d'une quelconque convention spécifique de réciprocité ; que pour ce motif également le contrôle est entaché de nullité.

L'URSSAF ne développe aucune argumentation.

Sur ce :

Les unions de recouvrement, qui constituent des personnes morales distinctes, ont en charge le contrôle du recouvrement des cotisations et contributions sociales (article L. 213-1 6° du code de la sécurité sociale).

Chacune d'elles exerce, en principe, cette compétence auprès des employeurs dont elle est chargée du recouvrement des cotisations, au sein d'une circonscription territoriale fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale (article D. 213-1 du code de la sécurité sociale).

Une union de recouvrement peut cependant, sous certaines conditions, déléguer sa compétence.

Selon article L.213-1 du code de la sécurité sociale dernier alinéa : 'En matière de recouvrement, de contrôle et de contentieux, une union de recouvrement peut déléguer à une autre union ses compétences dans des conditions fixées par décret.'

La délégation de compétence est donc possible, dans les termes de la loi, pour le contrôle comme pour le recouvrement.

Deux catégories de délégation de compétence sont prévues par le code précité :

- une convention générale de réciprocité : selon l'article D.213-1-1, 'Pour l'application du dernier alinéa de l'article L.213-1, la délégation de compétences en matière de contrôle entre unions de recouvrement prend la forme d'une convention générale de réciprocité ouverte à l'adhésion de l'ensemble des unions, pour une période d'adhésion minimale d'un an, renouvelable par tacite reconduction'.

- une convention de réciprocité spécifique : selon l'article D. 213-1-2 dans sa version applicable au litige, 'En application du pouvoir de coordination prévu par l'article L. 225-1-1 et pour des missions de contrôle spécifiques, le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale peut, à son initiative ou sur demande émise par une union, demander à une union de recouvrement de déléguer ses compétences en matière de contrôle à une autre union de recouvrement. La délégation prend la forme d'une convention de réciprocité spécifique. Le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale est chargé d'établir cette convention et de recevoir l'accord des unions concernées'.

L'avis de contrôle du 10 janvier 2011 mentionnait expressément que l'URSSAF de [Localité 38] avait adhéré à la convention générale de réciprocité portant délégation de compétences en matière de contrôle à tous les autres organismes de recouvrement et qu'à ce titre tous les établissements de l'entreprise étaient susceptibles d'être vérifiés.

L'article D.213-1-1 du code de la sécurité sociale prévoit en son second alinéa que 'Le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale est chargé d'établir cette convention et de recevoir les adhésions'.

S'agissant d'un contrat qui devait simplement être proposé à l'adhésion des différentes unions, le directeur de l'ACOSS n'avait pas d'autre obligation que d'en établir le cadre qu'il devait soumettre à l'adhésion des différents directeurs.

On ne saurait, sans ajouter au texte, exiger la preuve d'autre convention que celle de l'adhésion unilatérale de telle ou telle URSSAF dont la compétence territoriale est déniée (2e Civ., 26 novembre 2020, pourvoi n° 19-16.450).

Par ailleurs, comme l'a jugé la Cour de cassation (2e Civ., 30 mars 2017, pourvoi n°16-12.851), si selon l'article D. 213-1-2 du code de la sécurité sociale, en application du pouvoir de coordination prévu par l'article L. 225-1-1 et pour des missions de contrôle spécifiques, le directeur de l'ACOSS peut, à son initiative ou sur demande émise par une union, demander à une union de recouvrement de déléguer, sous la forme d'une convention de réciprocité spécifique, ses compétences en matière de contrôle à une autre union de recouvrement, ce texte n'a pas pour objet, ni pour effet de subordonner la régularité d'un contrôle concerté à l'existence préalable d'une convention de réciprocité spécifique, mais uniquement d'étendre la compétence des organismes chargés d'y procéder ; qu'une délégation spécifique de compétence n'est pas nécessaire lorsque ceux-ci bénéficient déjà d'une délégation de compétence prenant la forme d'une convention générale de réciprocité consentie en application de l'article L. 213-1 précité.

Cette décision, confirmée à plusieurs reprises par la suite (notamment 2e Civ., 20 décembre 2018, pourvoi n° 17-26.921) ne constitue pas un revirement portant atteinte à un droit légitime juridiquement protégé privant le cotisant du droit à un procès équitable, dont il y aurait lieu de limiter en conséquence les effets dans le temps, dès lors que rien ne permet d'affirmer qu'antérieurement à la publication du décret du 25 septembre 2017, l'exigence d'une convention de réciprocité spécifique dans le cadre d'un plan d'action concertée était reconnue en droit positif, quelque soit la solution retenue par les juridictions du premier degré.

Par l'emploi du verbe pouvoir (le directeur peut) plutôt que par l'emploi du verbe devoir (le directeur doit), l'article D. 213-1-2 n'impose pas au directeur de l'ACOSS de demander à une union de recouvrement de déléguer ses compétences, à son initiative ou sur demande émise par une union, dans le cadre d'un contrôle concerté.

Cet article n'a donc pas pour objet, ni pour effet, de subordonner la régularité d'un contrôle concerté à l'existence préalable d'une convention de réciprocité spécifique, mais uniquement d'étendre la compétence des organismes chargés d'y procéder.

La portée et les effets de la convention générale de réciprocité trouvent leur source dans des dispositions du code de la sécurité sociale contemporaines au contrôle.

Force est bien de relever que les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 213-1 ne distinguent pas selon la nature du contrôle à opérer la nature de la convention de réciprocité à consentir, en sorte que l'interprétation qui en est donnée par l'arrêt du 30 mars 2017, qui n'a pas pour effet d'interdire l'accès au juge, ne remet pas en cause le principe de sécurité juridique.

Il n'est en conséquence caractérisé aucun revirement de jurisprudence ayant eu pour effet de modifier l'état du droit existant ou de priver la partie concernée du droit au procès équitable, peu important en la matière le contenu de la nouvelle rédaction de l'article D 213-1-2 du code de la sécurité sociale telle qu'issue du décret du 25 septembre 2017.

Une circulaire ou les directives du directeur de l'ACOSS ne peuvent avoir pour effet de restreindre ou limiter les droits que l'organisme tient de la loi.

Le fait qu'il ne soit pas donné suite à l'instruction du directeur de l'ACOSS prévoyant la conclusion de conventions spécifiques de réciprocité préalablement à la mise en oeuvre d'un contrôle concerté n'est pas de nature à affecter la régularité de la procédure de contrôle que le directeur de l'URSSAF de [Localité 34] pouvait mettre en oeuvre de son propre chef selon les modalités offertes par la convention générale de réciprocité.

Ainsi, aucune nullité ne saurait être tirée en l'espèce de l'absence de convention de réciprocité spécifique dès lors que n'est pas contestée par la société l'existence de conventions générales de réciprocité régularisées par les URSSAF auxquelles sont rattachés les différents établissements contrôlés.

La compétence de l'URSSAF qui a opéré le contrôle ne saurait être remise en cause dès lors que les conventions générales de réciprocité se renouvellent par tacite reconduction.

C'est donc à juste titre que les premier juges ont écarté ces moyens de nullité.

2.2 Sur l'envoi de l'avis de contrôle :

La société soutient qu'en vertu de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, l'avis de contrôle doit être adressé au cotisant par l'organisme en charge du recouvrement des cotisations, c'est-à-dire par l'organisme dans le ressort géographique duquel se trouve l'établissement contrôlé et auquel la société verse habituellement ses cotisations ; qu'en l'espèce, l'URSSAF de [Localité 34] s'en est chargée alors qu'il appartenait à l'URSSAF [Localité 31] de le faire ; que de ce fait, la mise en demeure et le redressement envisagé sont nuls.

L'URSSAF ne développe aucune argumentation.

Sur ce :

Il résulte de l'article R. 243-53 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable que « tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par lettre recommandée avec accusé de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 324-9 du code du travail ».

En l'espèce, l'avis de contrôle a été adressé au siège social de la société à [Localité 38], le 10 janvier 2011, par l'URSSAF de [Localité 34].

Cet avis mentionne expressément que « conformément aux dispositions des articles L. 213-1 et D. 213-1-1 du code de la sécurité sociale, l'URSSAF de [Localité 38] a adhéré à la convention générale de réciprocité portant délégation de compétences en matière de contrôle à tous les autres organismes du recouvrement et qu'à ce titre tous les établissements de votre entreprise sont susceptibles d'être vérifiés ».

La délégation aux fins de contrôle au profit de l'URSSAF de [Localité 34] emporte la possibilité pour cet organisme délégataire d'émettre l'avis de contrôle. (2e Civ., 17 mars 2011, pourvoi n° 10-30.501)

Il n'y a pas lieu de distinguer entre l'URSSAF en charge du recouvrement des cotisations et l'URSSAF chargée du contrôle, l'expression « organisme chargé du recouvrement des cotisations du régime général » désignant l'URSSAF dans sa globalité.

Ce moyen de nullité sera écarté.

2.3 Sur la régularité de l'avis de contrôle :

La société énonce que l'avis de contrôle envoyé par l'URSSAF est irrégulier, fallacieux et traduit un comportement déloyal car il ne fait pas référence au contrôle concerté et aux textes qui le prévoient ; qu'il n'informe pas régulièrement la cotisante de la compétence de l'URSSAF contrôleuse du cadre dans lequel va se dérouler le contrôle pour lui permettre de se préparer ou de se faire assister en toute connaissance.

Cependant, l'avis de contrôle précité du 10 janvier 2011 informe la société de la date du passage de l'inspecteur et précise que le contrôle a pour objet l'application des législations de sécurité sociale, de l'assurance chômage et de la garantie des salaires AGS à compter du 1er janvier 2009.

Il rappelle que les vérifications seront opérées dans les conditions prévues aux articles L. 243-7, L. 243-12-3, L.114-14 à L.114-16, R.243-59, R.243-59-1 et R.253-9-2 du code de la sécurité sociale.

Outre les indications rappelées supra relatives la convention générale de réciprocité, l'avis de contrôle invite le cotisant à tenir à la disposition des inspecteurs tous les documents nécessaires à la vérification selon une liste exhaustive jointe, et à rassembler les documents éventuellement détenus par un tiers.

La société y est avisée de sa faculté de se faire assister par le conseil de son choix.

Il est également indiqué que dès le début du contrôle il lui sera remis la charte du cotisant contrôlé, document présentant la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement tels qu'ils sont définis par le code de la sécurité sociale.

Il est enfin indiqué que cette charte, dont le modèle a été fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable sur le site de l'URSSAF dont est donnée l'adresse internet.

Elle est signée de l'inspecteur dont il n'est pas contesté qu'il a procédé au contrôle.

Cet avis comporte bien les mentions prescrites à peine de nullité afin que soit respecté le principe du contradictoire.

L'indication de ce que le contrôle effectué l'est dans le cadre d'un contrôle concerté n'est pas prescrite par l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale précité à peine de nullité et en tout état de cause, la société n'indique pas en quoi l'absence de précision quant à la nature du contrôle l'a privée de la possibilité de se faire assister utilement et d'organiser sa défense ou de se rapprocher des autres sociétés objet du contrôle concerté.

Il n'est ni établi ni allégué que les droits du cotisant ne sont pas identiques dans le cadre d'un contrôle sur délégation générale de compétence et dans le cadre d'un contrôle sur délégation spécifique de compétence et qu'elle a été de ce fait privée, comme elle l'allègue, de garanties procédurales.

La société ne démontre pas qu'il a été porté atteinte au principe de l'égalité des armes et au droit de la défense.

Elle est dès lors mal fondée à solliciter la nullité des opérations de contrôle à ce titre.

3. Sur la régularité de la mise en demeure :

La société fait valoir que les mentions de la mise en demeure ne satisfont pas aux exigences de la jurisprudence dès lors qu'elle ne lui permettent pas d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de ses obligations et ne comportent pas la motivation exigée ; que le détail des cotisations et majorations par numéro de Siret est erroné ; que par exemple, pour l'établissement de [Localité 46], le montant figurant dans la mise en demeure est supérieur à celui mentionné dans la lettre d'observations et dans la lettre en réponse aux observations du cotisant ; que cette irrégularité entraîne l'annulation de la mise en demeure ; que s'agissant de l'établissement de [Localité 15], il est mentionné un numéro de Siret qui correspond à un établissement fermé depuis l'année 2008 ; que les montants des majorations de retard réclamés pour chaque chef de redressement sont erronés et en toute hypothèse incompréhensibles.

L'URSSAF ne développe aucune argumentation sur ce point.

Sur ce :

En application des articles L.244-2 et R.244-1 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans un délai imparti doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice (2e Civ., 9 février 2017, n° 16-12.189).

La mise en demeure qui se rapporte à un exercice donné, indique la nature des cotisations réclamées et distingue le montant dû au principal des majorations de retard, permet au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation (2e Civ., 24 septembre 2020, n°19-17.802).

La mise en demeure du 21 février 2012 produite aux débats mentionne :

- le motif de recouvrement (A la suite du contrôle de l'application des législations de sécurité sociale et d'allocations familiales dont vous avez fait l'objet pour la période du 01/01/2009 au 31/12/2009, une notification des chefs de redressement vous a été adressée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26/10/2011 conformément aux dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale) ;

- la nature des cotisations (régime général) ;

- la période de référence (01/01/2009 au 31/12/2009) ;

- le délai d'un mois pour s'acquitter des sommes réclamées [ ' à défaut de règlement dans un délai d'un mois suivant la réception de cette mise en demeure, des poursuites, sans nouvel avis, seront déclenchées (...) '] ;

- le montant des cotisations dû en principal (1 748 924 euros) et au titre des majorations de retard (269 334,30 euros), soit la somme totale de 2 018 258,30 euros.

La lettre d'observations à laquelle renvoie la mise en demeure précise que des majorations de retard seront réclamées en application de l'article R. 243-18 du code de la sécurité sociale.

La mise en demeure comporte également un tableau récapitulant les montants en cotisations et majorations par établissement désigné sous son numéro Siret.

La société fait valoir à juste titre que pour l'établissement de [Localité 46] dont le numéro de Siret est 38957197700104, la lettre d'observations, qui présente dans sa synthèse un tableau similaire à celui figurant dans la mise en demeure, retient un montant de cotisations dû de 52 925 euros alors que la mise en demeure mentionne la somme de 60 698 euros. Cette différence est significative et n'a fait l'objet d'aucune explication de la part de l'URSSAF.

Est indifférent le fait que le montant total du redressement notifié dans la mise en demeure (1 748 924 euros) est inférieur à celui envisagé initialement dans la lettre d'observations (1 760 406 euros), étant relevé que suite aux observations de la cotisante, le redressement a été minoré voire annulé pour certains chefs et certains établissements.

Par ailleurs, dans la lettre d'observations et la mise en demeure, l'établissement de [Localité 15], auquel est imputé un redressement d'un montant de 42 802 euros ramené à 42 383 euros, est désigné comme étant situé [Adresse 51], sous le numéro de Siret 38957197700120.

Or, la société justifie par ses pièces que :

- le numéro de Siret 38957197700120 correspond à un établissement dont l'adresse est '[Adresse 32]', fermé au répertoire Sirene depuis le 18 décembre 2008, soit antérieurement au contrôle ;

- l'établissement situé [Adresse 51], effectivement contrôlé, porte le numéro Siret 38957197700476 (Pièces n°21 et 22).

Ces éléments caractérisent des irrégularités qui ne permettent pas à la société d'avoir une connaissance précise de l'étendue et de la cause de ses obligations et affectent la validité de la procédure de redressement.

L'annulation de la mise en demeure sera en conséquence prononcée ainsi que celle des deux contraintes délivrées subséquemment.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a validé le redressement et l'URSSAF déboutée de sa demande en paiement.

5. Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société ses frais irrépétibles.

Par conséquent, celle-ci sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de l'URSSAF qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a ordonné la jonction à l'instance enregistrée sous le numéro 214-1692 de l'instance enregistrée sous le numéro 214-1720 et a déclaré recevables les recours des sociétés [44], [10] et [12] ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

PRONONCE l'annulation de la mise en demeure du 21 février 2012 et des contraintes des 7 et 20 novembre 2014 subséquentes ;

DÉBOUTE en conséquence l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du [Localité 31] de sa demande en paiement des causes du redressement ;

DÉBOUTE la société [11] de sa demande d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du [Localité 31] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 19/00407
Date de la décision : 22/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-22;19.00407 ?
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