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24/02/2023 | FRANCE | N°20/00577

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 24 février 2023, 20/00577


2ème Chambre





ARRÊT N° 119



N° RG 20/00577 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QNP7





(2)







BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST



C/



Mme [F] [K]



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée



le :



à :

-Me Sylvie KLEIMAN-GASLAI

N

-Me François MOULIERE











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 FEVRIER 2023



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHI...

2ème Chambre

ARRÊT N° 119

N° RG 20/00577 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QNP7

(2)

BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST

C/

Mme [F] [K]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

-Me Sylvie KLEIMAN-GASLAIN

-Me François MOULIERE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 Décembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 24 Février 2023, après prorogation, par mise à disposition au greffe

****

APPELANTE :

BANQUE POPULAIRE GRAND OUEST

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Sylvie KLEIMAN-GASLAIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

INTIMÉE :

Madame [F] [K]

née le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 6] (29)

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me François MOULIERE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

2

EXPOSÉ DU LITIGE :

La Banque populaire de l'ouest a consenti à M. [O] [K] :

- par acte du 5 juillet 2005, l'ouverture d'un compte professionnel ;

- par acte du 10 octobre 2005, un prêt 'spécial installation' d'un montant de 10 080 euros ;

- par actes du 25 juillet 2005,

- un crédit-bail portant sur un véhicule professionnel d'une valeur de 33 000 euros

- un crédit-bail portant sur une pelle, godets et accessoires d'une valeur de 46 950 euros.

- par actes du 29 décembre 2006 :

- un crédit-bail portant sur une pelle sur chenilles d'une valeur de 117 000 euros, - un crédit-bail portant sur une remorque porte-engins d'une valeur de 19 000 euros

- un crédit-bail portant sur un camion d'une valeur de 35 000 euros;

Mme [F] [C], épouse [K], s'est portée caution solidaire :

- par actes du 29 décembre 2006, à hauteur de 81 599,28 euros en garantie du contrat de crédit-bail portant sur une pelle sur chenilles, à hauteur de 13 251 euros en garantie de celui portant sur une remorque porte engins et à hauteur de 23 193,60 euros en garantie du contrat de crédit-bail portant sur un camion ;

- par acte du 8 novembre 2008, à hauteur de 20 000 euros en garantie de tous engagements de M. [K].

Par jugement du tribunal de commerce de Saint-Brieuc, M. [K] a été admis au bénéfice d'une procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire par jugement du 19 octobre 2016.

Par acte du 30 novembre 2017, la BPO a assigné Mme [K] devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc aux fins de condamnation en paiement.

Par jugement du 3 décembre 2019, le tribunal a :

Débouté la Banque populaire grand ouest (la BPGO) venant aux droits de la BPO de toutes ses demandes ;

Condamné la Banque populaire grand ouest aux dépens ;

Condamné la Banque populaire grand ouest à payer à Mme [C] [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire ;

Débouté les parties de toutes autres demandes.

Par acte du 22 janvier 2020, la Banque populaire grand ouest a relevé appel de ce jugement et, par dernières conclusions signifiées le 31 mars 2020, elle demande :

Réformer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc en date du 3 décembre 2019 ;

Condamner Mme [C] épouse [K] au paiement d'une somme de 20 000 euros au titre de son acte de cautionnement tous engagements, eu égard aux montants déclarés par la banque au titre du compte professionnel de M. [K], du contrat de crédit-bail n°025923 et du crédit-bail n°025922 ;

Condamner Mme [C] épouse [K] au paiement de :

- la somme de 38 225,80 euros au titre de son engagement de caution au titre du crédit-bail n°029086 ;

- la somme de 4 635,94 euros au titre de son engagement de caution au titre du crédit-bail n°029087 ;

- la somme de 9 638,64 euros au titre de son engagement de caution au titre du crédit-bail n°029088 ;

Condamner Mme [C] épouse [K] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 23 juin 2020 Mme [F] [K] demande à la cour de :

À titre principal,

Confirmer le jugement dont appel ;

au surplus,

Condamner la BPGO à verser à Mme [F] [K] la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles supportés en cause d'appel ;

À titre subsidiaire,

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest (venant aux droits de la Banque populaire ouest) a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde à l'égard de Mme [K] et la Condamner à indemniser cette dernière à hauteur de 52 000 euros ;

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest a manqué à son obligation d'information annuelle de la caution et à son obligation d'information concernant les incidents de paiements survenus ;

En conséquence,

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest sera déchue de son droit à solliciter de quelconques intérêts s'agissant des crédits-baux du 29 décembre 2006 ;

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde à l'égard de Mme [K] et la Condamner à indemniser cette dernière à hauteur de 20 000 euros ;

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest a manqué à son obligation d'information annuelle de la caution et à son obligation d'information concernant les incidents de paiements survenus ;

En conséquence,

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest sera déchue de son droit à solliciter de quelconques intérêts s'agissant des actes garantis par l'acte de cautionnement du 8 novembre 2008 ;

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest a commis un dol au préjudice de Mme [K] en ne l'informant pas des conditions de mise en oeuvre de la garantie Sofaris (Oséo) ainsi que des conditions de mises en oeuvre de l'assurance AGF ;

À défaut,

Dire et juger que Mme [K] a commis une erreur concernant les conditions de mise en oeuvre de la garantie Sofaris (Oséo) et de l'assurance AGF et la portée de ses engagements ;

En conséquence,

Prononcer la nullité de l'engagement de caution du 8 novembre 2008 ;

Dire et juger que la Banque populaire grand ouest a manqué à son obligation d'information à l'égard de Mme [K] en ne l'informant pas des conditions de mise en oeuvre de la garantie (Sofaris) Oséo et des assurances AGF ;

En conséquence,

Condamner la Banque populaire grand ouest à verser à Mme [K] la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

En tout état de cause,

Condamner la Banque populaire grand ouest à verser à Mme [K] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter la charge des entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision ainsi qu'aux dernières conclusions déposées l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 13 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Aux termes de l'article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution ne lui permette de faire face à ses obligations au moment où elle est appelée.

La BPGO fait grief au jugement d'avoir tenu compte de prêts à la consommation non portés à sa connaissance pour retenir le caractère disproportionné des engagements de caution souscrits par Mme [K] pour retenir le caractère disproportionné des engagements de caution souscrits le 29 décembre 2006 alors que ces prêts n'avaient pas été portés à sa connaissance.

La banque fait valoir qu'en tout état de cause, le patrimoine de la caution au moment où elle a été appelée lui permet de faire face à ses engagements.

S'agissant des engagements de caution souscrits le 29 décembre 2006 pour un total de 118 043,88 euros il ressort des éléments communiqués par Mme [K] à qui incombe la charge de la preuve de la disproportion à cette date qu'elle a perçu avec son mari avec lequel elle est mariée sous le régime de la communauté des revenus annuels en 2006 pour un total de 35 660 euros.

Les époux [K] étaient à cette date propriétaires d'un immeuble acquis en 2003 pour la somme de 115 800 euros outre un véhicule acquis en 2004 pour la somme de 17 854 euros .

Ils devaient faire face à des charges de prêts immobiliers pour un capital restant du de 104 709 euros à la date des cautionnements et des charges de trois prêts à la consommation pour des capitaux restants du de 16 212 euros.

La BPGO ne saurait se prévaloir avoir méconnu l'existence de deux des prêts à la consommation qui ne lui auraient pas été déclarés dans la mesure où elle ne justifie aucunement avoir interrogé Mme [K] sur sa situation patrimoniale antérieurement au 8 novembre 2008.

La situation financière du couple était par ailleurs grevée par les remboursements des échéances des contrats de crédit-bail sans qu'il y at lieu d'intégrer la valeur des biens donnés en location avec option d'achat au patrimoine du couple alors même que ces biens demeurent dans le patrimoine du bailleur.

Il apparaît ainsi que c'est par de justes motifs que le premier juge a retenu le caractère disproportionné des cautionnements donnés par Mme [K] le 29 décembre 2006.

S'agissant du cautionnement donné le 8 novembre 2008 il ressort de la fiche patrimoniale renseignée à cette date par Mme [K] qu'elle a déclaré être en congé parental et percevoir des revenus de 652 euros par mois son mari percevant des revenus annuels de 9 000 euros par mois.

Sur le plan patrimonial, Mme [K] a déclaré que la résidence principale du couple avait une valeur de 160 000 euros pour des emprunts restant dus de l'ordre de 100 000 euros. La caution a déclaré des charges d'emprunts mensuelles d'un crédit Auto de 277 euros courant jusqu'à l'année 2011.

Si Mme [K] n'a pas déclaré d'autres charges, la banque ne pouvait méconnaître l'état des engagements de caution précédemment souscrits par Mme [K] le 29 décembre 2006 pour un total de plus de 118 000 euros de sorte qu'il apparaît que le cautionnement ainsi donné était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Pour soutenir que le patrimoine de Mme [K] où elle est appelée lui permet de faire face à ses engagements, la BPGO fait valoir que l'immeuble commun a été évalué à la somme de 160 000 euros en 2008 que sa valeur a certainement augmenté depuis lors ; que les sommes restant dues au titre de leur prêt immobilier s'élèvent à la somme de 47 965 euros. La banque expose que Mme [K] est conseillère principale d'éducation et que s'il elle était en congé parental en 2008, elle a repris ses activités depuis lors et que sa rémunération se situe aux alentours de 3 500 euros par mois ;

Elle expose que le couple a acheté un terrain pour un prix de 9 587,82 euros le 3 juillet 2017 ; que M. [K] avait créé une entreprise Littoral Matériaux avant même la clôture de la liquidation de sa précédente activité.

S'agissant de la société créée par M. [K] en 2015, il sera constaté qu'elle a fait l'objet d'une liquidation judiciaire simplifiée le 5 juillet 2017 et qu'elle a été radiée le 26 avril 2018.

S'agissant des revenus de Mme [K], si cette dernière conteste le niveau de rémunération tel qu'évalué par la banque au vu de la grille indiciaire de son emploi, il n'est pas discuté qu'elle est bien conseillère principale d'éducation. Elle ne fournit aucun élément de nature à contredire l'estimation de ses revenus faite par la banque qui sera dès lors retenue.

S'agissant de la valeur de l'immeuble commun, Mme [K] produit aux débats une attestation d'un agent immobilier fixant la valeur de l'immeuble à la somme de 92 000 euros compte tenu de son état de son emplacement et de l'état du marché.

La banque ne fournit pas d'élément actualisé susceptible de contredire cette estimation l'évaluation faite par la caution, profane en matière d'estimation immobilière, dans la fiche patrimoniale n'étant pas de nature à la contredire celle d'un professionnel.

Il ressort du tableau d'amortissement produit qu'à la date de l'assignation de la caution le 30 novembre 2017, le capital restant du sur le prêt immobilier s'élevait à la somme de 62 299,04 euros pour des mensualités de 542,84 euros.

Il est constant que les époux [K] ont fait l'acquisition d'un terrain pour un prix de 9 587,89 euros mais ont financé cette acquisition au moyen d'un emprunt dont le capital restant du au 30 novembre 2017 s'élevait à la somme de 8 438,52 euros pour des mensualités de 227,83 euros.

Mme [K] doit également faire face aux échéances d'un contrat de crédit bail automobile moyennant des loyers de 610 euros.

Il ressort de ces éléments, que la valeur du patrimoine net des époux [K] ressort à la somme de 30 850,33 euros à la date où la caution a été appelée ; qu'ils devaient faire face à des échéances financières mensuelles d'un peu plus de 1 380 euros.

A la date du 30 novembre 2017, les sommes restant dues au titre des contrats cautionnés le 29 décembre 2006 s'élevaient dans la limite des cautionnements donnés à la somme totale de 105 000,76 euros.

Même si la banque limite sa réclamation au titre de ces cautionnements à 50 % des sommes dues soit 52 500,38 euros outre les sommes réclamées en exécution du cautionnement de 20 000 euros, il n'apparaît pas que le patrimoine de Mme [K] lui permettait de faire face à ses obligations de caution à la date où elle a été appelée.

C'est en conséquence à bon droit que les premiers juges ont retenu que la banque ne pouvait se prévaloir des engagements de caution querellés et le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la BPGO de ses demandes en paiement.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions y compris en ce qu'il a condamné la banque aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure.

La BPGO qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à Mme [K] une indemnité de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 décembre 2019 par le tribunal de grande instance de Saint Brieuc.

Y ajoutant

Condamne la Banque Populaire Grand Ouest à payer à Mme [F] [C] épouse [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la Banque Populaire Grand Ouest aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/00577
Date de la décision : 24/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-24;20.00577 ?
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