2ème Chambre
ARRÊT N°99
N° RG 20/00873
N° Portalis DBVL-V-B7E-QOTZ
(2)
SCI ROCH
C/
S.A.R.L. CABINET IMMOBILIER JACQUES BAILLY
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me NAUX
- Me VERRANDO
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 17 FEVRIER 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 Janvier 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 17 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
SCI ROCH
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Louis NAUX de la SELARL L.R.B. AVOCATS CONSEILS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE
INTIMÉE :
S.A.R.L. CABINET IMMOBILIER JACQUES BAILLY
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Philippe CHALOPIN de la SELARL ATLANTIC JURIS, plaidant, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON
EXPOSE DU LITIGE :
Suivant acte sous-seing-privé en date du 19 décembre 2014, la SCI Roch a confié à la société Cabinet immobilier Jacques Bailly un mandat de vente n° 3108 avec exclusivité portant sur des locaux professionnels et une parcelle de terrain sis à [Localité 5] au prix de 1 100 000 euros.
Suivant acte sous-seing-privé en date du 18 avril 2016, la SCI Roch a confié à la société Cabinet immobilier Jacques Bailly un mandat de vente n° 3565 sans exclusivité portant sur le même bien immobilier au prix de 850 000 euros.
Le 25 janvier 2017, la société Cabinet immobilier Jacques Bailly a reçu l'offre d'acquisition de M. [Y] [K] au prix de 850 000 euros qu'elle a adressée le jour même à la SCI Roch.
Suivant correspondance en date du 31 janvier 2017, le notaire de la SCI Roch a informé la société Cabinet immobilier Jacques Bailly qu'une offre d'acquisition avait été acceptée antérieurement à la proposition de M. [Y] [K] et qu'il ne pouvait dès lors y être donné suite.
Suivant acte d'huissier en date du 22 janvier 2018, la société Cabinet immobilier Jacques Bailly a assigné la SCI Roch devant le tribunal de grande instance de Nantes.
Suivant jugement en date du 23 janvier 2020, le tribunal de grande instance de Nantes devenu tribunal judiciaire de Nantes a :
Déclaré recevable la société Cabinet immobilier Jacques Bailly en son action dirigée contre la SCI Roch.
Condamné la SCI Roch à payer à la société Cabinet immobilier Jacques Bailly la somme de 50 000 euros à titre d'indemnité forfaitaire.
Ordonné la capitalisation annuelle des intérêts à compter de l'assignation en date du 22 janvier 2018.
Condamné la SCI Roch à payer à la société Cabinet immobilier Jacques Bailly la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Débouté la société Cabinet immobilier Jacques Bailly du surplus de ses demandes.
Débouté la SCI Roch de l'intégralité de ses demandes y compris de celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamné la SCI Roch aux dépens.
Ordonné l'exécution provisoire.
Suivant déclaration en date du 4 février 2020, la SCI Roch a interjeté appel.
En ses dernières conclusions en date du 21 octobre 2022, la SCI Roch demande à la cour de :
Vu les articles 1101 et suivants, 1984 et suivants, 1118, 1121 et suivants du code civil,
Vu les dispositions de la loi Hoguet n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce dite Loi Hoguet,
Réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré.
Statuant à nouveau,
Dire irrecevables les demandes de la société Cabinet immobilier Jacques Bailly faute d'intérêt à agir.
Débouter la société Cabinet immobilier Jacques Bailly de ses demandes, fins et conclusions.
La condamner à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
La condamner à lui payer la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Subsidiairement,
Ramener le quantum indemnitaire à la somme de 25 000 euros correspondant aux honoraires de négociation réellement facturés par la société Cabinet immobilier Jacques Bailly au titre du mandat.
La condamner aux dépens avec distraction au profit de la société LRB avocats conseils Juripartner représentée par Me Louis Naux.
En ses dernières conclusions en date du 26 octobre 2022, la société Cabinet immobilier Jacques Bailly demande à la cour de :
Vu les articles 1134, 1147 et 1152 du code civil dans leur version applicable au litige,
Vu la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce dite Loi Hoguet,
Vu le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d'application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970,
Déclarer la SCI Roch irrecevable et en tout cas non fondée en son appel.
Confirmer le jugement déféré.
Par conséquent,
Débouter la SCI Roch de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
Y ajoutant,
Condamner la SCI Roch à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d'appel.
La condamner aux dépens de la procédure d'appel avec distraction au profit de la société Lexavoue représentée par Me Marie Verrando.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions des parties.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 novembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Pour conclure à l'irrecevabilité des demandes de la société Cabinet immobilier Jacques Bailly faute d'intérêt à agir, la SCI Roch fait valoir que les mandats de vente ont été donnés à M. [L] [U].
Il résulte des pièces produites aux débats que les mandats de vente ont été donnés à la société Cabinet immobilier Jacques Bailly représentée par M. [L] [U] son gérant. Le cachet de la société, titulaire de la carte professionnelle d'agent immobilier, a d'ailleurs été apposé sur les documents contractuels. Elle justifie d'un intérêt à agir.
Sur le fond, la SCI Roch explique que le bien était en vente depuis plusieurs années sans le moindre succès et qu'elle a obtenu seule une offre d'acquisition le 16 janvier 2017 émanant de la SCI La cane et de M. [C] [O] pour un prix de 800 000 euros. Elle prétend qu'elle a avisé la société Cabinet immobilier Jacques Bailly par téléphone dès le lendemain de l'acceptation de l'offre d'acquisition puis que l'information officielle a été délivrée le 31 janvier 2017 par son notaire.
La société Cabinet immobilier Jacques Bailly rappelle que conformément aux stipulations du mandat de vente, la SCI Roch s'était obligée à conclure la vente dès lors que les conditions en seraient réunies à défaut de quoi elle serait tenue de lui régler la somme de 50 000 euros. Elle fait valoir que l'offre d'acquisition dont se prévaut la SCI Roch a été présentée par la SCI La cane qui a pour associé M. [M] [S] à qui elle avait fait visiter le bien immobilier le 13 novembre 2015. Elle constate que la SCI Roch s'est gardée de l'appeler à la négociation avec la SCI La cane, lui reproche d'avoir manqué sciemment à son devoir d'information et considère que le droit à indemnisation est acquis. Elle fait valoir en toute hypothèse que la SCI Roch ne démontre pas avoir vendu le bien immobilier et qu'elle a fautivement refusé de régulariser la vente avec l'acquéreur présenté par son entremise.
Comme relevé par le premier juge, la société Cabinet immobilier Jacques Bailly ne peut réclamer de rémunération au titre du premier mandat qui est arrivé à expiration le 17 décembre 2016. Elle ne peut réclamer de rémunération au titre du second mandat dès lors que la vente n'a pas été conclue avec l'acheteur qu'elle a présenté. Si elle prétend avoir fait visiter le bien à M. [M] [S] qui est associé de la SCI La cane, elle n'en rapporte pas la preuve. La fiche contact établie par l'agent immobilier ou les mentions portées par lui dans son agenda sont insuffisantes à établir cette preuve en l'absence de bon de visite dûment régularisé ou de tout autre élément probant. La preuve d'une inexécution fautive des mandats de vente par la SCI Roch pour avoir traité avec un acheteur présenté par l'agent immobilier n'est pas rapportée.
La SCI Roch était fondée à refuser de donner suite à l'offre d'acquisition présentée par M. [Y] [K] le 25 janvier 2017 dès lors qu'elle avait elle-même reçue une offre d'acquisition le 16 janvier 2017 et qu'elle l'avait acceptée le 23 janvier 2017, la vente étant alors parfaite, comme a pu en attester son notaire dans une correspondance en date du 31 janvier 2017.
La société Cabinet immobilier Jacques Bailly reproche à la SCI Roch de ne pas l'avoir avisée dans les huit jours de ce qu'elle avait reçu une offre d'acquisition. Si la SCI ROCH ne démontre pas avoir respecté les stipulations du contrat, il n'en est résulté aucun préjudice, la perte de la rémunération n'étant pas liée à ce défaut d'information mais à la réalisation de la vente sans intervention du mandataire.
Le jugement déféré sera infirmé sauf en ce qu'il a déclaré recevable la société Cabinet immobilier Jacques Bailly en son action dirigée contre la SCI Roch.
Les demandes de la société Cabinet immobilier Jacques Bailly seront rejetées.
La SCI Roch ne démontre pas que l'action de la société Cabinet immobilier Jacques Bailly a dégénéré en abus de droit. Elle ne démontre pas avoir subi le moindre préjudice. La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive sera rejetée.
Les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées au motif pris de l'équité.
La société Cabinet immobilier Jacques Bailly sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et il sera fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au bénéfice des avocats de la cause.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Nantes en date du 23 janvier 2020 sauf en ce qu'il a déclaré recevable la société Cabinet immobilier Jacques Bailly en son action dirigée contre la SCI Roch.
Statuant à nouveau,
Rejette les demandes de la société Cabinet immobilier Jacques Bailly.
La condamne aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au bénéfice des avocats de la cause.
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT