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15/02/2023 | FRANCE | N°19/07625

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 15 février 2023, 19/07625


5ème Chambre





ARRÊT N°-64



N° RG 19/07625 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QI2A













Société MACIF LOIR BRETAGNE.



C/



Etablissement Public CAISSE NATIONALE DE RETRAITE DES AGENTS DES COLLEC TIVITES LOCALES (CNRACL)



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















Copie exécutoire délivrée
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie ...

5ème Chambre

ARRÊT N°-64

N° RG 19/07625 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QI2A

Société MACIF LOIR BRETAGNE.

C/

Etablissement Public CAISSE NATIONALE DE RETRAITE DES AGENTS DES COLLEC TIVITES LOCALES (CNRACL)

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Décembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Société MACIF LOIR BRETAGNE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Vincent BERTHAULT de la SELARL HORIZONS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

CAISSE NATIONALE DE RETRAITE DES AGENTS DES COLLEC TIVITES LOCALES (CNRACL) Etablissement public géré par la CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2] / FRANCE

Représentée par Me Yann PAILLER de la SELARL BRITANNIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

Le 24 octobre 2011, Mme [T] [P] a été renversée par un véhicule automobile alors qu'elle traversait la chaussée sur un passage piétons, [Adresse 6] à [Localité 5]. Le conducteur du véhicule, M. [C] [G], assuré auprès de la MACIF Loire Bretagne, a quitté les lieux sans reconnaître sa responsabilité dans l'accident.

Une information judiciaire a été ouverte et M. [G] a été mis en examen du chef de blessures involontaires avec incapacité n'excédant pas trois mois par conducteur de véhicule automobile et délit de fuite.

Mme [P] a fait l'objet d'une première expertise médicale le 16 mars 2012 puis d'une expertise complémentaire le 18 février 2013 au terme de laquelle l'expert a conclu à une incapacité de travail personnel de plus de 4 mois.

Le 11 septembre 2012, la MACIF a versé à Mme [P] une provision de 11 000 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices.

Le 20 février 2013, un réquisitoire supplétif a été délivré à l'encontre de M.[G] du chef de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois par conducteur de véhicule automobile et délit de fuite.

Dans le cadre d'une procédure engagée par les époux [P], le juge des référés du tribunal de grande instance de Brest, par ordonnance du 23 juin 2014, a alloué à Mme [P] une provision complémentaire de 15 000 euros ainsi qu'une provision de 500 euros à son époux et a ordonné une expertise médicale confiée au docteur [S], remplacée ultérieurement par le docteur [L].

Ce dernier, après avoir sollicité l'intervention d'un sapiteur en la personne du docteur [H], a déposé son rapport le 29 juillet 2015.

A la suite de l'information judiciaire ouverte à l'encontre de M. [G], ce dernier a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Brest qui, par jugement du 5 juin 2015, l'a déclaré coupable et condamné du chef de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois par conducteur de véhicule automobile et délit de fuite. Le tribunal correctionnel a reçu la constitution de partie civile de Mme [P], son époux et leurs deux enfants et a notamment condamné M. [G] à verser, à titre de provision, à Mme [P] la somme de 55 000 euros, à M. [P] la somme de 2 000 euros et à chacun de leurs enfants la somme de 1 500 euros.

Faute d'accord sur les préjudices à indemniser, par acte d'huissier en date des 26, 27 et 30 juin 2017 et 3 juillet 2017, Mme [P], M. [P] et leurs deux enfants ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Brest, la MACIF Loire Bretagne, la CPAM du Finistère, la mutuelle Génération, [Localité 5] Métropole Océane et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (ci après dénommée CNRACL).

Par jugement en date du 22 mai 2019, le tribunal de grande instance de Brest a :

- condamné la MACIF Loire Bretagne à verser à Mme [P] la somme de 111 476,05 euros, déduction faite des provisions de 81 000 euros, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser à [Localité 5] Métropole Océane la somme de 169 014,75 euros,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser à la CNRACL la somme de

292 627,13 euros,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser à M. [P] la somme de 12 739,94 euros dont à déduire les provisions de 3 193,94 euros,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser à Mme [U] [P] la somme de 3 857 euros dont à déduire la provision de 1 857 euros,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser à M. [R] [P] la somme de 4 031,60 euros dont à déduire la somme de 2 031,60 euros,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser à Mme [T] [P], M. [D] [P], Mme [U] [P] et M. [R] [P] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser [Localité 5] Métropole Océane la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la MACIF Loir Bretagne à verser la CNRACL la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [T] [P], M. [D] [P], Mme [U] [P] et M. [R] [P] du surplus de leurs demandes,

- débouté [Localité 5] Métropole Océane du surplus de ses demandes,

- débouté la CNRACL du surplus de ses demandes,

- débouté la MACIF Loir Bretagne du surplus de ses demandes,

- ordonné l'exécution provisoire au titre des dispositions relatives aux sommes mises à la charge de la MACIF au profit de Mme [P] dans la limite de 80 000 euros,

- condamné la MACIF Loir Bretagne aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire du docteur [L] et son sapiteur.

Le 25 novembre 2019, la MACIF Loir Bretagne a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 21 août 2020, elle demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

- dire et juger que la CNRACL ne pourra prétendre qu'à la somme de 183 503,54 euros,

- la débouter de toutes autres demandes, plus amples ou contraires,

- condamner la CNRACL à payer à la MACIF Loir Bretagne une indemnité de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CNRACL aux entiers dépens dont distraction au profit de Vincent Berthault, avocat aux offres de droit, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 22 mai 2020, la CNRACL demande à la cour de :

- débouter la société MACIF Loir Bretagne de son appel principal,

- dire et juger la CNRACL recevable et bien fondée en son appel incident,

- confirmer le jugement dont appel en qu'il a condamné la société MACIF Loir Bretagne à régler à la CNRACL la somme de 292 627,13 euros (pension anticipée : 51 806,99 euros, rente d'invalidité : 240 820,14 euros), augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- condamner la société MACIF Loir Bretagne à régler sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2 500 euros à la CNRACL,

- condamner la société MACIF Loir Bretagne aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La MACIF Loir Bretagne soutient que le jugement entrepris comporte une erreur de droit sur l'assiette du recours de la CNRACL en ce qu'il a fait droit à l'intégralité de sa créance alors qu'elle aurait dû être limitée à l'assiette composée par l'évaluation du préjudice calculé en droit commun sur les pertes de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle et le déficit fonctionnel permanent.

Elle s'oppose à la demande de la CNRACL de voir réévaluer le poste de perte de gains professionnels futurs qui aurait dûe être calculé jusqu'à l'âge limite de la retraite de son emploi soit 67 ans. Elle relève qu'avec cette demande, la CNRACL méconnaît l'évaluation faite par la décision de première instance de ce poste qui, selon elle, est définitive et ajoute que dans le dispositif de ses écritures, la CNRACL sollicite d'ailleurs la confirmation du jugement en ce compris l'évaluation des pertes de gains professionnels futurs.

La CNRACL demande à la cour de confirmer le jugement s'agissant du poste de perte de gains professionnels futurs mais par substitution de motifs. Elle sollicite de retenir la date à laquelle la victime a atteint la limite d'âge de son emploi soit 67 ans au 27 février 2026 et non la date à laquelle la victime aurait pu partir à la retraite soit 62 ans au 1er avril 2021. Elle en déduit que ce poste de préjudice doit être évalué à la somme de 272 007,08 euros augmentée d'une surcôte, qu'elle dit ne pas pouvoir chiffrer mais qui, en tout état de cause, serait inférieure au montant de sa créance de 292 627,13 euros.

Aux termes de l'article 1er I de l'ordonnance n°59-76 du 7 janvier 1959, dans sa version applicable au litige, lorsque le décès, l'infirmité ou la maladie d'un agent de l'Etat est imputable à un tiers, l'Etat dispose de plein droit contre ce tiers, par subrogation aux droits de la victime ou de ses ayants droit, d'une action en remboursement de toutes les prestations versées ou maintenues à la victime ou à ses ayants droit à la suite du décès, de l'infirmité ou de la maladie.

L'article 31, alinéa 2, de la loi du 5 juillet 1985, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 2006 dispose que : ' Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel.

Conformément à l'article 1252 du Code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée.

Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice.'

Il est constant que la CNRACL a fait valoir sa réclamation auprès de l'assureur du tiers responsable, la MACIF Loir Bretagne de 292 627,13 euros au titre de la pension anticipée (51 806,99 euros) et de la rente d'invalidité (240 820,14 euros) conformément aux règles régissant le recours des tiers payeurs. Les parties s'accordent pour voir limiter ce remboursement à l'évaluation du préjudice patrimonial et extra-patrimonial soumis à recours calculé en droit commun sur les pertes de gains professionnels futurs, l'incidence professionnel et le déficit fonctionnel permanent.

Si la CNRACL demande de voir modifier l'assiette du poste de perte de gains professionnels futurs, c'est à bon droit que la MACIF Loir Bretagne relève qu'elle sollicite aux termes du dispositif de ses écritures, malgré cette demande, la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la MACIF Loir Bretagne à lui régler la somme de 292 627,13 euros. La cour ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions au visa de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la CNRACL ne peut solliciter une modification de l'évaluation de ce poste de préjudice qui a été définitivement évalué par le juge de première instance.

Au titre du poste de perte de gains professionnels futurs, le jugement a retenu après imputation de la rente invalidité et de la pension anticipée versée par la CNRACL à hauteur de 18 000,72 euros par an une perte résiduelle de 9 647,67 euros et a limité la période de perte de gains professionnels à 59 mois soit du 1er mai 2016 au 1er avril. La CNRACL peut ainsi prétendre à la somme de 88 503,54 euros au titre de perte de gains professionnels futurs pour la période considérée.

Elle peut prétendre ensuite à la somme de 25 000 euros au titre de l'incidence professionnelle fixée par le jugement et enfin à la somme de 70 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent évalué par le jugement à cette somme soit au total à la somme de 183 503,54 euros. Le jugement qui a retenu une créance de 292 627,13 euros sera ainsi réformé.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Les parties seront déboutées de leur demande à ce titre.

La CNRACL sera condamnée aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe :

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société MACIF Loir Bretagne à verser à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales la somme de 292 627,13 euros ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société MACIF Loir Bretagne à verser à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales la somme de 183 503,54 euros  ;

Condamne la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/07625
Date de la décision : 15/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-15;19.07625 ?
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