La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2023 | FRANCE | N°19/07587

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 15 février 2023, 19/07587


5ème Chambre





ARRÊT N°-63



N° RG 19/07587 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QIU7













Mme [K] [I]



C/



M. [B] [Y]

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDI CAUX

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie

exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseu...

5ème Chambre

ARRÊT N°-63

N° RG 19/07587 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QIU7

Mme [K] [I]

C/

M. [B] [Y]

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDI CAUX

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Décembre 2022

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 15 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [K] [I]

née le [Date naissance 4] 1975 à [Localité 5]

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Dominique CARTRON de la SAS CARTRON AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Monsieur [B] [Y]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Localité 10]

Représenté par Me Isabelle ANGUIS de la SELARL ARVOR AVOCATS ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDI CAUX Agissant par son Président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 7]

Représentée par Me Perrine DELVILLE de la SELARL CABINET BARTHOMEUF, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Olivier SAUMON, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Organisme CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE ayant fait l'objet des significations prévues par les articles 902 et 911 du code de procédure civile par remise de l'acte à personne habilitée à le recevoir, n'ayant pas constitué avocat

[Adresse 1]

[Localité 6]

Le 30 avril 2006, Mme [K] [I] a été victime d'une chute lui ayant occasionné une fracture bimalléolaire de la cheville droite. Elle a été opérée au Centre hospitalier de [Localité 10] par le docteur [U] qui a procédé à la pose d'un matériel d'ostéosynthèse fait de deux vis obliques sur la malléole interne et d'une plaque maintenue par vis sur la malléole externe.

Devant les douleurs présentées par Mme [I], le docteur [U] a posé un diagnostic d'algodystrophie.

Le 15 novembre 2016, le docteur [U] a enlevé le matériel d'ostéosynthèse.

Cette ablation a été suivie d'une rééducation et de complications se manifestant notamment par la persistance de douleurs et d'une raideur.

Le 7 février 2007, une radiographie est réalisée et a révélé la présence d'un corps étranger métallique dans la malléole externe.

Le 10 mai 2007 après une scintigraphie, le docteur [E] a évoqué une composante algoneurodystrophique en phase chaude.

Le 7 novembre 2008, le docteur [B] [Y] a procédé à la clinique de [Localité 10] Sud à l'ablation de la mèche cassée dans la malléole externe droite, laissée par le chirurgien.

Le 8 décembre 2009, Mme [I] a saisi la Commission de Conciliation et d'Indemnisation des Accidents Médicaux. Le rapport de l'expert désigné par la présidente de cette commission a conclu qu'elle avait été victime d'un accident médical non fautif et révélé un défaut d'information imputable au Centre hospitalier de [Localité 10].

En 2014, il a été diagnostiqué chez la patiente une lésion du nerf cutané dorsal médial. Le 17 juin 2015, il a été mis en évidence une rupture du nerf musculo-cutané à hauteur de la cheville.

Par ordonnance du président du tribunal administratif de Rennes du 7 mars 2016, Mme [I] a obtenu la désignation d'un expert.

Par ordonnance du 7 juillet 2016, les opérations d'expertise ont été étendues au docteur [Y].

L'expert a déposé son rapport en mars 2017, concluant qu'aucune faute n'avait été commise dans la prise en charge de Mme [I].

Par actes d'huissier de justice des 2, 3 et 4 mai 2018, Mme [I] a fait citer devant le tribunal de Quimper le docteur [Y], l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) et la CPAM du Finistère afin d'obtenir indemnisation de ses préjudices.

Par jugement en date du 24 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Quimper a :

- rejeté l'ensemble des demandes formées par Mme [K] [I],

- condamné Mme [K] [I] à verser à M. [B] [Y] une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé les dépens à sa charge.

Le 21 novembre 2019, Mme [K] [I] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 15 septembre 2022, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Quimper du 24 septembre 2019 et, statuant à nouveau :

- déclarer le docteur [Y] responsable pour faute médicale de l'accident dont elle a été victime et pour manquement au devoir d'information,

- condamner le docteur [Y] à lui payer la somme de 64 438,27 euros en réparation des préjudices corporels subis,

- condamner le docteur [Y] à lui payer la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi du fait d'un défaut d'information,

- juger que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance, les intérêts échus un an après cette date viendront s'ajouter au capital pour porter à leur tour intérêts, et ce à chaque échéance annuelle, tel qu'il ressort des dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Subsidiairement :

- juger que les conséquences dommageables de cet accident médical seront réparées au titre de la solidarité nationale par l'ONIAM,

- condamner l'ONIAM au paiement de la somme de 64 438,27 euros en réparation des préjudices corporels subis du fait de cet accident avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance, les intérêts échus un an après cette date viendront s'ajouter au capital pour porter à leur tour intérêts, et ce à chaque échéance annuelle, tel qu'il ressort des dispositions de l'article 1343-2 du Code civil,

- condamner le docteur [Y] à lui payer la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi du fait d'un défaut d'information,

Très subsidiairement :

- ordonner un complément d'expertise ou une nouvelle expertise d'analyse des causes de l'accident médical et de ses conséquences médico-légales,

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la CPAM du Finistère,

- condamner le docteur [Y] ou à défaut l'ONIAM au paiement d'une indemnité de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le docteur [Y] ou à défaut l'ONIAM au paiement des entiers dépens, comprenant les frais de l'expertise judiciaire, les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par maître Dominique Cartron, avocat au Barreau de Rennes membre de la société d'avocats Dominique Cartron conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 9 mars 2020, M. [Y] demande à la cour de :

Au principal :

- rejeter la demande d'expertise formulée par Mme [K] [I],

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Quimper du 24 septembre 2019 en toutes ses dispositions,

- y ajoutant, condamner Mme [K] [I] à lui verser une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [K] [I] aux dépens,

Subsidiairement

- dire qu'il ne peut être responsable des séquelles de la fracture et de l'algodystrophie,

- constater que l'essentiel du dommage de Mme [K] [I] est constitué par les séquelles de la fracture et de I'algodystrophie,

- en conséquence, ramener I'indemnisation à la seule fraction imputable, et ramener les montants alloués à de plus justes proportions.

Par dernières conclusions notifiées le 6 février 2020, l'ONIAM demande à la cour de :

- dire et juger que les complications présentées par Mme [K] [I] suite à l'intervention du 30 avril 2006 ne sont pas anormales au regard de son état de santé et de l'évolution prévisible de celui-ci,

- dire et juger que le docteur [Y] a commis une faute en opérant Mme [K] [I] le 7 novembre 2008,

A titre subsidiaire si le tribunal refusait de retenir une faute à l'encontre du docteur [Y] :

- dire et juger que les complications présentées par Mme [K] [I] suite à l'intervention du 7 novembre 2008 ne sont pas anormales au regard de son état de santé et de l'évolution prévisible de celui-ci,

En conséquence et en toutes hypothèses :

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Quimper du 24 septembre 2019,

- débouter Mme [K] [I] de sa demande d'expertise et de toutes autres demandes,

- débouter tout tiers payeur de ses demandes en ce qu'elles seraient dirigées contre lui,

- condamner la partie succombant aux dépens.

La CPAM du Finistère n'a pas constitué avocat dans le délai prescrit. La déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appelant ont été signifiées à une personne habilitée le 20 décembre 2019.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- A titre principal.

Au soutien de son appel, Mme [I] conteste la motivation des premiers juges.

Elle indique que le geste chirurgical du 7 novembre 2008 n'avait pas d'utilité véritable. Elle estime que cette indication opératoire posée par M. [Y] n'avait été accompagnée d'aucun avis de médecin spécialisé en psychiatrie si la réalisation de l'acte était motivée par son état psychologique.

Elle précise que le contexte d'algodystrophie constituait une contre-indication à l'intervention chirurgicale.

Mme [I] écrit que M. [Y] a accédé à sa demande d'intervention chirurgicale alors qu'il savait que celle-ci était inutile.

Elle affirme que le geste du 7 novembre 2008 est à l'origine d'une lésion du nerf musculo-cutané. Elle fait état de symptômes qui sont apparus après le 7 novembre 2008 et qui se sont intensifiés jusqu'en 2015, date à laquelle le diagnostic a été posé et un traitement instauré.

Elle expose qu'aucun élément du dossier ne permet de démontrer que M. [Y] l'a informée des risques afférents à l'intervention de l'ablation du matériel oublié.

En réponse, M. [Y] explique qu'il a opéré Mme [I] pour enlever le fragment de mèche sur sa demande.

Il signale qu'au 12 décembre 2008, Mme [I] n'avait plus mal et présentait un manque d'extension.

Il rappelle les différentes consultations médicales au bénéfice de Mme [I].

Il conteste toute faute. Concernant l'opération, si le gain fonctionnel n'était pas certain, il précise que le gain psychologique était évident pour Mme [I] qui n'acceptait pas la présence d'un corps étranger.

Il discute l'affirmation de l'appelante selon laquelle le contexte d'algodystrophie contre-indiquait une intervention chirurgicale.

M. [Y] expose que Mme [I] a été préalablement informée, par les deux chirurgiens qu'elle avait consultés, que le fragment de vis n'était pas impliqué dans ses douleurs. Il précise qu'il a informé Mme [I] de la même façon. Il estime qu'il n'existe pas de manquement à l'obligation d'information de sa part.

Il fait valoir que l'expert n'a retenu aucune maladresse ni atteinte directe de sa part. Il rappelle que le site à opérer avait subi deux chirurgies préalables avec des remaniements cicatriciels inévitables. Il signale que Mme [I] n'a pas contesté devant l'expert la qualification d'aléa thérapeutique retenu par ce dernier. Il souligne la variabilité du trajet du nerf d'une personne à une autre.

Ill prétend qu'il n'existe pas de lien de causalité avéré entre l'intervention du 7 novembre 2008 et la lésion du nerf musculo-cutané.

L'ONIAM rappelle sa mission au titre de la solidarité nationale telle que définie aux articles L 1142-1 et suivants et L 1142-22 et suivants du code de la santé publique.

Il considère que les conditions de son intervention ne sont pas réunies.

Il explique que l'algodystrophie relève d'un état antérieur et est très fréquente au décours de traumatisme.

Pour lui, l'ablation d'un résidu de mèche est fautive et est à l'origine des troubles sensitifs et moteurs au pied droit. Il soutient que l'ablation de ce matériel n'était pas nécessaire et que les troubles sensitifs et moteurs au niveau du pied sont apparus après l'opération.

À titre subsidiaire, l'ONIAM indique que la complication survenue à la suite de l'intervention litigieuse ne peut être considérée comme anormale.

Il rappelle que les tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime ne peuvent exercer contre lui le recours subrogatoire prévu à l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale.

- Sur l'opération.

Selon l'article L 1142-1 I du code de la santé publique, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

La charge de la preuve de cette faute pèse sur Mme [I].

Selon Mme [I], l'indication opératoire est fautive.

Or des pièces du dossier, il résulte que l'opération critiquée du 7 novembre 2008 a eu lieu sur demande voire insistance de Mme [I].

Ainsi le médecin traitant de Mme [I] a écrit à M. [Y] en ces termes : 'si tu pouvais en faire l'ablation, je pense qu'à tout point de vue, elle serait grandement soulagée et dès lors on aurait je l'espère des progrès rapildes.

Le 2 octobre 2008, M. [Y] a répondu à ce médecin traitant comme suit : 'Mme [I] désire qu'on enlève son fragment de mèche, mais je ne suis pas sûr que cela améliore beaucoup ses douleurs'.

L'expert désigné par la Commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux a conclu comme suit :

(...) Si on doit classer ces différentes causes à l'origine du dommage, on peut dire avec certitude que l'essentiel de la douleur et de la raideur de la cheville de Mme [I] est en rapport avec une algodystrophie sévère, que la fracture elle-même a pu participer très partiellement à cet état et que la mèche cassée n'est pas en cause dans le dommage actuel excepté en ce qui concerne les conséquences psychologiques puisque Mme [I] a été très affectée par cette notion de matériel cassé sans avoir été mise au courant.

L'expert psychologue, qui a examiné Mme [I] en mai 2014, a noté que : 'il semble que seul, le médecin traitant de Mme [I], qui préconise à juste titre le retrait du matériel -il a lieu en novembre 2008- ait perçu les conséquences traumatiques pour sa patiente, de ce corps étranger à l'intérieur du corps, potentiellement anxiogène, persécutant et susceptible d'enkystement au sens propre et figuré. Mme [I] dira le soulagement ressenti aussitôt après l'opération'.

L'expert judiciaire a écrit dans son rapport : 'la revue de la littérature médicale (...) concernant les ablations de matériel confirme que l'indication de l'intervention chirurgicale ne contrevient pas aux règles actuelles de la science. Il s'agit d'une indication de confort qu'on ne peut pas lui refuser à Mme [I] en l'absence de contre-indication physique valable. (...) Il n'y a pas dans la littérature médicale consultée une évocation de près ou de loin d'une nécessité d'une évaluation psychiatrique préalable'.

Mme [I] ne peut ainsi pas reprocher à M. [Y] d'avoir accéder à sa demande et ce d'autant plus qu'elle a indiqué à l'expert avoir été soulagée par l'ablation du matériel étranger.

Le reproche d'absence d'examen psychiatrique préalable à l'opération litigieuse est inopérant puisqu'elle ne présentait pas de pathologie mentale et ce d'autant plus que cet examen psychiatrique n'est pas nécessaire comme l'a indiqué l'expert.

Mme [I] ne peut pas plus invoquer le contexte de l'algodystrophie puisqu'au moment de l'opération, l'algodystrophie était en phase froide séquellaire comme l'indique l'expert judiciaire.

Ainsi l'indication opératoire ne peut être considérée comme fautive.

Après l'opération, M. [Y] a constaté l'absence de douleur lors de la consultation du 12 juin 2009.

Le 9 octobre 2009, le docteur [M] [F], neurologue, a noté la disparition de la douleur après l'opération et a précisé qu'il existe 'un tremblement du pied lors des efforts avec un petit manque de sensibilité'. Sa conclusion est la suivante : je pense qu'il s'agit plus d'un trouble proprioceptif de sa cheville droite secondaire à l'immobilisation et à l'algodystrophie.

Les douleurs ont été mentionnées dans un certificat du 5 novembre 2009.

A été mise en évidence en 2015 une rupture du nerf musculocutané à hauteur de la cheville en lieu et place du névrome du nerf musculocutané

Selon l'expert judiciaire, après l'ablation du corps étranger, sont apparus des troubles sensitifs et des troubles moteurs au niveau du pied qui n'ont jamais existé auparavant. Il signale une maturation lente de la symptomatologie. Il précise que 'l'atteinte de la branche cutanée du musculocutané est donc certainement en relation ou la conséquence de l'intervention de novembre 2008. L'expert n'est donc pas certain sur la cause de cette atteinte du nerf musculocutané ni de son imputabilité à M. [Y].

En outre, de l'expertise il résulte que :

- le compte rendu neurologique du 9 octobre 2009 n'a pas mis en évidence de lésion nerveuse,

- l'expertise diligentée par la Commission de conciliation d'indemnisation des accidents médicaux de 2010 ne mentionne aucun trouble neurologique,

- de 2011 à 2013, aucun document médical ne fait état de trouble neurologique,

- l'expertise psychologique de 2014 relate des douleurs mais pas de troubles neurologiques,

- à la consultation du 18 juillet 2014 est évoqué un névrome de la cicatrice externe de la cheville.

Ainsi le lien entre l'intervention du 7 novembre 2008 et la lésion du nerf n'est pas certain.

De plus, M. [G] a précisé que l'ablation de matériel d'osteosynthèse consiste à intervenir sur un site qui a déjà fait l'objet d'un traumatisme et d' intervention chirurgicale préalable, qui sont autant d'agressions pour l'os que les tissus avoisinants.

L'expert a également précisé qu'il existe des variantes anatomiques pour la perforation de la branche cutanée du nerf musculocutané de l'aponévrose jambière qui peuvent également favoriser une lésion nerveuse indépendamment de l'intervention.

En outre il convient de souligner la variabilité du nerf d'une personne à une autre (variabilité qui n'est pas contredite par Mme [I] par des documents objectifs).

Or la jurisprudence retient que l'atteinte portée, par un chirurgien à un organe ou un tissu que son intervention n'impliquait pas, est fautive, en l'absence de preuve, qui lui incombe d'une anomalie rendant l'atteinte inévitable ou de la survenance d'un risque inhérent à cette intervention, qui ne pouvant être maîtrisée relève de l'aléa thérapeutique.

Ainsi la responsabilité médicale de M. [Y] ne peut être retenue sans qu'il ne soit besoin d'ordonner un complément d'expertise ou une nouvelle expertise.

Le jugement est confirmé à ce titre.

- Sur l'obligation d'information.

Devant l'expert, Mme [I] a déclaré : le 1er octobre 2008, mon nouveau médecin le docteur [P] décide de m'envoyer voir le docteur [Y] chirurgien pour avoir son avis et décide de m'opérer mais me prévient que ce n'est pas sans risque ; cette déclaration suppose que Mme [I] a reçu l'information nécessaire.

Aucun manquement ne peut être reproché à M. [Y] et ce d'autant plus que le lien entre l'intervention du 7 novembre 2008 et la lésion du nerf musculocutané n'est pas démontré.

Le jugement est confirmé à ce titre.

- Sur l'ONIAM.

Au visa de l'article L 1142-1 II du code de la santé publique, lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Même si l'expert a retenu un aléa thérapeutique, il a été dit que l'accident médical n'est pas établi.

À défaut de déterminer la cause de la lésion sur le nerf musculocutané, Mme [I] est déboutée de ses demandes dirigées contre l'ONIAM.

Le jugement est confirmé à ce titre.

- Sur les autres demandes.

Succombant en appel, Mme [I] est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles et est condamnée à payer à M. [Y] la somme de 3 000 euros à M. [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens étant par ailleurs précisé que les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Dit n'y avoir lieu à complément d'expertise ou nouvelle expertise ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [I] de sa demande en frais irrépétibles ;

Condamne Mme [I] à payer à M. [Y] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [I] aux dépens.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/07587
Date de la décision : 15/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-15;19.07587 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award