La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2023 | FRANCE | N°19/07586

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 15 février 2023, 19/07586


5ème Chambre





ARRÊT N°-62



N° RG 19/07586 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QIUS













Mme [W] [R]



C/



Mme [V] [G]

Mme [I] [G]

M. [L] [G]



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée



le :



à :



r>






RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseil...

5ème Chambre

ARRÊT N°-62

N° RG 19/07586 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QIUS

Mme [W] [R]

C/

Mme [V] [G]

Mme [I] [G]

M. [L] [G]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Décembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [W] [R]

née le 22 Juin 1951 à [Localité 7]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Anne-Marie L'HERROU-CORRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/013588 du 29/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

INTIMÉS :

Madame [V] [G]

née le 31 Décembre 1977 à [Localité 9]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Ronan TIGREAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

Madame [I] [G]

née le 30 Septembre 1980 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Ronan TIGREAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

Monsieur [L] [G] de nationalité française, représenté par Madame [V] [G], sa soeur, en sa qualité de tutrice suivant jugement du Tribunal d'Instance de BREST en date du 13 avril 2015

né le 16 Août 1974 à [Localité 9]

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représenté par Me Ronan TIGREAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

M. [N] [G], né le 2 octobre 1951, en son vivant maçon, demeurant à [Adresse 10], est décédé le 22 juillet 2017, laissant pour lui succéder :

- M. [L] [G], son fils,

- Mme [V] [G], sa fille,

- Mme [I] [G], sa fille,

issus de son union avec Mme [W] [Z], dont le divorce a été prononcé par le tribunal de grande instance de Brest le 4 février 1988.

M. [N] [G] vivait avec Mme [W] [R].

Par testament olographe du 14 avril 2006, il a institué sa compagne comme légataire universelle de la quotité disponible de tous les biens dépendant de sa succession.

Le 4 juillet 2007, M. [N] [G] a souscrit un contrat d'assurance-vie Prévi-Options auprès de la société Suravenir, moyennant paiement d'un versement initial de 12 200 euros et d'un versement exceptionnel de 16 400 euros, à la date du 8 septembre 2016.

Aux termes d'une déclaration de renonciation enregistrée auprès du greffe du tribunal de grande instance de Brest le 1er février 2018, Mme [W] [R] a renoncé purement et simplement à la succession.

Par acte d'huissier du 13 août 2018, les enfants du défunt ont fait assigner Mme [R] devant le tribunal de grande instance de Brest.

Par jugement du 13 novembre 2019, le tribunal a :

- dit que la prime versée le 8 septembre 2016 pour la somme de 16 400 euros présentait un caractère manifestement exagéré au regard des facultés de M. [N] [G],

- condamné Mme [W] [R] à verser aux consorts [G] la somme de 16 400 euros,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné Mme [W] [R] aux dépens,

- débouté les parties de toutes autres demandes plus amples et contraires.

Le 21 novembre 2019, Mme [W] [R] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 28 janvier 2020, elle demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

- réformer le jugement du tribunal de grande instance de Brest du 13 novembre 2019 en ce qu'il a dit que la prime versée le 8 septembre 2016 pour la somme de 16 400 euros présentait un caractère manifestement exagéré au regard des facultés de M. [N] [G] et l'a condamnée à verser aux consorts [G] la somme de 16 400 euros,

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus et dire qu'elle conservera le bénéfice intégral de l'assurance-vie lui revenant,

Et statuant à nouveau,

- dire sans fondement légal la demande de réintégration à la succession des

primes d'assurance-vie,

- débouter les consorts [G] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- déclarer la demande des consorts [G] contraire à l'équité,

- condamner les consorts [G] pour man'uvres frauduleuses,

- condamner les consorts [G] solidairement et indivisément à lui verser une somme de 2 000 euros chacun, à l'exception de M. [L] [G],

- condamner les consorts [G] à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les mêmes aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 21 janvier 2020, les consorts [G] demandent à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Brest,

- condamner Mme [W] [R] à verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner Mme [W] [R] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au soutien de son appel, Mme [R] signale que les consorts [G] ne visent aucun texte au fondement de leur demande.

Elle explique que les fonds versés par M. [G] proviennent de la succession de sa mère. Elle souligne que les enfants de M. [G] n'ont jamais été amenés à contribuer pour leur père qui percevait une rente d'invalidité en 2007.

Elle fait état de l'absence de relation entre M. [G] et ses deux filles depuis 18 ans.

Elle expose que M. [G], malgré ses petits revenus, a réussi à acquérir une parcelle de terre agricole au Trehou, qu'elle a participé à la vie commune.

Elle indique qu'elle a utilisé une partie de la somme provenant de l'assurance-vie.

Elle signale qu'elle a, sur les conseils du notaire, et après accord des enfants de M. [G], renoncé à la succession de M. [G], alors que ce dernier l'avait instituée légataire universelle. Elle avance que les enfants de M. [G] ont perçu chacun une somme de 9 935 euros de la succession.

Elle affirme qu'il avait été convenu qu'elle conserverait le bénéfice de l'assurance-vie et que les enfants de M. [G] lui céderaient la moitié du terrain acquis en indivision.

Elle estime qu'elle a été trompée par les enfants de M. [G] qui ont, par la suite, intenté une action pour contester les primes de l'assurance-vie.

Elle indique que le notaire n'a pas attiré son intention sur les conséquences de sa renonciation à la succession.

Elle fait valoir que la mauvaise foi des enfants [G] ne saurait être consacrée et que le bénéfice de la présente procédure ne saurait profiter à des enfants dont les manoeuvres dolosives ne sauraient échapper à la sagacité du juge.

Elle soutient que le contexte de la vie de M. [G] et ses motivations honorables militent pour que l'équité soit rétablie.

En réponse, Mme [V] [G], Mme [I] [G] et M. [L] [G], représenté par Mme [V] [G] en qualité de tutrice, affirment qu'au regard des facultés de M. [N] [G] les primes versées sont manifestement exagérées.

Ils rappellent que M. [N] [G] percevait à compter du 1er décembre 2005 une pension d'invalidité de 522,63 euros par mois. Ils considèrent que l'utilité du contrat d'assurance-vie est relative et que le patrimoine de leur père s'est trouvé amputé d'une portion manifestement exagérée alors que la seule bénéficiaire des capitaux était sa compagne.

Ils contestent les propos de Mme [R] sur l'origine des fonds et sur le mode de vie de leur père et signalent l'abandon par ce dernier du domicile conjugal en 1986.

Ils arguent de faux les propos de Mme [R] sur les manoeuvres qu'ils auraient employées pour la faire renoncer à la succession.

Au visa de l'article L 132-13 du code des assurances, le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis, ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant. Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées au regard de ses facultés.

L'appréciation de l'excès manifeste des primes s'effectue au jour du versement et repose sur les critères d'âge et de la situation familiale et patrimoniale du souscripteur ainsi qu'à l'utilité pour lui des versements effectués sans qu'il soit tenu compte à ce stade de la situation du bénéficiaire du placement. Le patrimoine à prendre en considération s'entend de l'ensemble des biens composant celui-ci et non seulement les capitaux disponibles. Ainsi, l'ensemble de l'actif du patrimoine du souscripteur du contrat au moment du versement litigieux doit être rapporté pour démontrer cet excès manifeste.

L'âge avancé du souscripteur associé à un montant élevé de prime peut caractériser l'excès. De même, l'excès peut provenir d'une disproportion des primes par rapport au patrimoine du souscripteur.

Il appartient à celui qui exige la réintégration des primes à la succession de faire la démonstration du caractère manifestement exagéré de chacune de celles qu'il conteste au moment de leur versement.

En l'espèce, il résulte des pièces produites par les consorts [G] que M. [N] [G], né le 2 octobre 1951, était âgé :

- de moins de 56 ans au moment du versement de la première prime de 12 200 euros le 4 juillet 2007 sur le contrat Prévi-Options auprès de la société d'assurance Suravenir.

- de moins de 65 ans au moment du versement de la deuxième prime de 16 400 euros le 8 septembre 2016 sur ce même contrat.

Le premier versement d'un montant de 12 200 euros ne fait pas l'objet d'une contestation devant la cour, le tribunal de grande instance de Brest ayant jugé que ce versement n'étaient pas manifestement excessif au regard des facultés de M. [N] [G], souscripteur du contrat d'assurance-vie.

Le second versement a été réalisé moins d'un an avant le décès du souscripteur. Les pièces du dossier ne permettent pas d'établir l'origine des fonds de ce versement.

Des attestations versées au dossier, il résulte que M. [N] [G] était malade au moment du versement de la somme de 16 400 euros, de sorte que l'utilité de ce placement pour M. [G] est inexistant.

En 2016, la seule ressource de M. [N] [G] était constituée d'une pension d'invalidité. Au regard de ses déclarations d'impôt sur le revenu, M. [G] a perçu une somme de 11 475 euros en 2016 (soit 956,25 euros par mois) et une somme de 11 442 euros en 2017 (soit 953,50 euros par mois). M. [N] [G] disposait d'une épargne de 780,35 euros et 6 358,43 euros à la Caisse d'Epargne, et de 101,47 euros au Crédit Mutuel.

C'est par une juste appréciation que les premiers juges ont précisé que la somme de 16 400 euros représentaient plus de 2 ans et demi des ressources de M. [G] et plus d'un tiers de son patrimoine.

Cette prime est donc manifestement exagérée.

Mme [R] ne prouve pas la mauvaise foi des consorts [G].

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Succombant en appel, Mme [R] est déboutée de sa demande en dommages et intérêts ainsi qu'en frais irrépétibles ; elle est condamnée à supporter les dépens d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile. Les consorts [G] sont déboutés de cette demande.

Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [R] de sa demande en dommages et intérêts et de sa demande en frais irrépétibles ;

Déboute les consorts [G] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [R] aux dépens.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/07586
Date de la décision : 15/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-15;19.07586 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award