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15/02/2023 | FRANCE | N°19/07459

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 15 février 2023, 19/07459


5ème Chambre





ARRÊT N°-60



N° RG 19/07459 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QICU













M. [E] [D]



C/



AMA CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE-PAYS DE LA LOIRE

Organisme REGIME SOCIAL DES INDEPENDANTS (RSI)

Organisme CPAM D'ILLE ET VILAINE



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée









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Copie exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAM...

5ème Chambre

ARRÊT N°-60

N° RG 19/07459 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QICU

M. [E] [D]

C/

AMA CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE-PAYS DE LA LOIRE

Organisme REGIME SOCIAL DES INDEPENDANTS (RSI)

Organisme CPAM D'ILLE ET VILAINE

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 Décembre 2022

ARRÊT :

Rendu par défaut, prononcé publiquement le 15 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [E] [D]

né le [Date naissance 2] 1954 à

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Dominique CARTRON de la SAS CARTRON AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉES :

AMA CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE-PAYS DE LA LOIRE dite GROUPAMA LOIRE BRETAGNE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Organisme REGIME SOCIAL DES INDEPENDANTS (RSI)ayant fait l'objet des significations prévues par les articles 902 et 911 du code de procédure civile par remise de l'acte à personne habilitée, n'ayant pas constitué avocat

[Adresse 1]

[Localité 5]

Organisme CPAM D'ILLE ET VILAINE ayant fait l'objet des significations prévues par les articles 902 et 911 du code de procédure civile par remise de l'acte à personne habilitée à le recevoir, n'ayant pas constitué avocat

[Adresse 6]

[Localité 5]

Le 29 avril 2009, M. [E] [D], travailleur indépendant gérant de l'EURL Médipro spécialisée dans la vente de trousses de premiers secours aux professionnels non médicaux, a chuté de plusieurs mètres de hauteur, au travers d'une trappe laissée ouverte dans l'établissement d'un client qu'il visitait.

Victime d'une rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche, il a été placé en arrêt de travail jusqu'au 27 février 2010.

Ce sinistre a été déclaré auprès de la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricoles, (ci-après dénommée CRAMA), assureur de responsabilité civile du client de M. [E] [D], dont le droit à indemnisation intégrale n'a pas été contesté. Plusieurs provisions lui ont ainsi été versées, à titre d'avance sur l'indemnisation définitive de son préjudice, tandis qu'une mesure d'expertise médicale a été mise en 'uvre.

Le rapport d'expertise définitif a été déposé le 21 mai 2010, fixant la date de consolidation au 27 février 2010, date à laquelle M. [E] [D] a également pu reprendre son activité professionnelle.

Des pourparlers ayant été engagés entre les parties, plusieurs procès-verbaux transactionnels ont été régularisés, tant sur l'indemnisation des préjudices extra-patrimoniaux que sur celle des préjudices patrimoniaux.

Toutefois, considérant ne pas avoir obtenu complète satisfaction de ses demandes indemnitaires et par exploits en date du 19 mars 2015, M. [E] [D] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Rennes la société Groupama et la CPAM d'Ille-et-Vilaine aux fins d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices. L'instance a été enrôlée sous le numéro de RG n° 15/02216.

Par ordonnance rendue le 21 avril 2016, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'expertise comptable et financière et a commis pour y procéder M. [S] [X], expert-comptable.

Par acte délivré le 12 juillet 2016, M. [E] [D] a fait assigner la caisse RSI Bretagne aux fins de lui voir déclaré commun et opposable, le jugement à intervenir. L'instance a été enrôlée sous le numéro de RG

n° 16/04559.

La jonction de l'affaire n° 16/04559 avec l'affaire n° 15/02216 sous le numéro de RG n° 15/02216 a été prononcée par mention au dossier le 15 décembre 2016.

M. [S] [X] a établi un rapport d'expertise le 28 décembre 2017.

Par jugement en date du 8 octobre 2019, le tribunal a :

- reçu la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricoles Loire Bretagne dite Groupama Loire Bretagne en son intervention volontaire aux lieu et place de la société Groupama,

- déclaré irrecevables les demandes formées par M. [E] [D] à l'encontre de la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricoles Loire Bretagne dite Groupama Loire Bretagne tendant à l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels et de ses dépenses de santé actuelles résultant de l'accident dont il a été victime le 29 avril 2009,

- déclaré recevables les demandes formées par M. [E] [D] à l'encontre de la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricoles Loire Bretagne dite Groupama Loire Bretagne tendant à l'indemnisation de son incidence professionnelle et de sa perte patrimoniale résultant de l'accident dont il a été victime le 29 avril 2009,

- débouté M. [E] [D] de ses demandes tendant à l'indemnisation de son incidence professionnelle et de sa perte patrimoniale résultant de l'accident dont il a été victime le 29 avril 2009,

- condamné M. [E] [D] à verser la somme de 1 500 euros à la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricoles Loire Bretagne dite Groupama Loire Bretagne sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [E] [D] aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

- dit n'y avoir lieu à déclarer le jugement commun et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie et au RSI.

Le 14 novembre 2019, M. [E] [D] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 11 juin 2020, il demande à la cour de :

- confirmer partiellement le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Rennes en ce qu'il a :

* déclaré recevables ses demandes à l'encontre de Groupama Loire Bretagne tendant à l'indemnisation de son incidence professionnelle et de sa perte patrimoniale résultant de l'accident dont il avait été victime, le 29 avril 2009,

- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il :

* a déclaré irrecevables ses demandes à l'encontre de Groupama Loire Bretagne tendant à l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels et de ses dépenses de santé actuelles résultant de l'accident dont il avait été victime, le 29 avril 2009,

* l'a débouté de ses demandes tendant à l'indemnisation de son incidence professionnelle et de sa perte patrimoniale résultant de l'accident dont il avait été victime, le 29 avril 2009,

* l'a condamné à verser la somme de 1 500 euros à Groupama Loire Bretagne sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

En conséquence,

- déclarer la demande de condamnation formée par la CRAMA à hauteur de 1 047 euros outre intérêts au taux légal et capitalisation irrecevable,

- le déclarer recevable et bien-fondé en ses demandes, fins et conclusions,

- prononcer la nullité du procès-verbal de transaction en date du 5 juin 2011 et, à défaut, juger qu'il ne constitue aucunement une offre définitive et non provisionnelle,

- fixer à la somme de 171 981,20 euros son préjudice patrimonial sous réserve du calcul de l'incidence sur les droits à retraite,

Subsidiairement :

- fixer à la somme de 67 214,20 euros son préjudice patrimonial sous réserve du calcul de l'incidence sur les droits à retraite,

- condamner la société Groupama Loire Bretagne au paiement de ladite somme, outre les intérêts au taux légal capitalisés à compter de l'assignation du 19 mars 2015 sous déduction des provisions versées et des créances de la CPAM d'Ille-et-Vilaine,

- rejeter l'ensemble des demandes formées à son encontre,

- condamner la société Groupama Loire Bretagne au paiement d'une indemnité de 4 000 sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer le jugement à intervenir commun et opposable à la CPAM d'Ille- et-Vilaine et au RSI,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner la société Groupama Loire Bretagne aux dépens de l'instance, comprenant l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L111-8 du code des procédures civiles d'exécution, conformément aux dispositions de l'article R 631-4 du code de la consommation et autoriser Maître Dominique Cartron, avocat au barreau de Rennes, membre de la société d'avocats Cartron-L'Hostis, à les recouvrer en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 16 août 2022, la société CRAMA Bretagne Pays de la Loire dite Groupama Loire Bretagne demande à la cour de :

A titre principal :

- juger irrecevables toutes prétentions de M. [E] [D] compte-tenu de l'autorité de chose jugée attachée aux transactions des 24 août 2010, 2 décembre 2010 et 5 juin 2011, en l'absence d'aggravation de son état de santé postérieur à sa consolidation,

A titre subsidiaire :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et débouter M. [E] [D] de ses prétentions indemnitaires,

A titre plus subsidiaire (pour le cas d'une nullité des transactions) :

- juger que M. [E] [D] ne fait pas la preuve objective suffisante d'un lien de causalité entre l'accident, ses conséquences et la liquidation judiciaire de son entreprise et le débouter de l'ensemble des demandes, fins et prétentions,

- juger toutefois qu'il n'est pas contesté par M. [E] [D] qu'au titre de la période courante du 25 avril 2009 au 31 juillet 2011 la CRAMA est pu lui régler une somme de 46 267 euros alors que le préjudice comptable mis en évidence par l'expert judiciaire, n'excède pas 44 982 euros, soit un trop perçu de 1 047 euros,

- condamner M. [E] [D] à lui verser cette somme en restitution, avec intérêts au taux légal outre capitalisation pour compter de la notification par la CRAMA de ses conclusions en appel le 13 mars 2020,

Dans tous les cas :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a accordé à la CRAMA le bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile,

- y additer en cause d'appel en condamnant M. [E] [D] à lui verser la somme de 2 500 euros sur le même fondement,

- condamner M. [E] [D] aux entiers dépens, de 1ère instance, d'appel, compris les frais de l'expertise judiciaire.

La CPAM d'Ille-et-Vilaine n'a pas constitué avocat dans le délai prescrit. La déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appelant ont été signifiées à une personne habilitée le 13 février 2020.

Le RSI n'a pas constitué avocat dans le délai prescrit. La déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appelant ont été signifiées à l'étude le 14 février 2020.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. [D] soutient que la transaction du 5 juin 2011 est nulle car elle ne respecte pas les conditions de l'article L 211-16 du code des assurances.

Il soutient également que l'offre d'indemnisation servant de base à celle-ci est incomplète et contrevient aux dispositions de l'article R 211-40 du même code, ne peut donc être assimilée à une offre, de sorte qu'il ne peut être considéré que les parties ont définitivement transigé.

Il entend souligner que le seul fait que la CRAMA ait présenté une nouvelle offre le 4 décembre 2014 suffit à démontrer que la somme allouée au titre des pertes de gains dans la transaction du 5 juin 2011 n'était pas définitive.

Il entend donc voir statuer sur sa demande d'indemnisation initiale, précisant qu'il ne se prévaut nullement d'une aggravation.

S'appuyant sur les conclusions d'un rapport d'expertise comptable de 2013 du cabinet Texa , il demande de fixer son préjudice patrimonial à la somme de 171 981,20 euros et subsidiairement à la somme de 67 218,20 euros.

Il fait valoir que durant son arrêt de travail, et au delà de cet arrêt, ses clients sont partis à la concurrence, ce qui a conduit à la liquidation judiciaire de son entreprise et que dès lors, le lien de causalité entre l'accident et ces difficultés économiques est établi.

Il souligne que dans un autre rapport d'expertise, M. [X] retient comme cause plausible de la liquidation judiciaire de sa société la captation de ses clients par des concurrents.

M. [D] explicite l'incidence professionnelle subie par la privation de sa situation professionnelle à 55 ans et une diminution de ses droits à retraite.

Il ajoute que la valeur patrimoniale de son entreprise a totalement disparu.

La CRAMA demande à la cour de confirmer l'irrecevabilité des demandes sur ce point de M. [D], en application de l'article 2052 du code civil et de l'autorité de chose jugée attachée à la transaction. Elle relève que les dispositions des articles L 211-16 et R 211-40 du code des assurances sont inapplicables au litige et qu'il ne peut être tiré aucune conséquence d'une offre d'indemnisation effectuée en 2014 destinée à venir en lieu et place des transactions précédentes, cette offre n'ayant pas été acceptée.

Elle s'oppose à toute indemnisation au titre d'un préjudice patrimonial supplémentaire, à défaut pour M. [D] de démontrer un lien entre les préjudices allégués et l'accident.

- sur la recevabilité des demandes

La transaction du 5 juin 2011 fait suite à une 'offre de transaction droit commun règlement définitif' présentée suite à un rapport d'expertise comptable contradictoire des cabinets Polyexpert et Texa du 15 avril 2011, et porte sur une somme de 27 064,87 euros décomposée comme suit :

- dépenses de santé actuelles : 19,20 euros

- pertes de gains professionnels actuels : 46 029 euros

- déficit fonctionnel permanent : 8 000 euros

total : 54 048,20 euros,

à déduire règlements provisionnels de 22 500 euros et 4 483,33euros.

Pour prétendre à la nullité de cette transaction, M. [D] invoque à tort les dispositions de l'article L 211-16 du code des assurances, qui prévoient :

' La victime peut, par lettre recommandée, ou par envoi recommandé électronique avec demande d'avis de réception, dénoncer la transaction dans les quinze jours de sa conclusion.

Toute clause de la transaction par laquelle la victime abandonne son droit de dénonciation est nulle.

Les dispositions ci-dessus doivent être reproduites en caractères très apparents dans l'offre de transaction et dans la transaction à peine de nullité relative de cette dernière' .

En effet, ces dispositions sont incluses dans le livre II relatif aux assurances obligatoires et plus particulièrement le titre I concernant l'assurance des véhicules terrestres à moteur, inapplicables en l'espèce, les dommages subis n'étant pas la conséquence d'un accident de la circulation.

M. [D] ne peut donc arguer d'une nullité de la transaction.

La demande formée par la CRAMA de remboursement d'une somme de

1 047 euros n'est présentée devant la cour qu'à titre subsidiaire en cas de prononcé d'une nullité de la transaction. La demande de M. [D] tendant à déclarer irrecevable une telle prétention est donc sans objet.

Les dispositions de l'article R 211-40 du code des assurances prévoyant que ' l'offre d'indemnité doit indiquer, outre les mentions exigées par l'article

L 211-16, l'évaluation de chaque chef de préjudice, les créances de chaque tiers payeur et les sommes qui reviennent au bénéficiaire', sont de même inapplicables en l'espèce puisque concernant également les procédures d'indemnisation en matière d'assurances obligatoires et notamment l'assurance des véhicules terrestres à moteur. M. [D] n'est donc pas davantage fondé à se prévaloir d'une transaction qui aurait le caractère provisionnel au motif qu'elle repose sur une offre incomplète.

Il ne peut non plus y prétendre en invoquant une nouvelle proposition d'indemnisation effectuée en 2014, modifiant le montant proposé au titre des pertes de gains alors que cette proposition tend à la signature d'un procès-verbal 'annulant et remplaçant la transaction du 5 juin 2011", signature qui n'a jamais été effective, faute d'acceptation de l'assuré. Elle est donc inopérante à remettre en cause la transaction du 5 juin 2011.

En application de l'article 2052 du code civil, les transactions ont entre les parties l'autorité de chose jugée en dernier ressort.

Il sera observé par la cour que la somme de 46 029 euros mentionnée dans la transaction, allouée au titre d'une perte de gains professionnels dits 'actuels' dans l'offre correspond exactement à la somme arrêtée par l'expertise, qui a calculé celle-ci jusqu'à fin juillet 2011, la consolidation étant toutefois fixée au 27 février 2010.

M. [D] est donc irrecevable en ses demandes d'indemnisation formées au titre de dépenses de santé actuelles, mais aussi d'une perte de gains professionnels dans les conditions arrêtées dans la transaction.

Il ne peut donc utilement présenter de demandes que pour d'éventuelles pertes de gains postérieures au 31 juillet 2011. Le jugement est infirmé en ce qu'il le déclare irrecevable en ses demandes tendant à l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels.

- sur le fond et les demandes d'indemnisation

Il est rappelé que M. [E] [D] était au moment de l'accident gérant et unique salarié de l'EURL Medi Pro, qu'il a été en arrêt de travail du 29 avril 2009 au 27 février 2010. Il a repris son activité professionnelle le 28 février 2010. M. [D] bénéficie depuis le 1er juillet 2014 d'une retraite de la sécurité sociale et d'une retraite complémentaire.

L'EURL Medi Pro a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, la date de l'état de cessation des paiements ayant été fixée au 1er septembre 2012.

Le cabinet TEXA a été de nouveau désigné pour rechercher l'existence de pertes postérieures au 31 juillet 2011.

Le rapport d'expertise comptable dressé au contradictoire du cabinet Polyexert, en date du 24 janvier 2013, procède à un calcul de la perte complémentaire de revenus de M. [D] de 2011 jusqu'à la liquidation judiciaire, puis jusqu'à sa retraite fixée en 2016 (62 ans de M. [D] né le [Date naissance 2] 1954).

Compte tenu des développements précédents, de l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, de la date de départ en retraite, la période susceptible d'être indemnisée ne saurait en tout état de cause être celle ainsi définie.

Il est relevé que les calculs du cabinet Texa sont effectués en tenant compte d'une perte de clientèle.

M. [X], expert a été désigné par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Rennes le 21 avril 2016 en vue d'une expertise comptable ordonnée en application de l'article 1843-4 du code civil.

L'expert indique ne pas disposer d'éléments relatifs aux ventes par clients sur les exercices 2011, 2012, 2013 lui permettant d'apprécier l'importance des départs clients vers les sociétés Propharm et Dermafrom. Il note aussi ne disposer d'aucun élément factuel dans le rapport du liquidateur sur les raisons de la cessation d'activité de l'EURL Medi Pro. Il souligne que dans un rapport sollicitant la clôture de la liquidation judiciaire, le liquidateur fait état de la cessation de l'activité avant la liquidation judiciaire.

S'agissant des entreprises concurrentes, M. [X] note que les recherches effectuées ne sont pas probantes, en ce que les comptes de la société Propharm font apparaître une baisse de chiffre d'affaires de 16% en 2011, une stabilisation en 2012 (-1%) et une augmentation en 2013 de 120%, que la société Dermarform créée en 2007 a été liquidée puis radiée le 1er juin 2010 et qu'il ne dispose d'aucun élément comptable de la société Europharm qui ne dépose pas ces comptes.

En conclusion, M. [X] indique que même si l'explication est plausible, il ne dispose pas d'élément permettant de confirmer ou infirmer que la mise en liquidation judiciaire de la société de M. [D] est liée au fait qu'une partie de ses clients est partie à la concurrence du fait de son arrêt d'activité.

Dans ces conditions, et à défaut pour M. [D] de produire tout autre élément probant sur ce point, il n'est pas établi avec certitude que la perte économique liée à une perte de clientèle soit la conséquence de l'accident du 29 avril 2009.

Il convient donc de débouter M. [D] de ses demandes d'indemnisation complémentaire au titre d'une perte de gains, celles-ci reposant sur les estimations arrêtées dans le rapport Texa.

S'agissant de l'incidence professionnelle, l'existence d'une perte des droits à retraite n'est pas caractérisée par M. [D] du fait de son arrêt de travail en lien avec l'accident. Il n'est pas démontré que la cessation d'activité de son entreprise, alors qu'il avait repris son activité professionnelle, est la conséquence de son handicap. Il ne peut donc prétendre à l'existence d'une incidence professionnelle.

En l'absence de preuve d'un lien de causalité entre la procédure collective dont il a fait l'objet et l'accident, la demande portant sur une perte de la valeur des parts sociales de l'EURL n'est pas davantage fondée.

La cour confirme le jugement déboutant M. [E] [D] des demandes d'indemnisation au titre d'une incidence professionnelle et d'une perte patrimoniale.

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens, sont confirmées et la cour condamne la partie appelante à payer à la CRAMA Bretagne Pays de la Loire une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt par défaut, et par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement déféré en ce qu'il déclare irrecevable la demande formée par M. [E] [D] à l'encontre de la CRAMA dite Groupama Loire Bretagne tendant à l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur le chef du jugement infirmé ;

Déclare irrecevable la demande formée par M. [E] [D] à l'encontre de la CRAMA dite Groupama Loire Bretagne tendant à l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels en ce qu'elle porte sur la période antérieure au 31 juillet 2011 ;

Déclare recevable la demande formée par M. [E] [D] à l'encontre de la CRAMA dite Groupama Loire Bretagne tendant à une indemnisation des pertes de gains professionnels futurs pour la période postérieure à la date du 31 juillet 2011 ;

Y ajoutant,

Déboute M. [E] [D] de sa demande d'indemnisation au titre des pertes de gains professionnels futurs pour la période postérieure à la date du 31 juillet 2011 ;

Condamne M. [E] [D] à payer à la CRAMA Bretagne Pays de la Loire dite Groupama Loire Bretagne la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [E] [D] aux dépens d'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/07459
Date de la décision : 15/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-15;19.07459 ?
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