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07/02/2023 | FRANCE | N°21/06141

France | France, Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre commerciale, 07 février 2023, 21/06141


3ème Chambre Commerciale





ARRÊT N° 53



N° RG 21/06141 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SCIL













S.A. .BNP PARIBAS



C/



Mme [K] [J] épouse [X]

M. [L] [X]

































Copie exécutoire délivrée



le :



à :

Me NAUDIN

Me MARION



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



C

OUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 FEVRIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Julie ROUET, lors des débats, ...

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N° 53

N° RG 21/06141 - N° Portalis DBVL-V-B7F-SCIL

S.A. .BNP PARIBAS

C/

Mme [K] [J] épouse [X]

M. [L] [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me NAUDIN

Me MARION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Lydie CHEVREL, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 14 Novembre 2022

devant Monsieur Alexis CONTAMINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° B 662 042 449, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Thomas NAUDIN de la SELARL ARVOR AVOCATS ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Madame [K] [J] épouse [X]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 7]

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentée par Me Chrystelle MARION de la SCP MARION-LEROUX-SIBILLOTTE-ENGLISH-COURCOUX, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

Monsieur [L] [X]

né le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 6]

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représenté par Me Chrystelle MARION de la SCP MARION-LEROUX-SIBILLOTTE-ENGLISH-COURCOUX, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 1er juin 2011, la société Les Bains Brasserie a souscrit auprès de la société Banque de Bretagne un contrat de prêt professionnel n°612123-42, d'un montant principal de 159.000 euros, remboursable en 84 mensualités au taux d'intérêt nominal annuel de 3,6 %.

Le même jour, M. [X] et Mme [J] épouse [X], associés et co-gérants de la société Les Bains Brasserie, se sont portés cautions solidaires de la société Les Bains Brasserie au titre de ce prêt dans la limite de la somme de 182.850 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour une durée de 108 mois.

Le 25 juillet 2013, la société Les Bains Brasserie a été placée en redressement judiciaire.

Le 29 août 2013, la société BNP Paribas, venant aux droits de la société Banque de Bretagne, (la société BNP) a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire.

Le 5 septembre 2018, la société Les Bains Brasserie a été placée en liquidation judiciaire.

Par lettre en date du 13 septembre 2018, la société BNP a actualisé la créance au titre du prêt du 1er juin 2011 au montant de 78.704,56 euros.

Le 24 septembre 2018, la société BNP a prononcé la déchéance du terme et mis en demeure M. [X] et Mme [J] d'honorer leur engagement de caution.

Le 21 janvier 2020, la société BNP a de nouveau mis en demeure M. [X] et Mme [J] d'honorer leur engagement de caution.

Le 27 mai 2020, la société BNP a assigné M. [X] et Mme [J] en paiement.

Par jugement du 13 septembre 2021, le tribunal de commerce de Saint-Brieuc a :

- Déclaré la société BNP non recevable et mal fondée en ses demandes,

- Débouté la société BNP de ses demandes au titre des engagements de caution de M. [X] et de Mme [J],

- Jugé que les cautionnements de M. [X] et de Mme [J] à l'égard de la société BNP sont disproportionnés au regard du patrimoine,

- Dit que les actes de cautionnements ne sont pas opposables aux cautions,

- Dit et jugé que la société BNP n'apporte pas la preuve d'avoir satisfait à ses obligations d'information à l'égard des cautions,

- Jugé que la banque est mal fondée dans ses demandes aux droits à intérêt,

- Débouté la société BNP de ses demandes au titre des intérêts,

- Constaté l'absence de retour à meilleure fortune des cautions,

- Débouté la société BNP de ses demandes, fins et conclusions,

- Dit que la société BNP succombe pour l'essentiel,

- Condamné la société BNP à payer à M. [X] et à Mme [J], la somme totale de 1.000 euros au titre de I'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société BNP aux entiers dépens,

- Dit et jugé les parties mal fondées en leurs demandes plus amples ou contraires au dispositif du jugement, en conséquence les en a déboutées.

La société BNP a interjeté appel le 30 septembre 2021.

Les dernières conclusions de la société BNP sont en date du 29 décembre 2021. Les dernières conclusions de M. [X] et Mme [J] sont en date du 19 octobre 2022.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 octobre 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS :

La société BNP demande à la cour de :

- Réformer le jugement en ce qu'il a :

- Déclaré la société BNP non recevable et mal fondée en ses demandes,

- Débouté la société BNP de ses demandes au titre des engagements de caution de M. [X] et de Mme [J],

- Jugé que les cautionnements de M. [X] et Mme [J] à l'égard de la société BNP sont disproportionnés au regard du patrimoine,

- Dit que les actes de cautionnement ne sont pas opposables aux cautions,

- Dit et juge que la société BNP n'apporte pas la preuve d'avoir satisfait à ses obligations d'information à l'égard des cautions,

- Jugé que la banque est mal fondée dans ses demandes aux droits à intérêt,

- Débouté la société BNP de ses demandes au titre des intérêts,

- Constaté l'absence de retour à meilleure fortune des cautions,

- Débouté la société BNP venant aux droits de la société Banque de Bretagne de ses demandes, fins et conclusions,

- Dit que la société BNP succombe pour l'essentiel,

- Condamné la société BNP à payer à M. [X] et Mme [J] la somme totale de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société BNP aux entiers dépens,

- Dit et jugé la société BNP mal fondée en ses demandes plus amples ou contraires au dispositif du jugement, en conséquence l'en débouter.

Statuant à nouveau :

- Dire et juger la société BNP, recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Dire et juger que M. [X] et Mme [J] ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, de la disproportion qu'ils invoquent,

En conséquence :

- Débouter M. [X] et Mme [J] de leur demande visant à voir déclarer la société BNP, irrecevable à se prévaloir du cautionnement litigieux en raison d'une prétendue disproportion,

- Condamner solidairement M. [X] et Mme [J] à payer à la société BNP la somme actualisée de 84.660,18 euros outre les intérêts au taux de 3,6 % l'an à compter du 3 novembre 2020 et jusqu'à parfait paiement, en leur qualité de cautions du prêt n° 612123-42 du 1er juin 2011,

A titre subsidiaire :

- Dire et juger qu'il n'existe aucune disproportion des engagements de cautions souscrits par M. [X] et Mme [J],

En conséquence :

- Débouter M. [X] et Mme [J] de leur demande visant à voir déclarer la société BNP irrecevable à se prévaloir du cautionnement litigieux en raison d'une prétendue disproportion,

- Condamner solidairement M. [X] et Mme [J] à payer à la société BNP la somme actualisée de 84.660,18 euros outre les intérêts au taux de 3,6 % l'an à compter du 3 novembre 2020 et jusqu'à parfait paiement, en leur qualité de cautions du prêt n° 612123-42 du 1er juin 2011,

A titre infiniment subsidiaire :

- Dire et juger que M. [X] et Mme [J] sont désormais en mesure de faire face à leurs engagements à l'aide de leur patrimoine,

En conséquence :

- Condamner solidairement M. [X] et Mme [J] à payer à la société BNP la somme actualisée de 84.660,18 euros outre les intérêts au taux de 3,6 % l'an à compter du 3 novembre 2020 et jusqu'à parfait paiement, en leur qualité de cautions du prêt n° 612123-42 du 1er juin 2011,

En tout état de cause :

- Débouter M. [X] et Mme [J] de leur demande visant à ce que la société BNP soit déchue du droit aux intérêts conventionnels,

- Ordonner la capitalisation des intérêts,

- Condamner in solidum M. [X] et Mme [J] à payer à la société BNP la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant de la procédure d'appel outre 2.000 euros pour les frais engagés en première instance,

- Les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. [X] et Mme [J] demandent à la cour de :

- Confirmer la décision du tribunal de commerce,

En conséquence :

- Débouter la société BNP de ses demandes à l'encontre de M. [X] et Mme [J],

- Constater la disproportion manifeste entre le patrimoine de M. [X] et Mme [J] et les engagements de cautions souscrits,

- Constater l'absence de retour à meilleure fortune

- Décharger la société BNP des cautionnements qu'elle a fait souscrire à M. [X] et Mme [J],

- Constater l'absence de production des courriers annuels d'information de la caution,

- Débouter la BNP de sa demande de condamnation aux intérêts conventionnels,

A titre subsidiaire :

- Octroyer à M. [X] et Mme [J] un report de 24 mois pour le paiement de leur condamnation,

A titre infiniment subsidiaire :

- Octroyer à M. [X] et Mme [J] un délai de 24 mois pour le paiement de leur condamnation,

En tout état de cause,

- Dire et juger que le jugement à intervenir ne sera pas revêtu de l'exécution provisoire,

- Condamner la société BNP au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société BNP aux entiers dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

DISCUSSION :

Sur la demande de la société BNP :

L'article 1134 du code civil dans sa version applicable à l'espèce dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, qu'elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise et qu'elles doivent être exécutées de bonne foi.

En outre, l'article 2288 du Code civil dispose que celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même.

En l'espèce, M. [X] et Mme [J] se sont portés cautions solidaires à l'égard de la société Les Bains Brasserie au titre du prêt n°612123-42 dans la limite de la somme de 182.850 euros.

La société Les Bains Brasserie ayant été placée en redressement judiciaire le 25 juillet 2013 puis en liquidation judiciaire le 5 septembre 2018, la demande en paiement de la société BNP auprès des cautions est donc recevable.

Sur la disproportion manifeste :

L'article L 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur du 5 août 2003 au 1er juillet 2016 et applicable en l'espèce, prévoit que le créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un cautionnement manifestement disproportionné :

Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses bien et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

C'est sur la caution que pèse la charge d'établir cette éventuelle disproportion manifeste.

Cet article n'impose pas au créancier professionnel de s'enquérir de la situation financière de la caution préalablement à la souscription de son engagement. La fiche de renseignements que les banques ont l'usage de transmettre aux futures cautions n'est, en droit, ni obligatoire ni indispensable. En revanche, en l'absence de fiche de renseignements, les éléments de preuve produits par la caution doivent être pris en compte.

Ce n'est que lorsque le cautionnement est considéré comme manifestement disproportionné au moment de sa conclusion qu'il revient au créancier professionnel d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet à nouveau de faire face à son obligation.

La fiche de renseignements remplie par la caution lie cette dernière quant aux biens et revenus qu'elle y déclare, le créancier n'ayant pas, sauf anomalie apparente, à en vérifier l'exactitude.

La disproportion manifeste de l'engagement de la caution commune en biens s'apprécie par rapport aux biens et revenus de celle-ci, sans distinction et sans qu'il y ait lieu de tenir compte du consentement exprès du conjoint donné conformément à l'article 1415 du code civil, qui détermine seulement le gage du créancier, de sorte que doivent être pris en considération tant les biens propres et les revenus de la caution que les biens communs, incluant les revenus de son conjoint.

En l'espèce, M. [X] et Mme [J] sont mariés sous le régime de la communauté légale.

Pour apprécier le caractère disproportionné d'un cautionnement au moment de sa conclusion, les juges doivent prendre en considération l'endettement global de la caution, ce qui inclut les cautionnements qu'elle a précédemment souscrits par ailleurs, bien qu'ils ne correspondent qu'à des dettes éventuelles, à condition qu'ils aient été souscrits avant celui contesté.

- Sur le montant de l'engagement :

Pour évaluer une éventuelle disproportion manifeste de l'engagement de caution des époux, il convient tout d'abord d'en déterminer le montant.

Lorsque plusieurs cautions se sont engagées solidairement, simultanément et par un même acte à garantir l'ensemble de la dette du débiteur dans la limite d'un certain montant, elles sont, sauf stipulation expresse ou autres éléments contraires, réputées ne devoir ensemble que cette somme, et non chacune ladite somme.

M. [X] et Mme [J] ont chacun signé une mention manuscrite personnelle dans laquelle ils s'engageaient dans la limite de 182.850 euros.

M. [X] et Mme [J] reconnaissent s'être portés caution solidaire de la société Les Bains Brasserie mais contestent le fait que ce cautionnement prévoit une solidarité entre eux. Or les conditions particulières du prêt stipulent expressément la solidarité des cautions.

Le paragraphe intitulé 'Garanties du prêt - Engagements divers' prévoit des:

'Cautionnements solidaires avec l'Emprunteur et solidairement entre eux de Madame [X] [K] née [J] et de Monsieur [X] [L], ci-après constitués au profit de la banque'.

L'article 'Engagements de caution solidaires' au sein du paragraphe intitulé 'Garanties' stipule :

'Les personnes désignées ci-dessus sous l'intitulé 'la Caution' se constituent, envers la Banque, cautions solidaires, solidairement et indivisiblement entre elles (...)'.

Le contrat ne contient pas de clause de cumul des cautions contraire.

Les deux mentions manuscrites ne constituent donc qu'un seul et même engagement solidaire souscrit au sein du même acte et selon les mêmes modalités. Les premiers juges ont donc valablement retenu que l'engagement est limité à 182.850 euros pour le couple. Le jugement sera confirmé sur ce point.

- Sur la fiche de renseignements :

Une fiche de renseignements signée par M. [X] et Mme [J] a été versée aux débats par la société BNP. Toutefois, cette fiche de renseignements n'est pas datée et M. [X] et Mme [J] soutiennent qu'elle a été réalisée postérieurement à la souscription du cautionnement. En effet, le montant du capital restant dû renseigné sur ladite fiche au titre du prêt habitat de 74.000 euros remboursable en 120 mensualités arrivant à échéance le 10 mai 2021 et du prêt de 20.000 euros souscrit le 13 décembre 2012 remboursable en 72 mensualités arrivant à échéance le 4 décembre 2018 correspondent respectivement aux échéances du 10 janvier 2013 et du 3 janvier 2013, eu égard aux tableaux d'amortissement de ces prêts versés par M. [X] et Mme [J].

Il ressort de ces pièces que les renseignements de ladite fiche correspondent à la situation de M. [X] et Mme [J] sur la période comprise entre le 10 janvier 2013 et le 3 février 2013. Cela laisse supposer que ladite fiche de renseignements a été rédigée entre ces deux dates, soit plus de 18 mois après la souscription du cautionnement en date du 1er juin 2011. Cette hypothèse est compatible avec l'âge de Mme [W] [X], fille de M. [X] et de Mme [J], inscrit sur la fiche de renseignements.

Par conséquent, la fiche de renseignements versée ne saurait lier les cautions quant à leur exacte situation patrimoniale au jour de la souscription du cautionnement. Elle ne constitue qu'une pièce parmi les autres versées aux débats permettant d'évaluer le patrimoine de M. [X] et de Mme [J] au jour du cautionnement.

- Sur la situation de M. [X] à la date de signature du contrat de cautionnement :

En ce qui concerne le passif de M. [X], ce dernier affirme que Mme [J] et lui-même avaient contracté plusieurs dettes au 1er juin 2011, jour de la souscription du cautionnement :

- Un crédit renouvelable souscrit auprès de la société Société Générale d'un montant total de 11.000 euros dont 10.122,59 euros étaient décaissés au 29 mars 2006,

- Un prêt habitat de 74.000 euros souscrit auprès de la société Banque de Bretagne remboursable en 120 mensualités arrivant à échéance le 10 mai 2021,

- Un prêt habitat de 15.588 euros souscrit auprès de la société Banque de Bretagne remboursable en 140 mensualités arrivant à échéance le 10 janvier 2023.

Le crédit renouvelable souscrit auprès de la société Société Générale ne peut être pris en compte dans le passif de M. [X] dans la mesure où il ne justifie pas que cette ligne de crédit était encore ouverte au jour de la souscription du cautionnement.

En ce qui concerne l'actif de M. [X] au jour de la souscription du cautionnement, il convient de prendre en compte la valeur du bien immobilier sis à [Localité 6] dont il est propriétaire indivisaire.

M. [X] a reçu ce bien en indivision par voie de succession en 1986. Sa part en indivision est équivalente à trois huitièmes de la pleine propriété. Lors de la succession, le bien avait été évalué à 330.000 francs, équivalents à 50.308,18 euros. La part indivisaire de M. [X] telle qu'évaluée en 1986 s'élève donc à 18.865,56 euros. M. [X] ne verse pas de pièce permettant d'estimer la valeur de ce bien en 2011.

A son patrimoine propre s'ajoute les biens communs du couple. M. [X] et Mme [J] déclarent avoir acquis un bien immobilier en 2004 pour la somme de 64.029 euros.

Cependant, dans le premier jeu de conclusions devant le tribunal de commerce de Saint-Brieuc, produit devant la cour par la société BNP, M. [X] et Mme [J] déclaraient que leur patrimoine au jour de la souscription du cautionnement était notamment composé d'un bien immobilier d'une valeur de 250.000 euros. Cette valeur est celle figurant dans la fiche de renseignements transmise par la société BNP. Cette fiche, même postérieure de près de 18 mois à l'engagement litigieux, a été signée par les cautions.

M. [X] a par la suite contesté cette affirmation. Il ne produit cependant pas d'éléments permettant d'estimer la valeur dudit bien immobilier au jour de la souscription du cautionnement, valeur comprise entre 64.029 et 250.000 euros au vu des éléments produits. En tout état de cause, il est établi qu'en 2013, M. [X] a accepté une évaluation de leur bien à 250.000 euros en signant la fiche de renseignements.

Par ailleurs, la société BNP soutient à bon droit que les parts sociales détenues par la caution doivent être prises en compte pour apprécier le patrimoine de celle-ci. M. [X] n'indique aucunement la valeur des parts sociales qu'il détenait dans la société Les Bains Brasserie.

Les revenus de M. [X] et de Mme [J] sont des biens communs qu'il convient de comptabiliser dans l'actif de M. [X]. M. [X] produit une déclaration de revenus, laquelle fait apparaître qu'il a perçu, avec son épouse, au cours de l'année 2011, la somme de 38.091 euros de revenus, soit environ 3.174 euros par mois.

Ne présentant pas sa complète situation patrimoniale, ni une évaluation précise de ses biens immobiliers à la date de son engagement, M. [X] ne prouve pas la disproportion manifeste qu'il allègue. Le jugement sera infirmé de ce chef.

- Sur la situation de Mme [J] à la date de signature du contrat de cautionnement :

En ce qui concerne le passif de Mme [J], et comme développé précédemment, seuls les prêts suivants de la communauté peuvent être pris en compte :

- Un prêt habitat de 74.000 euros souscrit auprès de la société Banque de Bretagne remboursable en 120 mensualités arrivant à échéance le 10 mai 2021,

- Un prêt habitat de 15.588 euros souscrit auprès de la société Banque de Bretagne remboursable en 140 mensualités arrivant à échéance le 10 janvier 2023.

Comme il a été vu supra, la valeur de ce bien n'est pas justifié par Mme [J].

Par ailleurs, la société BNP soutient à bon droit que les parts sociales détenues par la caution doivent être prises en compte pour apprécier le patrimoine de celle-ci. Mme [J] n'indique aucunement la valeur des parts sociales qu'elle détenait dans la société Les Bains Brasserie.

Les revenus de M. [X] et de Mme [J] sont des biens communs qu'il convient de comptabiliser dans l'actif de Mme [J]. Mme [J] produit une déclaration de revenus, laquelle fait apparaître qu'elle a perçu, avec son conjoint, au cours de l'année 2011, la somme de 38.091 euros de revenus, soit environ 3.174 euros par mois.

Ne présentant pas sa complète situation patrimoniale, ni une évaluation précise de son bien immobilier à la date de son engagement, Mme [J] ne prouve pas la disproportion manifeste qu'elle allègue. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l'information annuelle de la caution :

L'établissement prêteur est tenu d'une obligation d'information annuelle de la caution :

Article L 313-22 du code monétaire et financier, dans sa rédaction en vigueur du 7 mai 2005 au 1er janvier 2014 et applicable en l'espèce :

Les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.

L'établissement n'est pas tenu de prouver que les lettres d'information ont été reçues. Il doit établir qu'il a envoyé des lettres contenant les informations fixées par ce texte.

Le fait que les cautions n'est jamais contesté ne pas avoir reçu les lettres que la société BNP aurait pu leur envoyer ne permet pas d'établir qu'elles aient été envoyées.

La société BNP est donc déchue du droit aux intérêts.

Il résulte de la déclaration de créance de la société BNP que les échéances du prêt ont été payées par le débiteur principal jusqu'à celle du 10 juin 2013, celle du 10 mai 2013 l'étant partiellement.

Au vu de la déclaration de créance et de son actualisation en date du 13 septembre 2018, des sommes payées par le débiteur principal, des trois acomptes payés en 2015, 2016 et 2017, du tableau d'amortissement et de sa version rééditée le 19 août 2013, il reste dû par les cautions la somme de 67.520,55 euros. Elles seront condamnées à payer cette somme avec intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2018, date de la première mise en demeure. Conformément à la demande de la société BNP, les intérêts dus pour une année seront capitalisés.

Sur la demande de délais de paiement :

M. et Mme [X] ont déjà, de fait, bénéficié d'importants délais de paiement. Il n'y a pas lieu de leur en accorder de nouveaux.

Sur les dépens :

Il y a lieu de condamner M. et Mme [X] aux dépens de première instance et d'appel et de rejeter les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

- Confirme le jugement en ce qu'il a :

- Jugé que la banque est mal fondée dans ses demandes aux droits à intérêt,

- Débouté la société BNP Paribas de ses demandes au titre des intérêts,

- Infirme le jugement pour le surplus,

Statuant de nouveau et y ajoutant :

- Condamne solidairement M. [X] et Mme [J], son épouse, à payer à la société BNP Paribas, au titre de leur engagement de caution du 1er juin 2011 attaché au prêt n°612123-42, la somme de 67.520,55 avec intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2018,

- Dit que les intérêts dus pour une année seront capitalisés,

- Rejette les autres demandes des parties,

- Condamne M. [X] et Mme [J], son épouse, aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 3ème chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/06141
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;21.06141 ?
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