La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/02/2023 | FRANCE | N°19/08033

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 02 février 2023, 19/08033


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°67



N° RG 19/08033 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-QKOJ













M. [G] [I]



C/



SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER

















Infirmation













Copie exécutoire délivrée



le : 02 fevrier 2023



à :

Me Annaïg COMBE

Me Marie VERRANDO





CCC Pôle Emploi

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 02 FEVRIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°67

N° RG 19/08033 -

N° Portalis DBVL-V-B7D-QKOJ

M. [G] [I]

C/

SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER

Infirmation

Copie exécutoire délivrée

le : 02 fevrier 2023

à :

Me Annaïg COMBE

Me Marie VERRANDO

CCC Pôle Emploi

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 02 FEVRIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,

Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 17 Novembre 2022

En présence de Madame [L] [Y], Médiatrice judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 02 Février 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [G] [I]

né le 03 Décembre 1964 à [Localité 7] (44)

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

Ayant Me Annaïg COMBE, Avocat postulant du Barreau de RENNES et représenté à l'audience par Me David LONG, Avocat plaidant du Barreau de GRENOBLE

INTIMÉE :

La SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER prise en la personne de ses représentants légaux et ayant son siège social :

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Avocat postulant du Barreau de RENNES et par Me Nelly MORICE substituant à l'audience Me Anne MURGIER de la SELARL CAPSTAN LMS, Avocat plaidants du Barreau de PARIS

M. [G] [I] a été embauché le 1er septembre 2002 par la société SCHINDLER dans le cadre d'un Contrat à durée indéterminée en qualité d'ingénieur travaux méthode.

Dans le dernier état des relations contractuelles régies par la Convention collective Nationale des Ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, M. [G] [I] occupait des fonctions de Directeur zone ouest de la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER au sein de laquelle son contrat de travail a été transféré le 21 octobre 2013 et percevait une rémunération annuelle composée d'une part fixe et d'une part variable de 33% maximum.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 mai 2017, M. [I] a été convoqué à un entretien préalable prévu le 23 mai 2017, avant d'être licencié le 29 mai 2017 pour insuffisance de résultats.

Le 8 septembre 2017, M.[I] a saisi le conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de voir déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner son employeur à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaires sur bonus au titre de l'exercice 2016/2017 et des dommages-intérêts pour procédure de licenciement irrégulière et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La cour est saisie de l'appel formé le 13 décembre 2019 par M. [G] [I] contre le jugement du 8 novembre 2019, par lequel le conseil de prud'hommes de Nantes a :

' Dit que le licenciement de M. [G] [I] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

' Condamné la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER à verser à M. [G] [I] les sommes suivantes :

' 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure,

' 1.200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

' Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

' Condamné la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER aux entiers dépens.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 27 avril 2022, suivant lesquelles M. [I] demande à la cour de :

' Infirmer le jugement attaqué en ses dispositions ayant dit que :

- Le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse,

- Le rappel de salaire sur bonus n'était pas du,

' Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a retenu :

- que la procédure de licenciement était irrégulière,

- que M. [I] avait droit à la somme de 1.200 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamner la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER à verser à M. [I] les sommes suivantes :

- 15.913 € de dommage et intérêts pour licenciement irrégulier sur la forme,

- 319.000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 11.591 € bruts au titre de rappel de salaire sur bonus 2016/2017,

- 1.159,10 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

' Condamner la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER aux entiers dépens.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 29 avril 2020, suivant lesquelles SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER demande à la cour de :

' Déclarer M. [I] irrecevable et en tout cas non fondé en son appel et l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, l'en débouter,

' Recevoir la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER en son appel incident, le dire bien fondé et y faisant droit,

A titre principal :

' Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté M. [I] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et de sa demande de rappel de salaire bonus 2016/2017 ainsi que les congés payés afférents,

' Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER à des dommages-intérêts pour procédure de licenciement irrégulière à hauteur de 5.000 € et à une indemnité de 1.200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

' Débouter M. [I] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

A titre subsidiaire :

Si par extraordinaire la Cour considérait que le licenciement de M. [I] n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse,

' Limiter les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 6 mois de salaire, soit 95.479,44 € ;

S'il était fait droit à la demande de rappel de bonus,

' Débouter M. [I] de sa demande de rappel d'indemnité de congés payés afférents,

A titre infiniment subsidiaire :

Si le licenciement étant considéré comme fondé mais irrégulier en la forme,

' Limiter les dommages et intérêts pour irrégularité de procédure à hauteur de 1€ symbolique ;

En tout état de cause :

' Condamner M. [I] à verser à la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

' Condamner M. [I] aux entiers dépens avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 3 novembre 2022.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le bien fondé du licenciement :

Pour infirmation et absence de cause réelle et sérieuse, M. [G] [I] fait valoir que les indicateurs retenus par l'employeur ne sont pas pertinents, qu'il ne peut être allégué une insuffisance des résultats économiques et une non atteinte de budget, en se fondant sur les quatre premiers mois de 2017 et sur ceux de 2016, que l'insuffisance de résultats ne peut en soi constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

M. [G] [I] ajoute que les objectifs qui lui étaient assignés étaient irréalistes, qu'ils n'ont été atteints qu'à trois reprises sur neuf exercices, que la société s'abstient de justifier des résultats des trois zones pour 2017 et 2018, que la comparaison avec les deux autres directeurs de zone n'est pas pertinente compte tenu des modifications de périmètre et des différences de politique budgétaire ainsi que de la prise en compte de critères tronqués, que si le résultat sur année glissante montre une baisse de chiffre d'affaires pour la zone Est et la zone Ouest dans des proportions identiques, il apparaît que le taux de rentabilité de ces deux zones est finalement supérieur à celui de la zone IDF dont le chiffre d'affaires est le seul en progression.

M. [G] [I] entend également souligner que le grief relatif aux accidents du travail est fondé sur un critère subjectif assis sur le choix discrétionnaire de ne pas retenir les accidents sans rapport direct avec le métier, faisant varier les taux rectifiés dans des proportions sans rapport avec la réalité, que les actions initiées en 2015 pour améliorer les taux de Fréquence et de Fréquences absolu ont été retardées par le délai de prise de décision de la direction technique France et celui du service achat, pour aboutir fin mars 2017, que les retards dans la réalisation des trois indicateurs de sécurité parmi d'autres, comme la prétendue insuffisance s'expliquent pour partie par des choix budgétaires de la Direction générale, que le plan d'action pour y remédier a concerné en dernier la zone ouest qui connaissait une évolution légèrement meilleure, que des indicateurs retenus qui lui sont reprochés sont erronés et peuvent d'autant moins être retenus comme des éléments objectifs que l'employeur néglige les autres indicateurs mettant en valeur le secteur Ouest.

La SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER objecte que le fait pour un salarié de ne pas atteindre les résultats réalistes qui lui ont été fixés et dont la non atteinte résulte d'une insuffisance professionnelle ou sont mauvais par rapport à ceux de ses prédécesseurs ou à ses collègues, constitue une cause de licenciement, que les résultats obtenus étaient nettement inférieurs à ceux attendus à la fixation desquels il participait, en baisse par rapport à l'exercice précédent et inférieurs à ses collègues, outre l'insuffisance des autres indicateurs.

A cet égard, la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER indique que les résultats en matière de sécurité étaient insuffisants, concernant notamment le taux d'accident du travail en hausse constante faute de mettre en oeuvre les actions nécessaires, en dépit des moyens mis à sa disposition et d'un nombre d'agences inférieur à celui de ses collègues, que l'employeur a tenté en vain de lui proposer d'autres postes plus fonctionnels, qu'il a toujours refusés, préférant demeurer en difficulté.

L'insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu'elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié'; le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur en formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.

L'insuffisance de résultats ne peut constituer, en soi, une cause de licenciement. Il appartient au juge de rechercher si les mauvais résultats allégués procèdent d'une insuffisance professionnelle ou d'une faute imputable au salarié ou de son incapacité à atteindre les objectifs fixés et de vérifier si les objectifs fixés au salarié lors de l'accomplissement de sa prestation de travail, qui peuvent être définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, étaient ni excessifs, ni irréalisables, mais au contraire réalistes.

La lettre de licenciement du 29 mai 2017 qui fixe les limites du litige et qui lie le juge, est ainsi motivée :

"Suite à l'entretien préalable que vous avez eu le 23 mai dernier avec le Président Directeur Général nous avons le regret de vous notifier votre licenciement à compter du 1er juin 2017 pour insuffisance de résultats. En effet les résultats de votre zone de responsabilité (Zone Ouest) à fin avril sont largement inférieurs à votre budget élaboré avec vous en septembre puisque vous n'êtes qu'à 80,6% d'atteinte OSC.

Ces résultats sont d'autant plus inquiétants que vos collègues responsables des deux autres Zones et dans un contexte identique au vôtre sont à 92,1% pour l'un et 98,7% pour l'autre d'atteinte de leur budget à fin avril.

Mais, ces résultats sont également insatisfaisants car ils ne reflètent nullement la promesse de redressement des résultats que vous nous aviez faite en début d'année au vu de vos résultats annuels 2016 puisque vous avez fini l'année à 89,6% de votre budget (résultat de surcroît en baisse vs 2015) alors que vos collègues ont dépassé leurs propres budgets avec respectivement 102,9% et 107,8% d'atteinte (et dans les deux cas en amélioration significative versus 2015).

Les résultats économiques ne sont pas les seuls à être insuffisants puisqu'en matière de Sécurité Produit nous constatons également d'importants écarts avec les objectifs fixés et avec les résultats de vos autres collègues Directeurs de Zone.

Ainsi vous n'êtes à fin avril qu' à 27 % de traitement des non-conformités CPSI inférieures à 100 jours alors que vos collègues sont respectivement à 34 % et 52 %.

En ce qui concerne la réalisation des EDS nous ne constatons aucune évolution depuis quatre mois alors que ce sujet a été défini comme une priorité par le Comité de Direction auquel vous appartenez.

Autre exemple avec l'avancement sur votre Zone du retrofit FI 615 : vous n'avez traité ces dernières semaines que quelques unités lorsque les deux autres Zones en affichent plusieurs centaines.

Enfin les résultats Sécurité en matière d'Accident du Travail sont également largement insuffisants puisqu'à fin avril 2017 les Taux de Fréquence Accident avec arrêt ou Taux de fréquence toutes accidents de votre zone sont de 13,4% tous les deux alors que les autres zones sont à 7.5/9 pour l'Ile de France et 5/5 pour la zone EST.

Ces taux de sécurité sont d'autant plus inquiétants qu'il sont en détérioration par rapport à l'année 2016 (elle-même en détérioration versus 2015) puisque vous aviez en fin d'année un taux de fréquence avec arrêt à 12,1 (13,4 en avril 2017) et à 13,1 en taux de fréquence tout accident (13,4 en avril 2017).

L'ensemble des éléments attestent :

- d'un manque de résultats sur des indicateurs majeurs de performance de votre zone (ce qui pénalise les résultats de l'ensemble de SCHINDLER France),

- d'une détérioration des résultats par rapport à 2016 (eux-mêmes en détérioration par rapport à 2015) contrairement aux engagements pris pour améliorer la situation.

Au cours de l'entretien préalable vous avez de nouveau essayé de nous convaincre que demain sera meilleur qu'aujourd'hui mais au vu des engagements non tenus sur ces 4 premiers mois vous comprenez que la confiance n'existe pas sur ce point.

Votre autre argument a été de nous expliquer que vous étiez désavantagé par rapport à vos collègues Directeurs de Zone en ayant moins de Directions d'Agence Régional, les difficultés d'une seule Agence Régionale impactant plus lourdement les résultats globaux de la Zone.

Nous ne pouvons plus retenir cet argument car inversement ayant moins de DAR à encadrer que vos collègues vous avez plus de temps disponible à pouvoir consacrer à chacune d'entre elles et notamment à celle qui serait en difficulté.

L'ensemble de ces éléments rendent donc impossible la poursuite de notre collaboration et votre contrat prendra donc fin le 30 novembre 2017 au terme de votre préavis de six mois dont nous vous dispensons de l'exécution.(...)

En l'espèce, l'employeur produit au débat neuf pièces (8 à 17) en rapport avec les objectifs, les résultats et les indicateurs concernant les résultats de M. [G] [I] et sa comparaison avec ceux de ses collègues des zones IDF et Est à la fin du mois d'avril 2017. étant précisé que les pièces 8 et 9 ne concernent que des jalons de planning budgétaire et d'organisation du séminaire des 21 et 22 octobre 2016, sans référence à la participation de M. [G] [I] à l'établissement des objectifs invoquée par l'employeur, la pièce 9 précisant seulement que son intervention pour présenter les hypothèses de vente, de portefeuille et de GMR ne pourrait excéder 30 minutes.

Pour le reste, la pièce 10 présente un tableau intitulé % atteinte du RM vs Budget avec quatre colonnes dont une colonne relative à l'atteinte budget 2016, présentant les résultats de chacune des zones dont la zone Ouest pour un pourcentage de 89,6% alors que les zones IDF et Est atteignait respectivement 107,8% et 102,9%, mais sans précision sur la notion d'YTD, étant précisé que l'occurrence métro de [Localité 9] présente un résultat relativement faible 25,2% impactant sensiblement le résultat présenté et ceux d'Aquitaine-Charente, Nord-Picardie et Normandie-Centre présentent des résultats inférieurs à 100%, seules l'Ouest et Midi-Pyrénées présentent des pourcentages supérieurs, alors que la zone IDF ne présente qu'un résultat à 55,4%, un résultat à 68,1% et un troisième à 84,4%, les cinq autres occurrences concernant Grand [Localité 8] Sud, Maintenance escaliers IDF, Grand [Localité 8] Ouest, IN IDF et AIF présentent des taux de 104 à 170% mais également que la zone Est présente six occurrences entre 81,9 et 99% pour le Centre Est, l'Alsace, Dauphiné Savoie, Loire-Auvergne, Côte d'Azur-Corse et Lorraine-Champagne et des taux supérieurs à 100 pour Techni-Lift Amonter, Provence-Languedoc, Savoie-[Adresse 5] et [Localité 6].

L'examen de ces données corrobore l'objection formulée par M. [G] [I] et à laquelle l'employeur s'abstient de répondre, concernant le caractère subjectif de la comparaison faite entre ces trois zones qui couvrent des secteurs particulièrement différents tant dans leur structure géographique que dans leur dispersion et concernant l'absence de prise en compte des budgets des filiales relevant de la zone Ouest.

A cet égard, alors qu'il n'est produit par la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER aucun élément de nature à confirmer l'affirmation selon laquelle les résultats 2016 seraient en baisse par rapport à ceux de 2015, contredite par les pièces 29 à 34 et 36 du salarié, non autrement discutées mettant en évidence un chiffre d'affaires supérieur en 2016 et un RM val de 0,1% inférieur.

Dans ces conditions et au bénéfice des mêmes observations, il appert que la même comparaison a fortiori sur les seuls quatre premiers mois de l'année 2017 n'est pas moins subjective et ne peut caractériser le grief tenant à la faiblesse des résultats économiques de la zone Ouest et à sa persistance.

En ce qui concerne la sécurité accident, l'employeur produit les pièces 12 au titre de l'année 2015 et 13 au titre des quatre premiers mois 2017 présentant des taux TF et des taux TFA (avec arrêt de travail) en année glissante avec une comparaison sur l'année n-1 mais également un taux TG en année glissante et son évolution par rapport à l'année n-1 pour les trois zones, rapportés au nombre d'heures travaillées.

Cependant et sous le bénéfice des mêmes observations concernant l'hétérogénéité des trois zones comparées et de l'appréciation de cet indicateur sur quatre mois pour 2017, nonobstant les comparaisons réalisées en année glissante, il doit être observé que l'employeur n'oppose aucun argument au salarié qui soutient que les chiffres produits ont fait l'objet d'un écrêtage aboutissant à en extraire les accidents que l'employeur estimait ne pas être directement liés à son activité, pour 2016 (pièces 57 à 69 salarié) et pour 2017 (pièces 71 à 77), de sorte qu'il ne peut être considéré qu'un tel indicateur invoqué par l'employeur à ce titre puisse dans de telles conditions être pris en compte pour apprécier l'insuffisance alléguée.

De surcroît, l'employeur demeure taisant en ce qui concerne l'inertie opposée par la direction technique et le service achats à la mise en oeuvre d'actions correctives initiées par le directeur technique de la zone Ouest en lien avec le CHSCT concernant le port de charges lourdes.

S'agissant de la sécurité produit, la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER produit un tableau intitulé "Direction Technique Nationale, Etat NCs

Cependant, outre le fait que manifestement la présence d'un quatrième secteur "PAR" est de nature à fausser le calcul des taux de la zone dont ce secteur a été extrait, il appert que chaque graphique met en évidence des sous-catégories distinguant des interventions en cours qui ne sont pas analysées.

En outre, M. [G] [I] n'est pas contredit quand il indique que ces indicateurs (CSPI, EDS, Fields informations) sont impactés par les marchés pris à la concurrence qui imposent de réaliser lesdits contrôles, de sorte que le développement d'une activité commerciale ayant abouti peut avoir pour effet d'allonger les délais d'intervention et que ces trois indicateurs ne peuvent être appréciés isolément en faisant abstraction des cinq autres indicateurs dont le MTBC correspondant au nombre de jours croissant entre deux pannes attestant de la qualité de son travail, que pour les huit indicateurs il avait un taux d'avancement de 51%, supérieur à celui de la zone Est et légèrement inférieur à celui de la zone IDF (54%), avec un taux de 81% pour le FI 641 supérieur à celui des deux autres zones, s'agissant d'un indicateur prioritaire.

Sans être plus contredit, M. [G] [I] démontre également que toutes les zones étaient en retard et souligne qu'il s'agit d'indicateurs annuels qui ne peuvent être appréciés sur quatre mois et ce, d'autant plus que toutes les fiches n'avaient pas été saisies et que le plan d'action conçu pour pallier le retard des trois zones sur les deux indicateurs FI 615 et FI 641, n'a été mis en oeuvre par l'employeur au profit de la zone Ouest qu'à compter d'avril 2017, à l'inverse des autres zones auxquelles aucun reproche n'a été adressé.

Aucun argument n'est opposé au salarié concernant les résultats économiques de la zone Ouest et ses taux de rentabilité supérieurs à la zone IDF sur les exercices 2015 et 2016.

Il résulte des développements qui précèdent et des pièces produites au débat que l'insuffisance professionnelle imputée au salarié n'est pas établie, de sorte que le jugement entrepris doit être infirmé, le licenciement prononcé à l'encontre de M. [G] [I] s'avérant dénué de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture :

En application de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise, de la perte d'une ancienneté de 14 ans 5 mois et 29 jours pour un salarié âgé de 52 ans à la date de la rupture ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à l' égard de l'intéressé resté sans emploi pendant un an, en étant allocataire de l'ARE à hauteur de 7.300,50 € brut de juin à septembre 2018, date à laquelle il a retrouvé un emploi moins rémunéré, ayant été contraint d'acquérir un véhicule et d'exercer ses fonctions en région parisienne en semaine, induisant une baisse significative de revenus ainsi que cela résulte des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l'article L. 1235-3 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 une somme de 200.000 € net à titre de dommages-intérêts ;

Sur l'irrégularité de la procédure :

L'article L1235-2 du Code du travail dans sa version en vigueur du 01 mai 2008 au 01 janvier 2018 dispose que "Si le licenciement d'un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l'employeur d'accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire".

Le licenciement de M. [G] [I] étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il ne peut prétendre à voir réparer distinctement le préjudice résultant du non respect par l'employeur de la procédure, celui-ci étant déjà indemnisé sur le fondement de l'article L.1235-3 du Code du travail, le jugement entrepris étant infirmé de ce chef.

Sur le rappel de salaire au titre du bonus 2017 :

Pour infirmation et rappel de salaire à ce titre, M. [G] [I] soutient qu'il n'a pas perçu l'intégralité du bonus qui aurait dû lui être versé, qu'il a interrogé en vain son employeur, lequel détient les informations lui permettant de justifier du montant qui lui est dû.

La SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER rétorque que le jugement doit être confirmé de ce chef dès lors que le salarié ne produit aucun élément à l'appui de ses prétentions à ce titre et qu'il ne peut de surcroît réclamer le paiement de congés payés sur le bonus.

Selon l'article 1315 devenu 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

La fixation d'objectifs à atteindre par le salarié pour bénéficier de la prime d'objectif ne fait pas obstacle à l'inclusion de cette prime dans l'assiette de calcul des congés payés et que cette prime non forfaitaire qui rétribue de manière directe l'activité déployée par l'intéressé pour réaliser l'objectif assigné, était assise sur les périodes travaillées, à l'exclusion des périodes de congés.

En l'espèce, à l'appui de ses prétentions, le salarié ne produit sa proposition d'engagement du 10 mai 2002 qui fait référence au versement d'un bonus "qui sera fonction de vos résultats et dont les modalités d'attribution vous seront communiquées par votre supérieur hiérarchique lors de votre arrivée dans notre société" (pièce 1) et la fiche d'attribution du bonus pour 2015 à hauteur de 36.846 € outre une prime discrétionnaire de 4.662 €, sans aucun autre document tel que la notification annuelle des objectifs ou tel que des comptes rendus d'évaluation.

Ceci étant, la notification du bonus 2015 précise selon la traduction libre de la cour que" basé sur ses performances personnelles et les résultats en accord avec les règles du plan d'objectifs applicable du groupe Schindler votre bonus pour l'année 2015 a été fixé comme suit :

"Cash bonus gross Eur 33 116 ; Deferred Bonus Schare Grant/29 Schindler Registrered Shares at CHF 138.88 (20% discount on volume weighted average price in March 2016) EUR 3730

Total bonus gross EUR 36 846, outre un bonus discrétionnaire de 4.662 €.

Cette production suffit à établir que le bonus n'est pas établi de manière discrétionnaire sauf en ce qui concerne la partie définie en tant que telle et que la définition du bonus alloué au salarié résulte des modalités de calcul détenues par le seul employeur qui s'abstient de les produire et prive la cour de la faculté d'examiner le bien fondé des prétentions du salarié, autrement que sur la base des seuls documents pertinents produits par ce dernier.

Il ressort des éléments non autrement discutés que M. [G] [I] n'a perçu en 2016 qu'un bonus de 16.699 € au lieu d'une somme de 28.290 € correspondant au bonus précédent proratisé sur une période de onze mois, de sorte qu'il reste dû à M. [G] [I] à ce titre, un rappel de bonus qui doit être fixé à la somme de 11.591 € outre 1.159 € au titre des congés payés afférents, le jugement entrepris étant infirmé de ce chef.

Sur le remboursement ASSEDIC

En application de l'article L.1235-4 du Code du travail, dans les cas prévus aux articles L.1235-3 et L.1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées

Les conditions d'application de l'article L 1235-4 du Code du travail étant réunies en l'espèce, le remboursement des indemnités de chômage par l'employeur fautif, est de droit ; ce remboursement sera ordonné tel qu'il est dit au dispositif ;

===

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société qui succombe en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser le salarié des frais irrépétibles qu'il a pu exposer pour assurer sa défense en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

INFIRME partiellement le jugement entrepris,

et statuant à nouveau,

DÉCLARE le licenciement de M. [G] [I] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER à payer à M. [G] [I] :

- 200.000 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 11.591 € brut à titre de rappel de bonus au titre de l'année 2016 ;

- 1.159,10 € brut au titre des congés afférents ;

DÉBOUTE M. [G] [I] de sa demande au titre de l'irrégularité de la procédure,

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes, à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les alloue ;

CONDAMNE la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER à payer à M. [G] [I] 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,

ORDONNE le remboursement par la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à M. [G] [I] dans les limites des six mois de l'article L 1235-4 du code du travail.

CONDAMNE la SA ROUX COMBALUZIER SCHINDLER aux entiers dépens de première instance et d'appel,

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/08033
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;19.08033 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award