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26/01/2023 | FRANCE | N°19/07905

France | France, Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 26 janvier 2023, 19/07905


7ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°30/2023



N° RG 19/07905 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QJ3Q













SA TEL AND COM



C/



Mme [N] [G]



















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JANVIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :<

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Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 22 Novem...

7ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°30/2023

N° RG 19/07905 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QJ3Q

SA TEL AND COM

C/

Mme [N] [G]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JANVIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 22 Novembre 2022 devant Monsieur Hervé BALLEREAU, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Monsieur [B], médiateur judiciarie

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SA TEL AND COM Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Audrey BALLU-GOUGEON de la SELARL BALLU-GOUGEON, VOISINE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me ROULEAUX Raphael, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Madame [N] [G]

née le 04 Avril 1978 à [Localité 5] (56)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Emilie HUBERT-LE MINTIER de la SELARL ISIS AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [N] [Z] a été engagée par la SA Tel and com selon un contrat à durée indéterminée en date du 15 septembre 2003. Elle exerçait les fonctions de conseillère de vente à temps complet.

Au cours de l'année 2015, la société Tel and com rencontrait des difficultés économiques.

Le 18 mai 2015, la DIRECCTE du Pas-de-Calais homologuait le document unilatéral portant réorganisation de l'UES de la société.

Le 22 juin 2015, la société Tel and com proposait à Mme [Z] un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) et précisait les motifs économiques conduisant à envisager son licenciement pour motif économique.

La salariée ayant adhéré au CSP le 09 juillet 2015, elle est sortie des effectifs le 15 juillet 2015.

Statuant sur une requête en annulation déposée par des salariés de la société Tel and com, le tribunal administratif de Lille, par décision en date du 14 octobre 2015, a annulé la décision d'homologation du document unilatéral définissant le PSE rendue par la DIRECCTE le 18 mai 2015.

Par arrêt en date du 11 février 2016, la cour administrative de Douai saisie par la SA Tel and com, a confirmé l'annulation du PSE.

Par l'intermédiaire de son conseil et par courrier daté du 31 mai 2016, Mme [Z] a vainement contesté la procédure de licenciement économique dont elle a fait l'objet.

***

Contestant la rupture de son contrat de travail, Mme [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Rennes par requête en date du 22 juin 2016 de différentes demandes qui, au dernier état de la procédure de première instance, étaient les suivantes :

- Suite au désistement de la société concernant les deux premières QPC soulevées, maintien de la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile : pour le dossier 18/80 : 1 000 euros ; pour le dossier 18/81 : 1 000 euros

- Demande rectification matérielle concernant l'oubli de rapporter dans le dispositif du jugement, la condamnation de la SA Tel and com au paiement d'une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

A titre principal,

vu les dispositions de l'article L1235-10 du code du travail,

- Dire et juger que la procédure pour licenciement économique de Mme [Z] est nulle.

- Condamner en conséquence la société Tel and com à verser à Mme [Z] des dommages et intérêts en réparation de la nullité de la procédure de licenciement économique, à hauteur de douze mois de salaire soit des dommages et intérêts à hauteur de (1 850 euros + 44eurosde prime d'ancienneté X 12 mois) : 22 728,00 Euros

A titre subsidiaire,

Vu les dispositions de l'article L1235-16 du code du travail,

- Condamner la société Tel and com à verser à Mme [Z] une indemnité à hauteur de : 22 728,00 Euros

En tout état de cause,

Vu les disposition de l'avenant du 1er avril 2015,

Vu les articles L3121-28 et suivants et L3123-18 et suivants du code du travail,

- Condamner la société Tel and com à verser à Mme [Z] les rappels de salaire suivants :

- Pour le mois d'avril 2015 : 369,95 Euros Brut

- Pour le mois de mai 2015 : 369,95 Euros Brut

- Pour le mois de juin 2015 : 369,95 Euros Brut

- Pour le mois de juillet 2015 : 500,72 Euros Brut

- Congés payés afférents :161,05 Euros

- Débouter la société Tel and com de l'ensemble de ses demandes.

- Condamner la société Tel and com à verser à Mme [Z] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile : 4 000,00 Euros

- Condamner la société Tel and com aux entiers dépens.

La SA Tel and com demandait au conseil de prud'hommes de :

- Constater, dire et juger que Mme [Z] ne justifie pas du bien-fondé, en fait et en droit, de sa demande.

En conséquence,

- Débouter Mme [Z] de sa demande.

A titre principal,

- Constater, dire et juger que le PSE n'a pas été annulé par le Juge administratif en raison d'une quelconque insuffisance des mesures du PSE.

- Constater, dire et juger que la décision administrative d'homologation du PSE a été annulée par le juge administratif exclusivement en raison d'une erreur de l'administration.

- Constater, dire et juger que les articles L1235-10 et L1235-11 du code du travail ne sont pas applicables et que la demande indemnitaire de Mme [Z] est donc mal fondée.

- Constater, dire et juger que l'article L1235-16 du code du travail est inconventionnel et contraire aux principes généraux du droit et que la demande indemnitaire de Mme [Z] est donc mal fondée.

- Constater, dire et juger que Mme [Z] ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle invoque en lien avec l'erreur de l'administration.

En conséquence,

- Débouter Mme [Z] de sa demande.

A titre subsidiaire,

- Constater, dire et juger que Mme [Z] ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle invoque en lien avec l'erreur de l'administration.

En conséquence,

- Limiter une éventuelle condamnation au titre de l'article L1235-16 du code du travail à la somme correspondant à 6 mois de salaire de

1 524,05euros : 9 144,30 euros

En toute hypothèse,

- Débouter Mme [Z] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner Mme [Z] à verser à la société Tel and com une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 2 000,00 Euros

- Condamner Mme [Z] aux entiers dépens.

Par jugement en date du 30 octobre 2019, le conseil de prud'hommes de Rennes a :

- Ordonné la jonction des affaires inscrites sous les nº RG 18/80. 18/81 et 19/474 au dossier inscrit sous le n° RG 16/587, et qu'il soit statué par un seul et même jugement.

- Dit qu'il y a lieu de rectifier l'erreur matérielle concernant l'oubli de rapporter la condamnation de la société SA Tel and com au paiement d'une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le dispositif du jugement du 12 juillet 2019 et ajoute au dispositif initial :

'- Condamné la SA Tel and com à verser à Mme [Z] une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.'

- Dit que les articles L.1235-10 et L.1235-11 ne sont pas applicables.

- Dit que l'article L.1235-16 n'est pas inconventionnel.

- Condamné la SA Tel and com sur les fondements de l'article L.1235-16 à verser à Madame [Z] la somme de 18 288,60 euros correspondant à 12 mois de salaire à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi consécutif à la nullité de son licenciement.

- Condamné la SA Tel and com à régler à Mme [Z] la somme de 201,93 euros à laquelle s'ajoutent les congés payés afférents pour 20,19 euros au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées;

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement assortie de la consignation des sommes ne relevant pas de l'exécution provisoire de droit en application de l'article R 1454-28 du code du travail, auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations;

- Condamné la Tel and com au paiement à Madame [Z] de la somme de 4500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, englobant l'indemnité concernant le dossier principal du fond (2 500 euros)et les deux dossiers ouverts pour les deux premières QPC (2 000 euros).

- Débouté les parties du surplus de leurs demandes.

- Condamné la SA Tel and com aux entiers dépens, y compris les frais éventuels d'exécution.

***

La SA Tel and com a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 09 décembre 2019.

Ses conclusions d'appel n°3 signifiées par RPVA le 21 août 2020, formulent les prétentions suivantes:

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande de rappel de salaire au titre d'une augmentation de salaire ;

- Dire que les articles L 1235-10 et L1235-11 du code du travail ne sont pas applicables et que la demande de Mme [Z] est mal fondée ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande formée du chef des dits articles ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ;

- Subsidiairement, dire que l'article L1235-16 du code du travail est inconventionnel, contraire aux principes généraux du droit et que la demande indemnitaire de Mme [Z] est mal fondée ;

- Infirmer le jugement du 30 octobre 2019 de ce chef et débouter Mme [Z] de sa demande ;

- Très subsidiairement, limiter une éventuelle condamnation au titre de l'article L1235-16 du code du travail à la somme de 9.144,30 euros (correspondant à 6 mois de salaire: 6 x 1.524,05 euros)

En toute hypothèse:

- Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné Tel and com sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à tout le moins le réformer et ramener une éventuelle condamnation de ce chef à un montant symbolique ;

- Débouter Madame [Z] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Madame [Z] à verser à Tel and com la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Madame [Z] à rembourser à Tel and com les montants qui lui ont été indûment versés en exécution du jugement du conseil de prud'hommes,

- Condamner Madame [Z] aux entiers dépens.

La société Tel and Com développe en substance l'argumentation suivante:

- Le projet d'avenant dont se prévaut Mme [Z] pour demander un rappel de salaire est dépourvu de valeur contractuelle puisqu'il n'est pas signé ; une promotion accordée à la salariée en avril 2013 aurait été contradictoire avec les difficultés économiques alors rencontrées par la société ; elle a été payée en conformité avec le temps de travail de 121,34 heures qui était le sien ;

- La demande d'heures supplémentaires n'est assortie d'aucun décompte ni mode de calcul ; elle n'est pas chiffrée ; le bulletin de paie de juillet 2015 fait en outre apparaître un nombre important d'heures supplémentaires ;

- L'annulation de la décision d'homologation du PSE n'est pas liée à une insuffisance du plan, mais uniquement à l'erreur de l'administration qui n'a pas procédé au contrôle des mesures du plan dans le bon périmètre du groupe de moyens (omettant d'intégrer la holding) ;

- Les articles L 1235-10 alinéas 1 et 2 et L1235-11 du code du travail ne sont pas applicables en l'espèce, dès lors que l'annulation de la décision d'homologation du PSE ne repose pas sur une insuffisance des mesures du PSE ; l'annulation de la décision est exclusivement liée à une erreur de l'administration ; Mme [Z] ne démontre pas en quoi l'erreur de l'administration lui aurait causé un préjudice;

- L'article L1235-16 du code du travail est inconventionnel car il prévoit une condamnation automatique de l'employeur à payer des dommages-intérêts au salarié, sans conditionner cette condamnation à une quelconque responsabilité de l'employeur dans l'illégalité du licenciement ; ce texte est contraire aux articles 10 de la convention n°158 de l'O.I.T. sur le licenciement et 24 de la Charte sociale européenne du 3 mai 1996, au protocole n°1 à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à l'article 6§1 de la dite convention ; il est en outre inconventionnel 'in abstracto' en ce qu'il prévoit un montant 'plancher' de condamnation de six mois de salaire minimum sans conditionner cette condamnation à un quelconque préjudice ; il est également inconventionnel 'in concreto' puisqu'il prévoit une condamnation automatique et forfaitaire de 6 mois de salaires.

Par d'ultimes conclusions transmises par son conseil sur le RPVA le 21 octobre 2022, la SA Tel and com demande à la cour de :

Demande de rappel de salaire au titre d'une augmentation de salaire

- Juger que Madame [Z] ne justifie pas du bien-fondé, en fait et en droit, de sa demande,

En conséquence,

- Confirmer le jugement du 30 octobre 2019 du conseil de prud'hommes de Rennes en ce qu'il a débouté Madame [Z] de sa demande,

Demande de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires

- Juger que Madame [Z] ne justifie pas du bien-fondé, en fait et en droit, de sa demande,

En conséquence,

- Infirmer le jugement du 30 octobre 2019 du conseil de prud'hommes de Rennes,

Statuant à nouveau,

- Débouter Madame [Z] de sa demande,

Demande principale de dommages et intérêts pour nullité du licenciement sur le fondement des articles L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail

A titre principal,

- Juger que la décision d'homologation du PSE n'a pas été annulée par le juge administratif en raison d'une quelconque insuffisance des mesures du PSE,

- Juger que la décision administrative d'homologation du PSE a été annulée par le juge administratif exclusivement en raison d'une erreur de l'Administration,

- Juger que les articles L.1235-10 et L.1235-11 du code du travail ne sont pas applicables et que la demande indemnitaire de Madame [Z] est donc mal fondée,

- Confirmer le jugement du 30 octobre 2019 du conseil de prud'hommes de Rennes, en ce qu'il a débouté Madame [Z] de sa demande,

Demande subsidiaire de dommages et intérêts pour licenciement sans cause sur le fondement de l'article L. 1235-16 du code du travail

A titre principal,

- Déclarer que cette demande est prescrite,

En conséquence,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Tel and com à verser à Madame [Z] l'indemnité de l'article L.1235-16 du code du travail,

Statuant à nouveau,

- Débouter Madame [Z] de sa demande indemnitaire.

A titre subsidiaire,

- Juger que l'article L.1235-16 du code du travail est inconventionnel

« in abstracto » et « in concreto»,

En conséquence,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a jugé que le licenciement économique était sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1235-16 du code du travail,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Tel and com au versement 18 288,60 euros sur le fondement de l'article L.1235-16 du code du travail,

Statuant à nouveau,

- Débouter Madame [Z] de sa demande indemnitaire.

A titre très subsidiaire,

- Juger que Madame [Z] ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle invoque,

En conséquence,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Tel and com au versement de18 288,60 euros sur le fondement de l'article L.1235-16 du code du travail,

Statuant à nouveau,

- Limiter une éventuelle condamnation au titre de l'article L 1235-16 du code du travail à la somme de 9 144,30 Euros (correspondant à 6 mois de salaire : 6 x 1 524,05 Euros),

Sur les autres demandes,

- Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné Tel and com sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Statuant à nouveau, débouter Madame [Z] de cette demande, à tout le moins le réformer et ramener une éventuelle condamnation de ce chef à un montant symbolique,

- Condamner Madame [Z] à rembourser à Tel and com les sommes perçues en exécution des termes du jugement infirmés par la cour de céans,

- Ordonner la déséquestration de la somme placée sur le compte CARPA de l'avocat de Madame [Z] et ordonner sa restitution à Tel and com,

- Juger que toute éventuelle condamnation prononcée ou confirmée par la cour d'appel de céans sera réglée au moyen de la somme séquestrée sur le compte CARPA de l'avocat de Madame [Z], - Ordonner à Madame [Z] la restitution du surplus sur le compte CARPA de l'avocat de Tel and com,

- Débouter Madame [Z] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Madame [Z] à verser à Tel and com la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Madame [Z] à rembourser à Tel and com les montants qui lui ont été indûment versés en exécution du jugement du conseil de prud'hommes,

- Condamner Madame [Z] aux entiers dépens.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par son conseil sur le RPVA le 15 mai 2020, Mme [Z] demande à la cour d'appel de :

A titre principal

Vu les dispositions de l'article L 1235-10 du code du travail ;

- Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Rennes du 30 octobre 2019 en ce qu'il a considéré que l'article L1235-10 du code du travail ne trouvait pas à s'appliquer au cas d'espèce ;

- Dire et juger que la procédure pour licenciement économique de Madame [Z] est nulle ;

- Condamner en conséquence la société Tel and com à verser à Madame [Z] des dommages-intérêts en réparation de la nullité de la procédure de licenciement économique à hauteur de 22 728 euros.

A titre subsidiaire

Vu les dispositions de l'article L 1235-16 du code du travail ;

- Confirmer la décision du conseil de prud'hommes de Rennes en ce qu'il a condamné la société Tel and com sur le fondement de l'article L 1235-16 du code du travail ;

- Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Tel and com à verser des dommages-intérêts à hauteur de 18 288,60 euros ;

- Condamner la société Tel and com à verser à Madame [Z] des dommages-intérêts à hauteur de 22 728 euros.

En tout état de cause

Vu les dispositions de l'avenant du 1er avril 2015

Vu les articles L 3121-28 et suivants et L3123-18 et suivants du code du travail

- Infirmer la décision du conseil de prud'hommes de Rennes en ce qu'il a débouté Madame [Z] de sa demande rappel de salaire au titre de l'augmentation de son salaire contractuel à compter d'avril 2015;

- Condamner la société Tel and com à verser à Madame [Z] les rappels de salaire suivants :

- Avril 2015 : 369,95 euros bruts

- Mai 2015 : 369,95 euros bruts

- Juin 2015 : 369,95 euros bruts

- Juillet 2015 : 298,79 euros bruts

- Les congés payés y afférents à hauteur de 140,86 euros.

- Confirmer la décision du conseil de prud'hommes de Rennes en ce qu'il a condamné la société Tel and com à régler à Madame [Z] la somme de 201,93euros à laquelle s'ajoute des congés payés y afférents pour 20,19 euros au titre des rappels d'heures supplémentaires.

- Débouter la société Tel and com de l'ensemble de ses demandes ;

- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a condamné la société Tel and com à verser à Madame [Z] une indemnité à hauteur de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles liés à l'instance principale au fond et 2 000 euros complémentaires au titre des frais irrépétibles correspondants aux deux QPC ;

- Condamner la société Tel and com à verser à Madame [Z] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile complémentaire en cause d'appel à hauteur de 2 500 euros;

- Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ses autres dispositions ;

- Débouter la société Tel and com de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner la société Tel and com aux entiers dépens.

Mme [Z] développe en substance l'argumentation suivante:

- La société Tel and Com n'a pas respecté les dispostions de l'avenant du 1er avril 2015 et est donc redevable des rappels de salaires correspondants pour la période allant du mois d'avril au mois de juillet 2015 ; la motivation du conseil de prud'hommes est erronée puisque l'employeur ne conteste pas l'existence de l'avenant et fait valoir qu'il a bien été appliqué sur la base du temps partiel de la salariée ;

- L'intégralité des heures de travail effectuées durant la dernière semaine de travail (du 6 au 12 juillet 2015) n'a pas été payée ; or, ces heures sont prises en considération dans le planning hebdomadaire qui mentionne 40 heures au lieu de 28 émargées par le supérieur hiérarchique de la salariée ; les heures de 'solidarité' mentionnées sur le bulletin de paie du mois de juillet ne correspondent pas à des heures complémentaires ou supplémentaires ; un rappel de salaire est donc dû ;

- La décision d'homologation du PSE a été annulée ; l'arrêt du Conseil d'Etat du 24 octobre 2018 qui déclare cette décision illégale est définitif ; l'article L1235-10 alinéas 1 et 2 du code du travail a vocation à s'appliquer en l'espèce ; par conséquent, le licenciement est nul ; l'annulation contentieuse a un effet rétroactif ;

- En constatant que les moyens de la société Sarto Finances n'ont pas été pris en compte pour prendre les mesures du PSE, le Conseil d'Etat caractérise une insuffisance de mesures ; si les moyens financiers de la société Sarto Finances avaient été pris en compte dans le cadre du PSE, les recherches de reclassement auraient été plus approfondies et pouvaient éviter à certains salariés la perte de leur emploi ; il ne s'agit donc pas d'une erreur commise exclusivement par l'administration qui n'a fait qu'apprécier les éléments erronés qui lui ont été soumis par la société Tel and Com ;

- Subsidiairement, il doit être fait application des dispositions de l'article L1235-16 du code du travail ; ce texte est conforme aux conventions internationales applicables.

***

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état le 25 octobre 2022 avec fixation de la présente affaire à l'audience du 22 novembre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues oralement à l'audience.

* * *

Par conclusions notifiées par RPVA le 3 novembre 2022, Mme [Z] demande à la cour de rejeter les conclusions déposées tardivement le 21 octobre 2022 et d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture.

Par conclusions notifiées par RPVA également le 3 novembre 2022, Mme [Z] réitère les demandes formées dans ses conclusions du 15 mai 2020.

Par conclusions notifiées le 17 novembre 2022, la société Tel and Com demande à la cour de rejeter la demande de voir écartées les conclusions de Tel and Com signifiées le 21 octobre 2022 et de statuer ce que de droit sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.

Elle réitère pour le surplus les demandes contenues dans ses conclusions du 21 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- Sur les demandes de rejet de conclusions et de révocation de l'ordonnance de clôture:

L'article 15 du code de procédure civile dispose: 'Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense'.

En vertu des dispositions de l'article 802 du code de procédure civile, auxquelles renvoie l'article 907 du même code relatif à la procédure devant la cour d'appel, après l'ordonnance de clôture aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

L'article 803 du même code dispose que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

En l'espèce, la société Tel and Com, appelante, a notifié des conclusions successivement les 5 mars 2020, 11 août 2020, 18 août 2020 et 21 octobre 2022.

Dans ce dernier jeu de conclusions signifié le vendredi 21 octobre 2022 après-midi, alors que l'ordonnance de clôture devait être rendue le mardi 25 octobre 2022 à 9 heures, la société Tel and Com a soulevé, pour la première fois depuis l'introduction de l'instance, le moyen tiré de la prescription de la demande de Mme [Z] fondée sur les dispositions de l'article L 1235-16 du code du travail.

Alors que les dispositions de ce dernier texte ont été invoquées par la salariée en première instance et que l'appel a été interjeté le 9 décembre 2019, l'appelante ayant depuis lors notifié trois jeux de conclusions entre le 5 mars 2020 et le 18 août 2020, aucun élément objectif ne justifie l'invocation aussi tardive d'une telle fin de non-recevoir, le fait que celle-ci puisse être soulevée en tout état de la procédure devant être conjugué avec le principe du contradictoire ainsi qu'avec celui de la loyauté des débats, dont le respect s'oppose à ce que des moyens et prétentions soient soulevés en dernière minute, chaque partie devant être en mesure de disposer du temps nécessaire pour apporter une réponse complète, argumentée et étayée aux moyens soulevés par son adversaire.

Dans ces circonstances, le fait de signifier des conclusions soulevant pour la première fois en appel la prescription d'une demande moins de deux jours ouvrés avant que ne soit prononcée l'ordonnance de clôture annoncée par un avis de fixation du 8 décembre 2021, caractérise un comportement contraire à la loyauté des débats, en ce que la société Tel and Com a empêché Mme [Z] de faire valoir ses moyens en temps utile, peu important le fait que celle-ci ait elle-même conclu après la clôture pour apporter dans l'urgence des éléments de réponse aux moyens tardifs soulevés par son adversaire, circonstance qui ne saurait justifier la révocation de l'ordonnance de clôture.

Dans ces conditions, les conclusions signifiées par la société Tel and Com le 21 octobre 2022 seront déclarées irrecevables.

En l'absence de cause grave justifiée, les conclusions notifiées postérieurement à la clôture sont irrecevables et seront donc également écartées des débats.

Il sera en conséquence statué sur les prétentions contenues dans les dernières conclusions régulièrement signifiées de la société Tel and com en date du 21 août 2020 et de celles précitées de Mme [Z] en date du 15 mai 2020.

2- Sur les demandes de rappels de salaires:

2-1: Au titre de l'avenant du 1er avril 2015:

Conformément aux principes du droit commun, le contrat de travail tient lieu de loi entre les parties.

Aux termes du contrat de travail conclu le 12 septembre 2003, Mme [Z] avait un statut de conseillère de vente, niveau 2 - coefficient 150 de la convention collective et le salaire mensuel était de 1.145,54 euros brut, sur la base d'un temps de travail modulé sur une période annuelle, fixé, compte tenu de la date d'embauche, à 1269 heures de travail effectif entre le 15 septembre 2003 et le 31 mai 2004.

Mme [Z] se prévaut d'un avenant en date du 1er avril 2005, aux termes duquel sa qualification devient celle de Responsable d'équipe, niveau 6 coefficient 260 avec le statut d'agent de maîtrise, la rémunération brute mensuelle étant portée à hauteur de 1.850 euros.

S'il est constant que l'avenant litigieux versé aux débats par la salariée n'est pas signé des parties au contrat, peu important qu'il ait été établi sur un papier à en-tête daté, par annotation en bas de page, du mois d'août 2013, il doit être relevé que les bulletins de salaire relatifs à la période du mois d'avril au mois de juillet 2015 mentionnent non pas la qualification de conseillère de vente, mais celle de Responsable de magasin - coefficient 260 - niveau 6, en conformité s'agissant du niveau de qualification, avec les termes de l'avenant non signé, ainsi d'ailleurs qu'avec le niveau de rémunération puisqu'il est indiqué sur les dits bulletins de paie 'Sal Tplein: 1 850,00".

La société Tel and Com soutient que le salaire versé de 1.480,05 euros brut pour la période litigieuse, correspond au temps partiel de la salariée et donc à la convention des parties.

Or, l'avenant non signé du 1er avril 2015 fait état, sans aucune limitation ni réserve, de la fixation d'une 'rémunération mensuelle brute de 1.850 euros' sans référence à un prorata devant être appliqué au titre d'un temps partiel, tandis que les bulletins de paie versés aux débats n'indiquent pas le nombre d'heures de travail effectuées et que des plannings signés de la salariée pour les mois d'avril à juillet 2015 ne sont pas versés aux débats, pas plus que tous autres éléments de nature à accréditer la thèse d'une minoration du temps de travail.

Le seul planning produit pour la période du 6 au 12 juillet 2015 ne peut pas plus utilement asseoir la thèse de l'employeur alors que précisément pour cette période, la salariée soutient avoir effectué 40 heures de travail effectif.

Dans ces conditions, la demande de rappel de salaire formée par Mme [Z] est justifiée et il convient, par voie d'infirmation du jugement entrepris, d'y faire droit, en condamnant la société Tel and Com à payer à la salariée la somme correspondante de 1.408,64 euros brut [(369,95 x 3) + 298,79] et celle de 140,86 euros brut au titre des congés payés afférents.

2-2: Au titre du mois de juillet 2015:

Le planning hebdomadaire de Mme [Z] pour la période du 6 au 12 juillet 2015, dont il n'est pas contesté qu'il est issu du logiciel de gestion du temps de travail de la société Tel and Com, mentionne 39,5 heures réalisées sur 28 heures théoriquement prévues.

Mme [Z] a annoté ce planning et affirme avoir réalisé non pas 39,5 heures mais 40 heures de travail durant la semaine litigieuse, soit 12 heures supplémentaires.

En application des dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail, la salariée présente ainsi des éléments permettant à l'employeur de répondre sur la réalité du temps de travail.

Pour toute explication, la société Tel and Com affirme que le bulletin de salaire du mois de juillet 2015 'fait bien apparaître le règlement d'un nombre important d'heures supplémentaires'.

L'examen de ce bulletin de salaire permet toutefois de constater le règlement de seulement 4,08 heures supplémentaires au taux horaire majoré de 10% et '7H solidarité 15/16" sans aucun montant correspondant.

Conformément au décompte non utilement contesté figurant dans les conclusions de la salariée, le salaire dû pour 12 heures (dont 7 heures complémentaires et 5 heures supplémentaires) s'élève à 201,93 euros, dont il convient de déduire les 4,08 heures déjà payées par l'employeur (54,74 euros), soit un solde restant dû de 147,19 euros brut outre 14,72 euros brut au titre des congés payés afférents, sommes que la société Tel and Com sera condamnée à payer à Mme [Z] par voie d'infirmation du jugement entrepris sur le quantum alloué.

3- Sur la demande en nullité du licenciement:

L'artocle L 1235-10 du code du travail dispose:

'Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le licenciement intervenu en l'absence de toute décision relative à la validation ou à l'homologation ou alors qu'une décision négative a été rendue est nul.

En cas d'annulation d'une décision de validation mentionnée à l'article L1233-57-2 ou d'homologation mentionnée à l'article L1233-57-3 en raison d'une absence ou d'une insuffisance de plan de sauvegarde de l'emploi mentionné à l'article L1233-61, la procédure de licenciement est nulle.

Les deux premiers alinéas ne sont pas applicables aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaires'.

L'article L 1235-11 du même code dispose: 'Lorsque le juge constate que le licenciement est intervenu alors que la procédure de licenciement est nulle, conformément aux dispositions des deux premiers alinéas de l'article L1235-10, il peut ordonner la poursuite du contrat de travail ou prononcer la nullité du licenciement et ordonner la réintégration du salarié à la demande de ce dernier, sauf si cette réintégration est devenue impossible, notamment du fait de la fermeture de l'établissement ou du site ou de l'absence d'emploi disponible.

Lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de son contrat de travail ou lorsque la réintégration est impossible, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois'.

Il est constant que par un arrêt rendu le 7 février 2018, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 11 février 2016 qui avait rejeté l'appel formé par les sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra contre le jugement du tribunal administratif de Lille ayant annulé la décision de la DIRECCTE du Nord-Pas de Calais du 18 mai 2015 ayant homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) des dites sociétés.

Il importe de relever qu'aux termes de cet arrêt, le Conseil d'Etat a jugé: '(...) qu'en jugeant ainsi, que l'insuffisance des recherches de postes de reclassement internes au groupe Squadra était, à elle seule, de nature à caractériser une insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, alors qu'il lui appartenait de considérer les mesures du plan dans leur ensemble, pour apprécier si elles étaient propres à satisfaire les objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, la cour administrative d'appel a entaché sa décision d'une erreur de droit (...)'.

Le Conseil d'Etat ordonnait par cette même décision le sursis à statuer afin de permettre un débat contradictoire sur la question consistant à déterminer si la société Sarto Finances, détenant à 100% la société Squadra, laquelle contrôle les sociétés Tel and Com et L'enfant d'aujourd'hui, doit être regardée comme une entreprise dominante au sens des dispositions des articles L233-1 et suivants du code de commerce.

Par un arrêt du 24 octobre 2018, le Conseil d'Etat, annulant la décision d'homologation du PSE, a motivé comme suit sa décision: 'Considérant qu'il est constant que l'administration n'a pas tenu compte des moyens financiers dont disposait cette société Sarto Finances ; qu'une telle omission a, par suite, entaché l'illégalité la décision d'homologation litigieuse (...)

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans une telle circonstance, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen tiré du caractère insuffisant des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi (...)'.

Il résulte ainsi des décisions rendues par le Conseil d'Etat que l'annulation de la décision administrative d'homologation du PSE n'a pas été prise pour insuffisance du dit PSE mais pour le défaut de prise en compte des moyens financiers de la société holding Sarto Finances, ce qui a d'ailleurs conduit la juridiction suprême de l'ordre administratif à préciser qu'un tel fondement excluait d'avoir à examiner la question du caractère insuffisant des mesures prévues par le PSE.

Dès lors, Mme [Z] est mal fondée à soutenir que l'erreur d'appréciation commise par l'administration, censurée par la juridiction administrative, quant au périmètre du groupe de moyens pris en compte dans le cadre du contrôle du PSE, caractériserait l'insuffisance du dit PSE, ce qui ne résulte nullement des décisions susvisées du Conseil d'Etat.

Il ne peut pas plus être considéré, au motif pris de l'effet rétroactif de la décision d'annulation prise par le Conseil d'Etat, que le licenciement est intervenu en l'absence de toute décision relative à la validation ou à l'homologation ou alors qu'une décision négative a été rendue, au sens des dispositions de l'article L1235-10 susvisé du code du travail, puisque précisément ce texte distingue dans ses deux premiers alinéas deux hypothèses distinctes à savoir, d'une part celle du licenciement prononcé en l'absence ou nonobstant une décision de refus d'homologation du PSE, d'autre part, celle du licenciement prononcé en présence d'une telle décision administrative ultérieurement annulée en raison d'une absence ou d'une insuffisance du PSE.

Ainsi et sans qu'il soit justifié d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties sur la responsabilité de la société Tel and Com dans la survenance de l'erreur commise par l'administration qui est à l'origine de l'annulation de la décision d'homologation, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que les articles L 1235-10 et L 1235-11 du code du travail étaient inapplicables en l'espèce.

En vertu de l'article L 1235-16 du code du travail, l'annulation de la décision de validation mentionnée à l'article L1233-57-2 ou d'homologation mentionnée à l'article L1233-57-3 pour un motif autre que celui mentionné au dernier alinéa du présent article et au deuxième alinéa de l'article L. 1235-10 donne lieu, sous réserve de l'accord des parties, à la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

A défaut, le salarié a droit à une indemnité à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L1234-9 (...)'.

Il est constant que cette indemnité répare le préjudice résultant pour le salarié du caractère illicite de son licenciement et qu'elle ne se cumule pas avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui répare le même préjudice lié à la perte injustifiée de l'emploi.

S'agissant du moyen tiré de l'inconventionnalité de ce texte, la société Tel and Com fait valoir qu'il entraîne une condamnation automatique de l'employeur sans conditionner celle-ci à une quelconque responsabilité de l'employeur dans l'illégalité du licenciement.

En premier lieu, il doit être observé que le texte en cause, qui a pour objet d'assurer aux salariés une indemnisation minimale de la perte injustifiée de leur emploi en cas de licenciement non suivi de réintégration, ne fait pas obstacle, sur le recours de l'employeur, à la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice direct et certain résultant de l'illégalité de la décision d'homologation.

En second lieu, est invoquée la violation des dispositions des articles 10 de la convention n°158 de l'O.I.T. sur le licenciement et 24 de la Charte sociale européenne du 3 mai 1996.

Ce second texte, eu égard à l'importance de la marge d'appréciation laissée aux parties contractantes par les termes de la Charte sociale européenne révisée, rapprochés de ceux des parties I et III du même texte, n'a pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.

L'article 10 de la convention n°158 de l'O.I.T. sur le licenciement consacre le droit des travailleurs ayant fait l'objet d'un licenciement injustifié à percevoir une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

La société Tel and Com soutient que le versement d'une telle indemnité suppose que la rupture soit imputable à l'employeur et que les dispositions de l'article L1235-16 méconnaitraient ce principe de responsabilité.

Or, par l'effet de l'annulation de la décision d'homologation mentionnée à l'article L1233-57-3, la perte d'emploi du salarié par suite du licenciement pour motif économique notifié par l'employeur qui est donc auteur de la décision de rupture, se trouve privée de cause et doit être indemnisée à défaut de réintégration.

Un tel mécanisme ne méconnaît nullement les dispositions précitées de l'article 10 de la convention n°158 de l'O.I.T. sur le licenciement, en ce qu'il se traduit précisément par l'octroi au salarié licencié nonobstant l'annulation de la décision de validation du PSE, d'une indemnité minimale, que le juge a le pouvoir d'évaluer à la hausse en fonction des circonstances de l'espèce qui lui sont soumises.

En troisième lieu, sont invoqués successivement, la violation du protocole n°1 à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et la violation des dispositions de l'article 6§1 de la dite convention.

L'atteinte subie par l'employeur sur son patrimoine, par l'effet d'une condamnation prononcée en vertu du texte querellé, trouve sa cause dans une décision de rupture du contrat de travail qu'il a prise et qui se trouve privée de fondement par suite de l'annulation de la décision de validation du PSE ; l'argument consistant à affirmer que l'illégalité du licenciement incombe exclusivement à l'administration n'est donc pas pertinent, dès lors que la décision de rupture est bien le fait de l'employeur auquel il appartient au demeurant de communiquer à l'administration, lorsqu'elle exerce son contrôle, tous éléments utiles à la détermination du périmètre du groupe.

L'argument tiré de la violation de l'article 6§1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales se heurte au fait que, comme il a été rappelé, l'employeur n'est nullement privé, comme cela est allégué à tort, d'un recours effectif par l'effet de l'application de l'article L1235-16 du code du travail, puisqu'il dispose d'une action contre l'Etat en réparation du préjudice qu'il estime subir du fait de l'illégalité de la décision d'homologation.

Enfin, l'argument tiré de l'inconventionnalité du texte en ce qu'il prévoit un montant 'plancher' de condamnation sans conditionner celle-ci à un préjudice, ne résiste pas à l'examen en ce que les dispositions de l'article L 1235-16 du code du travail qui permettent une indemnisation raisonnable et mesurée de la perte injustifiée de l'emploi du salarié en fixant une indemnisation minimale, sont de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT).

Au résultat de ces développements, la demande tendant à voir déclarer l'inconventionnalité de l'article L1235-16 du code du travail doit être rejetée et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Mme [Z] ne justifie d'aucun élément pertinent justifiant de porter à 12 mois l'indemnisation devant être mise à la charge de la société Tel and Com.

En considération des circonstances de l'espèce, du salaire de référence (1.850 euros) et de l'ancienneté de la salariée (11 ans et 10 mois), la société Tel and Com sera condamnée à lui payer la somme de 12.000 euros à titre d'indemnité en application de l'article L 1235-16 du code du travail.

4- Sur les dépens et frais irrépétibles:

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la société Tel and Com, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.

Elle sera en conséquence déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas justifié d'infirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'indemnité allouée à Mme [Z] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

S'agissant des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, l'équité commande de condamner la société Tel and Com à payer à Mme [Z] la somme de 2.000 euros sur ce même fondement juridique.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevables les conclusions notifiées par la société Tel and Com le 21 octobre 2022 ainsi que les conclusions signifiées par les deux parties postérieurement à l'ordonnance de clôture du 25 octobre 2022 ;

Infirme partiellement le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société Tel and Com à payer à Mme [Z] les sommes suivantes:

- 1.408,64 euros brut à titre de rappel de salaire en application de l'avenant du 1er avril 2015

- 140,86 euros brut au titre des congés payés afférents

- 147,19 euros brut à titre de rappel de salaire sur le mois de juillet 2015

- 14,72 euros brut au titre des congés payés afférents

- 12.000 euros à titre d'indemnité en application de l'article L 1235-16 du code du travail ;

Confirme pour le surplus le jugement entrepris ;

Déboute la société Tel and Com de sa demande tendant à voir déclarer inconventionnel l'article L1235-16 du code du travail ;

Déboute la société Tel and Com de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Tel and Com à payer à Mme [Z] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 7ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 19/07905
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;19.07905 ?
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