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25/01/2023 | FRANCE | N°19/00401

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 25 janvier 2023, 19/00401


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 19/00401 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PO55













Société [3]



C/



URSSAF [Localité 1]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEU

PLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 JANVIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe LE BOUDEC, lo...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 19/00401 - N° Portalis DBVL-V-B7D-PO55

Société [3]

C/

URSSAF [Localité 1]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 JANVIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Novembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 25 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 07 Décembre 2018

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de l'Ille-et-Vilaine

Références : 21400973

****

APPELANTE :

La société SAS [3],

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Alexandre ROUMIEU, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Christelle BOULOUX-POCHARD, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

L'UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Madame [C] [H] en vertu d'un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE

A la suite d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garanties des salaires 'AGS', opéré par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales [Localité 1] (l'URSSAF) sur la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012, la société [3] (la société) s'est vue notifier une lettre d'observations du 1er octobre 2013 d'un montant de 91 505 euros portant sur 18 chefs de redressement et une observation pour l'avenir.

Par lettre du 4 novembre 2013, la société a formulé des observations sur les chefs de redressement :

- retraite supplémentaire : non-respect du caractère collectif (chef n° 8) ;

- transaction suite à faute grave : indemnité compensatrice de préavis (chef n° 13) ;

- assiette minimum des cotisations : majorations pour heures supplémentaires (chef n° 17) ;

En réponse, par lettre du 26 novembre 2016, les inspecteurs ont maintenu les chefs de redressement contestés mais, reconnaissant que la formule de calcul était incorrecte s'agissant du chef n°17, ont ramené la régularisation sur ce point à 3 265 euros et le montant du redressement total à 81 294 euros.

L'URSSAF a notifié à la société une mise en demeure de payer datée du 6 décembre 2013, reçue le 9 décembre, pour un montant de 92 415 euros, soit 81 296 euros en cotisations et 11 119 euros de majorations de retard.

La société a saisi la commission de recours amiable de l'organisme par lettre du 9 janvier 2014.

Par décision du 19 juin 2014, cette dernière a confirmé le bien-fondé de l'intégralité des chefs de redressement contestés.

Le 3 octobre 2014, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Ille-et-Vilaine, lequel, par jugement du 7 décembre 2018, a :

- validé la procédure de contrôle et le redressement opéré sur la forme ;

- minoré le chef de redressement n° 8 relatif à la retraite supplémentaire à un montant de 2 197 euros ;

- annulé le chef de redressement n° 13 relatif aux transactions suite à licenciement pour faute grave ;

- débouté la société de sa demande d'annulation des chefs de redressement n° 6, 7, 15 et 17 ;

- confirmé la décision de la commission de recours amiable sur les autres chefs de redressement ;

- débouté l'URSSAF de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire.

Le 16 janvier 2019, la société a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 21 décembre 2018.

Par ses écritures parvenues au greffe le 18 avril 2019 auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les moyens tendant à la nullité du redressement opéré et, statuant de nouveau, de :

D'une part,

- constater les importantes discordances :

*entre la lettre d'observations et la mise en demeure ;

*entre la mise en demeure la décision de la commission de recours amiable ;

Et par conséquent,

- annuler la mise en demeure du 6 décembre 2013 ;

D'autre part,

- constater l'absence de communication par écrit du mode de calcul des chefs de redressement n° 6, 7, 15 et 17 ;

Et par conséquent,

- annuler lesdits chefs de redressements n° 6, 7, 15 et 17.

Par ses écritures parvenues au greffe le 2 avril 2021 auxquelles s'est référé et qu'a développées son représentant à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris ;

- dire et juger l'absence de nullité de la mise en demeure ;

- constater l'absence de nullité de la décision de la commission de recours amiable ;

- confirmer la validité de la lettre d'observations quant au respect du principe du contradictoire pour les chefs de redressements n° 6, n° 7, n° 15 et n° 17 ;

- confirmer la validité de la procédure de contrôle et de recouvrement ;

- condamner la société au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeter en conséquence les demandes et prétentions de la société.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la régularité de la mise en demeure

La société fait valoir que les discordances existant entre la lettre d'observations et la mise en demeure quant aux montants réclamés pour chacune des années concernées l'ont empêchée de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation, de sorte que ladite mise en demeure doit être annulée. Elle ajoute qu'il en est de même pour la décision de la commission de recours amiable s'agissant des montants indiqués pour les chefs de redressement n°1, 3 et 4, différents de ceux énoncés dans la lettre d'observations.

L'URSSAF réplique que la différence de 2 euros entre la lettre d'observations, minorée le 26 novembre 2012 suite aux observations de la société, et la mise en demeure ne saurait entacher d'irrégularité la procédure et justifier l'annulation de ladite mise en demeure.

Sur ce :

En application des articles L.244-2 et R.244-1 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans un délai imparti doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice (2e Civ., 9 février 2017, n° 16-12.189).

La mise en demeure qui se rapporte à un exercice donné, indique la nature des cotisations réclamées et distingue le montant dû au principal des majorations de retard, permet au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation (2e Civ., 24 septembre 2020, n°19-17.802).

La mise en demeure du 6 décembre 2013 produite aux débats, mentionne, outre le délai d'un mois pour s'acquitter des sommes réclamées :

- le motif de recouvrement (Contrôle. Chefs de redressement notifiés le 03/10/13 - article R. 243-59 du code de la sécurité sociale) ;

- la nature des cotisations (régime général) ;

- la période de référence (les années 2010, 2011 et 2012);

- les montants en cotisations, contributions et majorations de retard pour chaque année avec un total de 92 415 euros (81 296 euros de cotisations et contributions et 11 119 euros de majorations de retard).

S'il est exact que le montant des cotisations mentionné dans la lettre d'observations (91 505 euros) n'est pas celui indiqué dans la lettre de mise en demeure (81 296 euros), la cour rappelle que par lettre du 26 novembre 2013, les inspecteurs de l'URSSAF ont minoré l'un des trois chefs de redressement discutés par la société (chef n° 17), le ramenant de 13 476 euros à 3 265 euros, de sorte que le montant total du redressement a été réduit à 81 294 euros :

- 20 486 euros pour 2010,

- 31 521 euros pour 2011,

- 29 287 euros pour 2012.

Le montant des cotisations (81 296 euros) visé dans la mise en demeure se répartit comme suit :

- 20 489 euros pour 2010 (soit une différence de 3 euros en plus),

- 31 521 euros pour 2011,

- 29 286 euros pour 2012 (soit une différence de 1 euro en moins).

A la lumière de ce qui précède, force est de constater que les mentions précises et complètes de la mise en demeure permettaient à la société, par renvoi à la lettre d'observations qu'elle avait reçue et qui a présenté ses observations aux inspecteurs du recouvrement en obtenant de leur part une réponse motivée le 26 novembre 2013, de connaître la cause, la nature et l'étendue de ses obligations.

Comme l'ont à juste titre retenu les premiers juges, la seule différence, infime, de 2 euros entre le montant de la somme en cotisations réclamée dans la mise en demeure et le montant de celle faisant l'objet de la lettre d'observations rectifiée le 26 novembre 2013 n'empêchait pas cette connaissance et n'est donc pas de nature à justifier l'annulation de la mise en demeure.

La cour observe par ailleurs, à l'instar des premiers juges et contrairement à ce que soutient la société, que la ventilation des sommes redressées en cotisations opérée par la commission de recours amiable dans un tableau en pages 1 et 2 de sa décision confirmative en incluant les rectifications effectuées par les inspecteurs le 26 novembre 2013 s'agissant du chef n° 17 (porté au n° 18 dudit tableau), est parfaitement concordante avec la lettre d'observations rectifiée et la mise en demeure. Les quelques interversions de numérotation des chefs de redressement dans ce tableau sont aisément repérables et ne sont source d'aucune confusion.

Sur la communication du mode de calcul de certains chefs de redressement

La société fait également valoir que l'information sur le mode de calcul du redressement envisagé dans la lettre d'observations permet au cotisant de vérifier le bien-fondé des cotisations réclamées et de formuler utilement des observations ; qu'il s'agit donc d'une garantie essentielle du principe du contradictoire dont la violation est sanctionnée par la nullité du redressement ; que si, en l'espèce, les inspecteurs indiquent avoir communiqué à la société le détail de la régularisation lors de l'entretien de clôture s'agissant des chefs n°6, 7, 15 et 17, aucun élément de preuve ne vient corroborer cette affirmation, étant rappelé que cette communication doit être donnée par écrit et non simplement oralement ; que les quatre chefs précités doivent par conséquent être annulés.

L'URSSAF réplique que la société n'a jamais indiqué lors de la période contradictoire qu'elle ne disposait pas des éléments ayant conduit au redressement sur les quatre points qu'elle évoque ; que, dans sa réponse à la lettre d'observations contestant notamment le chef n°17, elle reprend en détail la formule de calcul dont elle dit même qu'elle est erronée, ce qui, du reste, conduira à la rectification dudit chef n°17 ; que les inspecteurs ont clairement indiqué les bases des chefs de redressement contestés, de sorte que la société, parfaitement informée du mode de calcul et des bases de redressement, est mal fondée dans sa critique, étant in fine rappelé que la Cour de cassation n'impose pas de préciser la liste des salariés concernés ; que le principe du contradictoire a dans ces conditions été pleinement respecté.

Sur ce :

L'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dispose dans sa version applicable :

« A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements envisagés ».

L'ensemble des diligences prévues par ce texte, et notamment l'information

portant sur le mode de calcul du redressement envisagé, contenue dans la lettre d'observations, a pour objet de permettre au cotisant de vérifier le bien-fondé des cotisations revendiquées et de formuler utilement ses observations en réponse. Le principe du contradictoire, dans sa déclinaison qui est de permettre au cotisant de comprendre l'étendue de sa dette, constitue un des principes essentiels de la procédure.

L'agent de contrôle n'est pas tenu de préciser dans la lettre d'observations le détail des calculs effectués pour chaque chef de redressement (2e Civ., 28 novembre 2019, pourvoi n° 18-20.656) mais il doit en poser les principes directeurs.

La lettre d'observations qui ne permet pas au cotisant de connaître le mode de calcul du redressement envisagé contrevient aux dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale sus-visé.

En l'espèce, pour chacun des quatre chefs de redressement concernés, les inspecteurs du recouvrement ont indiqué dans la lettre d'observations que le détail de la régularisation est donné en annexe.

La société n'a jamais remis en cause cette précision en phase contradictoire. Dans sa réponse du 4 novembre 2013, elle n'a pas remis en cause les chefs de redressement n° 6, 7 et 15 et ne s'est pas prévalue d'un manquement au principe du contradictoire ; sa contestation détaillée, dans cette réponse, de la formule de calcul employée par les inspecteurs pour le chef n°17, laisse apparaître que les modes de calcul de la régularisation lui avaient bien été communiqués, comme indiqué par les inspecteurs. Rien ne permet ainsi de remettre en cause les affirmations de ces derniers quant à la communication des éléments de calcul en annexe de la lettre d'observations.

La lettre d'observations reprend pour le surplus un tableau récapitulatif pour chaque chef de redressement, comportant les années concernées, les catégories de personnel, la base de calcul, le taux et les cotisations ; c'est par conséquent à bon droit que les premiers juges ont considéré que la société était suffisamment informée des erreurs ou omissions qui lui étaient reprochées ainsi que des bases du redressement et a été mise en mesure de répondre.

La demande d'annulation des quatre chefs contestés est de ce fait mal fondée.

Les parties ne remettant pas en cause le jugement entrepris pour le surplus, celui-ci sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il n'apparaît pas équitable de laisser à la charge de l'URSSAF ses frais irrépétibles.

La société sera en conséquence condamnée à lui verser à ce titre la somme de 1 500 euros.

S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de la société qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris ;

y ajoutant :

Condamne la société [3] à verser à l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales [Localité 1] une indemnité de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société [3] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 19/00401
Date de la décision : 25/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-25;19.00401 ?
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