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25/01/2023 | FRANCE | N°18/05212

France | France, Cour d'appel de Rennes, 9ème ch sécurité sociale, 25 janvier 2023, 18/05212


9ème Ch Sécurité Sociale





ARRÊT N°



N° RG 18/05212 - N° Portalis DBVL-V-B7C-PBU4













URSSAF BRETAGNE



C/



SCI [2]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :











Copie certifiée conforme délivrée

le:



à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇA

IS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 JANVIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,



GREFFIER :



Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des d...

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 18/05212 - N° Portalis DBVL-V-B7C-PBU4

URSSAF BRETAGNE

C/

SCI [2]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 JANVIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aurélie GUEROULT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère,

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Novembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 25 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats ;

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 13 Juillet 2018

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de l'Ille-et-Vilaine

Références : 21400305

****

APPELANTE :

L'UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES BRETAGNE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Madame [A] [M] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMÉE :

SCI [2]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Christelle BOULOUX POCHARD, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE :

A la suite d'une vérification de l'application de la législation sociale concernant les infractions aux interdictions de travail dissimulé effectuée par les services de police dont le procès verbal a été transmis au parquet, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bretagne (l'URSSAF) a notifié à la SARL [3], aux droits de laquelle vient depuis le 1er novembre 2017 la SCI [2] (la société), une lettre d'observations du 23 juillet 2013 d'un montant total de 18 225 euros, portant sur les trois chefs de redressement suivants :

- travail dissimulé avec verbalisation - dissimulation d'emploi salarié : assiette réelle (chef n°1) ;

- annulation des réductions Fillon suite au constat de travail dissimulé (chef n°2) ;

- annulation des déductions patronales 'loi TEPA' suite au constat de travail dissimulé (chef n°3).

Par lettre du 19 août 2013, la société a fait valoir ses observations sur le chef de redressement n°1, concernant le constat d'un travail dissimulé pour M. [G] [T].

En réponse, par lettre du 9 octobre 2013, l'inspecteur a maintenu ce chef de redressement.

L'URSSAF a adressé à la société une mise en demeure du 19 décembre 2013 tendant au paiement des cotisations notifiées dans la lettre d'observations et des majorations de retard y afférentes, pour un montant de 19 875 euros.

Le 15 janvier 2014, la société a saisi la commission de recours amiable de l'organisme, soulevant :

- le statut d'associé majoritaire non gérant de M. [T] ;

- l'absence de transmission du procès-verbal établi par l'officier de police judiciaire ;

- l'irrégularité de la lettre d'observations notifiée par l'URSSAF ;

- l'absence de lien de subordination entre M. [G] [T] et M. [P] [T], son fils, gérant de la société ;

- l'irrégularité du mode de calcul retenu pour évaluer le chef de redressement n°1.

Se prévalant d'une décision implicite de rejet, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Ille-et-Vilaine le 12 mars 2014.

Par décision du 3 juillet 2014, la commission de recours amiable a confirmé le bien-fondé des redressements contenus dans la lettre d'observations.

Par ailleurs, le 13 octobre 2016, suite à la cession du fonds de commerce de la société [3], l'URSSAF a fait opposition au prix de vente pour un montant de 13 524,29 euros.

Par jugement du 13 juillet 2018, le tribunal a :

- annulé le redressement dont la société [3] aux droits de laquelle vient la société [2] a fait l'objet suivant une lettre d'observations du 23 juillet 2013 et d'une mise en demeure d'un montant total de 19 875 euros du 19 décembre 2013 ;

- dit que le séquestre réalisé auprès de Me [F], à l'occasion de la vente du fonds de commerce en octobre 2016 suite à une opposition de l'URSSAF devra être levé ;

- condamné l'URSSAF de Bretagne à verser à la société [2] venant aux droits de la société [3] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration adressée le 26 juillet 2018, l'URSSAF a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 23 juillet 2018.

Par ses écritures n°2 parvenues au greffe le 23 avril 2021 auxquelles s'est référé son représentant à l'audience, l'URSSAF demande à la cour de :

Sur la forme,

- constater que M. [K] [U], en sa qualité de directeur régional adjoint disposait d'une délégation de signature du directeur de l'URSSAF Bretagne ;

- confirmer l'absence de nullité de la procédure de contrôle ;

Sur le fond,

- infirmer le jugement entrepris ;

- constater la démonstration d'un lien de subordination caractérisé ;

- confirmer le redressement pour travail dissimulé ;

- dire et juger la proratisation des exonérations Fillon et TEPA non fondée ;

- condamner la société au paiement de la somme de 13 300 euros (soit 12 158 euros de cotisations et 1 142 euros de majorations de retard), sans préjudice des majorations de retard complémentaires ;

- condamner la société au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter la société de l'ensemble de ses demandes ;

- délivrer un jugement revêtu de la formule exécutoire.

Par ses écritures n°2 parvenues au greffe le 26 juillet 2021 auxquelles s'est référé son conseil à l'audience, la société demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel, en ce qu'il a annulé intégralement le redressement notifié à la société [3] par mise en demeure du 19 décembre 2013, aux droits de laquelle vient la société [2], pour un montant de 19 875 euros, outre les majorations et pénalités afférentes ;

- confirmer, en conséquence, le jugement en ce qu'il a ordonné la levée du séquestre réalisé auprès de Me [F], à l'occasion de la vente du fonds de commerce, en octobre 2016, suite à une opposition de l'URSSAF ;

A titre éminemment subsidiaire, en l'absence d'annulation intégrale du redressement,

- dire et juger, en application de l'article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale, que le redressement au titre des déductions TEPA devra être réduit à 252,99 euros et que le redressement au titre des réductions Fillon devra être réduit à 2 414,22 euros ;

En tout état de cause,

- confirmer le jugement dont appel, en ce qu'il a condamné l'URSSAF à lui verser de l'article 700, mais porter le montant d'article 700 pour les deux instances à 3 000 euros ;

- condamner l'URSSAF au paiement des frais éventuels d'exécution liés à l'arrêt à venir ;

- condamner la même aux entiers dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur la régularité de la procédure de recouvrement :

Aux termes de l'article R. 133-8 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 8 mai 2010 au 1er janvier 2014 :

' Lorsqu'il ne résulte pas d'un contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 du présent code ou de l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, tout redressement consécutif au constat d'un délit de travail dissimulé est porté à la connaissance de l'employeur ou du travailleur indépendant par un document daté et signé par le directeur de l'organisme de recouvrement, transmis par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Ce document rappelle les références du procès-verbal pour travail dissimulé établi par un des agents mentionnés à l'article L. 8271-7 du code du travail et précise la nature, le mode de calcul et le montant des redressements envisagés. Il informe l'employeur ou le travailleur indépendant qu'il a la faculté de présenter ses observations dans un délai de trente jours et de se faire assister par une personne ou un conseil de son choix. [...]'.

En l'espèce, la lettre d'observations du 23 juillet 2013 adressée à la société est signée par le directeur régional adjoint, M. [K] [U], pour le compte du directeur de l'URSSAF (pièce n°1 de la société).

La société soutient qu'elle ne pouvait être signée que par le directeur, l'article R. 133-8 sus-visé ne prévoyant pas de possibilité de délégation.

Or, l'article R. 122-3 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er avril 2010 au 17 mai 2018 dispose :

'Il [le directeur] peut déléguer, sous sa responsabilité, une partie de ses pouvoirs à certains agents de l'organisme. Il peut donner mandat à des agents de l'organisme en vue d'assurer la représentation de celui-ci en justice et dans les actes de la vie civile.

En cas de vacance d'emploi, d'absence momentanée ou d'empêchement du directeur, ses fonctions sont exercées par le directeur adjoint. En cas d'absence ou d'empêchement du directeur ou du directeur adjoint ou à défaut de directeur adjoint, les fonctions de directeur sont exercées par un agent de l'organisme désigné dans les conditions prévues au 7° de l'article R. 121-1.'

Il se déduit de ce texte que le directeur adjoint dispose de plein droit de l'ensemble des pouvoirs du directeur en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci. Du reste, l'URSSAF produit une délégation de signature établie par le directeur, M. [L] [B], au profit de M. [U], au visa de l'article R. 122-3 du code de la sécurité sociale, datée du 4 février 2013 (sa pièce n°15).

La lettre d'observations signée par le directeur adjoint est donc parfaitement régulière.

2 - Sur le bien-fondé du redressement :

La lettre d'observations du 23 juillet 2013 mentionne les constatations suivantes :

'Le 29/05/2013, la SARL [3] a fait l'objet d'un contrôle des services de police. Lors de ce contrôle, les agents de police ont constaté la présence de [G] [T] en situation de travail. Ce dernier déclare être le père du gérant (M. [P] [T]). Il a été demandé lors du contrôle à M. [G] [T] de préciser son statut au sein de l'entreprise, ce dernier a répondu être retraité et qu'il est présent pour 'donner un coup de main' à son fils.

Le 03/06/2013, dans les locaux de la police, M. [P] [T] a été auditionné au sujet de l'activité constatée de son père lors du contrôle du 29/05/2013. Lors de cette audition, M. [P] [T] déclare que son père lui donne des coups de main au service depuis janvier 2012, date à laquelle il a repris la gérance de l'établissement. Il déclare également que son père est présent dans l'établissement du lundi au vendredi, de 10h à 16h et qu'il est absent 12 semaines dans l'année.

Au regard des éléments constatés lors du contrôle par les agents de police, et de ceux contenus dans l'audition de M. [P] [T], il est procédé à une régularisation de cotisations et contributions sociales pour la période de janvier 2012 au 29/05/2013.

La régularisation portera sur la masse salariale reconstituée suivante :

- sur la base d'un contrat de travail de 130 heures par mois multiplié par le smic en vigueur à raison de 9 mois pour l'année 2012,

- sur la base d'un contrat de travail de 130 heures par mois multiplié par le smic en vigueur à raison de 5 mois pour l'année 2013".

La lettre d'observations énonce également que le redressement opéré fait suite à un procès-verbal n°13/12130 établi en application de l'article L. 8271-7 du code du travail par la 'police', le 12 juin 2013.

Outre la lettre d'observations, l'URSSAF produit aux débats :

- le procès-verbal de saisine du commissariat central de [Localité 5] daté du 29 mai 2013 qui relate les constatations effectuées dans les locaux de la société le jour dit ;

- le procès-verbal d'audition d'[P] [T], gérant de la société, dans les locaux de la police, daté du 3 juin 2013 ;

- le procès-verbal d'audition de [G] [T], associé majoritaire, dans les locaux de la police, daté du 4 juin 2013.

Si le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé à l'origine du redressement opéré par l'URSSAF n'a pas à figurer dans les documents communiqués à l'employeur par l'organisme de recouvrement à l'issue du contrôle (2e Civ., 14 février 2019, pourvoi n° 18-12.150), il demeure cependant qu'en phase contentieuse, l'URSSAF doit produire ce procès-verbal fondant le redressement, en application de l'article 16 du code de procédure civile, ce qu'elle ne fait pas en l'espèce malgré la demande réitérée de la société.

Au surplus, il ressort des statuts de la société [3] que M. [G] [T] en est l'associé majoritaire (il détient 80% des parts sociales), M. [P] [T] étant le gérant, non associé.

Le fait que M. [G] [T] soit associé majoritaire n'exclut pas d'emblée l'existence d'une situation de salariat. Néanmoins, il est nécessaire de démontrer que son activité l'a placé sous la subordination juridique de la société, le lien de subordination étant caractérisé par l'exercice par l'employeur d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction.

Les premiers juges ont à juste titre retenu que l'URSSAF ne démontrait au cas particulier aucun lien de subordination.

En effet, le seul constat de M. [G] [T] en situation de travail le jour du contrôle et le fait que les heures de travail déterminées par l'URSSAF, qui ne sont pas contestées, sont nécessaires à la bonne marche de l'entreprise ne suffisent pas à établir les conditions dans lesquelles cette activité est exercée, notamment au regard de sa position d'ancien gérant et d'associé majoritaire, vis-à-vis de son fils nouveau gérant de la société.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

3 - Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société ses frais irrépétibles d'appel. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

S'agissant des dépens, l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.

Il s'ensuit que l'article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.

En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de l'URSSAF qui succombe à l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

DÉBOUTE la SCI [2] de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Bretagne aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 9ème ch sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 18/05212
Date de la décision : 25/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-25;18.05212 ?
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