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10/01/2023 | FRANCE | N°20/04051

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 10 janvier 2023, 20/04051


1ère Chambre





ARRÊT N°3/2023



N° RG 20/04051 - N° Portalis DBVL-V-B7E-Q4AB











Mme [H] [S]

M. [R] [S]

M. [G] [S]



C/



Mme [J] [A]

Mme [D] [A]

Mme [T] [A]

M. [L] [A]

Mme [I] [Z]

M. [HF] [Z]

M. [P] [A]

M. [X] [A]

Mme [C] [O]













Copie exécutoire délivrée



le :



à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAIS

E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 10 JANVIER 2023





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conse...

1ère Chambre

ARRÊT N°3/2023

N° RG 20/04051 - N° Portalis DBVL-V-B7E-Q4AB

Mme [H] [S]

M. [R] [S]

M. [G] [S]

C/

Mme [J] [A]

Mme [D] [A]

Mme [T] [A]

M. [L] [A]

Mme [I] [Z]

M. [HF] [Z]

M. [P] [A]

M. [X] [A]

Mme [C] [O]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 10 JANVIER 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère entendue en son rapport,

GREFFIER :

Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats, et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 octobre 2022

ARRÊT :

rendu par défaut, prononcé publiquement le 10 janvier 2023 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré annoncé au 29 novembre 2022 à l'issue des débats

****

INTERVENANTS VOLONTAIRES en leur qualité d'héritier de [F] [A] décédée le 19 février 2021 :

Madame [H] [S],

née le 14 Décembre 1976 à [Localité 8] (44)

[Adresse 10]

[Localité 8]

Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Chahira OUERGHI-NEIFAR de la SARL ATHENA AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

Monsieur [R] [S]

né le 21 Février 1980 à [Localité 18] (44)

[Adresse 11]

[Localité 5]

Représenté par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Chahira OUERGHI-NEIFAR de la SARL ATHENA AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

Monsieur [G] [S]

né le 18 Mars 1950 à [Localité 18] (44)

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Chahira OUERGHI-NEIFAR de la SARL ATHENA AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

INTIMÉS :

Madame [J] [A]

née le 24 Juin 1970 à [Localité 19] (44)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Audrey LECOMMANDEUR, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

Monsieur [X] [A]

né le 06 Septembre 1960 à [Localité 6] (44)

[Adresse 12]

[Localité 7]

Représenté par Me Virginie SIZARET, avocat au barreau de RENNES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/013931 du 08/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

Madame [D] [A]

née le 06 Mai 1973 à [Localité 8] (44)

[Adresse 14]

[Localité 5]

Régulièrement assignée par acte d'huissier délivré le 1er décembre 2020 à personne présente au domicile, n'a pas constitué

Madame [T] [A]

née le 29 Juin 1976 à [Localité 8] (44)

[Adresse 4]

[Localité 5]

Régulièrement assignée par acte d'huissier délivré le 1er décembre 2020 déposé en l'étude, n'a pas constitué

Monsieur [L] [A]

[Adresse 9]

[Localité 13]

Régulièrement assigné par acte d'huissier délivré le 25 novembre 2020 à sa personne, n'a pas constitué

Madame [I] [Z]

[Adresse 20]

ALLEMAGNE

Régulièrement assignée , n'a pas constitué

Monsieur [HF] [Z]

[Adresse 16]

ALLEMAGNE

Régulièrement assigné, n'a pas constitué

Monsieur [P] [A]

né le 21 Février 1969

[Adresse 15]

[Localité 8]

Régulièrement assigné par acte d'huissier délivré le 11 décembre 2020 déposé en l'étude, n'a pas constitué

Madame [C] [O]

[Adresse 2]

[Localité 8]

Régulièrement assignée par acte d'huissier délivré le 1er décembre 2020 déposé en l'étude, n'a pas constitué

EXPOSÉ DU LITIGE

De l'union de Mme [Y] [K] et M. [N] [A] sont issus cinq enfants':

- [U] [A], né le 13/04/1942 à [Localité 6], laissant pour héritier M. [P] [A] et M. [L] [A] ;

-[F] [A], née le 12/06/1943 à [Localité 17] ;

- [B] [A], né le 06/05/1946 à [Localité 6], laissant pour héritières Mme [D] [A], Mme [T] [A] et Mme [J] [A] ;

- [V] [A], née le 27/11/1949 à [Localité 6], laissant pour héritiers Mme [C] [O], Mme [I] [Z] et M. [HF] [Z] ;

-M. [X] [A], né le 06/09/1960 à [Localité 6].

[Y] [K] est décédée le 8 avril 2016 à [Localité 6] en laissant pour lui succéder':

Ses enfants':

-[F] [A] épouse [S],

-M. [X] [A],

Ses petits enfants :

- M. [P] [A],

- M. [L] [A],

venants en représentation de leur père [U] [A].

-Mme [D] [A],

-Mme [T] [A],

- Mme [J] [A],

venant en représentation de leur père [B] [A].

-Mme [C] [O],

-Mme [I] [Z],

-M. [HF] [Z]

venant en représentation de leur mère [V] [A].

La succession de [Y] [K] a été ouverte en l'étude de Maître [W] [E], notaire à [Localité 8].

Le 4 avril 2017, Maître [W] [E] a établi la dévolution successorale après avoir dressé l'inventaire de la succession le 22 juin 2016 et établi une attestation rectificative de propriété le 8 décembre 2016.

Plusieurs biens immobiliers (des terrains et une maison d'habitation) dépendent de la succession.

Dans la mesure où l'actif de la succession ne présentait pas les liquidités suffisantes pour régler le passif, des mandats de vente ont été régularisés par les héritiers afin de vendre certains biens immobiliers dépendant de la succession.

[F] [S] a conditionné son accord pour vendre au rapport à la succession par M. [X] [A] de certaines sommes.

Par acte d'huissier séparés délivrés le 12 avril 2018, Mme [J] [A], Mme [D] [A], Mme [T] [A], M. [L] [A], Mme [I] [Z] et M. [Z] ont fait assigner [F] [A], M. [X] [A], Mme [C] [O] et M. [P] [A] devant le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire aux fins notamment de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de M. [A], de la communauté ayant existé entre M. [A] et Mme [K], et de la succession de Mme [K] et d'autoriser la vente amiable ou à défaut, la licitation des biens immobiliers composant la succession.

A titre reconventionnel, [F] [A] a sollicité le rapport à la succession des dons manuels ayant bénéficié à M. [X] [A] notamment les sommes ayant servi à financer l'achat de son véhicule, celles prélevées au titre des réparations sur ce véhicule auprès de la société La Bauloise automobile ainsi qu'au titre des factures EDF et GDF de M. [X] [A] pendant plusieurs années.

Par jugement en date du 18 juin 2020 le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire a :

-Ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de M. [A], de la communauté ayant existé entre M. [A] et Mme [K], et de la succession de Mme [K],

-Désigné pour y procéder le président de la chambre départementale des notaires, à l'exception des notaires de l'étude de Maître [E] à [Localité 8] et de Maître [LH] à [Localité 6] ;

-Autorisé la vente amiable des biens immobiliers dépendant de la succession avant qu'il soit procédé au partage ;

-Dit que M. [X] [A] rapportera la somme de 116,51 € à la succession ;

-Débouté Mme [F] [S] de ses plus amples demandes de rapport à la succession ;

-Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile';

-Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

Suivant déclaration du 27 août 2020, [F] [A] a relevé appel de ce jugement seulement en ce qu'il l'a déboutée de ses plus amples demandes de rapport à la succession.

[F] [A] est décédée le 19 février 2021. Ses héritiers, Mme [H] [S], M. [G] [S] et M. [R] [S] sont intervenus volontairement à la procédure.

Aux termes de leurs dernières conclusions, transmises et notifiées au greffe le 29 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions, Mme [H] [S], M. [G] [S] et M. [R] [S] ( ci-après les consorts [S]) demandent à la cour de':

-Débouter Mme [J] [A] et M. [X] [A] de toutes leurs demandes fins et conclusions ;

-Réformer partiellement le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire du 18 juin 2019';

Statuant de nouveau':

-Juger que M. [X] [A] devra rapporter à la succession l'intégralité des sommes ayant servi :

*à l'achat de son véhicule Peugeot numéro de série VF38C4HXF81651927d'un montant de 34 185,00 €, outre les intérêts soit sur 60 mois, soit la 47 524,80 € à titre principal ou 1 536,55 € à titre subsidiaire, au regard des justificatifs versés,

* au règlement des factures de La Bauloise Automobiles au nom de M. [A] [X] pour le Véhicule Peugeot, numéro de série VF38-C4HXF81651927, soit la 14 613,35 € à titre principal ou 5 369,93 € à titre subsidiaire, au regard des justificatifs versés,

-Juger que M. [X] [A] devra également rapporter à la succession les sommes suivantes :

*9 776,00 € correspondant aux chèques tirés sur le compte de Mme [Y] [A] entre 2014 et 2015,

*5 057,75 € au titre des factures EDF,

*5 525,31 € au titre des factures GDF,

* 1.210,24 € au titre des factures ENGIE,

* 1 200 € au titre des règlements réalisés auprès de la SCP Drouin Huissiers de justice,

* 1 427,76 € au titre des factures SINA Peugeot,

Soit à titre principal : la somme totale de 86 335,21 € ou à titre subsidiaire : 31 103,54 €,

-Condamner la partie succombant à verser à Mme [S] [H], Mme [S] [R] et M. [S] [G] es qualité d'héritiers de Mme [S], la somme de 1 827,00 € en règlement des frais de recherche de compte,

-Condamner la partie succombant à verser à Mme [S] [H], M. [S] [R], et M. [S] [G] es qualité d'héritiers de Mme [S], la somme de 5 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises et notifiées au greffe le 16 septembre 2022 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions, M. [X] [A] demande à la cour de':

-Confirmer le jugement rendu par le tribunal de Saint-Nazaire le 18 juin 2020 sauf en ce qu'il a dit que M. [X] [A] rapportera la somme de 116,51 € à la succession ;

Statuant à nouveau':

-Condamner Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] venant aux droits de [F] [S] au paiement d'une indemnité d'occupation pour la jouissance privative des biens dépendant de la succession de Mme [Y] [K] ;

-Condamner Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] venant aux droits de [F] [S], au paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts, au profit de M. [X] [A] ;

-Débouter Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] venant aux droits de [F] [S], de leur demande de rapport à succession sur l'intégralité des sommes sollicitées, y compris la somme de 116,51 € ;

-Débouter Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] venant aux droits de [F] [S] de leurs demandes, fins et conclusions ;

-Condamner Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] venant aux droits de [F] [S] aux entiers dépens d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions, transmises et notifiées au greffe le 30 septembre 2022 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions, Mme [J] [A] demande à la cour de':

-Confirmer en l'ensemble de ses dispositions le jugement dont appel ;

Y ajoutant':

-Condamner Mme [H] [S], M. [R] [S], et M. [G] [S] venant aux droits de [F] [A] épouse [S] décédée le 19 février 2021, au paiement d'une indemnité d'occupation pour la jouissance privative des biens dépendant de la succession de Mme [Y] [K] et ce jusqu'au 28 septembre 2022, date de remise des clefs par les appelants à Maître [M] ;

-Condamner les mêmes, à raison de l'ensemble de ses errements, au paiement de la somme de 10 000 € au profit de sa co-indivisaire successorale Mme [J] [A] ;

-Condamner les mêmes à régler à Mme [J] [A], la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-Condamner les mêmes aux entiers dépens de la présente procédure dont distraction au profit de Maître Renaudin, Avocat aux offres de droit.

MOTIVATION DE LA COUR

1°/ Sur les rapports à la succession dus par M. [X] [A]

Il résulte de l'article 843 du Code civil que: «'tout héritier venant à une succession doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donation entre vifs, directement ou indirectement. Il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale'».

Pour établir l'existence d'une libéralité rapportable, il convient de prouver l'intention libérale du disposant (élément moral) et son appauvrissement (élément matériel).

La charge de cette preuve pèse sur celui qui invoque l'existence d'une libéralité rapportable, en l'occurrence les consorts [S].

Or, les consorts [S] sollicitent le rapport de donations tout en soutenant que les sommes obtenues par M. [X] [A] sont le fruit d'un comportement harcelant voire menaçant de sa part. Aux termes de leurs conclusions, ils plaident que les chèques ont été obtenus par 'abus de faiblesse' à l'égard de la défunte.

Ils invoquent au soutien de cette allégation un écrit, certes non daté et non signé mais dont il ne peut être sérieusement contesté qu'il émane de la main de Mme [K], aux termes duquel il est indiqué: ' Monsieur [X] [A] je précise avoir mare de me demander de l'argent. Ces tout le temps qui demande j'avais une belle maison je pense mal finir mes jours par sa faute' .

[F] [A] avait par ailleurs déposé une main courante le 30 juin 2015 auprès du commissariat de [Localité 6] en indiquant qu'elle-même et sa mère craignaient les accès de violence de M. [X] [A], qui faisait 'pression' sur elles.

La violence alléguée de M. [X] [A] est confirmée par les termes du jugement rendu le 10 mars 2017 par le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire à la suite d'une violente altercation survenue au domicile de Mme [K] entre M. [X] [A] et Mme [H] [S] (petite-fille de Mme [K]) et le conjoint de celle-ci ainsi que par l'arrêt rendu par la cour le 28 avril 2021. Il est observé que revenant sur le contexte de cette altercation, la cour a retenu dans ses motifs que '[X] [A] est très en demande, financièrement, à l'égard de sa mère et peut même être insistant, étant redouté des autres membres de la famille. Il apparaît aussi des attestations produites aux débats que [X] [A] pouvait être menaçant, harcelant, agressif, la crainte 'qu'il débarque' au domicile de sa mère existait. Il pouvait inspirer la peur à ses proches et s'était déjà montré violent, [G] [S], mari de [F] [S] ayant interdit l'accès à sa maison' à [X] [A] après plusieurs affrontements verbaux et corporels (...)'

Ces éléments accréditent la thèse développée par les consorts [S] et excluent l'hypothèse d'une volonté particulière de Mme [S] de gratifier son fils.

A cet égard, M. [X] [A] conteste lui aussi l'intention libérale de sa mère. En effet, il soutient que les aides financières reçues de la part de celle-ci, l'ont été en exécution d'une obligation alimentaire.

Il s'en suit que les parties elles-mêmes excluent l'intention libérale de la défunte.

Dès lors, les sommes ayant bénéficié à M. [X] [A] sous forme de règlements de factures ou de remises de chèques ne peuvent recevoir la qualification de donations rapportables au sens de l'article 843 du code civil. Aucun autre fondement n'est invoqué.

Par conséquent, la demande de rapport à la succession ne peut qu'être rejetée.

Le jugement sera donc confirmé sauf en ce qu'il a ordonné le rapport à la succession de la somme de 116,51 euros. La demande à ce titre sera rejetée.

2°/ Sur l'indemnité d'occupation demandée aux consorts [S]

Mme [J] [A] et M. [X] [A] estiment que les consorts [S] sont redevables d'une indemnité d'occupation (qu'ils ne chiffrent pas) au titre de la jouissance privative de la maison d'habitation dépendant de la succession et ce jusqu'au 28 septembre 2022, date de la remise des clés par les appelants à Maître [M].

Toutefois, la seule possession des clés par [F] [A] ne suffit pas à démontrer la jouissance privative des lieux dès lors qu'il ne ressort pas des pièces produites que celle-ci ou ses ayants-droits auraient été sommés de remettre les clés au notaire chargé de la succession et qu'ils auraient refusé.

Le courrier de Me [E] du 18 mai 2016 indique seulement que les clés sont en possession de [F] [A] laquelle n'a pas répondu à ses sollicitations. Il est cependant observé que les clés de la maison ont bien été remises à Me [E] afin qu'il procède à l'inventaire de la maison le 22 juin 2016.

Il n'est fait état d'aucune mise en demeure d'avoir à déposer les clés chez le notaire ni d'aucun refus de remettre les clés à un autre co-indivisaire qui les aurait réclamées, avant que celles-ci ne soient remises au notaire le 27 septembre 2022, par l'époux de la défunte.

La jouissance privative de la maison d'habitation dépendant de la succession n'étant pas démontrée, la demande d' indemnité d'occupation sera rejetée.

3°/ Sur les dommages-et-intérêts sollicités par Mme [J] [A] et M. [X] [A]

Selon l'article 1240 du code civil, «'tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'».

Mme [J] [A] sollicite la condamnation des consorts [S] à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle fait valoir que [F] [A] puis ses ayant-droits ont multiplié les démarches dilatoires pour faire obstacle à la liquidation de la succession et à la vente des biens dépendant de celle-ci, alors même que l'appel n'était limité qu'aux rapports dus par M. [X] [A]. Elle expose que cette attitude lui cause un préjudice en tant que co-indivisaire en ce que le bien se détériore et se déprécie d'une part et en ce qu'elle a dû avancer des fonds pour maintenir créditeur le compte de la succession qu'elle qualifie d'impécunieuse, d'autre part.

Elle considère par ailleurs que la procédure d'appel est abusive et vexatoire en ce que [F] [A] puis ses ayant-droits l'ont intimée en l'obligeant à exposer des frais, alors même que l'appel était limité aux rapports à succession dus par M. [X] [A] et qu'aucune demande n'a été formulée à son encontre.

M. [X] [A] s'associe à cette demande indemnitaire en sollicitant la condamnation des consorts [S] à lui régler la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice causé par l'obstruction de leur mère, [F] [A], à la vente des biens composant la succession et à la dégradation de ceux-ci.

a. Sur l'obstruction à la vente des biens composant la succession

[F] [A] s'est opposée sans motif légitime à la réalisation des biens immobiliers dépendant de la succession, alors qu'elle avait parfaitement conscience, ainsi qu'elle le relève dans ses écritures, que la vente de la maison et des terrains pouvait être poursuivie sans incidence sur les opérations de compte, liquidation et partage puisque dans l'attente de l'issue du procès relatif aux rapports de donations, les sommes auraient été consignées chez le notaire.

Le fait que l'avocate de [F] [A] ait continué à s'opposer ne serait-ce qu'à la désignation d'un notaire aux fins d'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession au motif qu'il était fait appel du jugement de Saint-Nazaire (courrier adressé à la chambre des notaires du 18 septembre 2020), alors même que l'appel se limitait aux rapports de donations à la succession, confirme l'intention dilatoire de [F] [A] et de ses ayants-droits.

La faute est caractérisée.

Toutefois, il n'est pas suffisamment établi que le retard pris dans la vente ait entraîné une dégradation telle du bien, que celui-ci aurait perdu de sa valeur. La cour observe à cet égard, qu'en 2016, la maison était évaluée par le notaire à la somme de 150.000 euros et que les mandats de vente signés à cette époque faisaient état d'une maison à rénover dont le prix oscillait entre 150.000 et 160.000 euros. Les consorts [S] produisent un avis de valeur détaillé de l'agence Stéphane Plazza daté du 21 mai 2021, mentionnant un prix de vente entre 142.000 et 152.000 euros ainsi qu' une estimation plus succincte établie par l'agence 3% Com immobilier datée du 27 septembre 2022, évaluant le bien entre 230.000 et 250.000 euros. Il n'est donc pas démontré que l'actif successoral se soit déprécié et que la succession perdra de l'argent en vendant maintenant plutôt qu'en 2016.

Aucun élément n'est produit concernant la valorisation actuelle des terrains, mais il est peu probable qu'un terrain situé à [Localité 6] ou ses environs se soit déprécié depuis 2016.

Le préjudice allégué n'est donc pas démontré.

Par ailleurs, les avances de frais faites par Mme [J] [A] pour le compte de la succession (notamment la somme de 540 euros pour les frais d'acte rectificatif) ne peuvent constituer un préjudice, dès lors que ces sommes pourront être recouvrées dans le cadre des opérations de compte liquidation et partage, la succession n'étant pas impécunieuse compte tenu de l'existence d'un patrimoine immobilier.

En définitive, faute de démontrer le préjudice causé par l'obstruction de [F] [A] à la vente des biens indivis, Mme [J] [A] et M. [X] [A] seront déboutés de leur demande respective de dommages-et-intérêts.

b. Sur la procédure abusive

L'exercice d'une action en justice est un droit fondamental qui ne peut donner lieu à une condamnation à des dommages-et-intérêts que s'il dégénère en abus, caractérisé notamment par la mauvaise foi ou l'intention de nuire.

La demande formée reconventionnellement en première instance par [F] [A] aux fins de voir ordonner dans l'intérêt de l'ensemble des co-indivisaires le rapport à la succession de diverses sommes ayant bénéficié à M. [X] [A], bien que mal fondée ne peut être considérée comme fautive. De même, il ne peut lui être reproché, en matière de partage, d'avoir intimé ensemble des co-héritiers copartageants, étant relevé au surplus que Mme [J] [A] n'a pas fait que défendre à cette instance, ayant elle-même formée devant la cour une demande susceptible d'affecter la masse partageable, en sollicitant une indemnité d'occupation.

La faute n'étant pas caractérisée, la demande de dommages-et-intérêts formée de ce chef ne peut qu'être rejetée.

4°/ Sur les frais de recherche de compte exposés par les consorts [S]

Les consorts [S] sollicitent la somme de 1.827 euros en remboursement des sommes qu'ils ont déboursées auprès des banques pour obtenir les relevés de compte.

Le fondement juridique de cette demande n'est pas précisé. La cour considère qu'il s'agit de frais irrépétibles. La demande formée au titre des frais irrépétibles sera examinée ci-après.

5°/ Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile'et que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] qui perdent le procès en appel seront déboutés de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, en ce comprise la demande de remboursement des frais de recherche de compte.

Mme [J] [A] et M. [X] seront également déboutés de leur demande respective sur ce même fondement.

Les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement rendu le 18 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire, sauf en ce qu'il a ordonné à M. [X] [A] de rapporter à la succession la somme de 116,51 euros';

Infirme le jugement de ce chef et déboute Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] de leur demande de rapport à succession de ce montant ;

Y ajoutant':

Déboute Mme [J] [A] de sa demande de dommages-et-intérêts';

Déboute M. [X] [A] de sa demande de dommages-et-intérêts';

Déboute Mme [J] [A] et M. [X] [A] de leur demande au titre de l'indemnité d'occupation';

Déboute Mme [H] [S], M. [R] [S] et M. [G] [S] de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, en ce comprise la demande de remboursement des frais de recherche de compte';

Déboute Mme [J] [A] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ';

Déboute M. [X] [A] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;

Dit que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/04051
Date de la décision : 10/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-10;20.04051 ?
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