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20/12/2022 | FRANCE | N°22/00706

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 20 décembre 2022, 22/00706


6ème Chambre B





ARRÊT N°



N° RG 22/00706 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SODU













Mme [W] [N] [B]



C/



M. [L] [V] [Z]

































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 20 DECEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Véronique CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle DESVALOIS, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Morgane LIZEE, lors des débats, et Madame Aurélie MARIAU, lors du prononcé,







DÉBATS :


...

6ème Chambre B

ARRÊT N°

N° RG 22/00706 - N° Portalis DBVL-V-B7G-SODU

Mme [W] [N] [B]

C/

M. [L] [V] [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 20 DECEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Véronique CADORET, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Emmanuelle GOSSELIN, Conseillère,

Assesseur : Madame Emmanuelle DESVALOIS, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Morgane LIZEE, lors des débats, et Madame Aurélie MARIAU, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Octobre 2022 devant Madame Véronique CADORET, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, a prononcé publiquement après prorogation, le 20 Décembre 2022 par mise à disposition au greffe l'arrêt dont la teneur suit :

****

APPELANTE :

Madame [W] [N] [B]

née le 03 Septembre 1986 à [Localité 12] (CAMBODGE)

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Rep/assistant : Me Valérie OBJILERE-GUILBERT, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉ :

Monsieur [L] [V] [Z]

né le 15 Janvier 1980 à [Localité 8] (CAMBODGE)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Non représenté

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [W] [N] [B] et Monsieur [L] [V] [Z] se sont mariés le 14 novembre 2006 devant l'officier d'état civil de [Localité 12] (Cambodge), sans contrat de mariage préalable.

Par acte notarié en date du 29 octobre 2007, les époux ont acquis les biens immobiliers suivants :

- un bien immobilier situé [Adresse 1], cadastré au [Cadastre 7] de la section [Cadastre 5],

- les terrains attenants situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 11] (droit indivis à concurrence d'un tiers) et 240 de la section [Cadastre 5],

- des terrains situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 6] et [Cadastre 2] de la section [Cadastre 5].

Cette acquisition au prix de 95.000 € net vendeur a été financée à concurrence de 1.960 € au moyen de deniers personnels et à concurrence de 93.040 € au moyen de prêts consentis, par le Crédit Foncier avec inscription de privilège de prêteur de deniers prise le 23 novembre 2007, pour les montants respectifs de :

- 12.375 € auprès du Crédit Foncier (n°2515646), remboursable par mensualités de 5,94€ jusqu'en novembre 2029,

- de 80.665 € auprès du Crédit Foncier (n°2515647), remboursable par mensualités de 504,22 € jusqu'en mai 2029.

Par ordonnance de non-conciliation en date du 21 juin 2018, le juge aux affaires familiales au tribunal de grande instance de RENNES a attribué la jouissance du domicile familial à l'époux à titre onéreux, mis à la charge de ce dernier le prêt immobilier à titre provisoire, lui a attribué la jouissance d'un véhicule et a mis à sa charge le prêt automobile à titre provisoire.

Par acte d'huissier en date du 17 juillet 2018, Madame [B] a fait assigner son conjoint en divorce sur le fondement de l'article 233 du Code civil.

Par jugement en date du 15 novembre 2018, le juge aux affaires familiales de RENNES a prononcé le divorce des époux sur le fondement des articles 233 et 234 du Code civil, a ordonné le report des effets du divorce au 22 novembre 2016, a constaté l'accord des parties pour confier à Maître [K] [U], Notaire à [Localité 14], les opérations de liquidation de leur régime matrimonial et les a renvoyées à un partage amiable de leurs intérêts patrimoniaux avec l'assistance du notaire et, à défaut d'y parvenir, à procéder conformément aux dispositions des articles 1359 et suivants du Code de procédure civile.

Par acte d'huissier en date du 3 juillet 2020, Madame [B] a fait assigner Monsieur [Z] devant le juge aux affaires familiales au tribunal judiciaire de RENNES afin de statuer sur les opérations de liquidation de leur régime matrimonial.

Par jugement en date du 27 août 2021 qualifié de jugement réputé contradictoire, Monsieur [Z] n'ayant pas constitué avocat, le juge aux affaires familiales a :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte et liquidation-partage des biens dépendant de l'indivision existant entre Madame [B] et Monsieur [Z],

- désigné Maître [U], Notaire à [Localité 14], pour procéder auxdites opérations,

- débouté Madame [B] de sa demande de licitation du bien immobilier situé [Adresse 1], cadastré au [Cadastre 7] de la section [Cadastre 5], des terrains attenants situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 11] et [Cadastre 3] de la section [Cadastre 5], ainsi que des terrains cadastrés aux [Cadastre 6] et [Cadastre 2] de la section [Cadastre 5],

- débouté Madame [B] de sa demande de condamnation de Monsieur [Z] à verser à l'indivision une indemnité d'occupation, du fait de la jouissance de l'ancien domicile conjugal, pour la période du 22 novembre 2016 au 21 juin 2018,

- dit qu'en exécution de l'ordonnance de non conciliation en date du 21 juin 2018, Monsieur [Z] était redevable à l'égard de l'indivision d'une indemnité d'occupation du fait de la jouissance de l'ancien domicile conjugal à compter du 21 juin 2018,

- fixé cette indemnité à 500 € par mois d'occupation,

- débouté Madame [B] de sa demande de compensation des sommes respectivement dues à l'indivision par Monsieur [Z] et Madame [B],

- condamné Monsieur [Z] à payer à Madame [B] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné Monsieur [Z] aux entiers dépens,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- débouté Madame [B] de ses demandes plus amples ou contraires.

Le 02 février 2022, Maître [U], notaire, a dressé un procès-verbal de difficultés après sommation délivrée le 25 janvier précédent à Monsieur [Z] d'assister au rendez-vous fixé en l'étude du notaire sur la base d'un projet d'état liquidatif.

Par déclaration du 03 février 2022, Madame [B] a interjeté appel du jugement précité du 27 août 2021 en ce qu'il l'a déboutée de :

- sa demande de licitation du bien immobilier situé [Adresse 1], cadastré au [Cadastre 7] de la section [Cadastre 5], des terrains attenants cadastrés aux [Cadastre 11] et [Cadastre 3] de la section [Cadastre 5] et des terrains cadastrés aux [Cadastre 6] et [Cadastre 2] de la section [Cadastre 5],

- sa demande de condamnation de Monsieur [Z] à verser à l'indivision une indemnité d'occupation du fait de la jouissance de l'ancien domicile conjugal pour la période du 22 novembre 2016 au 21 juin 2018,

- sa demande de compensation des sommes respectivement dues à l'indivision par Monsieur [Z] et Madame [B],

- ses demandes plus amples ou contraires.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 6 avril 2022, Madame [B] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

ordonné l'ouverture des opérations de compte et liquidation-partage des biens dépendant de l'indivision existant entre elle et Monsieur [Z],

désigné Maître [U], Notaire à [Localité 14], pour procéder auxdites opérations,

dit qu'en exécution de l'ordonnance de conciliation en date du 21 juin 2018, Monsieur [Z] était redevable à l'égard de l'indivision d'une indemnité d'occupation du fait de la jouissance de l'ancien domicile conjugal à compter du 21 juin 2018,

fixé cette indemnité à 500 € par mois d'occupation,

condamné Monsieur [Z] à lui payer une somme de 1500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

condamné Monsieur [Z] aux entiers dépens,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il :

l'a déboutée de sa demande de licitation du bien immobilier situé [Adresse 1], cadastré au [Cadastre 7] de la section [Cadastre 5], des terrains attenants situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 11] et [Cadastre 3] de la section [Cadastre 5], ainsi que des terrains situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés au [Cadastre 6] et [Cadastre 2] de la section [Cadastre 5],

l'a déboutée de sa demande de condamnation de Monsieur [Z] à verser à l'indivision une indemnité d'occupation du fait de la jouissance de l'ancien domicile conjugal pour la période du 22 novembre 2016 au 21 juin 2018,

l'a déboutée de sa demande de compensation des sommes respectivement dues à l'indivision par Monsieur [Z] et elle,

l'a déboutée de ses demandes plus amples ou contraires,

statuant à nouveau,

- ordonner la licitation du bien indivis situe [Adresse 1], cadastré au [Cadastre 7] de la section [Cadastre 5] et des terrains attenants situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 11] (droit indivis à concurrence d'un tiers) et 240 de la section [Cadastre 5], pour une mise à prix de 90.000 €,

- ordonner la licitation des terrains situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 6] et [Cadastre 2] de la section [Cadastre 5], pour une mise à prix de 5 000 €,

- désigner Maître [U], Notaire à [Localité 14], afin d'y procéder,

- condamner Monsieur [Z] à régler à l'indivision la somme de 9.500 € au titre de l'occupation du bien indivis pour la période du 22 novembre 2016 au 21 juin 2018,

en tout état de cause,

- condamner Monsieur [Z] à lui payer une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile qui s'ajouteront aux frais irrépétibles auxquels Monsieur [Z] a déjà été condamné en première instance,

- condamner Monsieur [Z] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Madame [B] a fait signifier à Monsieur [Z] sa déclaration d'appel ainsi que ses conclusions par acte d'huissier du 15 avril 2022. Cette signification a été faite par remise de l'acte en l'étude de l'huissier et avis de passage au domicile du destinataire de cet acte.

Monsieur [Z] n'a pas constitué avocat.

Les conclusions de l'appelante sont expressément visées pour complet exposé de ses prétentions et de ses moyens en application de l'article 455 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 octobre 2022.

MOTIFS

I- Sur la dévolution à la Cour

Il résulte de l'article 562 du Code de procédure civile que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

La Cour observe que Madame [B] ne critique plus dans ses dernières conclusions que les dispositions concernant la vente par licitation des biens immobiliers, dont elle a été déboutée par le premier juge, et celle concernant l'indemnité d'occupation sollicitée pour la période du 22 novembre 2016 au 21 juin 2018 et rejetée par le premier juge.

Monsieur [Z] n'ayant pas fait appel incident, seuls ces deux points seront examinés par la Cour, l'autre disposition du jugement et contestée dans la déclaration d'appel de l'appelante, en ce qu'elle a été déboutée de sa demande de compensation des sommes respectivement dues à l'indivision par chacune des parties, sera d'ores et déjà et sans autre examen confirmée.

S'agissant de la demande de Madame [B] afin de condamner Monsieur [Z] non seulement aux dépens d'appel mais encore aux dépens de première instance, la Cour relève que d'une part déjà dans le jugement déféré Monsieur [Z] a été condamné aux dépens, que d'autre part cette disposition sur les dépens n'a pas été critiquée expressément par l'appelante dans sa déclaration d'appel. Cette déclaration d'appel n'a dès lors pu opérer dévolution de ce chef et la Cour, non saisie à cet égard, ne statuera que sur les dépens d'appel et en aucun cas sur les dépens de première instance.

II- Sur la demande de vente par licitation des biens immobiliers

Aux termes des dispositions de l'article 815 du Code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention et aux termes de l'article

Aux termes de l'article 1377 alinéa 1 du code de procédure civile le tribunal ordonne, dans les conditions qu'il détermine, la vente par adjudication des biens qui ne peuvent être facilement partagés ou attribués.

En l'espèce, il est constant que les parties ont acquis le 29 octobre 2007, suivant acte reçu par Maître [M], notaire à [Localité 13], le bien ayant constitué le domicile conjugal situé [Adresse 1] ainsi que des terrains situés à [Localité 9], le tout cadastré aux [Cadastre 7], [Cadastre 11] (droit indivis à concurrence d'un tiers), 240, 228 et 229 de la section [Cadastre 5], acquisition financée au moyen notamment de deux prêts contractés auprès du Crédit Foncier, l'un (prêt n°2515646) d'un montant de 12.375 € remboursable par mensualités de 5,94€ jusqu'en novembre 2029 et l'autre (prêt n°2515647) d'un montant de 80.665 € remboursable par mensualités de 504,22 € jusqu'en mai 2029.

Le premier juge a débouté Madame [B] de sa demande de licitation de ces biens immobiliers.

Il résulte de projets d'acte liquidatif dressés successivement en 2017 par Maître [D], notaire, et le 03 avril 2020 par Maître [X], notaire, et d'un autre projet dressé en 2021 par Maître [U], qu'il était envisagé l'attribution préférentielle à Monsieur [Z] de ces biens, construction immobilière et terrains, moyennant une soulte à verser à l'épouse et calculée au dernier projet en date à la somme de 30.419,25 €.

Toutefois, les parties sont co-débitrices des prêts souscrits pour l'acquisition de ces biens et le non paiement des échéances de prêts, consentis avec inscription de privilège de prêteur de deniers prise le 23 novembre 2007, peut amener le créancier à se prévaloir de la déchéance du terme sur les prêts et à engager toutes voies d'exécution forcée à l'égard de l'une comme de l'autre des parties, en dépit des mesures provisoires ordonnées entre elles sur le temps de la procédure de divorce pour une répartition des mensualités de prêts et des projets de liquidation partage sus-visés.

Or, il est établi, ce que déjà le premier juge a retenu dans sa motivation comme résultant des pièces versées en première instance, que les prêts ont cessé d'être réglés. Au regard de décomptes établis au 02 février 2022, la créance exigible était à cette date d'un montant de :

- 50.658,21 € sur l'un de ces prêts, contre 44.177,91 € au 26 février 2020, les incidents de paiement étant constants depuis septembre 2019 sur ce crédit,

- 12.565,08 € sur l'autre de ces prêts, contre 12.248,46 € au 26 février 2020, les incidents de paiement étant constants depuis juillet 2019 sur cet autre crédit.

Dans un courrier en date du 31 mars 2022, Maître [U] devait écrire à Monsieur [Z] pour constater qu'il n'avait pas déféré au rendez-vous, pourtant convenu pour la date du 29 mars précédent afin de signature de l'acte de partage avec attribution à l'ex-époux du bien de [Localité 9] à charge pour lui de rembourser l'intégralité des prêts souscrits auprès du Crédit Foncier de France, ni donné suite aux interrogations de son propre notaire sur les démarches pour l'obtention d'un prêt. Aussi, ce courrier actait, en l'absence d'offre, que Monsieur [Z] ne se portait pas acquéreur du bien et que, à défaut d'accord de sa part pour une vente amiable, la vente serait forcée.

A nouveau le 03 avril 2022, par une lettre recommandée avec accusé de réception, puis le 20 avril 2022 par une autre lettre, le conseil de Madame [B] s'adressait au nom de celle-ci à Monsieur [Z] pour constater qu'il ne clarifiait pas ses intentions concernant le bien immobilier, pour l'informer de la volonté de l'ex-épouse de faire cesser l'indivision et, à défaut pour celui-ci de se porter acquéreur des parts de Madame [B] ou de donner son accord pour une vente amiable du bien, de l'intention de l'ex-épouse d'engager une action en vente par licitation du bien.

Aussi, la Cour doit en l'espèce constater d'une part l'absence d'accord vérifié quant au sort de ce bien, d'autre part le fait que Monsieur [Z] ne donne aucune garantie ni quant à une volonté de sa part de bénéficier d'une attribution préférentielle moyennant le versement à son épouse de la soulte à calculer et la prise en charge du solde des prêts immobiliers, ni aucune garantie quant au paiement des sommes restant dues sur ces prêts, dont le paiement des mensualités n'est déjà plus assuré en l'état des débats versés dans la présente instance, ni enfin quant au succès d'une vente amiable qui au demeurant retarderait d'autant une sortie d'indivision qui désormais s'impose eu égard à l'ancienneté de la séparation, à l'absence de clarification jusqu'alors de ses intentions par Monsieur [Z] et au risque pesant sur le sort du bien sur lequel le créancier bénéficie d'une inscription de privilège de prêteur de deniers.

Si le premier juge a relevé la cessation du paiement des échéances des prêts immobiliers depuis l'année 2019 et le fait que les relances auprès de Monsieur [Z] par le notaire et le conseil de Madame [B] n'avaient aucune suite vérifiée, il a néanmoins débouté l'ex-épouse de sa demande de vente par licitation ce, en l'absence de production de l'acte de vente des biens en date du 29 octobre 2007 et dès lors en l'absence de vérification possible de la pleine propriété de ce bien par les ex-époux et des modalités de cette acquisition.

Il reste, sur ce dernier point, que l'acte du 29 octobre 2007 que verse aux débats Madame [B] à hauteur d'appel confirme l'acquisition de ce bien par les parties (bien ayant constitué le domicile conjugal et terrains).

Aussi, celle-ci est bien fondée en sa demande de vente par licitation. La disposition du jugement déférée sera infirmée et la Cour, statuant à nouveau, autorisera ladite vente.

Quant aux modalités de cette vente par licitation, elles seront précisées au dispositif de la présente décision.

Dans le dernier projet liquidatif en date et versé aux débats, les parcelles section [Cadastre 7] (maison à usage d'habitation), 239 (droit indivis à concurrence d'un tiers) et 240 (terrain) sont estimées ensemble (maison et les deux terrains attenants) à la somme de 125.000 € et les parcelles section [Cadastre 6] et [Cadastre 2] (terrain avec garage et jardin) sont estimées à la somme de 5.000 €.

La licitation sera ordonnée non point avec des mises à prix correspondant aux estimations ci-dessus rappelées mais avec des mises à prix d'un montant inférieur, dans la mesure en effet où il est essentiel d'attirer des acheteurs potentiels et d'éviter des montants de mise à prix dissuasifs en eux-mêmes.

III- Sur l'indemnité d'occupation

Il résulte de l'article 815-9 du code civil que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

Si l'indemnité d'occupation est destinée à compenser la perte des fruits et revenus dont l'indivision est privée pendant la durée de la jouissance privative, elle se justifie également par l'atteinte au droit de jouissance des co-indivisaires de l'occupant. Elle s'analyse comme la contrepartie du droit de jouir privativement d'un bien indivis.

Aux termes de l'article 262-1 du Code civil, dans sa version applicable à l'espèce, à la demande de l'un des époux, le juge peut fixer les effets du jugement à la date à laquelle ils ont cessé de cohabiter et de collaborer. Cette demande ne peut être formée qu'à l'occasion de l'action en divorce. La jouissance du logement conjugal par un seul des époux conserve un caractère gratuit jusqu'à l'ordonnance de non conciliation, sauf décision contraire du juge.

Aussi, par application des articles 262-1 et 815-9 précités du code civil, un époux marié sous un régime de communauté, qui occupe un immeuble commun, est redevable de l'indemnité d'occupation à partir de la date de l'ordonnance de non-conciliation, dès lors en effet que l'occupation du logement de la famille par un seul époux avant le prononcé de l'ordonnance de non-conciliation est gratuite, sauf disposition contraire dans le jugement de divorce.

En l'espèce, le premier juge a débouté Madame [B] de sa demande de condamnation de Monsieur [Z] à verser à l'indivision une indemnité d'occupation du fait de la jouissance de l'ancien domicile conjugal sur la période courant du 22 novembre 2016 au 21 juin 2018, indemnité qui à l'inverse et dans le même jugement a été fixée à la charge de Monsieur [Z], par une disposition non contestée par Madame [B], à compter du 21 juin 2018, à 500 € par mois.

La Cour n'a donc à trancher qu'une contestation portant, non pas sur le montant de ladite indemnité d'occupation ni sur la période courant à compter du 21 juin 2018, mais sur un principe d'indemnité sur la période antérieure, du 22 novembre 2016 au 21 juin 2018.

Sur cette période litigieuse, le premier juge a considéré que, si aux termes du jugement de divorce prononcé entre les parties les effets patrimoniaux entre eux de ce divorce étaient reportés au 22 novembre 2016, date à laquelle ils avaient cessé de cohabiter et de collaborer, pour autant à cette occasion il n'avait pas été décidé d'un report à cette date du caractère onéreux de la jouissance du domicile conjugal. Aussi, le premier juge a estimé que la jouissance du domicile conjugal par Monsieur [Z] avait conservé un caractère gratuit jusqu'à l'ordonnance de non conciliation en date du 21 juin 2018.

L'ex-épouse conteste cette analyse et fait valoir précisément le report des effets du divorce entre les parties, en ce qui concerne leurs biens, au 22 novembre 2016, la jouissance exclusive et privative du bien indivis par Monsieur [Z] depuis cette date correspondant au départ de Madame [B]. Elle relève encore qu'en l'absence de précision dans le jugement de divorce, sur le caractère onéreux de cette jouissance par Monsieur [Z] pour la période antérieure à l'ordonnance de non conciliation, il appartenait au juge saisi de la liquidation des intérêts patrimoniaux des ex-époux de se prononcer à cet égard.

Or, ainsi qu'il a été relevé par le premier juge et par application des articles précités, lorsque le juge du divorce reporte les effets patrimoniaux du divorce, à la date à laquelle les époux ont cessé de cohabiter et de collaborer, cela n'a pas pour effet de rendre onéreuse l'occupation du logement conjugal avant l'ordonnance de non-conciliation, sauf disposition contraire dans la décision de report.

Aussi et en l'espèce, en l'absence de disposition contraire dans la décision de report, cette disposition du jugement de divorce portant report des effets patrimoniaux du divorce au 22 novembre 2016 n'a pu avoir pour effet de rendre onéreuse l'occupation du logement conjugal par l'époux avant l'ordonnance de non-conciliation soit avant la date du 21 juin 2018.

C'est dès lors à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de l'épouse en ce qu'elle portait sur une indemnité d'occupation pour la période écoulée entre le 22 novembre 2016 et le 21 juin 2018.

La décision déférée sera confirmée de ce chef.

IV- Sur les frais et dépens d'appel

Eu égard à l'issue du litige sur les points contestés, les dépens d'appel seront laissés à la charge de Monsieur [Z], partie perdante sur partie des contestations élevées devant la Cour.

L'équité commande cependant de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des frais non compris dans les dépens et engagés en appel par Madame [B].

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement déféré en sa disposition contestée portant sur la demande d'indemnité d'occupation sur l'immeuble indivis pour la période écoulée entre le 22 novembre 2016 et le 21 juin 2018 ;

Infirme le jugement déféré en sa disposition portant rejet de la demande de vente par licitation du bien indivis ;

Statuant à nouveau de ce chef infirmé,

Ordonne, à défaut d'accord entre les parties sur une vente de gré à gré, la licitation en l'étude de Maître [U], notaire à [Localité 14], sur cahier des conditions de vente dressé par lui, après accomplissement des formalités légales des biens immobiliers qui suivent, en deux lots, soit :

- lot n°1 : bien immobilier situé [Adresse 1], cadastré au [Cadastre 7] de la section [Cadastre 5] et terrains attenants situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 11] (droit indivis à concurrence d'un tiers) et 240 de la section [Cadastre 5],

sur la mise à prix de 90.000 euros ;

- lot n°2 : terrains situés [Localité 10] à [Localité 9], cadastrés aux [Cadastre 6] et [Cadastre 2] de la section [Cadastre 5],

sur la mise à prix de 3.500 euros

avec, pour chacun des lots, la faculté de baisse d'un quart puis de la moitié en cas de carence d'enchères ;

Désigne Maître [U], notaire à [Localité 14], en qualité de séquestre pour recevoir le produit de la vente et le conserver jusqu'au partage, sauf avance sur partage unanimement convenue par les indivisaires ou judiciairement octroyée ;

Renvoie les parties, pour le surplus des modalités de cette vente, aux articles 1275, 1277 et 1278 du Code de procédure civile ;

Dit que le prix à provenir de l'adjudication sera compris dans la masse active indivise et devra être partagé entre les parties selon leurs droits ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [Z] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 22/00706
Date de la décision : 20/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-20;22.00706 ?
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