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2ème Chambre
ARRÊT N°639
N° RG 19/06240
N° Portalis DBVL-V-B7D-QDLO
(1)
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
C/
Mme [R] [X]
Mme [P] [B] divorcée [W]
Mme [S] [B] épouse [Y]
M. [L] [B]
SELURL BALLY MJ
SA BANQUE SOLFEA
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me LECLERCQ
- Me LE BERRE BOIVIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 16 DECEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 25 Octobre 2022
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 16 Décembre 2022 par mise à disposition au greffe
****
APPELANTE :
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de BANQUE SOLFINEA (anciennement dénommée BANQUE SOLFEA),
[Adresse 2]
[Localité 10]
Représentée par Me Erwan LECLERCQ de la SCP LECLERCQ & CASTRES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Laure REINHARD de la SCPA RD AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Madame [R] [X] veuve [B]
née le 26 Juin 1954 à [Localité 13]
[Adresse 7]
[Localité 4]
Madame [P] [B] venant aux droits de [E] [B], décédé
née le 05 Août 1976 à [Localité 15]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Madame [S] [B] épouse [Y] venant aux droits de [E] [B], décédé
née le 09 Août 1979 à [Localité 14]
[Adresse 11]
[Localité 5]
Monsieur [L] [B] venant aux droits de [E] [B], décédé
né le 14 Novembre 1980 à [Localité 14]
[Adresse 6]
[Localité 3]
Tous représentés par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
SELURL BALLY MJ es qualité de mandataire liquidateur de la SAS NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE
[Adresse 9]
[Localité 12]
Assignée par acte d'huissier en date du 13/12/2019, délivré à personne, n'ayant pas constitué
EXPOSÉ DU LITIGE :
À la suite d'un démarchage à domicile, Mme [R] [X] épouse [B] a, selon bon de commande du 16 octobre 2012, commandé à la société Nouvelle Régie des jonctions des énergies de France (la société NRJEF), exerçant sous la dénomination commerciale 'Groupe solaire de France', la fourniture et l'installation de 12 panneaux photovoltaïques et d'un ballon thermodynamique, moyennant le prix de 23 500 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société Banque Solfea (la société Solfea) a, selon offre acceptée le même jour, consenti aux époux [B] un prêt de 23 000 euros au taux de 5,60 % l'an, remboursable en 168 mensualités de 237,85 euros et une mensualité de 214,23 euros, assurance emprunteur comprise, après un différé de remboursement de 11 mois.
Les fonds ont été versés à la société NRJEF au vu d'une attestation de fin de travaux du 25 octobre 2012.
Après le décès de [E] [B], survenu le 29 juillet 2014, son épouse, Mme [X], a remboursé le prêt par anticipation le 10 septembre 2014.
Prétendant que le bon de commande était irrégulier et que le raccordement au réseau n'était pas réalisé au moment du déblocage des fonds par la banque, Mme [X] ainsi que ses trois enfants, Mme [P] [B] épouse [W], Mme [S] [B] épouse [Y] et M. [L] [B], (les consorts [B]) ont, par actes du 13 octobre 2017, fait assigner devant le tribunal d'instance de Morlaix la société BNP Paribas Personal Finance (la BNP PPF), présentée comme se trouvant aux droits de la société Solfea en vertu d'un acte de cession de créances du 28 février 2017, ainsi que la SELARL Bally MJ, ès qualités de liquidateur de la société NRJEF, dont la liquidation judiciaire avait été prononcée par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 12 novembre 2014, en annulation des contrats de vente et de prêt.La BNP PPF ayant conclu à l'irrecevabilité des demandes formées à son encontre au motif qu'elle contestait être cessionnaire des droits et obligations de la société Solfea, les consorts [B] ont, par acte du 9 août 2018, appelé cette dernière à la cause, laquelle a soulevé la prescription de l'action des demandeurs.
Par jugement du 5 juillet 2019, le premier juge a :
rejeté les fins de non-recevoir présentées par la société Solfea et la BNP PPF,
prononcé l'annulation du contrat conclu le 16 octobre 2012 entre la société NRJEF, aujourd'hui représentée par son liquidateur, et les époux [B], et subséquemment l'annulation du contrat de crédit affecté conclu suivant offre du même jour entre les époux [B] et la société Solfea,
condamné la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfea, à restituer en conséquence aux consorts [B] la somme totale de 26 635,28 euros,
dit que, compte tenu des fautes de la société Solfea, il n'y a pas lieu à restitution par les consorts [B] de la somme de 23 500 euros au titre du capital emprunté,
dit que les consorts [B] devront tenir à la dispositions de la SELARL Bally MJ, ès qualités de liquidateur de la société NRJEF, le matériel de l'installation photolvotaïque litigieuse,
invité ce liquidateur à prendre l'attache des consorts [B] afin de récupérer ce matériel aux frais de la liquidation judiciaire, et ce dans le délai de 2 mois suivant la signification du jugement à défaut de quoi les consorts [B] pourront, passé ce délai, en disposer librement,
condamné solidairement la société Solfea et la BNP PPF aux entiers dépens, et à verser aux consorts [B] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
ordonné l'exécution provisoire,
débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.
La BNP PPF a relevé appel de ce jugement le 13 septembre 2019, pour demander à la cour de le réformer et de :
juger irrecevables les demandes formulées par les consorts [B] à son encontre,
prononcer sa mise hors de cause,
subsidiairement, dire prescrite l'action des consorts [B] sur le fondement de l'absence de cause, et, par conséquent, débouter les consorts [B] de leur demande sur ce fondement,
au fond, dire n'y avoir lieu à prononcer l'annulation du contrat principal, ni l'annulation du contrat de crédit,
débouter les consorts [B] de l'intégralité de leurs demandes,
plus subsidiairement, en cas d'annulation des contrats, dire que la société Solfea n'a commis aucune faute, et que les consorts [B] ne justifient pas de l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité à l'égard du prêteur,
dire que les consorts [B] ont remboursé le crédit par anticipation et que le prêteur devra rembourser aux consorts [B] le montant des sommes versées (à l'exception du montant du capital prêté restant acquis au prêteur), après justification de leur part de la résiliation du contrat conclu avec EDF, de la restitution à EDF des sommes perçues au titre de la revente d'électricité et au Trésor public des crédits d'impôts perçus,
en tout état de cause, condamner solidairement les consorts [B] au paiement d'une indemnité de 2 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
La société Solfea, devenue Solfinea, demande quant à elle à la cour de :
réformer le jugement attaqué,
juger irrecevable pour être prescrite l'action des consorts [B] sur le fondement de l'absence de cause,
juger irrecevable pour être prescrite l'action des consorts [B] visant à voir engager la responsabilité de la société Solfea,
au fond, juger n'y avoir lieu à prononcer l'annulation du contrat principal et du contrat de crédit,
débouter les consorts [B] de l'intégralité de leurs demandes,
subsidiairement, en cas d'annulation des contrats, juger que la société Solfea n'a commis aucune faute, et que les consorts [B] ne justifient pas de l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité à l'égard du prêteur,
juger que les consorts [B] ont remboursé le crédit par anticipation et que le prêteur devra rembourser aux consorts [B] le montant des sommes versées (à l'exception du montant du capital prêté restant acquis au prêteur), après justification de leur part de la résiliation du contrat conclu avec EDF, de la restitution à EDF des sommes perçues au titre de la revente d'électricité et au Trésor public des crédits d'impôts perçus,
en tout état de cause, condamner in solidum les consorts [B] au paiement d'une indemnité de 2 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Les consorts [B] demandent enfin à la cour de :
réformer le jugement attaqué en ce qu'il les a déboutés de leur demande en paiement de dommages-intérêts,
confirmer le jugement en ses autres dispositions,
à titre liminaire, débouter la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfinea, et la société Solfinea de leur fin de non-recevoir tirée d'une prétendue prescription des demandes des consorts [B],
débouter la BNP PPF, venant aux droits des sociétés Solfea et Solfinea de l'ensemble de ses demandes,
dire leurs demandes recevables et les déclarer bien-fondées,
confirmer l'annulation du contrat de vente conclu avec la société NRJEF, et du contrat de crédit affecté conclu avec la société Solfea et la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfea,
dire que la société Solfinea et la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfea, ont commis des fautes personnelles engageant leur responsabilité à l'égard des consorts [B],
dire que la société Solfinea et la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfinea, ne pourront se prévaloir des effets de l'annulation à l'égard des emprunteurs,
en conséquence, ordonner le remboursement par la société Solfinea et la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfinea, des sommes qui leur auront été versées par Madame [X] veuve [B], soit la somme de 26 635,28 euros,
à titre subsidiaire, condamner solidairement la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfea, et la société Solfinea à leur verser la somme de 26 635 euros, à titre de dommage et intérêts, au titre de leur préjudice, du fait de la négligence fautive des banques,
à titre infiniment subsidiaire, en cas de mise hors de cause de la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfinea, ordonner le remboursement par la société Solfinea des sommes qui leur auront été versées par Mme [X] veuve [B], soit la somme de 26 635,28 euros,
en tout état de cause, condamner solidairement la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfinea, et la société Solfinea à leur verser les sommes de :
6 000 euros au titre de leur préjudice financier,
6 000 euros au titre de leur préjudice moral,
3 968,80 euros, au titre du devis de désinstallation,
en tout état de cause, condamner la société Solfinea et la BNP PPF, venant aux droits de la société Solfinea, ou à défaut, la société Sofinea seule, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La SELARL Bailly MJ, ès qualités de liquidateur de la société NRJEF, à laquelle la BNP PPF, la société Solfinea et les consorts [B] ont signifié leurs conclusions, respectivement, les 25 juin 2020, 9 juin 2020 et 12 novembre 2020, n'a pas constitué avocat devant la cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour la BNP PPF le 10 mai 2022, la société Solfinea le 10 mai 2022 et les consorts [B] le 22 juin 2022, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 8 septembre 2022.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Sur la mise hors de cause de la BNP PPF
La BNP PPF soutient que le crédit consenti par la société Solfea a été remboursé par anticipation le 10 septembre 2014, antérieurement à la cession de créances intervenue entre le prêteur et la BNP PPF le 28 février 2017, ce qui a eu pour effet d'éteindre la créance du prêteur qui n'a donc pu lui être transmise, en sorte que les demandes formulées à son encontre par les consorts [B] seraient irrecevables en application de l'article 32 du code de procédure civile.
Les consorts [B] objectent que la cession de créances du 28 février 2017 aurait transféré à la BNP PPF, non seulement les créances existant alors contre les différents emprunteurs, mais également toutes les obligations dont la société Solfea était tenue envers eux, en ce compris celle de répondre de ses fautes dans l'exécution des contrats, et que leurs demandes à l'encontre du cessionnaire seraient par conséquent recevables.
Il est cependant constant que le prêt consenti le 16 octobre 2012 par la société Solfea a été intégralement remboursé par anticipation le 10 septembre 2014.
Il en résulte que la créance de la société Solfea sur les consorts [B], éteinte depuis cette date, n'a pu être cédée à la BNP PPF par l'acte de cession de portefeuille de créances du 28 février 2017, alors au demeurant que, ni la liste des créances cédées, ni la notification au consorts [B] de la prétendue cession de créance née du prêt litigieux ne sont produits.
Par conséquent, la BNP PPF n'a pas qualité pour défendre contre l'action exercée à son encontre aux fins d'annulation du contrat de crédit, d'engagement de sa responsabilité contractuelle lors de la libération des fonds et de restitution des sommes réglées en exécution du contrat de prêt et en paiement de dommages-intérêts complémentaires.
Après réformation du jugement attaqué, il conviendra donc de mettre la BNP PPF hors de cause.
Sur la nullité du contrat principal
Aux termes de l'article L. 121-23 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur lors de la conclusion du contrat litigieux, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'un démarchage au domicile d'une personne physique doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
les noms du fournisseur et du démarcheur,
la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés,
les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services,
le prix global à payer, les modalités de paiement et, en cas de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur ce type de vente,
la faculté de renonciation ouverte au client ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.
En outre, l'article L. 121-24 du code de la consommation précise que le contrat doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de cette faculté de renonciation et contenant les mentions décrites aux articles R. 121-3 à R. 121-6 de ce code, tous les exemplaires du contrat devant être signés et datés de la main même du client.
Enfin, selon l'article R. 121-4, le formulaire détachable de rétractation doit comporter, sur une face, l'adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé, et, sur son autre face, les mentions prévues à l'article R. 121-5 qui impose notamment l'indication de façon très lisible de la mention 'l'envoyer par lettre recommandée avec avis de réception' soulignée ou en caractères gras, ainsi que l'indication que le courrier doit être adressé à l'adresse figurant au dos.
En l'occurrence, les consorts [B] se plaignent à tort de ce que le bon de commande ne mentionne pas le prix de détail de chacun des éléments fournis, le texte précité n'imposant au contraire, à peine de nullité, que la seule mention du prix global.
D'autre part, satisfait aux exigences de l'article L. 121-23 § 6° du code de la consommation, relatives aux caractérisques du prêt affecté, lorsqu'au contrat principal est jointe l'offre préalable de prêt conclue concomitamment à l'occasion de l'opération de démarchage et contenant les renseignements prévus par ce texte.
En revanche, il est exact que le bon de commande ne mentionne pas la marque des panneaux fournis, alors pourtant que, s'agissant d'une installation à haut niveau de développement technologique destinée à produire de l'énergie, la marque, dont la fonction est de garantir l'origine d'un produit commercialisé, est une caractéristique essentielle pour le consommateur démarché qui doit ainsi pouvoir identifier le fabricant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et qui doit aussi pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi.
De même, le délai de livraison et d'exécution de la prestation accessoire de pose n'est pas mentionné dans le bon de commande, et aucune indication n'est donnée non plus sur les modalités de pose des panneaux.
Enfin, comme le souligne à juste titre les consorts [B], le bordereau détachable de rétractation figurant au verso du document ne peut être détaché de l'acte sans altérer celui-ci relativement à des éléments essentiels que constitue la désignation des parties contractantes.
Au surplus, le formulaire détachable de rétractation ne comporte, en réalité pas deux faces, mais une seule face sur laquelle la mention de l'envoi du formulaire par lettre recommandée avec accusé de réception est reproduite dans la même typographie que les autres énonciations du bordereau et ne figure ni en caractère gras ni souligné, et ne comporte donc pas une autre face sur laquelle devait être mentionnée l'adresse exacte et complète à laquelle il devait être envoyé, et ce en méconnaissance de l'article R. 121-5.
La société Solfinea soutient que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que les consorts [B] auraient renoncé à invoquer en acceptant la livraison et la pose des matériels, en revendant l'électricité produite, sans avoir jamais résilié le contrat les liant à EDF, en procédant au règlement des échéances du crédit, avant de procéder à son remboursement anticipé intégral.
Cependant, la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l'époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
Or, en l'occurrence, si les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause étaient reproduites au verso du bon de commande et qu'il était ainsi porté à la connaissance des époux [B] que celui-ci devait comporter, à peine de nullité, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des panneaux photovoltaïques et les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services, les dispositions de l'article R. 121-5 exigeant que le formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de rétractation du consommateur doit faire partie de l'exemplaire du contrat laissé au client et en être aisément séparé n'étaient pas reproduites.
Dès lors, rien ne démontre que les époux [B] avaient connaissance de ce vice du bon de commande lorsqu'ils ont laissé la société NRJEF intervenir à leur domicile et signé l'attestation de fin de travaux.
Il n'est donc pas établi que les consommateurs aient, en pleine connaissance de l'irrégularité de ce contrat de vente affectant le bordereau de rétractation, entendu renoncer à la nullité en résultant et qu'ils auraient de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.
Les consorts [B] soutiennent par ailleurs que le contrat principal devrait aussi être annulé pour dol, les acquéreurs des biens fournis par la société NRJEF ayant été trompés sur les performances de l'installation, le prix de revente de l'électricité ne leur permettant pas de couvrir les échéances de remboursement du prêt.
Cependant, ils n'établissent nullement que la société NRJEF leur aurait contractuellement promis que le niveau de rémunération de l'électricité produite par l'installation devait leur permettre de couvrir les mensualités de remboursement.
Le bon de commande ne contient en effet aucun objectif chiffré de rentabilité de l'opération, celui-ci se contentant d'indiquer la puissance maximale de l'installation.
Il s'évince de qui précède que le contrat conclu entre les époux [B] et la société NRJEF le 16 octobre 2012 n'encourt la nullité qu'en ce que le bordereau de rétractation dont le bon de commande était doté n'est pas régulier.
Sur la prescription des demandes formées contre la société Solfinea
Se prévalant de ce que l'assignation délivrée le 13 octobre 2017 à la BNP PPF n'avait pu avoir pour effet d'interrompre la prescription des demandes formées contre la société Solfinea, celle-ci soutient que l'action des consorts [B] engagée à son encontre par assignation en intervention forcée du 9 août 2018 serait prescrite.
En application de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, l'action de l'emprunteur en nullité du contrat de prêt se prescrit par cinq ans commençant à courir à compter de la découverte du vice, lequel, s'agissant d'une cause de nullité de plein droit résultant de la nullité du contrat principal, procède de la découverte de l'irrégularité du contrat principal si celle-ci était décelable à la simple lecture de l'acte.
Le délai de prescription de l'action en nullité de plein droit du contrat de prêt et en restitution des sommes remboursées en exécution du prêt, qui en découle, a en l'espèce commencé à courir à compter de la régularisation du bon de commande du 16 octobre 2012, date à laquelle les époux [B] pouvaient se convaincre, à la simple lecture de l'acte, de l'irrégularité du bordereau de rétractation.
En outre, contrairement à ce qu'ils soutiennent, l'assignation introductive d'instance délivrée le 13 octobre 2017 à l'encontre de la BNP PPF n'a eu aucun effet interruptif à l'égard de la société Solfea, dès lors que celle-ci ne vient pas aux droits de la société BNP PPF et que, pour être interruptive de prescription, la citation en justice doit être signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire.
Il en résulte que la prescription était acquise lorsqu'ils ont exercé leur action contre la société Solfinea par assignation du 9 août 2018 et que leurs demandes en annulation du contrat de prêt et restitution des sommes versées en exécution de celui-ci sont irrecevables, le jugement attaqué étant infirmé de ces chefs.
En revanche, l'action en responsabilité exercée contre le prêteur est soumise à la prescription quinquennale de l'article L. 110-4, commençant à courir à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Il s'ensuit que, s'agissant de l'action en paiement de dommages-intérêts complémentaires pour préjudices de jouissance et financier, le délai ne peut commencer à courir que du jour où les acheteurs ont pu découvrir l'insuffisance alléguée de performance, laquelle ne pouvait être constatée qu'après mise en service et utilisation de l'installation durant plusieurs mois, en tout cas moins de cinq ans avant l'assignation de la société Solfea en date du 9 août 2018.
Enfin, s'agissant de la demande en paiement des frais de remise en état de la toiture, le délai n'a pu commencer à courir qu'à la date du jugement attaqué ayant dit que les consorts [B] devront tenir à la dispositions du liquidateur de la société NRJEF, le matériel de l'installation photovoltaïque litigieuse.
Les intimés sont donc recevables à agir en paiement de dommages-intérêts, le jugement étant confirmé de ce chef.
Sur la responsabilité du prêteur
Les consorts [B] font grief au prêteur d'avoir apporté son concours à des opérations nécessairement ruineuses, et en participant ainsi au dol de son prescripteur.
Cependant, le dol ne se présume pas, et les époux [B] allèguent par de pures conjectures, et sans en rapporter la preuve, que le prêteur aurait été complice de manoeuvres dolosives du fournisseur qui n'ont au demeurant pas été retenues.
Ils ne sauraient par ailleurs, au soutien d'une demande subsidiaire en paiement de dommages-intérêts pour perte de chance de ne pas contracter, faire grief au prêteur de s'être fautivement serait fautivement dessaisi des fonds sans vérifier la régularité formelle du contrat principal, alors qu'ils n'apportent pas la preuve de l'existence de leur préjudice.
En effet, disposant d'une installation raccordée au réseau, mise en service, que le fournisseur ne viendra jamais reprendre du fait de sa liquidation judiciaire, ils ne démontrent que la faute de la société Solfinea, consistant à ne pas avoir su déceler l'irrégularité du bordereau de rétractation avant de se dessaisir des fonds empruntés, ait pu causer un préjudice aux emprunteurs, qui ont en définitive bénéficié d'une installation mise en service, raccordée au réseau, et produisant de l'électricité revendue à EDF depuis 7 ans.
Les demandes en paiement de dommages-intérêts formés contre la société Solfinea pour préjudices moral, financier et de jouissance seront pareillement rejetées, faute de preuve de l'existence de tels préjudices et de leur lien causal avec la faute du prêteur.
De même, la demande de condamnation de la banque au paiement du coût de dépose de l'installation et de remise en état de la toiture sera rejetée, dès lors que, tiers au contrat principal, le prêteur ne saurait se voir imputer les conséquences de l'anéantissement du contrat principal annulé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes.
Sur les frais irrépétibles
Il n'y a pas matière à en application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque, tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
CONFIRME le jugement rendu le 5 juillet 2019 par le tribunal d'instance de Morlaix en ce qu'il a :
rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Solfea relativement à la prescription de ses demandes en paiement de dommages-intérêts,
prononcé l'annulation du contrat conclu le 16 octobre 2012 entre la société NRJEF, aujourd'hui représentée par son liquidateur, et les époux [B],
dit que les consorts [B] devront tenir à la dispositions de la SELARL Bally MJ, ès qualités de liquidateur de la société NRJEF, le matériel de l'installation photovoltaïque litigieuse,
invité ce liquidateur à prendre l'attache des consorts [B] afin de récupérer ce matériel aux frais de la liquidation judiciaire, et ce dans le délai de 2 mois suivant la signification du jugement à défaut de quoi les consorts [B] pourront, passé ce délai, en disposer librement ;
L'INFIRME en ses autres dispositions ;
PRONONCE la mise hors de cause de la société BNP Paribas Personal Finance ;
DÉCLARE l'action en annulation de plein droit du contrat de prêt et en restitutions des sommes versées en exécution de ce contrat exercée contre la société Solfinea irrecevable ;
DÉBOUTE Mme [R] [X] veuve [B], Mme [P] [B] épouse [W], Mme [S] [B] épouse [Y] et M. [L] [B] de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts dirigées contre la société Solfinea ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
CONDAMNE solidairement Mme [R] [X] veuve [B], Mme [P] [B] épouse [W], Mme [S] [B] épouse [Y] et M. [L] [B] aux dépens d'appel;
REJETTE toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRESIDENT