COUR D'APPEL DE RENNES
N° 22/422
N° N° RG 22/00709 - N° Portalis DBVL-V-B7G-TKMQ
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Nous, Hélène CADIET, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Elodie CLOATRE, greffière,
Statuant sur l'appel formé le 06 Décembre 2022 à 11 heures 39 par La Cimade pour :
M. [L] [S]
né le [Date naissance 1] 2000 à [Localité 3] (SERBIE)
de nationalité Serbe
ayant pour avocat Me Sonia DAHI, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 05 Décembre 2022 à 17 heures 05 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiaire de RENNES qui a rejeté les exceptions de nullité soulevées, le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [L] [S] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-huit jours à compter du 05 décembre 2022 à 12 heures 45;
En l'absence de représentant du préfet de la Sarthe, dûment convoqué,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé (avis du 06/12/2022),
En présence de [L] [S], assisté de Me Sonia DAHI, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 07 Décembre 2022 à 14 H 00 l'appelant assisté de M. [V] [C], interprète en langue serbe, et son avocat en leurs observations,
Avons mis l'affaire en délibéré et le 07 Décembre 2022 à 16 heures 00, avons statué comme suit :
M. [L] [S] a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la SARTHE du 23 septembre 2022 ayant prononcé une obligation de quitter le territoire.
Le préfet l'a placé en rétention administrative par arrêté du 3 décembre 2022 après qu'il a été interpellé pour des faits de vol par escalade.
Statuant sur la requête de M. [L] [S] et sur celle du préfet reçue le 4 décembre 2022 à 18 heures 29, par ordonnance rendue le 5 décembre 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté son recours et prolongé sa rétention pour une durée maximale de vingt-huit jours à compter du 5 décembre 2022 à 12 heures 45.
Par déclaration de la CIMADE reçue au greffe de la cour le 6 décembre 2022 à 11 heures 39, M. [L] [S] a interjeté appel de cette ordonnance notifiée le 5 décembre 2022 à 17 heures 05.
Il fait valoir au soutien de sa demande d'infirmation et de remise en liberté le défaut d'examen de sa situation et l'erreur manifeste d'appréciation de la préfecture qui n'a pas tenu compte de ses garanties de représentation et de son hébergement stable chez son cousin. Il invoque en outre avoir été privé de liberté entre l'interpellation et la notification du placement en garde à vue au regard du délai intervenu tardivement pour la notification.
Le préfet par observations transmises le 7 décembre 2022 demande de confirmer la décision.
Selon avis écrit du 6 décembre 2022 le procureur général a sollicité la confirmation de l'ordonnance querellée.
A l'audience, M. [L] [S] , assisté de son conseil Me DAHI et de M. [V] [C] interprète en langue serbe ayant prêté serment, a maintenu les termes de son mémoire d'appel et demande à rester sur le territoire promettant de respecter ce qu'on lui imposera.
Il sollicite la condamnation du Préfet es qualités de représentant de l'Etat à payer à son avocat la somme de 800,00 Euros sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991, moyennant renonciation de son avocat à la perception des sommes qui lui auraient été allouées au titre de l'aide juridictionnelle.
SUR CE,
L'appel, formé dans les délais et formes légaux, est recevable.
Sur les garanties de représentation :
L'article L741-1 du CESEDA énonce que : «'L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision. Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3'».
Ce dernier texte précise : «'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière,
dans les cas suivants :
1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5'».
Enfin, l'article 15-1 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil dispose que : «'À moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement, en particulier lorsque :
a) il existe un risque de fuite, ou
b) le ressortissant concerné d'un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement.
Toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise'».
C'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu'il convient d'adopter que le premier juge a rejeté ce moyen en concluant à l'absence d'erreur d'appréciation de la préfecture après avoir relevé :
- les différentes déclarations de l'intéressé sur son logement( tantôt sans domicile fixe en audition du 2 décembre 2022, ou chez son amie mineure qui demeure chez ses parents à [Localité 2] et à l'audience devant le juge des libertés dans la rue dans son véhicule ou en appelant le 115) ;
- le non respect d'une précédente assignation à résidence selon procès verbaux de carence des 6 octobre et 3 décembre 2022, alors qu'il devait prendre un vol à destination de la SERBIE, ce qui caratérise le risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement de M. [L] [S] dépourvu de document d'identité ou de voyage.
Devant la cour il verse un nouvel élément : l'attestation de M. [Z] dont il n'est pas démontré qu'il est son cousin et sur laquelle la date du 20 septembre 2022 a été rajoutée avec une encre différente ainsi que la date du jour de l'attestation ; cette pièce, dont la préfecture n'avait nullement connaissance, est insuffisante à établir la réalité et la stabilité de la résidence de M. [S].
Le moyen sera rejeté.
Sur le grief tiré de la privation de liberté entre l'interpellation et la notification du placement en garde à vue :
C'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu'il convient d'adopter que le premier juge a estimé que la notification du placement en garde à vue à 19 heures 47 après l'interpellation à 18 heures 50 n'est pas intervenu dans un délai déraisonnable, au vu des démarches diverses à accomplir (notamment investigations techniques telles que faire prendre en charge le véhicule par un dépanneur en raison de matériel suspect dans le véhicule de M. [S], démarches aux fins de solliciter un interprète).
Le moyen sera également rejeté.
La décision sera confirmée.
La demande de M. [S] sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
statuant publiquement,
Déclarons l'appel recevable ;
Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 5 décembre 2022 ;
Rejetons la demande de M. [S] sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Laissons la charge des dépens au Trésor Public.
Fait à Rennes, le 07 Décembre 2022 à 16 heures 00
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [L] [S], à son avocat et au préfet
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier