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22/11/2022 | FRANCE | N°20/02802

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 22 novembre 2022, 20/02802


1ère Chambre





ARRÊT N°378/2022



N° RG 20/02802 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QWP3













OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT OPAC DE [Localité 7]



C/



M. [J] [X]

Mme [Z] [B]

















Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022


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COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du pronon...

1ère Chambre

ARRÊT N°378/2022

N° RG 20/02802 - N° Portalis DBVL-V-B7E-QWP3

OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT OPAC DE [Localité 7]

C/

M. [J] [X]

Mme [Z] [B]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 Juillet 2022 devant Madame Caroline BRISSIAUD, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré annoncé au 25 octobre 2022 à l'issue des débats

****

APPELANT :

L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT OPAC DE [Localité 7], établissement public local à caractère industriel et commercial agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Anne-Claire CAP, avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉS :

Monsieur [J] [X]

né le 05 Avril 1981 à [Localité 5] (MAROC)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Damien VARNOUX de la SELARL VALADOU - JOSSELIN & ASSOCIÉS, avocat au barreau de QUIMPER

Madame [Z] [B]

née le 13 Mars 1986 à [Localité 7] (29)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Damien VARNOUX de la SELARL VALADOU - JOSSELIN & ASSOCIÉS, avocat au barreau de QUIMPER

EXPOSÉ DU LITIGE

La commune de [Localité 6] a concédé à l'Office public de l'habitat de [Localité 7] (ci-après dénommé l'OPAC) l'aménagement de la ZAC de Gorequer.

Par acte sous seing privé du 18 mai 2016, Mme [Z] [B] et M. [J] [X], (ci-après dénommés les consorts [B]-[X]) ont conclu avec l'OPAC de [Localité 7], un contrat de vente portant sur une parcelle cadastrée section AC n°[Cadastre 1] dans le lotissement situé dans cette ZAC, d'une surface de 624 m2, pour y construire leur maison d'habitation, sachant que ce lot présentait une surface de plancher maximale autorisée de 312 m2.

La vente a été conclue avec une condition suspensive d'obtention d'un prêt, l'obtention ou le refus de prêt devant être justifié par les acquéreurs au plus tard le 30 juin 2016 à peine de caducité du compromis si bon semble au vendeur.

Les consorts [B]-[X] ont sollicité un permis de construire une maison avec un étage auprès de la commune et l'ont obtenu le 21 juillet 2016.

Faute d'avoir pu obtenir un financement bancaire pour leur projet, ils ont demandé le retrait de leur permis de construire le 9 novembre 2017.

Ils ont formé une nouvelle demande de permis de construire avec un projet différent, portant sur une maison de plain-pied et le second permis de construire a été accordé le 17 janvier 2018. Ils ont obtenu du Crédit Agricole, le 12 décembre 2017, un financement se composant d'un prêt habitat de 122 577 € au taux effectif global de 2,11 %, d'un prêt 0% Primo Breton PTH de 10 000 € sans intérêt et d'un prêt à taux zéro de 85 065 €, boni'é par l'État.

Le préfet du Finistère s'est cependant opposé au permis et celui-ci a été retiré, au motif que la construction projetée se situait en grande partie en zone Nh du PLU qui interdit les nouvelles constructions à usage d'habitation.

Par la suite, les consorts [B]-[X] ont décidé d'acquérir un autre lot, la parcelle AC n°[Cadastre 2], d'une surface de 653 m2 dont une surface de plancher maximale autorisée de 326 m2.

Un second compromis de vente a été régularisé le 27 février 2018 avec le lotisseur vendeur, l'Office public de l'habitat de Quimper- Cornouaille. Un troisième permis de construire a été sollicité et accordé par le maire de la commune le 5 avril 2018.

Par ailleurs, les consorts [B]-[X] ont obtenu un nouveau financement le 16 avril 2018, se composant d'un prêt Tout Habitat Facilimmo de 112 096 € au taux effectif global de 2,41%, d'un prêt 0% Primo Breton PTH de 10 000 €, d'un prêt Tout Habitat Facilimmo de 56 000 € et d'un prêt a taux zéro de 43 562 €.

Reprochant à l'OPAC de [Localité 7] de ne pas les avoir informés de l'inconstructibilité partielle du terrain acquis en 2016 du fait de sa situation en zone Nh du PLU, les consorts [B]-[X] ont par courrier du 12 mars 2018, demandé à leur vendeur de les indemniser du surcoût résultant de leur second projet de construction et des préjudices subis.

Ils ont renouvelé leur demande par courrier recommandé du 11 juin 2018 en sollicitant une indemnité de 27 319,12 € au titre du renchérissement du nouveau prêt qu'ils ont dû souscrire et des troubles causés du fait des nouvelles démarches engagées.

Estimant n'avoir commis aucune faute, l'OPAC a rejeté leur demande en précisant qu'il ne pouvait être tenu pour responsable du changement de la réglementation relative aux prêts à taux zéro, intervenu le 1er janvier 2018 et des nouvelles conditions de prêts bancaires. Il rappelait également qu'il avait à titre exceptionnel accepté de prendre en charge les frais d'acquisition au titre du second compromis de vente (2 150 €).

Par acte d'huissier du 23 janvier 2019, les consorts [B] -[X] ont fait citer l'OPAC de [Localité 7] devant le tribunal de grande instance de Quimper afin de le voir condamner, sur le fondement de l'article 1602 du Code civil, à leur verser la somme de 33 769,12 € à titre de dommages-et-intérêts, avec intérêts au taux légal et capitalisation, outre 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 24 mars 2020, le tribunal judiciaire de Quimper a :

-condamné l'Office public de l'habitat OPAC de [Localité 7] à verser à Mme [Z] [B] et M. [J] [X] une indemnité de 24 000 € en réparation de leurs préjudices, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

-condamné l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] à verser à Mme [Z] [B] et M. [J] [X] une indemnité de 2 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-ordonné l'exécution provisoire,

-condamné l'Office public de l'habitat OPAC de [Localité 7] aux entiers dépens.

Suivant déclaration du 24 juin 2020, l'Office public de l'habitat OPAC de [Localité 7] a relevé appel de toutes les dispositions de ce jugement.

Par voie de conclusions, Mme [Z] [B] et M. [J] [X] ont formé un appel incident relatif au montant des dommages-et-intérêts accordés.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises et notifiées au greffe le 15 mars 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions, l'Office public de l'habitat- OPAC de [Localité 7] demande à la cour de réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Quimper le 24 mars 2020 et statuant à nouveau de :

-Débouter M. [X] et Mme [B] de leur appel incident et plus généralement de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

-Ordonner la restitution des sommes versées à M. [X] et Mme [B] par l'OPAC de [Localité 7] au titre de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement du 24 mars 2020,

-Condamner M. [X] et Mme [B] à payer à l'OPAC de [Localité 7] une somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et à prendre en charge les entiers dépens de 1ère instance et d'appel.

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises et notifiées au greffe le 16 décembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens et prétentions, Mme [Z] [B] et M. [J] [X] demandent à la cour de :

A titre principal :

-Débouter l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] de l'ensemble de ses fins, demandes et prétentions,

-Confirmer le jugement en ce qu'il a reconnu la responsabilité de l'OPAC de [Localité 7],

-Infirmer partiellement la décision rendue ce qu'elle n'a pas fait droit à l'ensemble des demandes de M. [X] et Mme [B],

En conséquence,

-Condamner l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] à leur verser la somme de 33.769,12 € avec intérêts au taux légal à compter de la demande du 12 mars 2018,

-Ordonner la capitalisation des intérêts,

A titre subsidiaire,

-Débouter l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] de l'ensemble de ses fins, demandes et prétentions,

-Confirmer la décision rendue en première instance par le tribunal judiciaire de Quimper,

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour venait à annuler la décision rendue par le tribunal judiciaire de Quimper et devait statuer à nouveau,

-Condamner l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] à leur verser la somme de 33.769,12 € augmentée des intérêts au taux légal ainsi que de leur capitalisation courant à compter de la demande du 12 mars 2018.

-Débouter l'Office public de l'habitat -OPAC de [Localité 7] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

En tout état de cause,

-Condamner l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIVATION DE LA COUR

1°/ Sur la responsabilité de l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7]

L'article 1602 du Code civil dispose que le vendeur est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige. Tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur.

a. sur le manquement du vendeur à l'obligation précontractuelle d'information

En l'espèce, il ressort du plan de zonage communiqué par l'OPAC que la parcelle cadastrée AC n°[Cadastre 1] d'une contenance de 624 m2, cédée aux consorts [B]-[X], est située, pour presque la moitié de sa surface, en zone classée Nh au PLU de la commune. Cette parcelle est donc en grande partie inconstructible.

Comme l'a relevé le tribunal, en tant que professionnel de l'immobilier et aménageur de la ZAC de Gorequer, l'OPAC ne pouvait ignorer les différentes zones du PLU incluses dans son projet global d'aménagement, notamment les zones dans lesquelles les constructions n'étaient pas autorisées.

La connaissance qu'avait le lotisseur vendeur de la situation du terrain cédé au regard du PLU est confirmée par le courrier du 23 février 2018, adressé par le maire de la commune de [Localité 6] au directeur de l'OPAC, aux termes duquel le maire « déplore que M. [X] et Mme [B] n'aient pas été informés de l'inconstructibilité d'une partie de la parcelle (') alors que cette erreur perdure depuis 2011 » en ajoutant «  je souhaite par ce courrier que vous preniez en charge l'intégralité du surcoût engendré par cette situation et que les pétitionnaires ne subissent pas les conséquences d'une erreur connue depuis des années par vous et vos services ».

Par ailleurs, le compromis de vente mentionne un terrain à bâtir pour une contenance de 653 m2, formant le lot n°37 de la ZAC de Gorrequer, en précisant qu'est attachée au lot vendu, une surface de plancher maximale autorisée de 326 m2.

Comme l'a justement relevé le tribunal, l'OPAC savait qu'il vendait des terrains afin que des acquéreurs y construisent une maison d' habitation. La constructibilité du terrain était nécessairement entrée dans le champ contractuel.

Il en résulte que le vendeur, qui était tenu d'informer de manière claire et complète les consorts [B]-[X] avant la signature du compromis de vente du 15 mai 2016 , devait leur faire savoir que la parcelle cadastrée section AC n° [Cadastre 1] cédée était partiellement inconstructible.

En l'absence de toute information sur le classement d'une grande partie du terrain en zone Nh, les acquéreurs étaient fondés à croire que celui-ci était librement et intégralement constructible, dans la limite de la surface plancher autorisée ( 312 m2).

Ce d'autant que, par référence au prix payé par les consorts [B]-[X] pour acquérir in fine la parcelle cadastrée AC n°[Cadastre 2], le terrain litigieux a manifestement été vendu au prix du m2 d'un terrain constructible pour la totalité de sa surface.

En définitive, il est évident que cette information relative à une qualité essentielle de la chose vendue, a fortiori au regard de l'ampleur de la surface inconstructible, ne pouvait être passée sous silence par le lotisseur-vendeur.

C'est tout à fait vainement que l'OPAC prétend que son obligation d'information se limitait à l'objet du contrat, c'est à dire la cession d'un terrain à construire et qu'elle ne s'étendait pas à la réalisation d'un projet de construction.

Par ailleurs, comme l'a parfaitement relevé le premier juge, le fait que les consorts [B]-[X] n'aient pas obtenu immédiatement le financement bancaire souhaité et qu'ils aient été contraints de modifier leur projet, de renoncer au premier permis de construire accordé et d'en solliciter un second, ne fait pas disparaître la faute initiale du vendeur.

En outre, l'OPAC ne peut sérieusement soutenir qu'elle a scrupuleusement respecté son obligation de transparence et de renseignement en se retranchant derrière le fait que les acquéreurs étaient parfaitement informés que la surface de plancher pouvant être construite sur la parcelle était limitée à 312 m2.

L'inconstructibilité partielle du terrain ne pouvait en effet se déduire de l'information relative à la surface de plancher maximale attachée au lot cédé, l'OPAC entretenant vainement la confusion entre ces deux notions, qui n'ont pourtant aucun rapport entre elles.

D'après l'attestation du directeur de l'OPAC datée du 23 octobre 2013, la surface de plancher maximale de 312 m2 attachée au lot n°77 est déterminée par le cahier des charges de cession applicable aux colotis. Cette limitation de construction est indépendante des règles d'urbanisme applicables à la ZAC. Le permis de construire obtenu le 17 janvier 2018 a d'ailleurs été retiré à la demande du préfet alors qu'il portait sur la construction d'une maison de plain-pied dont l'emprise au sol était bien inférieure à 312 m2 .

L'information relative à la surface de plancher maximale a bien été donnée aux acquéreurs, mais elle était loin d'être suffisante.

De fait, avec un terrain pour moitié inconstructible, les possibilités d'aménagement et de construction étaient fortement contraintes. De telles restrictions à l'usage et à la destination de la chose vendue ne pouvaient qu'être portées à la connaissance des acquéreurs.

Il s'ensuit que les moyens opposés par l'Office public de l'habitat- OPAC de [Localité 7] pour contester la faute sont parfaitement inopérants. C'est à bon droit que le tribunal a retenu un manquement du vendeur à son devoir d'information.

b. sur le lien de causalité

Le tribunal a également retenu à juste titre que les préjudices allégués par les acquéreurs étaient en lien direct avec la faute commise par le vendeur.

En effet, l'échec du premier projet de construction, faute de financement, est sans incidence pour la résolution du litige.

Quant au second projet, les consorts [B]-[X] avaient obtenu leur permis de construire ainsi que le financement.

En outre, comme précédemment indiqué, leur projet de construction d'une maison de plain-pied ne dépassait pas la surface de plancher maximale autorisée.

C'est donc exclusivement le fait que la parcelle se trouvait en grande partie en zone inconstructible qui a conduit au recours amiable du Préfet contre le permis de construire accordé le 17 janvier 2018.

Par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'OPAC, aucun élément ne permet de considérer que la surface de plancher mentionnée dans le compromis de vente (312m2) aurait été réellement possible ni que la surface constructible aurait pu accueillir le projet de construction de plain-pied des acquéreurs, si ces derniers avaient accepté de revoir l'implantation de la maison. Le retrait du permis de construire accordé le 17 janvier 2018 pour la construction d'une maison présentant une emprise au sol de 107,43 m2 (bien inférieure à la surface plancher autorisée) ainsi que l'attestation de l'architecte de Breizh Plan Habitat démontrent le contraire.

C'est donc bien l'inconstructibilité partielle du terrain qui a remis en cause leur projet de construction. L'OPAC est dés lors particulièrement mal fondée à reprocher aux consorts [B]-[X] leur choix de faire construire une maison de plain-pied , d'avoir voulu construire en zone non aedificandi en violation du PLU de la commune ou encore d'avoir refusé de revoir l'implantation de leur maison.

Outre qu'il n'est pas démontré que la construction envisagée était possible en zone aedificandi, le tribunal a justement souligné que les acquéreurs n'avaient en tout état de cause aucune obligation d'adapter leur projet à cette nouvelle information qui réduisait le potentiel du terrain et modifiait l'implantation et l'orientation de leur maison. Ils étaient donc bien fondés à renoncer à l'achat de cette parcelle au profit d'une autre, permettant la réalisation de leur projet.

En définitive, s'ils avaient été informés des restrictions de constructibilité de leur terrain au regard des règles d'urbanisme, les consorts [B]-[X] auraient directement pu procéder, en 2017, à l'acquisition d'un autre terrain susceptible d'accueillir leur maison.

Dès lors, ils n'auraient pas été obligés d'élaborer un nouveau projet sur une parcelle différente, impliquant l'élaboration par l'architecte de nouveaux plans de construction ainsi qu'une nouvelle demande de permis de construire et une nouvelle recherche de financement.

Il doit être considéré que le manquement du vendeur à son obligation d'information a causé un préjudice direct et certain aux consorts [B]-[X] qui, pour faire aboutir leur projet de construction, ont dû débourser davantage que ce que le projet avorté leur aurait coûté.

2°/ Sur l'indemnisation des préjudices

a. les préjudices matériels

M. [X] et Mme [B] exposent qu'en 2017, ils avaient pu bénéficier d'un prêt à taux zéro pour un montant plus important (85 065 euros) qu'en 2018 où le PTZ a été plafonné à 42 822 euros. Ils estiment que le nouveau prêt souscrit pour le financement de l'acquisition et de la construction de la parcelle AC n°[Cadastre 2] a entraîné pour eux un surcoût de 27 069,12 euros.

En se référant aux coûts des crédits mentionnés dans les offres de prêt datées du 12 décembre 2017 et du 16 avril 2018, le tribunal a déterminé qu'au maximum, le coût total du premier financement obtenu en 2017 s'élevait à 33 333,94 euros contre 59 639, 35 euros en 2018.

Il est exact que les offres de crédit mentionnent qu'en raison du caractère incertain des dates et du montant des utilisations, le montant des intérêts en période d'anticipation ne peut être qu'estimé selon l'hypothèse d'un déblocage de la totalité des sommes au premier jour de la période d'anticipation.

Toutefois, par définition, il est impossible de connaître le montant exact des intérêts que les consorts [B]-[X] auraient effectivement réglés au titre du financement obtenu en 2017. La reconstitution de leur préjudice ne peut reposer que sur l'hypothèse figurant dans l'offre de prêt, soit celle d'un déblocage de la totalité des sommes au premier jour de la période d'anticipation. La cour ne dispose d'ailleurs d'aucun élément pour dire que les estimations des offres de prêts seraient erronées ni que l'incidence des conditions d'utilisations sur le coût total du crédit serait pertinente dans l'évaluation du préjudice.

Dès lors, au vu des éléments dont elle dispose, la cour considère que le préjudice financier des acquéreurs au titre du renchérissement du crédit est certain et qu'il correspond à la différence entre les conditions de crédit obtenues en 2017 et celles, moins favorables, qu'ils ont pu négocier en 2018, soit la somme de 26 305,41 euros, sans qu'il y ait lieu de procéder à un quelconque abattement.

Par ailleurs, le tribunal a écarté à juste titre les frais de dossier bancaire, ces derniers étant inclus dans les coûts totaux des crédits.

Enfin, les consorts [B]-[X] exposent qu'ils ont dû se tourner vers un terrain plus cher que la parcelle initialement acquise. Comme l'a cependant relevé le tribunal, si la parcelle cadastrée AC n°[Cadastre 2] leur a effectivement coûté 1 450 euros de plus que la parcelle AC n° [Cadastre 1] , la superficie du second terrain est toutefois supérieure au premier ( 653 m2 pour la parcelle AC n°[Cadastre 2] contre 624 m2 pour la parcelle AC n°[Cadastre 1]), de sorte qu'il n'existe aucun préjudice.

b. le préjudice moral

Au regard des troubles et tracas causés aux acquéreurs, lesquels ont été contraints de revoir entièrement et rapidement leur projet avec le sentiment désagréable d'avoir été trompés, puisqu'ils n'ont appris l'inconstructibilité partielle de leur terrain que le jour même de la signature de l'acte authentique, par l'intermédiaire du Préfet et non du vendeur, la cour considère que le tribunal a fait une juste appréciation du préjudice moral des consorts [X]-[B] lesquels n'apportent en cause d'appel aucun élément de justification complémentaire du préjudice moral allégué.

Au total, après infirmation du jugement, l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] sera condamné à verser à Mme [Z] [B] et M. [J] [X] la somme de 26 305,41 euros en réparation de leurs préjudices matériels outre la somme de 2.000 euros au titre de leur préjudice moral.

3°/ Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

L'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] qui succombe à nouveau en appel sera condamné aux dépens d'appel et débouté par conséquent de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de le condamner à payer à Mme [Z] [B] et M. [J] [X] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu le 24 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Quimper sauf en ce qu'il a :

Condamné l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] à verser à Mme [Z] [B] et M. [J] [X] la somme de 24 000 euros en réparation de leurs préjudices ;

Statuant à nouveau de ce chef :

Condamne l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] à verser à Mme [Z] [B] et M. [J] [X] la somme de 26 305,41 euros en réparation de leurs préjudices matériels outre la somme de 2.000 euros au titre de leur préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière ;

Y ajoutant :

Condamne l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] à verser à Mme [Z] [B] et M. [J] [X] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'Office public de l'habitat-OPAC de [Localité 7] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/02802
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;20.02802 ?
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