La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/2022 | FRANCE | N°19/04809

France | France, Cour d'appel de Rennes, 2ème chambre, 18 novembre 2022, 19/04809


2ème Chambre





ARRÊT N°559



N° RG 19/04809

N° Portalis DBVL-V-B7D-P6II













LOCAM SAS



C/



Mme [J] [L]



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée













Copie exécutoire délivrée



le :



à :

- Me LHERMITTE

- Me BOURGES



RÉPUBLIQUE FRANÇ

AISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,



GREFFIER...

2ème Chambre

ARRÊT N°559

N° RG 19/04809

N° Portalis DBVL-V-B7D-P6II

LOCAM SAS

C/

Mme [J] [L]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me LHERMITTE

- Me BOURGES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 22 Septembre 2022

devant Monsieur Jean-François POTHIER, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 18 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

LOCAM SAS

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par la SELARL LEXI CONSEIL ET DEFENSE, plaidant, avocat au barreau de SAINT ETIENNE

INTIMÉE :

Madame [J] [L]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

2

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon contrat d'abonnement et de location de solution Internet du 22 mars 2017, la société Cometik a créé pour Mme [L], exerçant une activité de sophrologue un site Internet en s'engageant à l'héberger et à le mettre à jour.

Parallèlement, la société de location financière Locam a, par contrat de location du même jour, loué le site à Mme [L] moyennant le paiement de 48 loyers mensuels de 240 euros TTC.

Suivant facture du 3 juillet 2017, la société Cometik a cédé le site à la société Locam moyennant le prix de 6 664,20 euros TTC.

Prétendant avoir été trompée sur les conditions de son engagement contractuel et les prestations attendues, Mme [L] a, adressé des réclamations aux sociétés Cometik et Locam.

Se prévalant du défaut de paiement des loyers la société Locam a, par lettre recommandée du 25 mai 2018 , mis Mme [L] en demeure de régulariser l'arriéré sous huit jours, faute de quoi elle se prévaudrait de la déchéance du terme.

Puis, par acte du 10 août 2018, la société Locam a fait assigner Mme [L] en paiement devant le tribunal de grande instance de Lorient.

Par jugement assorti de l'exécution provisoire du 28 mars 2019, le tribunal d'instance de Lorient a :

- Condamné Mme [L] à payer à la société Locam la somme de 1 200 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2018 sur la somme de 960 euros et du 10 août 2018 pour le surplus ainsi qu'à payer la somme de 500 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2019.

- Débouté Mme [L] de sa demande de délais de paiement

- Condamné Mme [L] aux entiers dépens

- Débouté la société Locam de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

La société Locam a relevé appel de cette décision le 17 juillet 2019 et par dernières conclusions notifiées le 20 juillet 2020, elle demande de :

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a réduit à 500 euros les indemnités contractuelles de résiliation ;

- Condamner Mme [J] [L] à régler à la société Locam la somme complémentaire de 8 340 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 25 mai 2018 ;

- Débouter Mme [J] [L] de son appel incident et, plus généralement, toutes ses demandes ;

- Condamner Mme [J] [L] à régler à la société Locam une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- La Condamner aux entiers dépens d'instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées le 24 septembre 2020, Mme [L] demande de :

À titre principal, Infirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Lorient le 28 mars 2019,

En conséquence,

Annuler le contrat de location financière souscrit par Mme [J] [L] auprès de la Société Locam pour dol,

Débouter la société Locam de toutes ses demandes à l'encontre de Mme [J] [L],

Condamner la société Locam à rembourser à Mme [J] [L] l'intégralité des loyers versés soit la somme de 1 680 euros,

Condamner la société Locam à payer à Mme [J] [L] la somme de 4 800 euros à titre de dommages et intérêts,

A défaut de retenir la dol de la Société Locam, retenir sa responsabilité,

En conséquence,

Débouter la société Locam de toutes ses demandes à l'encontre de Mme [J] [L],

Condamner la société Locam à payer des dommages et intérêts à Mme [J] [L] dont le montant sera équivalent aux sommes réclamées et, au besoin en ordonner la compensation,

Condamner la société Locam à rembourser à Mme [J] [L] l'intégralité des loyers versés soit la somme de 1 680,00 euros,

Condamner la société Locam à payer à Mme [J] [L] la somme de 4 800 euros à titre de dommages et intérêts,

À titre subsidiaire,

Confirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Lorient le 28 mars 2019 sauf en ce qu'il a débouté Mme [J] [L] de sa demande de délai de paiement,

Autoriser conséquence Mme [J] [L] à s'acquitter des condamnations mises à sa charge sur une durée de deux années,

En toutes hypothèses,

Débouter la société Locam de toutes ses prétentions, fins et conclusions contraires formulées à l'encontre de Mme [J] [L],

Condamner la société Locam à payer à Mme [J] [L] une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société Locam aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions visées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 juin 2022.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Au terme de son appel incident, Mme [L] sollicite l'annulation du contrat de location souscrit auprès de la société Locam pour dol. Elle soutient la recevabilité de ses demandes formées contre la société Locam en l'absence d'appel à la cause de la société Cometik faisant valoir que la société de Location financière cette dernière peut, en raison d'indivisibilité des contrats, se voir opposée les fautes commises par la société Cometik au terme du mandat apparent qui était le sien d'agir pour le compte du loueur.

Elle fait grief à la société Locam d'avoir financé un site internet de très mauvaise qualité totalement basique contenant des erreurs et ce pour un prix prohibitif.

C'est par de justes motifs adoptés par la cour que le premier juge a retenu l'interdépendance existant entre le contrat de fourniture de site internet conclu entre la société Cometik et Mme [L] et le contrat de location financière entre Mme [L] et la société Locam s'agissant de contrats conclus le même jour destinés à la fourniture et au financement d'un site internet au profit de Mme [L] pour les besoins de l'activité professionnelle de cette dernière.

La dénomination sociale du cocontractant de Mme [L] est, pour chacun de ces contrats, clairement déterminée, et le contrat principal de création de site Internet et d'abonnement comportait une clause prévoyant expressément que la société Cometik se réservait la possibilité, de céder les droits résultant du contrat. S'il existe ainsi une interdépendance entre le contrat conclu avec la société Cometik et le contrat conclu avec la société Locam c'est par de justes motifs que le premier juge a rappelé qu'en l'absence de mise en cause de la société Cometik les contestations portant sur le contrat conclu avec cette société ne pouvaient prospérer et engendrer la caducité du contrat de location financière.

S'agissant du dol que Mme [L] entend opposer à la société Locam il sera constaté que Mme [L] ne fournit aucun élément de nature à établir l'existence de pressions qu'elle affirme avoir subies pour conclure les contrats. Si Mme [L] produit différents courriers manifestant sa déception et son mécontentement quant à la qualité du site, il sera constaté qu'elle a réceptionné le site sans réserve suivant procès verbal du 30 juin 2017, et qu'elle a acquitté les échéances du contrat jusqu'au mois de janvier 2018 date de ses premières réclamations. La réception sans réserve et le versement des contreparties prévues tendent à contredire l'existence d'une supercherie telle que dénoncée par la locataire dans ses écritures.

Mme [L] ne saurait par ailleurs s'étonner de ce que la société Locam tire un bénéfice du contrat de location qu'elle lui avait consenti alors que la cession d'un bien par le fournisseur à une société de financement en vue de mobiliser sa créance et de proposer une solution de financement échelonné à son client est une pratique commerciale courante qui bénéficie également au locataire qui obtient un étalement dans le temps de ses obligations.

Il n'est aucunement démontré que la société Locam ait eu, par elle-même ou même par l'intermédiaire d'un mandataire ou d'un tiers complice, l'intention de tromper Mme [L] et celle-ci sera déboutée de ses demandes en annulation pour dol.

S'agissant de l'exécution du contrat de financement, si Mme [L] soutient que la preuve de ses engagements envers la société Locam n'est pas établie, il sera constaté que les obligations de Mme [L] résultent d'un contrat de location à entête de la société Locam précisant tant l'objet du contrat que le nom du fournisseur la société Cometik et le nom de la locataire. Elle n'apparaît pas fondée à soutenir avoir pu méconnaître l'intervention de la société Locam alors même que la faculté de recours à un bailleur et notamment la société Locam était rappelé dans les conditions générales et particulières du contrat conclu avec la société Cometik ; que les conditions financières de location à raison de 48 loyers mensuels de 240 euros TTC sont portées au contrat concu avec la société Locam dûment accepté par Mme [L] qui y a apposé sa signature.

Il est prévu au contrat à l'article 2-2 des conditions générales que l'obligation de délivrance du site web est exécutée par le fournisseur sous le contrôle du locataire ; que lors de la livraison, le locataire signera le procès verbal de conformité qui vaut reconnaissance de la conformité du site au cahier des charges et à ses besoins.

Il est précisé que la signature par le locataire du procès verbal de conformité est le fait déclencheur d'une part de l'exigibilité des loyers et d'autre part pour le loueur de la faculté de règlement de la facture du fournisseur.

La société Locam produit aux débats le procès verbal de réception signé par Mme [L] le 30 juin 2017 sans restriction ni réserve, de sorte que la société Locam était fondée à réclamer le paiement des loyers dus.

Mme [L] ne saurait dénier à la société Locam la faculté de se prévaloir de ce procès verbal de réception en ce qu'il a été établi à la diligence de la société Cometik alors même qu'il n'est pas discuté que c'est la société Cometik qui a livré le site et que cette livraison constituait le point de départ des obligations de la locataire et de la faculté de rachat du contrat par la société Locam qui est intervenue postérieurement suivant facture du 3 juillet 2017.

Outre que Mme [L] n'a pas appelé à la cause la société Cometik pour contester les conditions d'établissement du procès verbal de réception, il sera constaté qu'elle ne fournit aucun élément de nature à établir qu'elle a signé ce document sous une contrainte dont elle ne précise d'ailleurs pas la nature.

Mme [L] n'établit pas l'existence d'une faute à la charge de la société Locam susceptible de faire échec en ses demandes en exécution du contrat ou d'ouvrir droit à des dommages-intérêts au profit de Mme [L].

Il ressort du contrat de financement, de la facture unique comportant l'échéance des loyers et du décompte de créance que Mme [L] reste en principe contractuellement devoir à la société Locam au jour de la déchéance du terme, intervenue huit jours après la vaine mise en demeure du 25 mai 2018 , les sommes de :

960 euros (240 x 4) au titre des 4 loyers impayés du 20 février au 20 mai 2018,

8 880,00 (240 x 37) au titre de l'indemnité de résiliation égale au montant des 37 loyers à échoir entre 20 juin 2018 au 20 juin 2021 outre la majoration de 10 % portée au contrat.

Cependant la majoration de 10 % constitue, comme l'indemnité de résiliation une clause pénale stipulée à la fois comme un moyen de contraindre le locataire à l'exécution de ses obligations et comme l'évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice subi par le loueur.

Ces pénalités sont donc susceptibles de modération par le juge, y compris d'office, en application de l'article 1231-5 du code civil si elles sont manifestement excessives.

Or ces pénalités sont d'un montant de 10 824 euros, alors que le bien financé n'a coûté au loueur que 6 664,20 euros et que celui-ci recevra par ailleurs, au titre des loyers échus impayés, une somme de 960 euros et ce en sus des loyers déjà perçus.

Même en tenant compte de ce que la résiliation anticipée du contrat de location financière cause au loueur un préjudice découlant de l'accroissement de ses frais et risques du fait de l'interruption des paiements prévus, cette double pénalité est manifestement excessive.

Il convient en conséquence de supprimer la majoration de 10 % et de réduire l'indemnité de résiliation à la somme de 7 000 euros qui suffira à réparer le préjudice réellement subi par la société Locam.

Il en résulte que Mme [L] sera condamnée au paiement de la somme de 7 960 euros (960+7000), avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure réceptionnée le 29 mai 2018.

Compte tenu de l'ancienneté de la créance et des délais dont a disposé Mme [L] pour s'acquitter de sa dette, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de délais de paiement.

Il n'y a pas matière à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme partiellement le jugement rendu le 28 mars 2019 par le tribunal d'instance de Lorient,

Statuant à nouveau sur l'entier litige,

Déboute Mme [L] de ses demandes

Dit que les indemnités de clause pénale sont manifestement excessives ;

Condamne Mme [L] à payer à la société Locam la somme de 7 960 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2018 ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [L] aux dépens de première instance et d'appel ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/04809
Date de la décision : 18/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-18;19.04809 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award