8ème Ch Prud'homale
ARRÊT N°469
N° RG 18/07667 -
N° Portalis DBVL-V-B7C-PKVZ
-M. [B] [V]
- M. [A] [Y]
- Mme [C] [W]
- M. [L] [D]
C/
- Me [K] [M] (Liquidation judiciaire de la la SAS C3 CONSULTANTS ATLANTIQUE et Autres)
- Association UNEDIC, DÉLÉGATION AGS -GEA DE RENNES
Infirmation partielle
Copie exécutoire délivrée
le : 18 nov. 2022
à :
Me Amélie AMOYEL-VICQUELIN
Me Bertrand GAUVAIN
Me Marie-Noëlle COLLEU
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,
Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,
Madame Gaëlle DEJOIE, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 07 Juillet 2022
devant Monsieur Rémy LE DONGE L'HÉNORET et Madame Gaëlle DEJOIE, magistrats tenant l'audience en la formation rapporteur, sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 18 Février 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS et intimés à titre incident :
Monsieur [B] [V]
né le 09 Avril 1979 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 4]
[Adresse 4]
Monsieur [A] [Y]
né le 27 Mai 1981 à [Localité 7] (44)
demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]
Madame [C] [W]
née le 15 Juin 1976 à [Localité 8]
demeurant [Adresse 6]
[Adresse 6]
Monsieur [L] [D]
né le 23 Avril 1967 à [Localité 8] (74)
demeurant [Adresse 1]
[Adresse 1]
Ayant tous Me Amélie AMOYEL-VICQUELIN de la SELARL AB LITIS, Avocat au Barreau de RENNES, pour postulant et représentés par Me Sarah DJABRI substituant à l'audience Me Fiodor RILOV, Avocats plaidants du Barreau de PARIS
.../...
INTIMÉES et appelantes à titre incident :
La SCP de Mandataire Judiciaire [K] [M] prise en la personne de Me [K] [M] ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS C3 CONSULTANTS ATLANTIQUE, de la SAS C3 CONSULTANT GROUPE EST, de la SAS C3 CONSULTANTS GROUPE ILE DE FRANCE CENTRE et de la SAS C3 CONSULTANTS GROUPE SUD OUEST
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Ayant Me Bertrand GAUVAIN de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Avocat au Barreau de RENNES, pour postulant et Me Véronique BAILLEUX, Avocat du Barreau de NANTES, pour conseil
L'Association UNEDIC - Délégation AGS, CGEA de RENNES prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège :
[Adresse 9]
[Adresse 9]
Représentée par Me Marie-Noëlle COLLEU de la SELARL AVOLITIS, Avocat au Barreau de RENNES
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La société C 3 Consultants Groupe Est a engagé M. [D] le 21 août 2006 en qualité de conseiller en reclassement professionnel et M. [V] le1er août 2012, en qualité de coordinateur de site dans le cadre de contrats à durée indéterminée.
La société C 3 Consultants Atlantique a embauché M. [Y] le 3 juillet 2006 en qualité d'informaticien et Mme [W] le 13 septembre 2010, en qualité de conseillère en reclassement professionnel.
La société C 3 Consultants Atlantique a été admise au bénéfice d'une procédure de redressement judiciaire le 2 février 2014 et les trois autres entités du groupe C3 Consultants (société C 3 Consultants Groupe Est, société C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et société C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest) le 9 juillet 2014.
Ces procédures ont été converties en liquidation judiciaire le 10 septembre 2014 pour la société C 3 Consultants Atlantique, et le 5 novembre 2014 pour les trois autres entités du groupe qui avaient toutes pour activité le conseil, spécialisé dans le placement à l'emploi, l'élaboration de projets professionnels et la formation professionnelle .
Le document unilatéral intégrant le Plan de Sauvegarde de l'Emploi (PSE) pour chacune des entités a été homologué par la Direccte :
- le 22 octobre 2014 pour la société C 3 Consultants Atlantique,
- le 10 octobre 2014 pour la société C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre,
- le 6 octobre 2014 pour la société C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest,
- le 22 octobre 2014 pour la société C 3 Consultants Groupe Est.
Suite à ces homologations et à l'ordonnance du juge commissaire autorisant la suppression de tous les postes de ces différentes sociétés, le mandataire liquidateur a licencié pour motif économique les salariés entre le 16 octobre 2014 et le 30 janvier 2015.
Par jugements du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions d'homologation de la Direccte pour insuffisance de motivation.
Par arrêts du 3 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a confirmé cette annulation.
Par arrêts du 28 mars 2018, le Conseil d'État a confirmé l'annulation de ces décisions.
Le 16 octobre 2015, dix salariés dont les quatre appelants ont saisi le conseil de prud'hommes de Nantes aux fins de :
A titre principal,
' Dire que le Pôle Emploi et les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, étaient co-employeurs des demandeurs,
A titre subsidiaire,
' Dire que les plans de sauvegarde de l'emploi présentés par le liquidateur sont insuffisants au regard des moyens du groupe TF1,
' Constater la nullité des licenciements des demandeurs,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualités de mandataire liquidateur, à payer à chacun des demandeurs une indemnité,
' Dire la décision opposable au CGEA de Rennes,
' Assortir la condamnation d'intérêts au taux légal,
A titre plus subsidiaire,
' Dire que les plans de sauvegarde de l'emploi présentés par le liquidateur sont insuffisants au regard des moyens des sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest,
' Constater la nullité des licenciements des demandeurs,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualités de mandataire liquidateur, à payer à chacun des demandeurs une indemnité,
' Dire la décision opposable au CGEA de Rennes,
' Assortir la condamnation d'intérêts au taux légal,
A titre encore plus subsidiaire,
' Constater la violation de l'obligation individuelle de reclassement au détriment des demandeurs,
' Juger que les licenciements des demandeurs sont dépourvus de cause réelle et sérieuse,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualités de mandataire liquidateur, à payer à chacun des demandeurs une indemnité,
' Dire la décision opposable au CGEA de Rennes,
' Assortir la condamnation d'intérêts au taux légal,
A titre infiniment subsidiaire,
' Constater l'illégalité des licenciements des demandeurs du fait de l'annulation par les juridictions administratives des décisions d'homologation des plans de sauvegarde de l'emploi,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualité de mandataire liquidateur, à payer à chacun des demandeurs une indemnité,
En tout état de cause,
' Assortir la décision à intervenir de l'exécution provisoire,
' Condamner solidairement les défenderesses aux entiers dépens,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualités de mandataire liquidateur, à payer à chacun des demandeurs une somme de 500 € chacun en application de 1'article 700 du code de procédure civile.
La cour est saisie de l'appel formé par M. [V], M. [Y], Mme [W], et M. [D] le 28 novembre 2018 contre le jugement du 25 octobre 2018 notifié le 29 octobre 2018 par lequel le conseil de prud'hommes de Nantes a :
' Ordonné la jonction des instances n° RG 15/01314 à 15/01321 et 16/00014 à l'instance n° RG15/01313,
' Fixé le montant de la créance des demandeurs au passif de la liquidation judiciaire des sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, aux sommes suivantes :
- 15.953,36 € pour M. [V],
- 19.164,92 € pour M. [Y],
- 15.933,74 € pour Mme [W],
- 15.919,49 € pour M. [D],
- 16.535,99 pour Mme [R],
- 21.706,68 € pour M. [S],
- 17.168,69 € pour Mme [E],
- 16.142,95 € pour Mme [P],
- 24.370,83 € pour Mme [G],
- 10.878,96 € pour Mme [H],
- 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour chacun des demandeurs,
' Débouté les demandeurs du surplus de leurs prétentions,
' Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
' Reçu Me [M], ès qualités de mandataire liquidateur des sociétés C 3 Consultants, en ses demandes reconventionnelles et y a fait partiellement droit ,
' Décerné acte à l'AGS et au CGEA de Rennes des conditions de son intervention sur le fondement de l'article L 621-15 du Code de commerce,
' Déclaré le présent jugement opposable à l'AGS et au CGEA de Rennes, son mandataire dans les limites de la garantie légale,
' Laissé les dépens à la charge de la liquidation judiciaire des sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest.
Par arrêt avant dire droit du 18 février 2022, la cour a réouvert les débats et invité les parties à faire valoir avant le 8 avril 2022 leurs observations sur la portée de l'appel de chacune des parties au regard du dispositif de leurs écritures et du dispositif du jugement entrepris et le cas échéant, d'en tirer toute conséquence de droit et renvoyé l'affaire à l'audience du 20 mai 2022.
Vu les écritures notifiées par voie électronique telles que reprises le 7 avril 2022, au terme desquelles M. [V], M. [Y], Mme [W], et M. [D] demandent à la cour de :
' Infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a alloué aux appelants une indemnité du fait de l'annulation de l'homologation du document unilatéral,
A titre principal,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, en tant que co-employeurs des appelants à leur verser une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à savoir :
- 47.860,08 € pour M. [V],
- 76.659,70 € pour M. [Y],
- 47.801,22 € pour Mme [W],
- 63.677,96 € pour M. [D],
A titre subsidiaire,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualités de mandataire liquidateur du fait de la violation de l'obligation de reclassement individuelle à payer aux appelants les indemnités suivantes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
- 47.860,08 € pour M. [V],
- 76.659,70 € pour M. [Y],
- 47.801,22 € pour Mme [W],
- 63.677,96 € pour M. [D],
' Dire la décision opposable au CGEA de Rennes,
' Assortir la condamnation d'intérêts au taux légal,
A titre plus subsidiaire,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualités de mandataire liquidateur du fait de l'annulation de l'homologation document unilatéral, à payer aux appelants les indemnités suivantes :
- 47.860,08 € pour M. [V],
- 76.659,70 € pour M. [Y],
- 47.801,22 € pour Mme [W],
- 63.677,96 € pour M. [D],
En tout état de cause,
' Condamner solidairement les intimées aux entiers dépens,
' Condamner les sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, représentées par Maître [M], ès qualités de mandataire liquidateur à verser aux appelants la somme de 500 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 8 juillet 2019, au terme desquelles la SCP [M], mandataire liquidateur des sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest, demandait à la cour de :
A titre principal,
' Confirmer le jugement entrepris en qu'il a débouté les salariés de leurs demandes relatives à :
- la reconnaissance de l'existence d'une situation de co-emploi entre les societés C3 Consultants et Pôle Emploi,
- l'insuffisance du PSE,
- la violation de l'obligation de reclassement individuel,
' Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a accordé aux salariés une indemnisation égale à 6 mois de salaires sur le fondement de l'article L. 1233-58 du code du travail,
' Rejeter l'argumentaire des demandeurs aux titres de :
- la situation de co-emploi pour défaut de contradiction,
- la remise en cause de la validite du PSE,
- l'insuffisance des recherches de reclassement,
' Débouter les mêmes de leurs demandes indemnitaires quant à l'indemnisation des conséquences de l'annulation de la décision d'homologation du PSE,
A titre subsidiaire,
' Prononcer la compensation des sommes indemnitaires au titre de l'article L. 1233-58 du code du travail avec l'indemnité conventionnelle de licenciement perçue dans le cadre du solde de tout compte des demandeurs,
En tout état de cause,
' Condamner les demandeurs à payer à la SCP [M], ès qualités de mandataire liquidateur de la société C3 Consultants Atlantique la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' Condamner les mêmes aux entiers dépens.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 21 juin 2022, suivant lesquelles le CGEA de Rennes demande à la cour de :
À titre principal,
' Débouter les appelants de leurs demandes au titre du co-emploi dirigées à l'encontre des sociétés C 3 Consultants,
' Débouter les appelants de leur argumentation au titre du groupe TFI,
' Dire que le PSE doit s'apprécier dans le seul cadre des sociétés C3 Consultants,
' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les salariés de l'ensemble de leurs demandes fondées sur la critique du contenu du PSE et de l'obligation de reclassement,
' Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a octroyé aux salariés l'équivalent de six mois de salaires sur le fondement de l'article L.1233-58 du code du travail,
Statuant à nouveau,
' Débouter les appelants de leur demande, faute de préjudice,
À titre infiniment subsidiaire,
' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a limité l'indemnité à six mois de salaires,
' Condamner les appelants à rembourser à l'AGS les indemnités de licenciements versées dans le cadre de la rupture de leur contrat de travail,
' Le cas échéant, prononcer la compensation entre ce remboursement et les éventuelles sommes qui seraient fixées au passif par ailleurs,
Sur la garantie,
' Dire que s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale,
' Dire que la garantie prévue aux dispositions de l'article L.3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article L.3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages-intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie,
' Dire que la garantie de l'AGS ne pourra excéder, toutes
créances avancées pour le compte du salarié confondues, l'un des trois plafonds des cotisations maximum du régime d'assurance chômage mentionnés à ces articles,
' Statuer ce que de droit quant aux frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'AGS.
' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- Dit se déclarer incompétent pour remettre en cause le motif économique du licenciement prononcé en application d'un jugement du tribunal de commerce,
- Constaté son incompétence pour apprécier le caractère suffisant des PSE, leur suffisance n'ayant pas été remise en cause par le juge administratif, seul compétent,
L'affaire fixée à l'audience 20 mai 2022 a été renvoyée à l'audience du 7 juillet 2022
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient de rappeler à titre liminaire que par application de l'article 954, alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statuera que sur les prétentions énoncées au dispositif des écritures des parties en cause d'appel, ce que ne sont pas au sens de ces dispositions des demandes visant seulement à 'dire' ou 'constater' un principe de droit ou une situation de fait.
*
Sur le périmètre de la saisine de la cour :
Sans répondre à l'interrogation de la cour concernant la portée de l'appel de chacune des parties au regard du dispositif de leurs écritures et du dispositif du jugement entrepris et le cas échéant, d'en tirer toute conséquence de droit et sans avoir appelé à la cause Pôle Emploi ou formulé à son encontre de demande au terme du dispositif de leurs écritures, les quatre salariés appelants entendent démontrer que les sociétés C3 CONSULTANTS avaient perdu toute autonomie à raison de l'état de domination que lui imposait Pôle Emploi dans l'organisation du travail, la détermination des méthodes et des objectifs, outre l'exigence faite aux cadres des sociétés de lui rendre compte directement de l'activité et l'asservissement au logiciel LISA.
Ils ajoutent que l'établissement du co-emploi n'implique pas l'appel à la cause de Pôle emploi, ou de demande à son encontre.
L'AGS rétorque qu'il résulte du jugement entrepris que les premiers juges n'ont pas statué sur l'irrecevabilité des demandes formulées par les salariés, que ces derniers n'ont pas demandé la condamnation solidaire des quatre sociétés et de Pôle emploi au titre du co-emploi, ni sollicité la fixation de créances à l'égard des quatre sociétés en liquidation judiciaire, qu'il appartient donc à la cour de statuer sur l'exception d'incompétence et d'infirmer le jugement en ce qu'il a octroyé aux salariés l'équivalent de six mois de salaire.
Les organes de la procédure n'ont développé aucune observation postérieurement à la réouverture des débats.
L'article 16 du Code de procédure civile dispose que "Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations."
En application de l'article L. 1221-1 du code du travail précité, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière.
En l'espèce, il est établi que les premiers juges étaient saisis d'une demande des quatre salariés tendant à faire établir l'existence d'un co-emploi entre Pôle Emploi et les sociétés du groupe C3 CONSULTANTS, que l'AGS intervenant forcé en raison du placement des sociétés du groupe C3 en liquidation judiciaire, lui a opposé à la fois une exception tirée de l'incompétence de la juridiction de l'ordre judiciaire pour connaître des litiges concernant Pôle emploi et l'irrecevabilité de la demande tendant à faire établir le co-emploi précité du fait que cet organisme n'avait pas été appelé à la cause.
Or, l'établissement de la réalité d'une situation de domination et de contrôle des sociétés du groupe C3 CONSULTANTS par Pôle emploi ne peut se faire, contrairement à ce que soutiennent les appelants, sans respecter le principe du contradictoire, lequel suppose à tout le moins que Pôle emploi soit mis en mesure de discuter le principe du co-emploi qui lui est opposé et faire valoir utilement ses arguments, y compris en ce qui concerne la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire pour en connaître.
Il résulte de ce qui précède et du dispositif des conclusions des quatre salariés que la cour n'est plus saisie d'une demande des appelants tendant à voir retenir que Pôle Emploi et les sociétés C 3 CONSULTANTS ATLANTIQUE, C 3 CONSULTANTS GROUPE EST, C 3 CONSULTANTS GROUPE ILE DE FRANCE CENTRE ET C 3 CONSULTANTS GROUPE SUD-OUEST, étaient co-employeurs des demandeurs, nonobstant le développement de leurs écritures, de sorte que la demande tendant à voir établir l'existence d'une situation de co-emploi entre les quatre sociétés du groupe, fondée sur le seul état de domination de Pôle emploi à leur égard, est irrecevable.
Par ailleurs, en l'absence de tout autre argument que celui tenant à la domination de Pôle emploi sur ces sociétés, de nature à établir l'existence d'un co-emploi des sociétés C3 CONSULTANTS ATLANTIQUE, C3 CONSULTANTS GOURPE EST, C3 CONSULTANTS GROUPE ILE DE FRANCE CENTRE et C3 CONSULTANT GROUPE SUD OUEST entre elles, les salariés appelants ne doivent être déboutés de leur demande à ce titre et ne peuvent solliciter comme le souligne l'AGS, indifféremment la condamnation desdites sociétés, au surplus placées en liquidation judiciaire et sans demande de condamnation solidaire, la cour ne pouvant que prononcer une fixation de créance de chacun des salariés à l'égard de leur propre employeur.
Sur le bien fondé des licenciements :
Sans remettre en cause l'absence de cause réelle et sérieuse des licenciements intervenus "du fait de l'annulation de l'homologation du document unilatéral" et l'allocation d'une indemnité à ce titre, les appelants demandent à la cour de retenir que le mandataire liquidateur es-qualités a manqué à son obligation de reclassement à leur égard en n'étendant pas ses recherches de reclassement à l'ensemble des entités du groupe TFI, ce dont ne le dispensait pas l'établissement d'un PSE.
Le mandataire liquidateur objecte que les contestations liées au PSE et à la procédure afférente ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à l'homologation ou à la validation qui relève de la juridiction administrative qui a annulé le PSE à raison du défaut de motivation de la décision d'homologation sans pour autant remettre en cause le contenu et la suffisance du plan qui échappe à la compétence de la cour.
Sur le fond, le mandataire liquidateur soutient que les salariés ne produisent aucun élément matériel objectif, que le plan social fait état de l'échec des possibilités de reclassement.
L'AGS fait valoir que l'appréciation de la validité d'un PSE relève de la juridiction administrative qui l'a annulé pour insuffisance de motivation de la décision d'homologation pour une autre cause, sans remettre en cause les moyens mis en oeuvre par le groupe dans ce cadre, notamment au regard de l'obligation de reclassement.
Dès lors qu'il est établi que le PSE a été annulé pour défaut de motivation de la décision d'homologation, la nullité affectant le PSE prive ce dernier d'effet, sous réserve de l'application des dispositions de l'alinéa 8 de l'article L.1233-58 du Code du travail non évoquée en l'espèce et ne permet donc pas à la juridiction prud'homal de substituer un motif tenant à l'insuffisance du plan, sous couvert de manquement à l'obligation de reclassement.
Il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les salariés de leur demande tendant à voir déclarer leur licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
===
Sur les conséquences de l'annulation des décisions d'homologation des PSE :
Pour infirmation sur le quantum des montants alloués par les premiers juges, les salariés font essentiellement valoir que leur préjudice doit être majoré au regard de leur ancienneté.
Le mandataire liquidateur expose qu'une indemnité est due dans cette hypothèse mais n'est pas prévue dans certains cas d'annulation.
L'AGS CGEA de Rennes fait valoir que le PSE a été annulé pour autre motif, que l'indemnité de l'article L.1233-58 II du Code du travail ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire mais que cette sanction n'est pas applicable aux sociétés en procédure collective.
En droit l'alinéa 7 de l'article L1233-58 II du Code du travail dispose qu'en "cas de licenciements intervenus en l'absence de toute décision relative à la validation ou à l'homologation ou en cas d'annulation d'une décision ayant procédé à la validation ou à l'homologation, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. L'article L. 1235-16 ne s'applique pas. "
L'article L1235-16 du Code du travail dispose que : "L'annulation de la décision de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-2 ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-3 pour un motif autre que celui mentionné au dernier alinéa du présent article et au deuxième alinéa de l'article L. 1235-10 donne lieu, sous réserve de l'accord des parties, à la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
A défaut, le salarié a droit à une indemnité à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9. (...)"
Il ne peut être déduit de l'alinéa 7 de l'article L1233-58 II du Code du travail et de son renvoi à l'article L1235-16 du Code du travail qui ne s'applique pas aux entreprises faisant l'objet d'une procédure collective, qu'aucune indemnité ne serait due aux salariés ayant fait l'objet d'un licenciement dans le cadre d'un PSE d'une entreprise faisant l'objet d'une liquidation judiciaire, ayant été annulée pour une autre cause, dès lors que l'exclusion de l'application de l'article L.1235-16 du Code du travail vise la faculté de réintégration du salarié.
En l'espèce, M. [D] a été engagé en qualité de conseiller en reclassement professionnel par la société C 3 Consultants Groupe Est le 21 août 2006 et disposait d'une ancienneté de 8 ans et 2 mois à la date de la rupture de son contrat de travail. Le préjudice qui en est résulté dans les circonstances rapportées doit être évalué à la somme de 23.900 € net qu'il y a lieu d'inscrire au passif de la société C 3 Consultants Groupe Est
M. [V] a été engagé le1er août 2012, en qualité de coordinateur de site dans le cadre de contrats à durée indéterminée société C 3 Consultants Groupe Est et disposait d'une ancienneté de 4 ans, le préjudice qui en est résulté dans les circonstances rapportées doit être évalué à la somme de 18.700 € net qu'il y a lieu d'inscrire au passif de la société C 3 Consultants Groupe Est
M. [Y] a été embauché le 3 juillet 2006 par la société C 3 Consultants Atlantique en qualité d'informaticien et disposait d'une ancienneté de 8 ans et 3 mois, le préjudice qui en est résulté dans les circonstances rapportées doit être évalué à la somme de 28.750 € net qu'il y a lieu d'inscrire au passif de la société C 3 Consultants Atlantique
Mme [W] a été engagée le 13 septembre 2010 par la société C 3 Consultants Atlantique en qualité de conseillère en reclassement professionnel et disposait d'une ancienneté de 4 ans 4 mois, le préjudice qui en est résulté dans les circonstances rapportées doit être évalué à la somme de 19.470 € net qu'il y a lieu d'inscrire au passif de la société C 3 Consultants Atlantique.
Sur la demande de compensation de la SCP [M] es-qualités :
Le PSE étant nul et privé d'effet, le mandataire n'est pas fondé à solliciter la compensation des sommes allouées aux salariés et les sommes perçues à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, l'interprétation faite de l'article L.1233-58 II du Code du travail par le mandataire liquidateur étant erronée.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile :
Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; Maître [M] es-qualités qui succombe en appel, doit être débouté de la demande formulée à ce titre et condamné à indemniser les salariés des frais irrépétibles qu'ils ont pu exposer pour assurer leur défense en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
INFIRME partiellement le jugement entrepris,
et statuant à nouveau,
DÉCLARE irrecevable la demande tendant à voir établir l'existence d'une situation de co-emploi entre les quatre sociétés C3 CONSULTANTS, fondée sur le seul état de domination de Pôle emploi à leur égard,
FIXE la créance de M. [D] au passif de la société C 3 Consultants Groupe Est à la somme de 23.900 € net,
FIXE la créance de M. [V] au passif de la société C 3 Consultants Groupe Est à la somme de 18.700 € net,
FIXE la créance de M. [Y] au passif de la société C 3 Consultants Atlantique à la somme de 28.750 € net,
FIXE la créance de Mme [W] au passif de la société C 3 Consultants Atlantique à la somme de 19.470 € net,
DÉBOUTE la SCP [M] prise en la personne de Me [K] [M] es-qualités de mandataire liquidateur des sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest de sa demande de compensation,
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus, y compris en ce qui concerne l'intervention de l'AGS CGEA de Rennes sur le fondement de l'article L.621-15 du Code de commerce dans les limites de la garantie légale,
et y ajoutant,
CONDAMNE la SCP [M] prise en la personne de Me [K] [M] es-qualités de mandataire liquidateur des sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest à verser à M. [V], M. [Y], Mme [W], et M. [D] la somme de 100 € chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE la SCP [M] prise en la personne de Me [K] [M] es-qualités de mandataire liquidateur des sociétés C 3 Consultants Atlantique, C 3 Consultants Groupe Est, C 3 Consultants Groupe Ile de FRANCE Centre et C 3 Consultants Groupe Sud-Ouest aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.